RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher

Trop c’est trop. Il faut maintenant passer au boycott.

Il est temps. Il est grand temps. La meilleure stratégie pour mettre fin à l’occupation de plus en plus sanglante est de faire en sorte qu’Israël fasse l’objet d’un mouvement comme celui qui mit fin à l’apartheid en Afrique du Sud. En juillet 2005 un tel plan fut proposé par une très large coalition de groupes pro-palestiniens. Il firent appel « aux personnes de conscience du monde entier pour imposer un large boycott et lancer des initiatives contre Israel similaires à celles appliquées à l’Afrique du Sud du temps de l’apartheid. » Ainsi est née la campagne « Boycott, Divestment and Sanctions » (BDS) (*)

Pour chaque jour de bombardements sur Gaza qui passe, de plus en plus de gens se rallient à la cause BDS, y compris chez les juifs israéliens. Pendant l’assaut, environ 500 israéliens, dont plusieurs dizaines sont d’éminents artistes et universitaires, ont envoyé une lettre aux ambassadeurs étrangers en poste en Israël. La lettre demandait « l’adoption immédiate de mesures restrictives et de sanctions » et faisant référence à la lutte contre l’apartheid. « Le boycott de l’Afrique du sud fut efficace, mais Israël bénéficie d’un traitement de faveur... Le soutien international doit cesser. »

Malgré ces appels, nombreux sont ceux qui hésitent à franchir la ligne. Les raisons sont complexes, d’ordre émotionnelle et compréhensibles. Mais elles sont insuffisantes. Les sanctions économiques constituent l’outil le plus efficace de l’arsenal non violent : ne pas les appliquer relève de la complicité. Voici les quatre principales objections à la stratégie BDS, suivies de contre arguments.

Les mesures punitives radicaliseraient les Israéliens au lieu de les convaincre.

Le monde a déjà tenté le « dialogue constructif ». Ce fut un échec total. Depuis 2006, Israël s’est régulièrement enfoncé dans la criminalité : extension des colonies, une guerre scandaleuse contre le Liban, une punition collective contre Gaza via un blocus brutal. Malgré cette escalade, Israël n’a subit aucune mesure de représailles, au contraire. Les armes et les 3 milliards d’aide annuelle dispensées par les Etats-Unis ne sont qu’une partie. Pendant toute cette période charnière, Israël a grandement renforcé ses relations diplomatiques, culturelles et commerciales avec divers autres alliés. Par exemple, en 2007 Israël est devenu le premier pays en dehors de l’Amérique latine à signer un accord de libre-échange avec le bloc Mercosur. Au cours des neuf premiers mois de 2008, les exportations vers le Canada ont augmenté de 45%. Un nouvel accord avec l’Union Européenne prévoit le doublement des exportations d’aliments israéliens. Et au mois de Décembre (2008), les ministres européens ont « renforcé » les accords entre l’UE et Israël, une mesure longtemps attendue par Israël.

C’est dans ce contexte que les dirigeants israéliens ont lancé leur dernière guerre : confiants qu’il n’y aurait pas de prix à payer significatif. Il est remarquable de constater qu’après sept jours de guerre, l’indice de la bourse de Tel Aviv a grimpé de 10,7%. Lorsque les carottes sont inefficaces, il faut employer le bâton.

Israel n’est pas l’Afrique du sud

Evidemment que non. Mais la référence à l’Afrique du sud sert à démontrer que les tactiques BDS peuvent se révéler efficaces lorsque des mesures faibles (manifestations, pétitions, lobbying) ont échoué. De plus, dans les territoires occupés, il y a des éléments qui rappellent tristement l’apartheid : les pièces d’identité de couleurs différentes et les permis de voyager, les maisons détruites au bulldozer et les déplacements forcés, les routes réservées aux colons. Ronnie Kasrils, un éminent politicien Sud africain, a dit que le modèle de ségrégation qu’il avait vu en Cisjordanie et à Gaza était « infiniment pire que l’apartheid ». C’était en 2007, avant qu’Israël ne lance sa guerre ouverte contre cette prison en plein air qu’est Gaza.

Pourquoi s’en prendre à Israël alors que les Etats-Unis, la Grande Bretagne et d’autres pays occidentaux font la même chose en Irak et en Afghanistan ?

Le boycott n’est pas un dogme mais une tactique. La raison de le tenter est d’ordre pratique : pour un pays si petit et dépendent de son commerce extérieur, cela pourrait se révéler efficace.

Le boycott coupe les communications alors qu’il en faudrait plus et pas moins.

J’y répondrai par une anecdote personnelle. Pendant 8 ans, mes livres ont été publiés en Israël par une maison d’édition appelée Babel. Lorsque j’ai publié la Stratégie du Choc, je voulais respecter le boycott. Sur le conseil de militants BDS, dont le magnifique écrivain John Burger, j’ai pris contact avec un petit éditeur militant appelé Andalus, trés engagé dans le mouvement contre l’occupation et le seul éditeur israélien qui se consacre exclusivement à publier des traductions de l’arabe à l’hébreu. Nous avons rédigé un contrat qui stipule qu’Andalus touche tous les droits d’auteurs, je ne touche rien. Ainsi, je boycott l’économie israélienne mais pas les Israéliens.

Notre modeste plan a provoqué des dizaines d’appels téléphoniques, des courriers électroniques et des messages entre Tel Aviv, Ramallah, Paris, Toronto et la ville de Gaza. Ce que je veux dire est ceci : dés que l’on se lance une stratégie de boycott, le dialogue s’intensifie. L’argument qui consiste à dire que les boycotts couperaient les communications est particulièrement spécieux dans la mesure où bon nombre de moyens de communications modernes et bon marché sont à notre disposition. Les moyens pour communiquer à travers les frontières existent. Aucun boycott ne nous en empêchera.

(...)

Traduction VD pour le Grand Soir http://www.legrandsoir.info

Article Original
http://www.guardian.co.uk/commentisfree/2009/jan/10/naomi-klein-boycott-israel


EN COMPLEMENT : qui boycotter ?
http://www.legrandsoir.info/spip.php?article7760

(*) http://fr.wikipedia.org/wiki/Boycott,_D%C3%A9sinvestissement_et_Sanctions

URL de cet article 7796
  

Même Auteur
La Stratégie du Choc
Naomi KLEIN
Qu’y a-t-il de commun entre le coup d’état de Pinochet au Chili en 1973, le massacre de la place Tiananmen en 1989, l’effondrement de l’Union soviétique, le naufrage de l’épopée Solidarnösc en Pologne, les difficultés rencontrées par Mandela dans l’Afrique du Sud post-apartheid, les attentats du 11 septembre, la guerre en Irak, le tsunami qui dévasta les côtes du Sri-Lanka en 2004, le cyclone Katrina, l’année suivante, la pratique de la torture partout et en tous lieux - Abou Ghraib ou Guantanamo, aujourd’ (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

« Le fait de se définir Blanc ne s’est pas construit à travers des séances d’œnologie ou de dégustations de glaces entre amis, mais sur le saccage de la vie, de la liberté, du travail et des terres ; sur la lacération des dos ; l’enchaînement des membres ; l’étranglement des dissidents ; la destruction des familles ; le viol des mères ; la vente des enfants ; et tant d’autres actions destinées avant tout à nous refuser à toi et moi le droit de protéger et de disposer de nos propres corps. »

Ta-Nehisi Coates

Le DECODEX Alternatif (méfiez-vous des imitations)
(mise à jour le 19/02/2017) Le Grand Soir, toujours à l’écoute de ses lecteurs (réguliers, occasionnels ou accidentels) vous offre le DECODEX ALTERNATIF, un vrai DECODEX rédigé par de vrais gens dotés d’une véritable expérience. Ces analyses ne sont basées ni sur une vague impression après un survol rapide, ni sur un coup de fil à « Conspiracywatch », mais sur l’expérience de militants/bénévoles chevronnés de « l’information alternative ». Contrairement à d’autres DECODEX de bas de gamme qui circulent sur le (...)
103 
L’UNESCO et le «  symposium international sur la liberté d’expression » : entre instrumentalisation et nouvelle croisade (il fallait le voir pour le croire)
Le 26 janvier 2011, la presse Cubaine a annoncé l’homologation du premier vaccin thérapeutique au monde contre les stades avancés du cancer du poumon. Vous n’en avez pas entendu parler. Soit la presse cubaine ment, soit notre presse, jouissant de sa liberté d’expression légendaire, a décidé de ne pas vous en parler. (1) Le même jour, à l’initiative de la délégation suédoise à l’UNESCO, s’est tenu au siège de l’organisation à Paris un colloque international intitulé « Symposium international sur la liberté (...)
19 
La crise européenne et l’Empire du Capital : leçons à partir de l’expérience latinoaméricaine
Je vous transmets le bonjour très affectueux de plus de 15 millions d’Équatoriennes et d’Équatoriens et une accolade aussi chaleureuse que la lumière du soleil équinoxial dont les rayons nous inondent là où nous vivons, à la Moitié du monde. Nos liens avec la France sont historiques et étroits : depuis les grandes idées libertaires qui se sont propagées à travers le monde portant en elles des fruits décisifs, jusqu’aux accords signés aujourd’hui par le Gouvernement de la Révolution Citoyenne d’Équateur (...)
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.