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Le mythe de la transformation individuelle

Peut-on se changer soi sans changer le monde ?

« Vouloir corriger les défauts du caractère d’un homme par des sermons de morale n’est pas moins chimérique que de forcer un chêne à donner des abricots ». Arthur Schopenhauer

De Zénon à Epicure, du christianisme au bouddhisme, il n’est pas d’école éthique qui ne développe un art de vie prescriptif pour faire face à l’adversité du monde. Peut-on croire après Marx et Freud qu’il est possible de sculpter sa personnalité à sa guise par un effort d’autogouvernement indépendant du monde extérieur ?

Karx Marx s’est attelé à dévoiler la relation combinatoire entre le collectif et l’individuel, l’économique et l’idéologique, les structures sociales et les structures psychiques. Le marxisme tisse des liens de causalité multilatéraux entre des faits apparemment épars qui rendent la société et les comportements humains intelligibles. Cette description ne ressortit pas seulement à la philosophie pure mais avant tout, là réside son insigne originalité, à l’action.

Seule la critique pratique du système peut potentialiser la transformation des rapports sociaux et par suite de l’homme.

La révolution ne surgit pas ex nihilo mais elle s’inscrit dans un mouvement réel qui prend appui sur les contradictions internes au système capitaliste. Ce socialisme est dit scientifique parce qu’il repose sur le développement historique et matériel de la société là où le capitalisme recourt à des principes absolutistes ou immanents pour forger sa légitimation.

La ligne de démarcation réformisme- révolution n’a rien perdu de sa validité. Michel Onfray propose d’instaurer un socialisme abâtardi qu’il nomme capitalisme libertaire par le biais des coopératives et l’extension graduelle du contrôle économique. Il n’existe rien selon lui en-deçà et au-delà du capitalisme ; seule la répartition doit être corrigée. Cette thèse d’arrière-garde a des concordances évidentes avec le socialisme mutualiste de Proudhon qui prétend faire de chacun des capitalistes. Ce socialisme de médiation fait fi du principe d’antagonisme irréductible des intérêts de classe.

Les syndicats, au vu de la conjoncture économique et la faiblesse de la conscience sociale, adoptent une posture attentiste similaire et concentrent leur action sur le maintien des salaires et la non dégradation des conditions de travail. Il s’agit de préserver pour le travailleur un minimum de droit sur le produit de son propre travail que la capitaliste tente de lui extorquer davantage en maniant un argumentaire de justifications que le contexte de crise lui fourni à foison. La mutation du mode de production n’est même plus envisagée.

Il est entendu que la lutte contre l’ordre en place ne peut se faire qu’à l’intérieur de cet ordre mais en concevant son caractère transitoire et son dépassement.

Les mobilisations sociales plus ou moins spontanées du type des Indignés récusent toute ligne idéologique. Cette indétermination politique constitue leur force mobilisatrice mais aussi leur plus grande faiblesse. L’élan premier ne peut que s’essouffler s’il ne prend pas la forme d’une organisation politique avec une orientation affirmée. Seule cette forme politique - au sens générique du terme - peut créer l’unité dialectique des aspirations particulières et fixer une stratégie d’action conforme aux objectifs.

Les divers échecs de mouvements d’émancipation et la propagande libérale actuelle ont fortifié l’idée de l’inanité de l’engagement politique au profit d’un exil en dedans ou en dehors. Pour se préserver d’un monde tragique, on se replie dans la sphère intérieure, l’hédonisme ou la transcendance. On observe effectivement une floraison spectaculaire de la religiosité et les théories de développement personnel. Il ne s’agit plus de combattre pour changer les choses mais d’être en phase avec le cosmos.

Cet apolitisme revendiqué qui néglige la dimension sociale au profit de la plénitude personnelle est moralement critiquable et pratiquement inconcevable. Le cadre général socio-historique est négligé au profit de la volonté individuelle, autrement dit la question sociale est réduite à l’éthique personnelle. Il en ressort que l’individu doit se changer et non tendre à changer le système puisque celui-ci est réputé intangible. De la sorte, la responsabilité de la situation de chacun comme de la situation d’un pays ou d’un continent repose sur les épaules des individus.

Ce détachement du réel équivaut à une soumission de facto à l’existant. Alain Badiou, dans son essai l’Hypothèse communiste, souligne le caractère conservateur de ce nihilisme : « l’ennemi le plus redoutable de la politique d’émancipation n’est pas la répression par l’ordre établi. C’est l’intériorité du nihilisme, et la cruauté sans limites qui peut en accompagner le vide ». Ce pessimisme morbide ne peut que conforter l’ordre en place. Ce dogme s’est imposé à force de répétition et de logique circulaire : si le communisme a échoué, c’est qu’il ne peut pas exister et si le capitalisme règne partout, c’est qu’il est une donnée naturelle transhistorique.

Résistons à cette double régression de l’évasion intra-individuelle ou extra-mondaine pour revendiquer positivement les idéaux de révolution, d’émancipation, de liberté et de justice. L’action politique collective, dont l’efficacité réelle est conditionnée par la prise de conscience individuelle, est la seule force de résistance objective.

Emrah Kaynak

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