RSS SyndicationTwitterFacebook
Rechercher

ONU / Le discours de l’Arabie saoudite sur les droits de l’homme en Syrie est une blague…

Ce 16 Novembre, le projet de résolution A/C.3/73/L.50 [1] portant sur la situation des droits de l’homme en Syrie a été adopté par 106 voix pour, 16 voix contre et 58 abstentions [2]. Il a été présenté devant la Troisième Commission de l’Assemblée générale de l’ONU par l’Arabie saoudite, son principal co-auteur.

À notre humble avis, là, il ne s’agit plus d’une blague, mais d’une tentative évidente de blanchiment de la réputation du gouvernement saoudien, suite au scandale de l’Affaire Khachouggi, en noircissant celle du gouvernement syrien. Ce qui prouve que l’Arabie saoudite reste une pièce maîtresse dans le jeu des États ennemis de la Syrie, pour remporter par la politique ce qu’ils n’ont pu obtenir par la guerre. En effet, l’insistance permanente sur la « mise en place d’une autorité de transition inclusive dotée des pleins pouvoirs exécutifs » ne signifie rien d’autre.

Pour mémoire, voici l’intervention du délégué permanent de la Syrie auprès des Nations Unies [NdT].

* * *

Monsieur le Président,

Le niveau de surréalisme atteint par ce que nous venons d’entendre est vraiment admirable. Je suis surpris que l’ambassadeur saoudien n’ait pas soumis, au nom de son pays, un projet de résolution déclarant sa candidature au « Prix de l’utopie politique », vu son discours plagiant Platon dans sa « Cité idéale », suivi des absolutions ou châtiments distribués aux uns et aux autres, à la manière d’un Père Noël gratifiant des enfants assoupis.

L’ère des prophéties est révolue, mon cher collègue. Il est temps de vous réveiller et de revenir à la réalité. Je vous conseille de laisser Platon reposer en paix et de témoigner d’un peu d’humilité ; car l’humilité est la vertu des sages, tandis que la surenchère, l’irréalisme et le surréalisme mènent à l’arrogance.

L’arrogance qui fait que mon collègue, ambassadeur de l’Arabie saoudite, parle au nom du peuple syrien. Y’a-t-il une situation plus surréaliste que celle-ci ? Il se voit comme le représentant du peuple syrien auprès des Nations Unies, lequel peuple est représenté ici par un ambassadeur syrien qui vous parle en ce moment même. Si ce n’est pas du surréalisme, c’est un cas de dédoublement de la conscience.

Monsieur le Président,

La délégation de mon pays réaffirme l’attachement de la République arabe syrienne à la promotion et à la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales de tous les Syriens, conformément à la Constitution syrienne ainsi qu’aux dispositions de la Charte des Nations Unies et du droit international.

À ce propos, je tiens à rappeler que la Syrie a collaboré activement à la création du Conseil des droits de l’homme et qu’aujourd’hui, plus que jamais, elle refuse que ses mécanismes, ses rapports et ses représentants spéciaux soient exploités pour nuire à certains États en particulier ; position partagée par nombre d’autres États épris de paix et gardant foi en ces mêmes dispositions.

Et c’est dans ce même contexte que la délégation de mon pays réaffirme son rejet total de tout le contenu du projet de résolution saoudien L.50, qu’il s’agisse des paragraphes préliminaires ou des paragraphes de travail, pour de nombreuses raisons. En voici quelques unes :

Premièrement : C’est un projet de résolution politique par excellence. D’une part, il traduit l’hostilité profonde des autorités saoudiennes à l’égard de mon pays et révèle la politique flagrante du « deux poids, deux mesures » de certains États Membres cherchant à servir leurs propres agendas politiques en ciblant l’État syrien, calomniant ses institutions, entravant les efforts consentis en vue d’une solution politique à la crise, via le dialogue entre Syriens et certainement pas via le dialogue entre Syriens et Saoudiens.

D’autre part, il s’inscrit dans la continuité des efforts visant à remonter le moral des organisations terroristes et de leurs partisans, suite aux succès de l’État syrien et de ses alliés dans leur lutte contre le terrorisme et leur confrontation à ses sponsors ; parmi lesquels, comme vous le savez tous, l’Arabie saoudite, Israël, le Qatar, et bien d’autres co-auteurs de ce projet de résolution.

Deuxièmement : Nous ne pouvons que regretter le niveau désastreux atteint par l’Organisation des Nations Unies, une réalité à laquelle les pères fondateurs ne s’attendaient certainement pas, même dans leurs pires cauchemars, vu que le gouvernement de l’État chargé par ses employeurs de la présentation de ce projet, i.e. l’Arabie saoudite, est le dernier à pouvoir parler des droits de l’homme.

En effet, le discours de l’Arabie saoudite sur les droits de l’Homme est une blague, parce que comme vous le savez aussi, elle est dépourvue des critères les plus élémentaires du respect de ces droits. Il nous suffit de rappeler qu’elle ne fait pas partie du « Pacte international relatif aux droits civils et politiques », tandis que la Syrie en fait partie depuis 1969.

Autrement dit, en Syrie, nous sommes à des années lumières de l’Arabie saoudite, comme en témoignent les pratiques quotidiennes des autorités saoudiennes et leurs violations flagrantes des droits de l’homme à l’intérieur ou à l’extérieur de leur territoire. Des pratiques rendues au point de transformer leurs résidences diplomatiques en centres de détention et de liquidation des opposants, sauvagement et en plein jour. Tel est le concept saoudien de la diplomatie !

Sans oublier que les crimes commis par les autorités saoudiennes ne se limitent pas à leurs ressortissants, mais sont une menace pour la paix et la sécurité internationales du fait de leur soutien multiforme au terrorisme, notamment en Syrie, et du fait de la propagation de l’idéologie extrémiste wahhabite, nuisible aux Arabes et à l’Islam et principale inspiratrice du terrorisme, de la haine et du rejet de l’autre, notamment de la femme.

Ce n’est un secret pour personne que les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité commis par les autorités saoudiennes contre les civils du Yémen, ont coûté la vie à des milliers de femmes et d’enfants et détruit les infrastructures de ce pays frère que nous, Arabes, considérons à l’origine de notre arabité ; raison qui fait qu’il est ciblé.

Par conséquent, ce projet de résolution révèle l’aggravation de la schizophrénie au sein de la délégation présentatrice saoudienne. En effet, il y est question de l’organisation d’élections, de Constitution, de Parlement, d’un rôle accordé aux femmes de Syrie, etc. Autant d’éléments profondément enracinés dans la société syrienne depuis l’époque de la reine Zénobie à Palmyre, il y a 2000 ans, mais, autant d’éléments que l’Arabie saoudite n’a jamais accordés à ses citoyens. Et le citoyen qui, en tant qu’opposant, réclamerait ces choses à partir de l’étranger, subirait le sort de celui qui a été convoqué au consulat d’Arabie saoudite à Istanbul…

Le comble de l’ironie est que la délégation saoudienne s’est opposée, ici-même, à l’adoption d’articles inscrits dans des projets de résolution concernant la liberté de la presse et la protection des journalistes, alors qu’elle a ajouté tout un paragraphe sur la protection des journalistes, en Syrie, dans son projet de résolution L.50. L’important pour les autorités saoudiennes est donc la protection des journalistes en Syrie ; partout ailleurs, ni la protection des journalistes, ni la liberté d’opinion ou d’expression ne posent problème.

Troisièmement : L’hypocrisie flagrante de certains auteurs de ce projet de résolution, des auteurs citoyens d’États prétendument soucieux de la démocratie, des droits de l’homme, de l’État de droit et de la lutte contre le terrorisme, mais qui n’ont jamais rien fait pour mettre fin au soutien des autorités saoudiennes au terrorisme dans le monde, ni pour présenter un quelconque projet de résolution concernant les terribles violations des droits de l’homme à l’intérieur et à l’extérieur du royaume saoudien.

Quatrièmement : Nombre de pays ayant participé à l’élaboration de ce projet de résolution, notamment ceux impliqués dans la « Coalition internationale » menée par les États-Unis, violent les droits de l’homme en Syrie.

Viols par occupation, agressions, crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Crimes commis directement, par ladite Coalition internationale ayant entraîné la mort de milliers de civils syriens, principalement des femmes et des enfants, et la destruction des infrastructures. Ou crimes commis indirectement, par le soutien accordé aux organisations terroristes ; par le recrutement, le financement et l’acheminement de terroristes étrangers vers le territoire syrien ; par le silence adopté sur les pratiques des gouvernements soutenant le terrorisme ; par les mesures économiques coercitives unilatérales et illégitimes, imposées à la Syrie par les gouvernements de certains pays membres de cette organisation, mesures privant les Syriens de certains de leurs besoins essentiels, médicaments ou autres…

En conclusion, Monsieur le Président,

La Syrie endure depuis des années des pratiques de certains gouvernements et a payé un lourd tribut afin de préserver sa souveraineté, son indépendance, son unité et son intégrité territoriale. Autant de raisons qui font que nous appelons à voter contre ce projet de résolution ou, du moins, à ne pas participer au vote.

Pour nous, voter en sa faveur est un acte hostile envers la République arabe syrienne, lequel dispense ses co-auteurs de contribuer à la recherche d’une solution politique et les autorise à empêcher la reconstruction.

Par ailleurs, tout en réaffirmant notre rejet total de ce projet de résolution et sans négliger les motivations de ses co-auteurs, nous tenons à souligner qu’ils y ont inclus des éléments qui ne relèvent pas du mandat de cette commission, tels que les éléments des paragraphes 9, 31, 32, en rapport avec l’OIAC, organisation indépendante, le mécanisme d’enquête et son financement concernant tous les pays membres, à partir de 2020.

C’est pour toutes ces raisons que la délégation de mon pays demande que ce projet soit intégralement mis aux voix et invite les États Membres à voter contre ou à ne pas y participer.

Je demande que cette déclaration soit considérée comme un document officiel de la présente séance.

Merci Monsieur le Président.

Dr Bachar al-Jaafari
Délégué permanent de la Syrie auprès des Nations Unies

16/11/2018

Transcription et traduction par Mouna Alno-Nakhal

Source : The Syrian Mission to the United Nations

Notes :

[1] Le projet de résolution A/C.3/73/L.50

[2] Les résolutions de pays continuent de polariser les débats au sein de la Troisième Commission, qui adopte 13 projets de résolution

URL de cet article 34104
   
L’Histoire m’acquittera
Fidel CASTRO, Jacques-François BONALDI
L’Histoire m’acquittera (en espagnol : La Historia me absolvera) est un manifeste d’auto-défense écrit par Fidel Castro en octobre 1953, à la veille de son procès (il est jugé pour avoir attaqué la caserne de Moncada le 26 juillet 1953, en réaction au coup d’état de Batista). Fidel Castro est diplômé en droit, il manie la plaidoirie, exercice qu’il connaît bien, avec aisance : il y explique ses actes et son implication dans le soulèvement contre Batista mais surtout, il y développe ses (…)
Agrandir | voir bibliographie

 

Croire que la révolution sociale soit concevable... sans explosions révolutionnaires d’une partie de la petite bourgeoisie avec tous ses préjugés, sans mouvement des masses prolétariennes et semi-prolétariennes politiquement inconscientes contre le joug seigneurial, clérical, monarchique, national, etc., c’est répudier la révolution sociale. C’est s’imaginer qu’une armée prendra position en un lieu donné et dira "Nous sommes pour le socialisme", et qu’une autre, en un autre lieu, dira "Nous sommes pour l’impérialisme", et que ce sera alors la révolution sociale !

Quiconque attend une révolution sociale “pure” ne vivra jamais assez longtemps pour la voir. Il n’est qu’un révolutionnaire en paroles qui ne comprend rien à ce qu’est une véritable révolution.

Lénine
dans "Bilan d’une discussion sur le droit des nations", 1916,
Oeuvres tome 22

© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.