Ne l’appelez plus l’État d’Israël, ni même l’État juif, car c’est un amalgame intolérable. D’une part, « être juif, c’est toujours être aux côtés des opprimés, et jamais du côté des oppresseurs » (Marek Edelman, commandant en second de l’insurrection du ghetto de Varsovie) et, d’autre part, cet État ne prétend agir au nom de tous les Juifs que pour mieux s’accaparer leur mémoire et user du génocide des Juifs comme d’un redoutable palladium. Cet État est paradoxalement contre les Juifs, c’est bien pourquoi il a toujours eu le soutien inconditionnel des antisémites (Balfour et sa déclaration, et les sionistes chrétiens de nos jours). Il suffit, pour s’en convaincre, de se rappeler comment, dans cet État, furent traités, qualifiés les rares survivants des camps de concentration et d’extermination : de moutons qui sont allés sans résistance à l’abattoir et, parfois, surnommés même les « savons ».
Ne l’appelez plus l’État d’Israël, et encore moins l’État hébreu, car c’est, là, un contresens historique (ou, au choix, un terme de pure propagande). Cet État n’est pas dirigé, ni défendu par des descendants des Hébreux, peuple sémite de l’Orient ancien. En effet le Grand Exode de 70 après J.-C. fait partie du roman national, et rien ne vient l’étayer : ce mythe entretenu ne sert qu’à justifier l’injustifiable, à savoir l’expulsion des Palestiniens de leurs terres et la création d’un foyer national juif. De même, la spécieuse expression « une terre sans peuple pour un peuple sans terre » n’est qu’un mensonge primordial, le premier d’une trop longue liste.
Ne l’appelez plus l’État d’Israël, ni même l’État sioniste, car cela serait un gentil euphémisme. Bien sûr, le sionisme est, par essence, une idéologie condamnable : son unique dessein est la création d’un Eretz Israël pur ethniquement. C’est donc un colonialisme de remplacement : il ne s’agit pas là de faire suer le burnous, mais de le faire déguerpir mort ou vif. Et comme toujours pour justifier l’injustifiable, cet État dénigre la population indigène, les qualificatifs les plus odieux sortent des bouches officielles jusqu’à taxer les Palestiniens d’animaux humains, comme si Gaza et la Cisjordanie étaient leur chasse gardée. Tout cela sent fort les remugles du colonialisme occidental, que l’on croyait révolu. Et non ! Le sionisme reste bel et bien une idéologie arriérée et occidentale du XIXe, et qui entraîne ses adeptes dans une folie collective.
Ne l’appelez plus l’État d’Israël, appelez-le sans barguigner l’État judéo-nazi, car « mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde » (Albert Camus).
Le terme de judéo-nazi a été forgé par le philosophe israélien (et accessoirement sioniste) Yeshayahou Leibowitz qui s’exprima ainsi : « dans les territoires occupés, nous employons la torture. La torture ! Nous l’employons en vertu de l’autorisation qui nous a été donnée par la créature qui, il y a encore trois ans était président de la Cour Suprême de l’État d’Israël [Moshe Landau de 1980 à 82 ; il présida aussi le procès Eichmann en 1961]. [..] Voilà ce que j’entends par judéo-nazis. Les judéo-nazis existent. Je constate un fait. Si j’élève la voix, c’est que les gens l’ignorent encore. »
Déjà, en 1948, Albert Einstein et Hannah Arendt écrivaient dans le New York Times : « parmi les phénomènes politiques les plus inquiétants de notre époque, il y a dans l’État nouvellement créé d’Israël l’apparition du « Parti de la Liberté » (Tnuat Haberut) [Menahem Begin fut chef de ce parti], un parti politique étroitement apparenté dans son organisation, ses méthodes, sa philosophie politique et son appel social aux partis Nazi et fascistes. Il a été formé par les membres et partisans de l’ancien Irgun Zvai leumi, une organisation terroriste d’extrême-droite et nationaliste en Palestine. »
Le sionisme portait donc en germe le crime suprême comme la nuée l’orage : de volonté de créer un juif nouveau, en volonté de pureté ethnique, en passant par le suprémacisme juif et la déshumanisation des Palestiniens, tout cela ne pouvait que mal finir. À force de violations répétées du Droit international, à force de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité toujours impunis, à force de complicités occidentales intangibles et de soutiens inconditionnels indéfectibles, tout cela ne pouvait qu’amener au génocide des Palestiniens.
Mais comment se peut-il ? Mais comment ce peuple qui a subi le pire, à savoir les pogroms et l’extermination nazie, pourrait-il à son tour commettre des crimes, voire un génocide ?
Il n’y a là aucune contradiction : les victimes du passé ne sont en rien comptables des crimes actuels. Seules subsistent leurs mémoires. Utilisées jusqu’à l’obscène, leurs mémoires sont souillées par tous ces crimes qui ont débuté bien avant le génocide en cours et même avant la Nakba.
William Blum disait : « la pire chose qui soit jamais arrivée au peuple juif, après l’Holocauste, c’est la création de l’État d’Israël. »
Bien sûr, il reviendra à l’Histoire de désigner les nouveaux Justes. Mais, d’ores et déjà, il est juste d’écrire que la pire chose qui soit jamais arrivée aux Palestiniens, c’est l’existence de l’État judéo-nazi.
Personne
