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La Démocratie prise en otage

S’il fallait trouver le mot le plus souvent mentionné dans notre « OCCIDENT CHRÉTIEN » ce serait sans nul doute le mot « DÉMOCRATIE ». En son nom, tous les pays qui en font partie se présentent au reste du monde comme modèles de liberté et de gouvernance. De la même manière, ils justifient les guerres, que ce soit celles en Irak, en Afghanistan ou encore, comme c’est présentement le cas, en Libye où, plus subtilement, ils y ajoutent la préoccupation d’aide humanitaire. En somme, un véritable humanisme soucieux de la volonté des peuples et du respect de leur liberté d’assumer leur propre destin.

De quoi rallier la grande majorité des citoyens, non seulement de l’Occident chrétien, mais encore ceux du monde entier. Personne ne peut être contre la liberté, la justice, le respect des droits fondamentaux des peuples dont celui de décider de leur destin.

Mais qu’en est-il exactement dans la réalité ? Que se passe-t-il .dans l’antichambre de nos élus, une fois les élections terminées ? Qui sont ceux qui prennent le relai du peuple pour faire entendre leurs volontés ?

Ce n’est un secret pour personne que les représentants des grandes puissances viennent y prendre les premières places. Il y a de ces intérêts qui doivent s’imposer à tous les autres et sur lesquels les peuples ont peu d’influence. Nous n’avons qu’à penser à ces guerres où le Canada est devenu un combattant et une source importante de financement. Jamais le peuple canadien n’a été consulté pour savoir si c’était là sa volonté. A ce que nous sachions aucune force étrangère ne nous menace et encore moins nous attaque. Pourtant nos soldats y sont, plusieurs y meurent.

L’antichambre ne comprend pas seulement les représentants des grandes puissances, mais aussi ceux des grandes entreprises nationales et internationales, intéressées aux milliards de dollars que les gouvernements ont à dépenser et aux centaines de millions de dollars qu’ils pourront économiser au titre de l’impôt. Ils sont intéressés à sortir gagnants sur les deux plans. Les ressources ne leur manquent pas pour faciliter la tâche à ceux ou celles qui sont en postes d’autorité. Cette mission sera d’autant plus facile qu’ils auront déjà manifesté leur bonne volonté en finançant par diverses voies les caisses électorales.

Ces deux principaux intermédiaires entre le peuple que l’on dit souverain et ses élus ne peuvent qu’affecter sa souveraineté et l’exercice de la démocratie dont il est investi. Cette situation devient source de bien des mensonges et d’une constante manipulation de l’opinion publique. Il ne faut pas que le peuple sache tous les dessous de ces tractations. Ainsi, elle favorise la politique du secret et l’utilisation toujours plus fréquente d’expressions comme « la sécurité nationale », « les intérêts supérieurs de la nation », « la défense et la promotion de la démocratie dans le monde », « la lutte contre le terrorisme » etc. Les médias, ceux sous contrôle d’entreprises privées et ceux répondant à l’État, serviront de courroie de transmission de ces discours dont l’objectif est de garder le bon peuple dans l’illusion qu’il contrôle son destin grâce à ses représentants attentifs à ses besoins et à ses valeurs.

Quelques exemples qui mettent en évidence la faible consistance de la démocratie dont s’enveloppe le Canada et ceux qui le représentent.

Depuis quelques jours, M. Harper, en pleine campagne électorale, se fait le chef de file de ceux et celles qui ne veulent pas que le peuple Québécois se prononce sur son destin comme peuple et comme nation. Pourtant, quoi de plus démocratique que la tenue d’un référendum permettant au peuple de s’exprimer librement ? N’est-il pas, M. Harper, celui qui s’est fait un ardent promoteur de l’indépendance de la Serbie en y envoyant des coopérants et des militaires pour y préparer la voie à son indépendance, laquelle s’est effectivement réalisée de façon unilatérale en 2008 ? Ce petit pays, d’à peine 2.5 millions d’habitants, bénéficie de toutes les attentions diplomatiques du Gouvernement canadien. Alors pourquoi ne pas vouloir pour le Québec, nation de plus de 7 millions d’habitants, ce qu’il a défendu pour la Serbie ?

Ce n’est un secret pour personne que le retour du Président Aristide ne faisait pas l’affaire du Canada, allié indéfectible de Washington. D’ailleurs, un document secret obtenu grâce à la loi d’accès à l’information, fait état d’une crainte d’un retour possible d’Aristide exigé par ses supporteurs, suite au tremblement de terre de 2010. On aura également remarqué que le parti politique, Fanmi Lavalas, auquel il s’identifie et qui est le plus populaire auprès de la population a été exclu des dernières élections présidentielles. Nous savons le rôle actif qu’a joué le Canada pour discréditer le candidat gouvernemental et faciliter l’accès du candidat de Washington au second tour des présidentielles. Est-ce là l’attitude et la pensée de véritables défenseurs de la démocratie ?

Au Moyen Orient, tant à Bahreïn qu’au Yémen, les peuples réclament la démission des dictateurs en place. Toutefois, dans ces deux cas, les interventions internationales ne viennent pas appuyer les peuples mais les dictateurs qui les répriment. L’Arabie Saoudite, avec plus de mille soldats, est entré à Bahreïn pour y réprimer le peuple et conforter le gouvernement. Dans ces deux cas le Canada se fait bien discret, lui qui n’a pas hésité à sortir ses F-18 pour voler au secours des mercenaires libyens dont le mandat est de renverser par la force des armes le gouvernement de Kadhafi et d’en finir avec ce dernier. Un exemple, s’il en fallait un, du deux poids, deux mesures.

Un dernier exemple, question de ne pas trop faire long, se réfère à la politique canadienne à l’endroit du Venezuela. S’il y a un pays qui a fait la démonstration, depuis plus de 10 ans, d’une très grande démocratie tant au sens électoral qu’au sens du pouvoir du peuple pour le peuple, c’est bien le Venezuela sous la gouverne d’Hugo Chavez. Or le Canada, totalement aligné sur la politique agressive des États-Unis, se permet des déclarations mettant en doute cette démocratie et va jusqu’à s’impliquer dans la planification d’actes visant la déstabilisation du gouvernement et, si nécessaire, l’élimination physique de son Président.

Que conclure de tout ceci ? Il ne fait pas de doute que le peuple canadien est mis à l’écart des grandes décisions qui déterminent ses engagements internationaux. D’ailleurs, ce thème est pratiquement mis à l’écart des débats politiques. Il en va de même pour les budgets militaires et les services de renseignement. De plus, sur les grandes orientations concernant la fiscalité, le développement économique et industriel, il a peu à dire.

Quant à l’exercice très démocratique d’un référendum sur l’indépendance du Québec, le Gouvernement canadien, M. Harper, en tête s’y refuse. De quoi se questionner sur l’esprit démocratique qui l’anime. Est-ce ce type de démocratie que vont défendre nos soldats en Afghanistan et ailleurs dans le monde ? Plusieurs y ont déjà laissé leur vie et plusieurs autres sont morts sous les balles de leurs fusils et les bombes larguées de leurs avions. De quoi secouer la conscience des canadiens et canadiennes.

Oscar Fortin
Québec, le 20 avril 2011
http://humanisme.blogspot.com

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