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La Guyane et le Chili touchés par la ruée vers l’or.


4 mai 2006


On connaît les désastres que causent les orpailleurs à la forêt amazonienne au Brésil et au Venezuela : des milliers d’hectares d’arbres morts, un véritable spectacle de désolation. C’est que pour extraire l’or du minerai, on utilise le mercure, qui l’amalgame, ou les cyanures. Alors forcément, ce n’est pas très bon pour la végétation et la santé. Deux projets d’exploitation minière devraient voir le jour au Chili et en Guyane, avec des parallèles singuliers.


Au Chili

Le Chili a été atteint par cette fièvre avec le projet Pascua Lama. Il s’agissait initialement de dynamiter trois glaciers nommés Toro I, Toro II et Esperanza pour ouvrir une mine à ciel ouvert. L’entreprise responsable est la Barrick Gold Corporation, multinationale d’origine canadienne. Devant les protestations des écologistes et des agriculteurs de la région, l’État a finalement obtenu que l’exploitation soit souterraine et n’endommage pas les glaciers. C’est que ces glaciers alimentent en eau la vallée du fleuve Huasco, qui trouve son embouchure près de Vallenar, à 650 km au nord de Santiago. C’est une région où il pleut très rarement et où, quand il a suffisamment plu en juillet-août, s’épanouit le Désert Fleuri, une petite merveille de la nature. La vallée du Huasco est une région agricole prospère, ce qui justifie la grogne des exploitants. Ils craignent, et sans doute à juste titre, que les eaux du Huasco se retrouvent polluées par les cyanures et les métaux lourds, mercure bien sûr, mais aussi plomb, arsenic, antimoine qui se trouvent dans les déchets miniers. De l’autre côté des Andes, les argentins en ont déjà fait l’expérience. L’exploitation est supposée rapporter 10 milliards de dollars à la Barrick Gold.


En Guyane

En Guyane, c’est une autre multinationale d’origine canadienne, Cambior, qui fait des siennes. Le projet se situe à Camp Caïman, sur la montagne de Kaw, dans un parc régional. Ici, les rejets miniers pourraient polluer les étangs de Kaw et faire disparaître des dizaines d’espèces animales comme les caïmans noirs, des poissons comme les atipas, nourriture prisée de la population ou des oiseaux migrateurs. La teneur en mercure des effluents prévue par Cambior est au moins dix fois supérieure aux normes françaises et très largement au-delà du seuil de toxicité supportable par la faune aquatique. La température de l’eau rejetée serait de 8 ºC supérieure à celle autorisée. En outre, Cayenne trouve sa principale source d’alimentation en eau potable sur le fleuve Comté à 15 km de la mine. Cambior projette l’extraction de 28 tonnes d’or en 7 ans.


Sur fond de malversations

Au Chili, Rodolfo Villar a vendu à la Barrick Gold en 1997, 8600 hectares de terrains-clés pour l’exploitation de la mine. Il a signé aveuglément un acte de vente en croyant empocher un million de dollars. Il n’a reçu, à ce jour, que 10 000 pesos chiliens soit environ 20 dollars. Il est en procès depuis 2001. La Barrick Gold a dû aussi mettre la main à la poche pour faire approuver son projet : 60 millions de dollars pour la construction d’un barrage et l’alimentation en eau assurée pour la vallée du Huasco, pots-de-vin aux organisations professionnelles, 180 millions de dollars pour améliorer la protection de l’environnement. Un tout petit effort pour 10 milliards de dollars. En Guyane, même méthode, même résultat. Le chef coutumier du village Favard a signé un document permettant à Cambior de faire passer son accès à la mine par la zone de droit d’usage du village en échange de la promesse d’emplois et d’équipements. Le chef est analphabète. Cambior a aussi promis l’installation d’une usine d’épuration des effluents pour que l’eau reste potable. En somme, quelques menues dépenses qui permettent de remporter un pactole qui pourrait se révéler encore plus important que celui escompté.


Doubler la mise !

Les bénéfices ont été prévus sur la base d’un prix moyen de 425 dollars l’once. Or, comme pour tous les métaux, le cours monte. Avec la baisse du dollar, l’or retrouve sa qualité de valeur-refuge chez les investisseurs et ses niveaux d’il y a 25 ans. Il atteint aujourd’hui un cours de 675 dollars au Stock Metal Exchange à Londres et le Conseil Mondial de L’Or le prévoit à 850 dollars dans 18 mois. Ca pourrait doubler la mise !

Lire aussi http://www.legrandsoir.info/article...




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COMMENTAIRES  

05/05/2006 17:44 par oho

Je suis stupéfais ...
En tant que Guyanais délocalisé je suis désolé de ce qu’il se passe au pays !
Comment pouvons nous agir ? Des idées ?

Je me rappel cette vu magnifique depuis le carbet de l’ONF sur la montagne de Kaw ou du hamac nous pensions que cette terre était le dernier refuge de la nature.

Non non non, a pou nous fait ine bête !

O.

05/05/2006 21:00 par J. M. Hureau

J’en sais beaucoup plus sur Pascua Lama, qui a fait l’objet de nombreux articles dans la presse chilienne et qui est une région que je connais bien, que sur Camp Caïman.

J’ai été alerté par un diaporama, que je n’ai malheusement pas conservé, et j’ai tout d’abord cru à un hoax.

Il y a eu ensuite un article dans le quotidien France-Guyane du 15 avril et un article dans Le Monde du 19 avril qui confirment la véracité du projet.

A ma connaissance, les opposants à ce projet sont Corinne Lepage, le collectif Quel orpaillage pour la Guyane ?, Frédéric Lecorre, directeur de Floramazone et Pierre- Charles Dominique, spécialiste de la forêt tropicale au CNRS. Peut-être faudrait-il voir aussi du côté des Palikurs, qui ont été floués dans l’histoire.

Les protestations ont été efficaces au Chili sans toutefois aboutir à un abandon total du projet.

J’aurais envie de vous dire : "Guyanais, debout !"

Bon courage.

Bien cordialement

JMH

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