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Sauvons Kyoto, sauvons la Terre, sauvons l’humanité

« Si le climat était une banque les dirigeants occidentaux l’auraient sauvé. » Hugo Chavez (Président de la République bolivarienne du Venezuela)

Cette sentence du président résume mieux que mille discours l’état désastreux du climat. Il y a dix ans, Jacques Chirac mettait en garde : « La maison brûle et nous regardons ailleurs », « Nous voulons que nos enfants vivent dans une Amérique qui ne soit pas menacée par le pouvoir destructeur d’une planète qui se réchauffe ». Ces mots de Barack Obama à Chicago, prononcés le 6 novembre, après sa victoire autorisent l’’espoir de voir le pays relancer la lutte contre le changement climatique. Autant de belles phrases qui sont en totale contradiction avec la réalité.

Historique de la prise de conscience

En 1992, à Rio, les pays membres de l’ONU ont pris conscience de l’urgence de sauver la Terre. En 1997, à Kyoto (Japon), une partie des pays dits développés ont accepté de s’engager à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Puis, ils ont demandé aux pays en développement de les imiter, puisque nombre d’entre eux - notamment la Chine - font partie des plus gros émetteurs. Ces derniers ont refusé, rappelant - à juste titre - que ce sont les pays riches qui sont responsables d’une très grande partie des particules déjà accumulées dans l’atmosphère (plus de 800 milliards de tonnes de CO2 en un siècle). Adopté en 1997, entré en vigueur en 2005, le protocole de Kyoto assigne aux États développés des objectifs contraignants de réduction des émissions des gaz à effet de serre (CO2, méthane, HFC, PFC, N2O, SF6) : elles devaient diminuer sur la période 2008-2012 par rapport à ce qu’elles étaient en 1990. L’accord de Kyoto, qui contraignait les pays à réduire leurs émissions, arrive à échéance au 31 décembre. Que va-t-il se passer ensuite ? Avec qui ? Sous quelle forme ? Et pour combien de temps ? Celui-ci engage les nations industrialisées à réduire leurs émissions de 5,2% en moyenne d’ici à 2012 par rapport à 1990. La fin de l’année approche et l’échéance touche à sa fin. Sauf qu’il y a un os : aucun nouvel accord encadrant les émissions futures n’a été trouvé. Alors que va-t-il se passer aux douze coups de minuit le 1er janvier ? (1)

En y regardant de près, le bilan de Kyoto en termes de réduction d’émissions de GES est bien plus mitigé qu’il n’y paraît d’emblée. Les réductions d’émissions réalisées dans les pays industrialisés sous contrainte de Kyoto sont, en grande partie, liées à deux éléments clés, indépendants de la mise en oeuvre de politiques volontaristes de limitation des émissions de GES et indépendantes du protocole de Kyoto : l’effondrement des émissions des pays de l’ex-bloc soviétique, le ralentissement économique mondial, intervenu dans la plupart des nations industrialisées.

La situation actuelle : une fuite en avant

Une mauvaise nouvelle pour le climat : 34 milliards de tonnes de dioxyde de carbone ont été rejetées dans l’atmosphère en 2011 et vont stationner 120 ans. Un record. « Si la tendance actuelle se maintient, le rejet mondial de CO² en 2020 va croître de 20%, au-delà de 40 milliards. » Sur cette tendance, les émissions seront de 58 milliards de tonnes en 2020. Or, il ne faudrait pas dépasser 44 milliards à cette date pour atteindre cet objectif. Le monde est aujourd’hui sur une trajectoire de 3 à 5 °C de hausse d’ici la fin du siècle. Il est urgent d’agir. Et pourtant, les négociations internationales s’enlisent. (2)

De plus, un scoop qui a fait le buzz nous est donné par un rapport de l’AIE paru ce lundi 12 novembre. Il fait l’éloge des Etats-Unis qui vont détrôner les Arabes, en l’occurrence, l’Arabie Saoudite dont la production serait sur le déclin. « Vers 2017, les Etats-Unis deviendront le plus gros producteur de pétrole, Il y aura un déclin imminent de la production de bon nombre des principaux pays producteurs de la planète, notamment la Russie, l’Iran, le Mexique, le Nigeria ou encore la Chine. l’Algérie et la Libye. (3)

Le rapport alarmant de la Banque mondiale

Dans le 4e rapport du Giec, suivant les scénarios, les modèles prévoyaient que la température de l’air augmenterait de 1 à 4 °C d’ici 2100. La Banque mondiale fait son entrée dans le débat sur le réchauffement climatique avec un rapport en forme d’alerte. Le rapport publié en anglais Turn down the Heat (« Baissez la chaleur ») fait état des possibles futures victimes du réchauffement climatique. Si les promesses des engagements politiques ne sont pas tenues, c’est d’ici 2060 que l’atmosphère se réchauffera de 4 °C, soit le scénario le plus pessimiste du Giec. Une hausse de 4 °C de plus ne peut qu’avoir des conséquences dramatiques pour les sociétés humaines. La température n’est évidemment pas le seul paramètre climatique qui sera modifié. Avec ce scénario, l’acidification des océans augmenterait de 150% et le niveau des mers pourrait s’élever d’un mètre. Le risque d’inondation sera alors maximal pour 10 villes, en particulier au Bangladesh, en Inde, en Indonésie, à Madagascar, au Mexique, au Mozambique, aux Philippines, au Venezuela et au Vietnam. La disparition de l’écosystème marin en général (en raison d’une trop forte acidité) et l’augmentation de la fréquence des événements météo extrêmes tels que les cyclones ou les ouragans auront d’innombrables conséquences sur le littoral. (4)

L’augmentation des vagues de chaleur, des pluies et des sécheresses pour une planète à +4 °C pourrait bien provoquer une troisième guerre mondiale autour du problème de l’eau. Vitale et déjà rare, l’eau manquerait dans le sud de l’Europe, en Afrique Les inondations peuvent introduire des polluants et des éléments pathogènes dans les réseaux d’approvisionnement en eau potable. Les effets du changement climatique sur la production agricole risquent d’aggraver la sous-alimentation et la malnutrition dans de nombreux pays en développement qui connaissent déjà une mortalité infantile élevée. « Il faut limiter le réchauffement à 2 degrés », a commenté le président du groupe de la Banque mondiale. « Si nous n’agissons pas suffisamment contre le changement climatique, nous risquons, déclare le DG, de léguer à nos enfants un monde radicalement différent de celui que nous connaissons aujourd’hui. » (4)

Après Copenhague, les promesses de Durban : un sursis pour Kyoto

En 2009, avant la COP 15 de Copenhague, la mobilisation citoyenne battait son plein, tirée par des ONG sur le qui-vive. 3 ans plus tard, les manifestations et actions citoyennes sur le changement climatique sont plus que rares. La faute au climato-scepticisme qui a torpillé le débat : 9 Américains sur 10 s’estiment informés sur le changement climatique mais seule la moitié de la population considère ce phénomène comme « une menace » (sondage Gallup 2011). Faut-il y voir l’incidence du traitement médiatique ? Les médias américains jouent un rôle paradoxal : ce sont eux qui couvrent depuis le plus longtemps le sujet du CC depuis le premier rapport du GIEC en 1990, mais ce sont aussi eux qui consacrent la plus grande part au climato-scepticisme, surtout entre 2007 et 2010.

Aux Etats Unis le président Obama s’y est en tous cas personnellement engagé après sa victoire en promettant d’en « discuter (...) très largement avec les scientifiques, les ingénieurs et les élus pour voir ce que nous pouvons faire de plus, à court terme, pour réduire les émissions de carbone » et à « avoir une conversation dans tout le pays sur ce qui est réaliste de faire à long terme pour s’assurer que nous ne laissons pas aux futures générations un problème très cher et très douloureux à régler ». « L’important n’est pas de convaincre les 20% de climato-sceptiques mais de convaincre les 80% convaincus d’agir. »

Depuis 2009 l’espoir s’est refroidi, il y a une panne dans l’action et les climato-septiques redressent la tête et insinuent le doute. «  Le CO² n’est pas responsable de cet emballement qui... est naturel : Résultat des courses : on peut donc continuer à polluer allègrement.

Les questions à régler à Doha pour sauver Kyoto

Le lundi 26 novembre s’est ouverte à Doha (Qatar), la 18e conférence des 193 États signataires de la Convention internationale sur le changement climatique (COP). Le but est de limiter la hausse des températures dues aux émissions de gaz à effet de serre à 2 °C d’ici la fin du siècle. Si, de l’accord de tous, il est imparfait et insuffisant, le protocole de Kyoto, négocié en 1997 et mis en oeuvre en 2005, reste le seul instrument juridiquement contraignant pour lutter contre le changement climatique. Cependant, sa première période d’engagement se termine fin 2012 et plusieurs questions restent posées sur l’orientation à donner à sa suite, dans le cadre de la plate-forme de Doha,

Justement, le choix du petit émirat de 1,3 million d’habitants dont moins de 300.000 Qatariens, n’est pas heureux. Depuis une décennie, les Qataris détiennent le record d’émissions de CO2 par habitant : 57 tonnes selon les données de l’ONU de 2007, soit presque trois fois plus qu’un Américain (20 t), huit fois plus qu’un Chinois (10 t) et 50 fois plus qu’un Indien (1,2 t). En 2009, le Qatar est plus sage, ce n’est que 45 tonnes (11 fois plus que l’Algérie). Doha ne s’est pas vu fixer d’objectif de réduction de ses rejets, et n’a pris aucun engagement volontaire en signant le protocole de Kyoto. Dans son dernier rapport en mai, l’ONG de protection de l’environnement WWF désignait, par ailleurs, le Qatar comme le pays ayant la plus forte empreinte écologique, à savoir 11,5 hectares globaux par habitant. Malgré sa rareté, l’eau est gratuite. Conséquence : une consommation des plus importantes au monde, avec 400 litres par habitant et par an. C’est au total la consommation de toute l’Afrique (1 milliard d’habitants) qui est équivalente à celle consommée par trente millions d’habitants des pays du Golfe. Un rapport de 1/30. Un Qatari consomme en une semaine ce que consomme un Sahélien en une année.! Et c’est ce pays qui est censé nous guider vers la sobriété énergétique. C’est vraiment l’hôpital qui se moque de la charité ! Peu importe que le Bengladesh ou les Iles Maldives soient à terme noyées....

On se souvient que c’est à Durban en 2011 que les participants ont décidé de prolonger le protocole de Kyoto pour une seconde période. C’est à cette seule condition que les pays en développement ont accepté de poursuivre les négociations autour d’un nouvel accord futur incluant, cette fois, tout le monde pas seulement ceux de Kyoto, notamment les pays émergents. Si tout va bien, il pourrait être signé en 2015 pour une application en 2020. Ce compromis arraché de haute lutte s’appelle la « plate-forme de Durban ». Les États ont jusqu’à 2015 pour s’entendre sur les engagements de chacun, le nouveau protocole entrant alors en vigueur en 2020. Reste le mécanisme de contrôle qui n’est pas au point, les Chinois sont conte tout contrôle de leur degré d’application de leur réduction du CO2

« Seules l’Union européenne et l’Australie nous dit Loïc Chauveau, ont annoncé à ce jour vouloir prolonger cet accord. Le Canada s’en est retiré, les États-Unis n’ont jamais adhéré, la Russie s’interroge, le Japon a renoncé à ses objectifs du fait de la fermeture de ses centrales nucléaires à la suite de l’accident de Fukushima. Plusieurs incertitudes, la validité du calendrier : Kyoto 2 s’étendra-t-il jusqu’à 2017 ? 2020 ? A priori, les pays envisagent un amendement au protocole d’origine qui devra être à son tour ratifié par les Parlements nationaux. (…) Et après ? Pour l’Union européenne, c’est assez simple : elle a déclaré depuis longtemps qu’elle baisserait de 20% ses émissions d’ici 2020, et même de 30% si d’autres la suivaient. Mais les autres ? « L’Australie a annoncé cette semaine de nouveaux engagements très faibles (de 5% en 2020 par rapport à 2000, Ndlr), souligne Célia Gauthier. Mais il faut absolument rehausser les objectifs avant 2020. » » (5)

« Autre question irrésolue pour les Etats : que fait-on de l’héritage de la première période et notamment des excédents de quotas ? Les pays de l’Est ont connu une forte désindustrialisation au moment de l’effondrement de l’URSS. Sans faire d’efforts environnementaux particuliers, ils ont pu accumuler de grandes quantités de quotas qui sont venus inonder le marché carbone et faire baisser les cours. Pourquoi il faut - quand même - sauver Kyoto : Le marché d’émissions de gaz à effet de serre qui permet de vendre et d’acheter des tonnes de CO2 entre états industriels est complètement déprimé. A 7 euros la tonne, il n’est pas intéressant d’investir dans des technologies propres. (...) Pour faire remonter les cours, l’Union européenne propose de retirer 900 millions de tonnes de quota des huit milliards qui devraient être distribuées aux industriels européens entre 2013 et 2020 ».(5)

Sur cette question, l’attitude des États-Unis à Doha sera particulièrement suivie. L’entrée du deuxième émetteur de CO2 dans ce marché changerait fondamentalement la donne. Les pays en voie de développement demandent aux pays riches de les aider à s’adapter au réchauffement climatique dont ils seront les premières victimes. » De 2010 à 2012, la communauté internationale s’est engagée à dépenser 23 milliards d’euros par an sur ces projets. Un peu plus de 12 milliards seulement ont été effectivement versés. Les sources de financements à long terme restent à déterminer. De nombreux pays, à l’instar de la Russie, de la Nouvelle-Zélande, de la Chine et du Japon, ont d’ores et déjà indiqué qu’ils refuseraient des réductions supplémentaires. Et les quelques volontaires (l’Union européenne et l’Australie) ne représentent que 15% des émissions de GES mondiales. (...) « le Brésil, la Chine, l’Inde et l’Afrique du Sud ont prévenu que Doha serait un échec si les pays riches ne s’engageaient pas à réduire davantage leurs propres émissions ». (5)

Pour Stéphane Hallegatte économiste à la Banque mondiale « Aller vers un monde à +4 °C, c’est aller vers l’inconnu car plus le réchauffement est important, plus ses conséquences sont difficiles à anticiper. (...) les mesures permettant de limiter le réchauffement climatique sont aussi des mesures qui permettent le développement économique. Parmi ces mesures, il y a, dans les pays en développement, plus de 1 000 milliards d’euros de subventions de ce type chaque année qui favorisent le gaspillage et sont principalement versées aux plus riches ». (6)

Comment remobiliser les citoyens du monde pour combattre les partisans du «  toujours plus ? » Prions pour que tout le monde prenne des engagements contraignants pour sauver la Terre. Nous sommes tous concernés. Kyoto est mort. Vive un nouveau protocole où tout le monde sera concerné !

Chems Eddine Chitour

1. http://www.terraeco.net

2.http://sciencesetavenir.nouvelobs.com/nature-environnement/20121126.OB...

3. Les Etats-Unis 1er producteur mondial de pétrole d’ici 5 ans L’Expansion.com 13/11/2012

4. http://www.futura-sciences.com/fr/news/t/climatologie-1/d/la-banque-mo...

5. Loïc Chauveau : Sciences et Avenir 26/11/12

6. http://www.terraeco.net


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