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Washington impose de nouvelles sanctions contre le Venezuela et Cuba

Le conseiller américain à la sécurité nationale, John Bolton, a annoncé une escalade des sanctions imposées par les États-Unis à Cuba et au Venezuela lors d’un discours belliqueux prononcé à Miami jeudi devant un public choisi composé d’exilés de droite et de responsables républicains.

Le discours de Bolton sur la politique du gouvernement Trump à l’égard de l’Amérique latine constituait une demande de changement de régime à Cuba et au Venezuela, ainsi qu’au Nicaragua, et une affirmation éhontée de la domination américaine sur cet hémisphère, avec des déclarations répétées concernant un comportement que Washington ne « tolérerait » pas de la part des pays situés au sud de la frontière américaine.

À peine cinq jours avant les élections américaines de mi-mandat, le discours faisait indéniablement partie des efforts de l’administration Trump pour créer sa base électorale, qui comprend en Floride des organisations d’exilés cubains installés à Miami depuis la révolution de 1959 qui renversa la dictature de Fulgencio Batista soutenue par les États-Unis.

Alors que la rhétorique fanfaronne de Bolton visait sans aucun doute à donner à son auditoire réactionnaire ce qu’il avait envie d’entendre, elle fournissait également une expression authentique de la politique de plus en plus agressive et militariste de Washington à l’égard de l’Amérique latine.

Il a qualifié Cuba, le Venezuela et le Nicaragua de « Troïka de la tyrannie », une imitation délibérée du discours de George W. Bush sur « l’axe du mal » utilisé lors du déclenchement des guerres des États-Unis au Moyen-Orient dont on ne voit toujours pas la fin.

Il a poursuivi en déclarant que « ce triangle de terreur est la cause d’immenses souffrances humaines, l’impulsion d’une énorme instabilité régionale et la genèse d’un berceau sordide du communisme dans l’hémisphère occidental. »

Il a juré que la soi-disant troïka avait « rencontré un adversaire à sa taille » dans l’administration Trump, qui « n’apaiserait plus les dictateurs et les despotes près de nos côtes ». Il a juré qu’ils « rencontreraient leur fin », que « leur minute de vérité les attends » et que Washington attendait avec impatience « de regarder tomber chaque coin du triangle ».

Bolton a appelé le reste de l’hémisphère à « s’inspirer du nord, à compter sur notre drapeau » pour son inspiration en présentant les États-Unis comme le défenseur des « droits de l’Homme » et de l’« État de droit ».

L’absurdité de cette prétention a été mise en évidence par un discours prononcé par Trump à peine quelques heures après le discours de Bolton, dans lequel le président américain avait juré de violer le droit américain et le droit international en imposant un refus d’asile généralisé à l’encontre de réfugiés d’Amérique centrale et en menaçant d’ordonner aux forces américaines d’abattre les hommes, femmes et enfants immigrés à la frontière américano-mexicaine.

La plus importante des nouvelles sanctions annoncées dans le discours de Bolton était une mesure visant à entraver les exportations d’or du Venezuela, qui sont devenues une source importante de devises pour l’économie du pays. Les autorités américaines affirment que le Venezuela a exporté environ 20 tonnes d’or vers la Turquie, un allié dans le cadre de l’OTAN avec lequel Washington est de plus en plus en conflit. Caracas et le gouvernement chinois ont récemment signé un accord pour développer ce que le gouvernement vénézuélien a qualifié d’alliance stratégique pour développer le secteur minier de l’or dans le pays.

L’annonce des sanctions sur l’or affirme qu’en évitant les autres sanctions américaines visant à étrangler l’économie vénézuélienne, le commerce d’or du pays implique des « pratiques trompeuses » et une « corruption ». Il est remarquable que l’annonce ajoute que la mesure peut être étendue à tout autre secteur de l’économie sur la même base, ouvrant ainsi la porte à la mise en œuvre rapide d’un embargo américain sur le pétrole vénézuélien, qui représente environ 98 % des recettes du pays à l’exportation.

Une nouvelle série de sanctions contre Cuba visant une vingtaine d’entités économiques prétendument liées à l’armée, a également été annoncée. Cela s’ajoute aux quelque 180 entités cubaines visées par l’administration Trump l’année dernière.

Bolton a prononcé son discours le jour même où l’Assemblée générale des Nations Unies a condamné le blocus économique américain imposé depuis 58 ans contre Cuba, 189 pays ayant voté pour la résolution et deux seulement – les États-Unis et Israël – ayant voté contre.

Dans une séance de questions-réponses après le discours, Bolton a indiqué que le gouvernement Trump envisageait d’appliquer une section de la loi Helms-Burton de 1996 qui vise Cuba, cela permettrait aux exilés cubains aux États-Unis d’intenter des poursuites devant les tribunaux fédéraux contre les entreprises qui font des affaires impliquant des propriétés expropriées à la suite de la révolution de 1959. La mesure est systématiquement suspendue depuis plus de deux décennies en raison de sa portée extraterritoriale.

Dans le cadre de sa politique de « l’Amérique d’abord » de guerre commerciale mondiale, il semble que la Maison blanche de Trump pourrait rompre avec cette pratique, entraînant un conflit direct entre Washington et ses principaux partenaires commerciaux, dont le Canada et l’Union européenne, qui ont tous deux de vastes investissements à Cuba.

Bien qu’aucune nouvelle sanction n’ait été annoncée contre le Nicaragua, Bolton a avancé le même type d’accusations et de demandes de changement de régime formulées à l’encontre de Cuba et du Venezuela, promettant que le gouvernement du président Daniel Ortega « sentira tout le poids du puissant régime de sanctions américain » avec des mesures à venir. « Dans un avenir très proche ». Jusqu’à présent, Washington a fait preuve d’une certaine ambivalence à l’égard du gouvernement du dirigeant sandiniste, qui est revenu au pouvoir en 2007 sur la base d’un programme économique axé sur les intérêts du capital nicaraguayen et étranger.

Au milieu de toutes les dénonciations et menaces, Bolton a évoqué un point positif supposé sur le continent américain : l’élection au Brésil du mois dernier de l’ancien capitaine de l’armée fasciste, Jair Bolsonaro, qui a célébré l’ancienne dictature militaire du pays et son régime de torture et a menacé que ses adversaires politiques auraient à choisir entre la prison et l’exil.

Bolsonaro a été décrit par Bolton comme un « dirigeant dont je partage les idées », dont l’élection était l’un des « signes positifs pour l’avenir de la région » et qui démontrait « un engagement régional croissant envers les principes du libre marché et d’une gouvernance ouverte, transparente et responsable ».

Parmi les attraits de Bolsonaro pour l’administration américaine – mis à part l’affinité qui existe entre les vues fascistes de Trump et le président élu du Brésil – il y a le fait qu’il jure de poursuivre une politique alignée sur celle de Washington et contre l’influence de la Chine dans l’hémisphère. Au cours de la campagne électorale brésilienne, il a dénoncé Pékin pour avoir tenté d’« acheter le Brésil » et a même effectué un voyage provocateur à Taïwan en février dernier, dans un affront à la politique de la « Chine unique » reconnue par le Brésil depuis les années 1970.

Derrière toute la rhétorique creuse sur les « droits de l’homme » et le refus de tolérer les « despotes », la politique américaine en Amérique latine est de plus en plus guidée par son conflit stratégique avec la Chine, dont l’influence n’a cessé de grandir dans une région longtemps considérée par l’impérialisme américain comme son « arrière-cour ». Une fois de plus, les responsables américains invoquent la doctrine Monroe et le « droit » supposé de Washington d’intervenir pour empêcher les pouvoirs « extérieurs » de braconner dans des pays qu’il considère comme des semi-colonies.

En septembre, le gouvernement Trump a rappelé ses ambassadeurs d’El Salvador, de la République dominicaine et du Panama et menacé de couper toute aide à cause de la décision des gouvernements de ces pays de rompre avec Taïwan qui avait tissé des liens avec les précédentes dictatures anticommunistes, et à établir des relations avec Beijing.

Malgré tout, alors que Bolton prononçait son discours à Miami, les présidents d’El Salvador et de la République dominicaine étaient tous deux à Beijing pour rencontrer le président Xi et d’autres hauts responsables, quand la Chine et le Panama ont annoncé le même jour que la ville de Panama accueillerait l’année prochaine le Sommet des entreprises sino-latino-américaines dans les Caraïbes qui se consacrerait à la promotion de la coopération économique et commerciale entre les deux régions. Dans la mesure où l’influence du commerce et des investissements chinois défie celle des États-Unis, Washington réagira par des provocations et un militarisme croissants.

Dans le discours de Bolton, il convient de noter ses dénonciations répétées du « communisme » et du « socialisme » et son insistance sur le fait que la catastrophe économique et sociale au Venezuela – un pays où le capital financier n’a fait que renforcer son emprise sur l’économie au cours des 20 dernières années et où le gouvernement est largement dirigé par l’armée – est un exemple de socialisme « mis en œuvre effectivement ».

Sous-jacente à cette rhétorique réactionnaire est la crainte au sein de la classe dirigeante américaine que les conditions désespérées créées par la crise du capitalisme ne suscite un nouveau défi révolutionnaire de la part de la classe ouvrière latino-américaine.

Bill Van Auken

(Article paru en anglais le 3 novembre 2018)

»» https://www.wsws.org/fr/articles/2018/11/05/vene-n05.html
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