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Quota-quota par-ci, quota-quota par-là … le disque est un peu rayé.

Partageux comme pas deux, je cède à l’occasion ces colonnes à d’autres râleurs. Aujourd’hui, c’est Anatole Bernard qui me remplace dans un long billet (on se croirait chez Frédéric Taddeï, dont il parle d’ailleurs).

Théophraste R.


L’idée même des quotas me donne la nausée, sans parler de la laïcité positive. Mais malheureusement c’est un fait, les esprits portent actuellement l’empreinte du sarkozisme qui s’est distingué très tôt par un penchant pour les quotas ethniques qui lutteraient soi-disant contre le racisme, au point de troubler les consciences et de culpabiliser le peuple. Il n’échappera à personne que cette pratique entraîne une discrimination envers ceux qui ne bénéficient pas de ces mesures. Alors, l’engrenage s’emballe et les gestes de délation se multiplient à tel point qu’il n’est pas inutile de se demander si, lorsqu’on parle à une personne, on ne parle pas tout simplement à un magnétophone ; la conversation ordinaire, le plus vieux métier de l’homme est en péril, la liberté d’expression et la démocratie aussi : « je ne suis pas d’accord avec vous disait Voltaire, mais je suis prêt à me battre pour que vous puissiez vous exprimer ».

Un conseil qu’il n’est pas inutile de rappeler dans une période où les occasions de parler ou d’écouter parler se raréfient : " Ce soir ou jamais", exception culturelle de notre télévision publique disparaît du programme de F3. Certains n’aimaient pas, sans doute ; et pourtant, que du bonheur, avec des accrochages, des hésitations, des délires, des raisonnements accueillis dans la durée nécessaire à leur résolution, bref toutes les formes de paroles qui mettent à l’épreuve la pensée collective et contradictoire pour éviter les écueils dogmatiques et les modes d’emploi. Rien ne vaut les frictions interminables, les désaccords et les dissensus pour nourrir la pensée. La parole délibérante fonde la démocratie.

C’est vrai non ?

En outre et désormais, non seulement les murs ont des oreilles, mais la société a ses petits rapporteurs, avides de gloriole, pour lesquels l’accusation tient lieu de preuve, avec pour conséquence de transformer tout débat en procès d’intention.

Cependant il ne faut pas laisser retomber le soufflet de la Fédération Française de Football et profiter de cette étrange dénonciation pour élargir l’interrogation : pourquoi refuser au football ce qui est autorisé à la politique, aux médias, à Sciences Po, à certaines bibles de la fiction télévisuelle ? Y aurait-il des bons quotas et des mauvais quotas ? Ce qui serait bon pour certains ne le serait pas pour d’autres ? Je suis choqué, révolté même à la simple idée que la couleur, les origines, l’emportent sur la compétence, les connaissances, le talent, dont toute société à principalement besoin. Ne serait-il pas bon de rappeler que la France est une République laïque de citoyens dont la couleur n’est ni black, ni blanc, ni beur, mais tout simplement couleur citoyenne.

Alors, à qui profite le crime ? Qui bénéficie de cette diversion ? Pourquoi Laurent Blanc, ce bouc émissaire précisément aux compétences affirmées, à ce moment précis, alors que les enregistrements datent un peu et que la composition de l’équipe de France de ces dernières années, présente une diversité que n’ont pas la plupart des équipes nationales européennes ? Au fond, cette affaire a surtout le mérite de faire émerger l’imprécision de la double nationalité. Qui sont donc ces nouveaux Janus ? A quels saints se vouent-ils, de quels droits bénéficient-ils, de quels devoirs ont-ils la charge ? Sommes-nous en présence d’un malaise d’identité, d’un malaise de civilisation, d’un opportunisme, d’un déchirement ?

En réalité leur sentiment d’appartenance, ni d’ici ni d’ailleurs, au croisement de contradictions singulières, évolue dans un changement permanent.

Dans ce mouvement, cette inquiétude, chacun a ses raisons et il ne peut être dans mon intention de les juger, d’en contester les choix. Je pense même que je serai le premier à féliciter ceux qui seraient appeler à revêtir le maillot tunisien ou marocain ou polonais ou luxembourgeois. Cependant, je souhaite rappeler quelques pratiques de bon sens qui ont cours dans notre pays depuis longtemps et qui l’honorent.

En effet, il n’est pas rare que dans certaines institutions, des bourses soient allouées pour des études spécialisées. Des sommes qui permettent aux bénéficiaires d’accumuler du savoir et du savoir faire dans les meilleures conditions. Une manière claire pour les moins fortunés d’accéder à des capacités qu’ils mettront très rapidement au service de la société qui leur a permis de se les approprier. C’est une forme de troc par lequel, en échange de l’aide en amont, le bénéficiaire s’engage à exercer quelques années dans l’institution donatrice. Quoi de plus raisonnable et de plus partageux : je reçois des connaissances et j’accumule un travail complexe que je redistribue au service de cette institution, sinon je me libère en remboursant la somme avancée.

Pourquoi ne pas envisager une formation au football de haut niveau qui s’inspirerait de ces modèles ? Car déceler et former des jeunes gens et des jeunes filles réclame des moyens considérables mis en oeuvre par le pays formateur. Déjà , dans la vie ordinaire des clubs et des centres de formation, pour harmoniser la circulation des jeunes pousses, une réglementation prévoit que des indemnités de formation soient versées par les clubs bénéficiaires, ce qui ne va pas sans poser quelques problèmes, mais qui fonctionne. Autrement dit, les pays concernés par la double nationalité devraient être lié par des conventions où le pays bénéficiaire s’engagerait à verser des indemnités au pays formateur. Vous avez dit professionnels ? Alors, allons jusqu’au bout, faisons en sorte que la plus value soit honorée à son juste prix.

Enfin, personne n’en parle, mais qu’en pensent les joueurs de simple nationalité des pays bénéficiaires, écartés au profit des bi-nationaux ?

Anatole Bernard

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COMMENTAIRES  

11/05/2011 09:38 par Dominique

Ayant vécu plusieur années en Israel, je connais énormément de gens qui ont la double mationalité française et israélienne et un certain nombre qui ont trois nationalités, française, israélienne et étasunienne et naturellement ils jouent sur tous les tableaux. Cela ne semble gêner personne en France. Il faut dire qu’ils ne sont ni colorés ni pauvres...

Il s’agitdonc encore une fois de discriminer les non blancs comme aux USA où les mâles blancs n’épousent pas de femmes noires afro-américaines ni latinos (issues d’Amérique Latine) ce qui est le signe le plus clair du déni d’égalité qu’ils subissent et du refus de les intégrer.

Quand à ceux qui font leurs études dans un pays et en font profiter un autre pays, je viens d’apprendre que les Français allaient faire leurs études de médecine en Roumanie et que des recruteurs sillonaient les hôpitaux de ce pays pour débaucher les docteurs et infirmières pour qu’ils viennent travailler en France où les campagnes manquent de médecins....

Mais ça ne gêne personne en France...

Le pauvre entraîneur est bien le bouc émissaire de ce gouvernement pourri dont on n’a pas le droit de dire à quel autre gouvernment de triste mémoire il ressemble sans être poursuivi en justice... Ce qui montre le niveau de notre ex-démocratie et de notre ex-liberté d’expression.

11/05/2011 11:25 par macala48

Que du bon sens dans cet article !!! ...

11/05/2011 12:39 par EW

Si simplement le concept de quota est erroné, comment on fait pour la pêche ? On laisse les poissons trouver un consensus avec les pêcheurs ?

Le souci ici c’est que les quotas ne sont pas adaptés à la problématique de la situation (comme pour l’immigration en fait) et que les discussions qui ont été menées n’ont rien de "pro" en effet (comme pour l’immigration en fait) ; pourtant des compromis raisonnable peuvent être trouvés, sans discrimination aucune et sans léser personne, comme pour ce qui concerne l’immigration en fait.

12/05/2011 13:55 par dominique

Les quotas d’un côté, l’ostracisme de l’autre...

L’émission Ce soir ou jamais acccueille le plus large panel d’opinions mais apparemment pas toutes si l’on en croit cet article de Pascal Boniface sur son blog :

Quand Christophe Bourseiller, programmateur de Frédéric Taddeï, se prend les pieds dans le tapis.

04 mai 2011
Coup de fil de Christophe Bourseiller, qui me dit préparer pour l’émission « Ce soir ou jamais », un débat stratégique sur les empires. Il m’affirme avoir naturellement pensé à moi et qu’il serait ravi que je participe à l’émission. Je l’écoute, lui répond sur certains points et tout d’un coup me rend compte du mal entendu. « Désolé, je suis Pascal Boniface et non pas Gérard Challiand. » Un grand blanc s’ensuit, je sens mon interlocuteur aussi gêné que s’il venait de se rendre compte qu’il était sorti dans la rue sans avoir mis de pantalon.

En fait, depuis que Christophe Bourseiller s’occupe de la programmation de « Ce soir ou jamais » je n’ai plus jamais été invité à cette émission où j’étais convié de temps en temps. A chaque sortie de livre soit sur le football, soit sur les questions internationales, les attachés de presse ont tenté leur chance en vain. Je sais que je suis blacklisté par certains journalistes à cause de mes positions sur le Proche-Orient. Mais Frédéric Taddeï a toujours su composer des plateaux extrêmement variés et son émission est certainement l’une des plus ouvertes et contradictoires du paf.

A une responsable de communication qui lui avait demandé s’il y avait un problème à mon égard, Christophe Bourseiller avait nié. Au bout de deux ans de refus de m’inviter, je l’ai appelé et il m’a de nouveau assuré qu’il n’y avait aucune exclusive à mon encontre. N’empêche que cette déclaration n’a jamais été suivie d’aucune invitation. Il a donc une forte prévention à mon égard pour une raison que j’ignore. On comprend donc qu’il soit un peu mal à l’aise de sa confusion qui m’a beaucoup amusé.

Je ne revendique aucun droit à être invité à une émission. Chaque journaliste fait ses choix en toute indépendance. Par contre, je suis assez sensible au fait que certains me boycottent uniquement parce qu’il m’est arrivé de porter des critiques à l’égard du gouvernement israélien. On n’imagine pas que quelqu’un puisse être systématiquement écarté parce qu’il aurait critiqué les mouvements palestiniens. Autant je peux comprendre que quelqu’un qui pense que je ne sais pas expliquer les situations, que je m’exprime mal, que je n’ai pas une vision claire des choses, ne m’invite pas. Chacun est libre de me trouver pertinent ou non. Je comprends parfaitement que les radios communautaires ne se précipitent pas pour m’inviter, puisqu’elles ont parmi leurs priorités éditoriales la défense du gouvernement israélien. Que des animateurs, pour les mêmes raisons, sur le service public refusent de me convier pour ce motif est beaucoup plus gênant.

J’avais beaucoup plus de chance d’être sélectionné en équipe de France que d’être invité par Alain Finkielkraut sur son émission de France Culture. Je pourrais multiplier les exemples.

L’an dernier, lors de la crise entre les deux Corées, la responsable communication de l’Iris me dit que j’ai une invitation pour l’émission « Revu et corrigé » de Paul Amar. Il faut être présent en fin d’après-midi à France télévision le samedi. Cela ne m’arrange guère mais avec un taxi je calcule que je peux être rentré à temps pour le dîner prévu avec des amis. J’accepte d’autant plus que je me rappelle avoir été sollicité pour cette émission, pour être au final déprogrammé, pour des raisons que je crois deviner. Je dis donc à la responsable de la communication que j’accepte en étant à peu près certain d’être décommandé. Pari gagné ! Effectivement peu après la journaliste la rappelle en lui disant qu’ils ont changé d’approche et qu’ils ne vont pas aborder la question de la Corée lors de l’émission. Évidemment, cette question a été abordée, mais avec un autre invité. Une fois encore Paul Amar a mis son veto sur ma participation. Même pour parler de la Corée du Nord il faut avoir une position à ses yeux correcte sur Israël. Ceux qui préparent l’émission pensaient que j’avais des choses pertinentes à dire sur le sujet, mais il a mis son veto une fois de plus pour des raisons très contestables.

Tout ceci est assez amusant pour une émission qui se veut une analyse critique des médias. Le critère de choix des invités de Paul Amar pourrait être un vrai sujet pour une émission de critique des médias.

Pascal Boniface

Note du Clan des Vénitiens : M. Blanrue n’a jamais été invité dans cette émission, ce qui ne semble pas scandaliser M. Boniface. Rappelons que M. Christophe Bourseiller, de son vrai nom Gintzburger-Kinsbourg, a, durant 16 ans, été franc-maçon (tout d’abord à la Grande loge nationale française) et s’en est ouvert dans Un Maçon franc (Éditions Alphée, 2010). Dans ses actuelles fonctions, on lui reconnaît un charmant petit défaut : grand fan des livres reçus en service de presse, il a la mauvaise habitude de ne guère les partager avec ses collègues. Maniaque de son étagère à livres, ce petit génie de la connaissance et des fiches ne consent que rarement à déjeuner avec son équipe. A part ça, il est gai comme un pinson et, en général, seconde assez bien Marc-Édouard Nabe lorsqu’il s’agit de conseiller Frédéric Taddéi.

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