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Ana Belén Montés : Pour bien commencer l’année.

L’année 2015 est à marquer d’une pierre blanche pour avoir été celle qui aura donné un élan à la connaissance de l’histoire inhumaine d’Ana Belén Montés.

Deux livres ont publié son histoire. En mars 2015, celui d’Hernando Calvo Ospina « Latines, belles et rebelles », et en avril 2015 celui de Patrick Pesnot (Monsieur X) « Le grand livre des espions ». Son histoire a aussi été publiée dans des revues d’amis de Cuba.

En cette année 2015, un comité « pour un traitement humain d’Ana Belén Montés » est né dans la société Cubaine. De tels comités ont aussi été crées à Porto Rico, en Italie, en Suisse, en Espagne et sont en cours de création dans d’autres pays. En France nous en sommes aux balbutiements. En attendant, Jacqueline Roussie et Maurice Lecomte assurons la liaison en France, et relayons les actions en faveur d’Ana. Par sa mère, Ana a appris le mouvement de solidarité naissant et en a été bouleversée.

Au delà de la cause d’Ana Belén Montés, ne perdons pas de vue que c’est son positionnement intimement articulé avec la défense des principes fondateurs de la Charte de l’ONU qui l’a amenée en cellule d’isolement. En soutenant sa cause, ce sont ces principes que nous appuyons. Ils sont la boussole du mouvement internationaliste pour la paix dont nous avons tant besoin, notamment nous, pays colonisateurs ou néo colonisateurs. La France a été un des pays fondateurs de l’ONU et doit s’en montrer digne.

Voilà, la liaison est toute trouvée pour la prochaine action, sachant qu’il en faudra bien d’autres et sur le long terme pour que les choses bougent.

Le 28 février prochain, Ana « fêtera » ses 59 ans. En réalité un bien triste anniversaire pour elle qui vit cloitrée dans sa cellule. Alors ce serait bien qu’à cette occasion nous soyons nombreux à lui envoyer une petite carte. Ne nous faisons pas d’illusion, elle ne la recevra certainement pas, mais quelquefois un gardien plus humain peut faire une petite entorse au règlement. Même si elle ne reçoit aucune de nos cartes, l’administration pénitentiaire verra elle, qu’Ana commence à être connue dans le monde. Avec le précédent des Cinq, cela peut peser, et le Président Obama dispose d’un éventail d’initiatives possibles ne serait-ce que s’en tenir à la stricte levée de l’isolement absolu. Ce ne serait pas une démarche bien coûteuse pour lui et ne constituerait en fait qu’une simple mise en adéquation avec un respect minimal des droits de l’homme, mais pour Ana Belén Montés ce serait l’ouverture d’une fenêtre sur le monde.

L’adresse :

Ana Belén Montés N° 25037-016
FMC (Federal Medical Center)
P.O. Box 27137
Fort Worth, TX 76127
ETATS-UNIS

Il faut lui écrire un mot gentil et court sur le thème de son anniversaire, mais anodin qui ne se retourne pas contre elle dans cette prison de sinistre réputation.

Il faut timbrer au tarif « monde » depuis la France.

Pour que la carte arrive à temps, il faut l’envoyer vers la fin janvier. Pour que nous ayons une idée de l’impact de ce que nous faisons et pouvons faire, informez nous de l’envoi de votre carte par un simple courriel à l’adresse : kakine.roussie@orange.fr. En décembre la lettre envoyée à Obama l’a été au nom de 261 personnes.

Voilà ce que nous voulions vous dire.

Comme c’est le mois des étrennes, voici la chanson de David Robics et sa traduction. Nous joignons aussi l’histoire d’Ana mise à jour.

Jacqueline Roussie et Maurice Lecomte.

Chanson pour Ana Belen Montes :
https://soundcloud.com/davidrovics/song-for-ana-belen-montes

Sa traduction :

Le juge a dit : vingt-cinq ans
Puis il a tapé avec son marteau et opiné du chef
Vous avez mal agi, vous avez trahi notre confiance
Maintenant, nous vous tenons et vous avez perdu
A présent vous passerez des décennies derrière des barreaux d’acier ;
Vous pensiez pouvoir vous jouer de nous, mais là c’est du vrai
Vous donniez des secrets à l’ennemi
Vous allez maintenant vivre en prison sur la terre de la liberté
Mais ici sous ce soleil cubain
Je voudrais juste vous remercier pour tout ce que vous avez fait
Aujourd’hui je suis déchiré
Ana Belen Montes, vous êtes un espion comme je les aime
J’ai obéi à ma conscience plutôt qu’à la loi, avez-vous dit lors de votre procès secret
Vous n’avez rien gagné pour votre travail, votre fichier déclassifié le prouve
Des plans d’assassins des Etats-Unis vous avez averti les Cubains
Et fait d’autres bonnes actions dont ils ne nous parleront jamais
Mais ici sous ce soleil cubain
Je voudrais juste vous remercier pour tout ce que vous avez fait
Aujourd’hui je suis déchiré
Ana Belen Montes, vous êtes un espion comme je les aime
Haut placée dans les rangs du ministère de la défense, vous avez servi le bien commun
Travaillant seule, nuit et jour, vous n’avez fait que ce vous deviez
De tous les grands que j’ai connus, il y en a peu qui soient plus grands
Qu’une femme qui obéit à une loi supérieure, et que le juge appelle traître
Mais ici sous ce soleil cubain
Je voudrais juste vous remercier pour tout ce que vous avez fait
Aujourd’hui je suis déchiré
Ana Belen Montes, vous êtes un espion comme je les aime

David Rovics


Ana Belén Montés

Ana Belén Montés, née en 1957, est fille d’un couple de portoricains. C’est l’aînée d’une famille de quatre enfants. Son père était médecin militaire et travaillait au sein de l’armée US. Cet homme violent et autoritaire battait sa famille. Sa mère avait obtenu le divorce au bout de 16 ans de mariage. Ana avait alors 15 ans.

Après avoir obtenu une licence, puis une maîtrise en relations internationales à l’Université de Virginie, Ana est entrée à 28 ans à l’Agence de Renseignement pour la Défense du Pentagone (DIA), où elle devenait, 7 ans plus tard, analyste. Elle a eu quelques temps un emploi fictif à la représentation diplomatique à La Havane, soit disant pour « étudier » les militaires cubains. En 1998, retour dans l’Ile pour cette fois, « observer » le déroulement de la visite du Pape Jean-Paul II.

Cette femme discrète, devenue analyste de première catégorie au à la DIA, spécialiste de Cuba, avait accès à presque toute l’information sur l’Ile dont disposait la communauté du renseignement, en particulier sur les activités militaires cubaines. De par son rang, elle était membre du très secret « groupe de travail inter agences sur Cuba », qui rassemble les principaux analystes des plus hautes agences de renseignements des Etats-Unis, comme la CIA par exemple.

Elle a été arrêtée en 2001, jugée et condamnée à 25 ans de prison en 2002 pour espionnage : elle avait remis à Cuba, sans contre partie financière, l’information concernant les plans d’agression des Etats-Unis contre l’île. Elle a risqué sa vie pour défendre la petite île de Cuba de l’agression des Etats-Unis, superpuissance mondiale. Elle n’a par contre jamais nuit aux Etats-Unis ni à son peuple, ni même eu une telle intention, bien au contraire. Pourtant on lui a imputé d’avoir indirectement causé la mort d’un Béret Vert en soi-disant dévoilant un secret de polichinelle : l’existence d’une base secrète yankee au Salvador. Scott W.Carmichael à l’origine de son arrestation, a écrit qu’il n’était pas sûr de sa culpabilité à ce sujet dans son livre True Believer, publié en 2007.

Voici ce qu’a déclaré Ana Belén Montés dans son plaidoyer lors de son procès, avant l’annonce de sa sentence :

« Il existe un proverbe italien qui peut-être, décrit le mieux ce que je crois :

Le monde entier n’est qu’un seul pays. Dans ce pays mondial, le principe d’aimer son prochain comme soi même, est le guide essentiel pour des relations harmonieuses entre tous les pays.

Ce principe implique tolérance et compréhension pour la façon de se comporter envers les autres. Il implique que nous traitions les autres nations comme on aimerait être traité : avec respect et considération. C’est un principe que, malheureusement nous n’avons jamais appliqué à cuba.


Votre honneur, je suis devant vous aujourd’hui pour une activité à laquelle je me suis livrée parce que j’ai obéi à ma conscience plutôt qu’à la loi. Je crois que la politique de notre gouvernement vis-à-vis de Cuba est cruelle et injuste, profondément agressive, et je me suis sentie moralement dans l’obligation d’aider l’île à se défendre contre nos efforts de lui imposer nos valeurs et notre système politique. Nous avons fait preuve d’intolérance et de mépris à l’égard de Cuba depuis plus de 40 ans. Nous n’avons jamais respecté le droit pour Cuba de choisir sa propre voie vers ses propres idéaux d’égalité et de justice. Je ne comprends pas pourquoi nous devons continuer à dicter aux Cubains comment ils doivent choisir leurs dirigeants, qui peuvent ou ne peuvent pas être leurs dirigeants, et quelles sont les lois appropriées pour ce pays. Pourquoi ne pouvons-nous pas laisser Cuba poursuivre son propre chemin, comme le font les Etats-Unis depuis plus de deux cents ans



Ma manière de réagir à notre politique Cubaine a peut-être été moralement condamnable. Peut-être que le droit pour Cuba d’exister libre de toute pression politique ou économique ne justifie pas les informations secrètes que j’ai transmises pour l’aider à se défendre. Je peux seulement dire que j’ai fait ce qui me paraissait être juste pour réparer une grave injustice. 



Mon plus grand désir est de voir des relations amicales s’établir entre les Etats-Unis et Cuba. J’espère que mon cas contribuera d’une certaine manière à encourager notre gouvernement à abandonner sa politique hostile envers Cuba et à collaborer avec la Havane dans un esprit de tolérance, de respect mutuel, de compréhension...

 »

Ana Belén Montés a été en quelque sorte précurseur des nouvelles relations entre Cuba et les Etats-Unis et a agi en harmonie avec les principes fondateurs de la Chartre des Nations Unies..

Elle est la prisonnière 25037-016 de la prison de Carswell, une annexe du FBI de la Station Aérienne de la Marine des Etats-Unis située au Texas. Elle y est internée dans la section de psychiatrie, bien que ne présentant pas de troubles de ce type. C’est un lieu dangereux pour elle, qui pourrait avoir de graves répercussions sur son état mental.

Ana Belén Montés est sensée recouvrer la liberté en 2026, dans 11 ans. Elle a déjà accompli 14 ans de réclusion. Elle est soumise à un régime d’isolement extrême. Elle ne peut pas recevoir la visite d’amis, uniquement celles de ses parents et de sa fratrie. Son père est décédé et sa mère est impotente. Sa sœur Lucy et son frère Alberto ont tous deux des postes à responsabilité au sein du FBI, elle à Miami, et lui à Atlanta. Lucy a d’ailleurs été décorée pour sa contribution à l’arrestation des membres du réseau « Avispa » auquel appartenaient les Cinq. Ce ne sont donc pas eux qui vont lui apporter un grand réconfort ! Reste son jeune frère Juan Carlos dont nous savons seulement qu’il tient une crèmerie à Miami.

Ana est interdite de téléphone, n’a accès à aucun moyen d’information, ni journal, ni revue, ni livre. Elle n’a pas le droit de regarder la télévision et ne peut recevoir de colis. Il lui est même interdit d’avoir le moindre contact avec les autres personnes détenues.

Les autorités pénitentiaires ne donnent aucune information sur sa santé, les traitements médicaux qu’elle reçoit, ni ne justifient le fait qu’elle soit dans un centre destiné aux personnes souffrant de troubles psychiatriques.

Le régime carcéral qu’elle subit est plus sévère que celui appliqué aux dangereux criminels et n’est surtout pas conforme aux Droits de l’Homme.

Un essai a été fait de lui écrire. La lettre a été renvoyée à l’expéditeur en recommandé. Le Bureau fédéral des Prisons y précisait qu’elle ne pouvait avoir de contacts qu’avec ses parents les plus proches, étant donné qu’elle était condamnée pour espionnage.

En avril 2013, pour la première fois sa sœur Lucy a accepté de répondre aux questions d’un journaliste, en l’occurrence, Jim Popkin. Ses frères se sont opposés à tout interview.

C’est ainsi que nous avons appris qu’Ana avait voisiné successivement avec une femme ayant étranglé une femme enceinte, une ancienne infirmière ayant tué par injections 4 patientes et une admiratrice de Charles Manson ayant tenté de tuer le Président Ford. Le travail d’enquête de plus d’une décennie de la journaliste Betty Brink du Weekly, un journal local de Fort Word où est situé Carswell, nous apprend que cet hôpital-prison fédéral a succédé à un précédant fermé entre autres raisons, pour négligence médicale généralisée. C’est très exactement l’identique qui s’y est installé et perdure au vu et su de toutes les autorités en place. Rares sont les critiques, et les dénonciateurs s’exposent à le payer très chèrement. Le terme de « négligence » utilisé est un euphémisme et cette pratique tant sadique qu’assassine englobe des personnels au delà du médical, au regard de chacune des histoires sordides (nombreuses et répétées) ayant pu être connues. Sur une longue période en décennies, et c’est le cas, il est possible de dire qu’elle est structurelle.

Lucy dévoile que dans une lettre de 14 pages, Ana lui avait écrit « il ne me plait pas d’être en prison, mais il y a certaines valeurs pour lesquelles il vaut la peine d’être en prison, ou qui méritent que l’on se suicide pour ne pas passer tout ce temps en prison ».

Nous voyons à travers ces paroles qu’Ana a gardé intactes ses convictions, et lui infliger de vivre dans de telles conditions relève du sadisme et doit avoir des effets dévastateurs.

Nous devons aider cette femme courageuse. Nous devons faire connaître son histoire, et développer des campagnes pour que dans la prison où elle endure sa peine, elle puisse au moins avoir un traitement plus humain.

Jacqueline Roussie, Maurice Lecomte

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