RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher

Philippines : Mandats d’arrêt contre des dirigeants de la gauche légale

Quatre mandats d’arrêt ont été délivrés à la mi-juillet contre des leaders de la gauche radicale (légale). Ils sont accusés d’implication dans une affaire de double meurtre qui remonte à plus de douze ans et pue le coup monté à plein nez.

Arrêtez-les ! Le 11 juillet 2018, la juge Turla, du tribunal provincial de Nueva Ecija, délivre un mandat d’arrêt contre quatre des principaux dirigeants de Bayan, mouvement qui chapeaute un vaste réseau d’organisations de la gauche (légale) d’inspiration communiste.

Les mandats d’arrêt concernent :

– Satur Ocampo (au centre sur la photo), 79 ans, journaliste. C’est une personnalité politique unanimement respectée. Détenu durant plusieurs années dans les geôles de la dictature, il a été sénateur sous l’étiquette Bayan Muna (gauche radicale) et membre de l’équipe de négociation du NDFP lors des pourparlers de paix – accessoirement, il est inscrit sur la liste de 600 « terroristes » publiée par le gouvernement Duterte en février dernier, liste qui compte également plusieurs prêtres et la représentante des Nation Unies pour les questions indigènes à Mindanao.

– Teddy Casiño (à droite sur la photo), journaliste et écrivain. D’abord militant au sein du mouvement étudiant puis de l’organisation syndicale KMU, il est élu député à deux reprises (2004, 2007) sous les couleurs de Bayan Muna.

– Rafael Mariano, dirigeant historique de l’organisation paysanne KMP, ex-député d’Anakpawis (party-list représentant les paysans), ex-ministre de l’agriculture remercié en mai dernier.

– Liza Maza, actuelle ministre de la Commission anti-pauvreté (dernière figure « de gauche » dans le gouvernement Duterte) et représentante du mouvement de femmes Gabriela.

Tous quatre sont poursuivis pour leur implication présumée dans une affaire de double meurtre qui remonte à plus de douze ans et pue le coup monté.

Ça se passe dans la municipalité de Bongabon (province de Nueva Ecija).
A quelques mois d’intervalle, MM Jimmy Peralta et Carlito Bayudang sont abattus de plusieurs coups de feu, respectivement le 23 décembre 2003 et le 6 mai 2004.

La veuve du second dépose alors une plainte, accusant les dirigeants d’Anakpawis, Gabriela et Bayan Muna d’avoir ordonné l’exécution de son époux, lui-même militant d’Akbayan, un parti rival.

En 2006, l’affaire est relancée par les aveux d’un certain Julie Flores Sinohin, qui se rend de lui-même à la police et déclare avoir tiré sur Carlito Bayudang. Deux autres témoins se présentent alors – la veuve de la première victime et un dénommé Alvarez Juliano – qui corroborent les aveux du tueur et affirment avoir été présents lors d’une rencontre secrète réunissant les accusés (Ocampo, Maza, Casiño et Mariano), des dirigeants du parti communiste des Philippines et de la Nouvelle armée du peuple. Lors de cette rencontre, les témoins auraient entendu les accusés ordonner l’exécution de Peralta et Bayudang.

Peu crédible que les témoins, dont aucun n’appartient au cercle dirigeant de la gauche radicale, aient pu avoir accès à une réunion aussi confidentielle. D’autre part, les témoignages sont tellement identiques qu’ils paraissent provenir d’une même source et avoir été appris par cœur. Enfin, les douilles retrouvées sur les lieux du crime ne correspondent pas à l’arme présentée par le soi-disant tueur repenti. Bref, la juge Evelyn Atienza Turla, en charge du dossier, n’est pas convaincue. Le 18 juillet 2008, estimant que le dossier ne contient pas d’élément probant, elle refuse d’émettre un mandat d’arrêt contre les accusés (Rappler, 27/08/2018).

Curieusement, c’est la même magistrate qui, dix ans plus tard, le 11 juillet 2018, sans qu’aucun nouvel élément ait été versé au dossier et sans fournir d’explication, revient sur sa décision et délivre un mandat d’arrêt qu’elle assorti même d’une recommandation à ne pas autoriser la mise en liberté sous caution des accusés.

Tout aussi curieusement, la police se hâte de ne rien faire.

Et le 30 juillet, Oscar Albayalde, chef de la PNP, donne quelques jours de sursis aux quatre accusés qu’il appelle à se rendre de leur plein gré…

… tout en annonçant qu’il a confié l’exécution du mandat d’arrêt au CIDG (Criminal Investigation and Detection Group), une unité d’élite chargée de l’arrestation des criminels particulièrement dangereux.

Puis, le 4 août, Citizen Crime Watch en rajoute une louche. Cette organisation « citoyenne » de lutte contre la criminalité et qui entend prêter main-forte à la police, offre une récompense de 1 million de pesos (environ 16.000 euros) pour toute information permettant l’arrestation des quatre « criminels ».

A l’heure ou je mets en ligne, aucun des inculpés n’a encore été détenu.

Et l’on peut se demander si le pouvoir souhaite véritablement traîner les quatre représentants de Bayan devant la justice où s’il cherche à mettre en place les conditions qui pourraient justifier leur exécution – une opération de police musclée, par exemple, au cours de laquelle les accusés tenteraient de résister aux forces de l’ordre ou essayeraient de s’enfuir… sans autre témoin que les cow-boys du CIDG, évidemment.

Philippe Revelli

»» http://philipperevelli.com/mandats-darret-contre-des-dirigeants-de-la-...
URL de cet article 33667
  
AGENDA

RIEN A SIGNALER

Le calme règne en ce moment
sur le front du Grand Soir.

Pour créer une agitation
CLIQUEZ-ICI

Le cauchemar de Humboldt de Franz Schultheis
Bernard GENSANE
Bien qu’un peu long, ce compte-rendu rend à peine justice à la richesse de cet ouvrage indispensable à ceux qui veulent comprendre pourquoi, par exemple, la première contre-réforme imposée par Sarkozy fut celle des universités. On pourrait commencer par cette forte affirmation de 1991 de sir Douglas Hague, universitaire britannique de haut niveau, professeur de sciences économique, spécialiste du " marché de l’éducation " et, ô surprise, ancien conseiller de Madame Thatcher : "Si les (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

"Je n’en dors pas la nuit de voir comment, au cours des 11 dernières années, nous, journalistes, activistes, intellectuels, n’avons pas été capables d’arrêter ce monde à l’envers dans lequel de courageux dénonciateurs et éditeurs vont en prison tandis que des criminels de guerre et des tortionnaires dorment paisiblement dans leur lit."

Stefania Maurizi
28 octobre 2021, au cours du procès d’appel en extradition de Julian Assange

Analyse de la culture du mensonge et de la manipulation "à la Marie-Anne Boutoleau/Ornella Guyet" sur un site alter.
Question : Est-il possible de rédiger un article accusateur qui fait un buzz sur internet en fournissant des "sources" et des "documents" qui, une fois vérifiés, prouvent... le contraire de ce qui est affirmé ? Réponse : Oui, c’est possible. Question : Qui peut tomber dans un tel panneau ? Réponse : tout le monde - vous, par exemple. Question : Qui peut faire ça et comment font-ils ? Réponse : Marie-Anne Boutoleau, Article XI et CQFD, en comptant sur un phénomène connu : "l’inertie des (...)
93 
Appel de Paris pour Julian Assange
Julian Assange est un journaliste australien en prison. En prison pour avoir rempli sa mission de journaliste. Julian Assange a fondé WikiLeaks en 2006 pour permettre à des lanceurs d’alerte de faire fuiter des documents d’intérêt public. C’est ainsi qu’en 2010, grâce à la lanceuse d’alerte Chelsea Manning, WikiLeaks a fait œuvre de journalisme, notamment en fournissant des preuves de crimes de guerre commis par l’armée américaine en Irak et en Afghanistan. Les médias du monde entier ont utilisé ces (...)
17 
Reporters Sans Frontières, la liberté de la presse et mon hamster à moi.
Sur le site du magazine états-unien The Nation on trouve l’information suivante : Le 27 juillet 2004, lors de la convention du Parti Démocrate qui se tenait à Boston, les trois principales chaînes de télévision hertziennes des Etats-Unis - ABC, NBC et CBS - n’ont diffusé AUCUNE information sur le déroulement de la convention ce jour-là . Pas une image, pas un seul commentaire sur un événement politique majeur à quelques mois des élections présidentielles aux Etats-Unis. Pour la première fois de (...)
23 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.