Théâtre Majâz...
Un ami (H.C.) qui a diffusé ce texte, me signale ce beau spectacle à Paris :
A la Cartoucherie, le théâtre Majâz résout le conflit israélo-palestinien
J.-P. Thibaudat
chroniqueur
Publié le 20/12/2012 à 11h01
Les acteurs du Théâtre Majâz se préparant à être optimistes (DR)
A la Cartoucherie, le conflit israélo-palestinien trouve une résolution sur un terrain d’entente et de partage : l’imaginaire. Les négociateurs sont des spécialistes de la question : des comédiens. Ceux du Théâtre Majâz, mot qui veut dire métaphore en arabe. La plupart sont nés dans la région. Le titre du spectacle résume leur énergie et leur pouvoir de persuasion : « Les optimistes. »
De l’école Lecoq à l’enquête menée à Jaffa
Tout commence dans ce vivier qu’est l’école Jacques Lecoq à Paris. Quatre l’on fréquentée dont l’Israélien Ido Shaked et la franco-libanaise Lauren Hussein qui fondent ensemble le théâtre Majâz en 2007. Ils signent ensemble le texte et lui seul la mise en scène de « Les Optimistes ». Ils n’en sont pas à leur premier spectacle mais celui-ci prend à bras le corps leur histoire familiale et régionale (la leur et celle de la plupart de leurs acteurs) à travers une chronique qui se passe à Jaffa.
Ido et Lauren ont d’abord séjourné pendant l’été 2010 à Saint-Jean-d’Acre. Le temps de bâtir un canevas sur lequel les membres de la troupe vont improviser tout en menant parallèlement un énorme travail de documentation. Ils fouillent dans des archives, des livres d’histoire, des romans et se shootent aux poèmes de Mahmoud Darwich.
Telle une mama, Ariane Mnouchkine les a accueillis, hébergés, placés sous son aile et c’est dans le local de répétions du Théâtre du soleil que le théâtre Majâz joue « Les optimistes ».
A qui appartient la maison de Beno ?
En 1948, Jaffa, ville palestinienne, vit beaucoup de ses habitants être expulsés dans des camps de réfugiés au Liban et ailleurs. Les maisons vides étant attribuées à des familles fraîchement émigrés en Israël. C’est le cas du personnage pivot du spectacle, Beno, rescapé des camps, et de Malka son épouse.
Beno se lance à corps perdu dans sa nouvelle vie et sa nouvelle maison. Malka ne s’y fait pas. Enceinte, elle repart en Europe, en France, d’où elle vient et où sa famille juive s’est cachée pendant la guerre échappant aux camps contrairement à celle de Beno qui finira dans les chambres à gaz.
Malla et Beno ne se reverront jamais. Bien des années plus tard, le petit-fils de Malka qui n’a jamais mis les pieds en Israël, et n’a jamais vu son grand-père de son vivant, vient pour vendre la maison de Jaffa dont il a hérité. C’est à ce moment-là que le spectacle commence. Et il va moins revivre que rêver ce passé. il s’y plonge en lui tordant le coup. C’est l’idée forte de ce spectacle gonflé d’espoir. Avec ce corollaire ; toute vérité gagne à être connue. Ainsi les acteurs se posent-il cette question : à qui appartient l’âme de la maison de Jaffa ?
Une scène du spectacle « Les optimistes » (DR)
Un jour Beno reçoit une lettre des anciens habitants palestiniens de la maison. Ils demandent des nouvelles de leur logis d’autrefois dans lequel ils vivent en pensée, des orangers du verger, de leur boutique au coin de la rue. Faut-il leur dire que les orangers ont été rasés, la boutique remplacée par autre chose, les noms des rues changés ?
Beno et ses voisins et amis israéliens et palestiniens restés à Jaffa décident de n’en rien faire, de leur raconter un joli bobard, joli comme un conte oriental, de faire comme si. Bref de réinventer l’histoire sous des atours plus tolérants. Ils en viendront à fonder un journal sur le même principe. On peut devenir la suite, les murs à Jaffa ayant aussi des oreilles.
L’aile protectrice et solidaire d’Ariane Mnouchkine
Joué en français, en hébreu et arabe (sous-titrés) par une distribution bigarrée, le spectacle fait des sauts dans le temps et marque des arrêts pour lire au public un document historique oublié ou occulté. Les acteurs viennent d’Israël, de Palestine, du Maroc, d’Iran, d’Espagne et de France. Ils disent :
« Nous mettons à profit nos identités et nos doubles cultures afin de pousser le discours d’une jeune génération d’artistes engagés. A travers une recherche collective, nous nous réapproprions notre mémoire et apprivoisons celle de l’autre. »
Et ils savent traduire cela en jeu et mise en jeu, en plaisirs d’acteurs. A travers un sens de la fable, un art de la saynète que Brecht n’aurait pas renié, une façon fraternelle de s’adresser au public, une habileté à glisser du récit au dialogue et une scénographie efficace et ludique.
Mnouchkine ne les pas seulement accueillis, elle a trouvé dans le théâtre Majâz un enfant adoptif.
Infos pratiques
"Les optimistes"
Par le Théâtre Majâz
A la Cartoucherie de Vincennes, salle de répétition du Théâtre du soleil (en face du Théâtre de la tempête), jeudi, vendredi 20h30, samedi 14 heures et 20h30, dimanche 14 heures, jusqu’au 22 décembre. Tel. 01 43 74 24 08.
http://blogs.rue89.com/balagan/2012/12/20/la-cartoucherie-le-theatre-majaz-resout-le-conflit-israelo-palestinien-229204