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Brève histoire de Taïwan

L’île de Taïwan, étendue comme quatre fois la Corse, se situe en mer de Chine, à environ 180 kilomètres des côtes de la province du Fujian, distance à peu près équivalente à celle entre la métropole et l’île de Beauté.

De la préhistoire à 1895

Les premiers peuplements humains sur Taïwan vinrent naturellement du continent, et furent probablement à l’origine d’une dissémination dans le Pacifique, l’Asie du Sud-Est, la Nouvelle-Zélande et jusqu’à Madagascar.

Les nombreuses îles dans le détroit de Taïwan, notamment les îles Pescadores, furent peuplées par une population de pêcheurs hans dès le XIIIème siècle, tandis que l’île principale, sans ressources et habitée par des tribus hostiles fut peu visitée.

Au XVIème siècle, des marins portugais qui passaient au large de l’île la nommèrent « Ilha Formosa », Belle Île, devenu Formose en français.

Dans la première moitié du XVIIème siècle, la Compagnie hollandaise des Indes Orientales, après avoir essayé d’installer un comptoir sur les îles Pescadores sises dans le détroit de Taïwan et d’en avoir été chassée par l’armée des Ming, s’implanta finalement sur l’île de Taïwan. Dès lors, sous l’impulsion de cette présence étrangère, des dizaines de milliers de paysans du Fujian vinrent eux aussi y vivre. Les Hollandais régnèrent sur Taïwan jusqu’en 1661, année où il furent mis dehors par les troupes de l’empereur Yongli des Ming du Sud.

Après quelques tentatives infructueuses des Hollandais pour reprendre l’île, la dynastie Qing l’annexa et en fit une préfecture du Fujian. Le processus de sinisation des populations primitives de l’île s’amorça, non sans réactions. En effet, l’île fut longtemps secouée par des révoltes et des guerres tribales, à tel point qu’un dicton chinois disait : « tous les trois ans un soulèvement, tous les cinq ans une rébellion ». Taïwan devint la vingtième province chinoise, se modernisa lentement, notamment par la construction de la première ligne ferroviaire chinoise.

Même la France, lors de la guerre sino-française qui dura moins d’une année entre 1884 et 1885, essaya de mettre la main sur l’île. Sans succès.

De 1895 à 1949

Dix ans plus tard, en 1895, au terme de la première guerre sino-japonaise, et suite à la défaite de la Chine, Taïwan, ses îles attenantes et les Pescadores sont cédées à l’empire du Japon dans le cadre du traité de Shimonoseki.

Durant les cinquante ans qui suivent, Taïwan est exploitée au profit du développement japonais et sert de base à son impérialisme dans la région. Les Hans et les populations aborigènes habitant sur l’île sont classés citoyens de seconde et de troisième zones. Les portes de l’éducation et des promotions leur sont fermées, laissant peu de natifs capables d’assumer des rôles de direction et de gestion des décennies plus tard, même après que le Japon a quitté l’île. Aux alentours de 1935, les Japonais démarrent la japonisation de l’île afin de la lier plus fermement à l’Empire. Les Taïwanais apprennent à se considérer comme japonais, la culture et la religion taïwanaises sont proscrites, et les citoyens encouragés à adopter des noms de famille japonais. En 1938, plus de 300 000 colons japonais résident à Taïwan.

En 1912, sur le continent, naît la République de Chine, mettant fin à plus de deux millénaires de domination impériale.

En 1921, le Parti Communiste Chinois est fondé lors d’une réunion secrète entre 13 délégués régionaux, parmi lesquels Chen Duxiu, Li Dazhao et Mao Zedong. Détail amusant : la réunion, ayant lieu dans la concession française de Shanghai, est interrompue... par la police française.

En 1925, Sun Ya-Tsen, chef du Kuomintang, le parti nationaliste jusque-là allié des Communistes, meurt. Son successeur, Tchang Kaï-Chek, se retourne alors contre eux marquant ainsi le début de la guerre civile chinoise.

En 1928, la majeure partie du territoire chinois est sous le contrôle du Kuomintang.

En 1934, les troupes de Tchang Kaï-Chek balaient les Communistes qui entament leur retraite, la Longue Marche, qui mènera les troupes Communistes de la province du Guizhou à celle du Shaanxi, sur près de 12000 kilomètres, qui coûtera la vie à 100 000 hommes de l’Armée de Libération Populaire et au cours de laquelle Mao s’affirmera comme chef incontesté.

En 1937, six ans près leur invasion de la Mandchourie, les troupes japonaises entrent à Pékin, établissant de facto une trêve dans la guerre civile. Les troupes nationalistes de Tchang kaï-Chek et celles de l’Armée de Libération Populaire forment alors une alliance précaire dans la lutte contre l’envahisseur.

En 1943 a lieu la Conférence du Caire, réunissant Franklin Roosevelt, Winston Churchill et Tchang Kaï-Chek. Elle porte sur la nécessité de défaire l’empire japonais et contient notamment la clause de restitution des territoires chinois occupés par le Japon, parmi lesquels l’île de Taïwan.

Dès la fin du conflit mondial et la défaite du Japon, la guerre civile chinoise reprend, malgré les efforts de conciliation des puissances alliées. Et en dépit du soutien explicite financier et militaire des Américains dont bénéficie Tchang Kaï-Chek, elle s’achève en 1949 par la victoire de l’ALP et la proclamation de la République Populaire de Chine.

Après l’échec de négociations, le gouvernement nationaliste se replie sur l’île de Taïwan, accompagné d’un exode massif de population (en quelques jours, la population de Taïwan s’accroît d’environ deux millions de personnes). Taipei devient la capitale de la République de Chine.

De 1949 à aujourd’hui

En 1949, l’île de Taïwan est officiellement restituée à la République Populaire de Chine... mais reste sous tutelle des États-Unis, nouvelle puissance dominante de la région.

Dès lors, le Kuomintang, au mépris des demandes du continent, dirige Taïwan d’une main de fer, établit une loi martiale qui durera jusqu’en 1987. Celle-ci marque le début de la Terreur Blanche. Pendant 38 ans, 140 000 personnes, principalement des intellectuels ou des membres de l’élite sociale, sont emprisonnés en raison de leur sympathie pour le Parti communiste chinois ou de leur résistance au gouvernement nationaliste de la République de Chine, et pas moins de 20 000 personnes selon les estimations, sont exécutées.

Durant tout ce temps et jusqu’au tournant des années 1990, le gouvernement de Taïwan se revendique comme seul légitime pouvoir sur l’entièreté du territoire chinois comprenant l’île de Taïwan et la Chine continentale. Je répète : durant toutes ces années, Taïwan revendique la Chine. Pas moins. Les enfants taïwanais grandissent et sont éduqués dans l’idée qu’ils sont Chinois, que la plus haute montagne de leur pays, c’est l’Everest et que le plus long fleuve, c’est le Yangtsé.

La période post-martiale voit un changement idéologique soudain, un tournant à 180 degrés, et ce bien que le Kuomintang soit encore au pouvoir. Sous l’impulsion de pressions extérieures devant l’émergence économique de la République Populaire de Chine, l’île passe des revendications comme seule et unique vraie représentante de la nation et du peuple chinois à une doctrine séparatiste, rejetant l’autorité et même la parenté avec le continent, déclarant de facto son statut de nation indépendante, n’ayant rien à voir historiquement, culturellement et ethniquement avec le peuple chinois qui se trouve de l’autre côté du détroit. Bien que les Nations-Unies ne suivent pas vraiment, refusant à Taïwan le siège qu’elle réclame, la majeure partie des pays occidentaux considèrent l’île comme une nation à part entière.

Depuis, les livres d’histoire se réécrivent à Taïwan mais aussi dans les écoles occidentales. Sur l’île, les jeunes se disent taïwanais avant tout et la Chine devient un pays hostile, dangereux. Le plus haut sommet, c’est la Montagne de Jade dorénavant, le Yu Shan, vaincu par un Japonais puis par un Occidental. Le plus grand fleuve est désormais une rivière, la Tamsui, qui fait à peine 160 kilomètres de long.

Le Parti Démocrate Progressiste (DPP), succédant au Kuomintang, a planté le dernier le clou sur le cercueil d’une réunification pacifique entre la Chine et Taïwan, se rapprochant ostensiblement du Japon, derrière lequel se cachent, comme un troupeau d’éléphants derrière une tige de bambou, les États-Unis d’Amérique, le seul pays au monde à avoir utilisé la bombe atomique, qui plus est deux fois de suite et uniquement au milieu de populations civiles japonaises. Et Taïwan, qui se croit aujourd’hui plus japonaise que chinoise, est persuadée d’être indépendante, sans voir à son cou la laisse que tient déjà Washington dont le rêve est d’installer des ogives nucléaires à quelques encablures du littoral chinois.

L’ONU, toujours courageuse, continue à tenir un double discours consistant à ne pas donner à Taïwan le statut de pays (bien que tous nos dictionnaires, encyclopédies, médias le fassent) afin de ne pas froisser le dragon tout en défendant le droit à l’autodétermination du peuple taïwanais pour plaire à l’aigle. Cette même autodétermination qui, au moment de lui rendre Taïwan, fut refusée au peuple chinois au terme de sa guerre avec le Japon.

Le 11 juillet 2022, trois jours après la mort de Shinzo Abe, ancien premier ministre japonais et fervent soutien du nationalisme anti-chinois, la présidente de Taïwan Tsai Ing Wen a fait mettre les drapeaux en berne. Le Kuomintang (KMT) a tout de même protesté contre ce geste, le Japon ne s’étant jamais excusé des crimes qu’il a commis en Chine.

COMMENTAIRES  

06/08/2022 17:09 par Xiao Pignouf

Merci les amis... en dépit du fait que vous m’avez amputé de mon fun fact, ce dont je vais avoir du mal à me remettre...

07/08/2022 08:06 par Bernard Gensane

L’équipe du LGS préfère les diverses expressions françaises qui rendent compte de ce qui, en anglais, est, sémantiquement parlant, assez pauvre. Merci et bravo pour ton article.

06/08/2022 18:30 par loulou la pétroleuse

Merci Xiao pour ce remarquable résumé de l’histoire de la Chine. Tu devrais l’envoyer à nos médias ignares, sans trop d’illusion...

J’ai lu il y a quelques jours un article qui décrivait un affrontement entre manifestants pro-indépendance et manifestants pro-Chine à Taîwan pendant la visite de Pelosi - ce qui m’a appris que ces derniers existent aussi, bien qu’aucun de nos média n’y fasse allusion. Malheureusement je n’ai pas noté l’adresse de cet article et je ne l’ai pas retrouvé.

J’ai trouvé par contre un article fort intéressant de la BBC, à l’adresse que je m’empresse de vous communiquer : https://www.bbc.com/afrique/monde-62408539
Et dans cet article j’ai copié la citation suivante :

Une Enquête de juin 2022 a révélé que seuls 5,2 % des Taïwanais étaient favorables à l’indépendance dès que possible, tandis que 1,3 % étaient en faveur d’une unification avec la Chine continentale dès que possible. Les autres sont favorables à une forme de maintien du statu quo, le groupe le plus important souhaitant le maintenir indéfiniment sans avancer vers l’indépendance ou l’unification.

06/08/2022 20:17 par françois gerard

merci pour ces précisions.

06/08/2022 20:35 par françois gerard

J’ai oublié de dire que lors de mon voyage en chine, j’ai eu l’honneur et la chance de rencontrer un des derniers survivants ayant participé à la longue marche avec Mao. J’ai bu le thé avec lui , Il vivait dans une petite maison à pékin et il m’a demandé si je connaissais Freud. Quelle surprise pour moi, de voir un très vieux chinois me poser cette question, et de voir aussi sa femme, ravie de ma surprise. C’était dans l’ année juste après les évènements de la place Tienanmen. On sentait le développement de la chine prendre de l’ampleur, il y avait des grues partout, et surtout à l’aéroport de Pékin qui faisait à cette époque encore un peu désuet, mais depuis, je suppose qu’il doit faire ultra moderne .

07/08/2022 05:42 par pierreauguste

Laissons les "Blast" entonner leur médiocrité récurrente ,malsaine et dangereuse et délectons nous ici ....

07/08/2022 09:18 par Xiao Pignouf

Bernard,

Il n’y a vraiment pas de mal, je suis taquin. Et comme ce n’est pas le sujet ici, je me suis permis de te faire une réponse argumentée sous un article dont c’est le sujet, un des derniers de Georges Gastaud sur la francophonie.

Merci de me publier et merci pour tes encouragements.

07/08/2022 10:08 par CN46400

Article bienvenu, mais il manque une relation de la venue, en 72, de Nixon à Pékin, au cours de laquelle fût entérinée le remplacement de Formose par Pékin à l’ONU, et d’autres curiosités politiques comme le soutien, ultérieur, des kmers "rouges" aussi bien par les USA que par Mao.....

07/08/2022 16:53 par Serge LEFORT

Merci pour cet article, mais l’auteur oublie de dire que Taïwan a été sous l’administration de la Chine depuis 230.

07/08/2022 17:25 par Xiao Pignouf

@Serge Lefort

Bonjour,

Outre le fait que j’ai voulu aller à l’essentiel, (comment résumer 3000 ans d’histoire en un article de quelques lignes ?), il y a deux raisons pour lesquelles, en dehors de ma mention à la préhistoire visant à dire que le peuplement de Taïwan ne pouvait venir que de Chine, je n’ai pas voulu remonter aussi loin.

La première, ce sont tout bonnement mes connaissances limitées sur la question de l’histoire de Taïwan et de la Chine en général. J’en connais probablement un peu plus que la moyenne, mais ça reste succinct, mine de rien. Et souvent, écrire un article pour le GS est un double processus d’apprentissage en temps réel et de partage sous une forme aussi claire que possible.

La deuxième, c’est que l’époque que vous mentionnez est une époque où la Chine telle que nous la connaissons aujourd’hui n’existait pas encore, incomplète, divisée, réunifiée puis redivisée, des Royaumes en concurrence, des dynasties qui se chevauchaient. Un peu comme si nous devions aujourd’hui débattre du bien-fondé de l’appartenance à la France de certains territoires espagnols ou anglais parce qu’à l’époque ils étaient partie intégrante du territoire d’un pays qui n’existe plus tel quel aujourd’hui.

L’appartenance de Taïwan ne peut se justifier que dans la convergence d’évènements qui se sont déroulés sur les quelques siècles qui ont précédé l’époque contemporaine, comme une succession de causes et d’effets.

07/08/2022 17:44 par Serge LEFORT

Pour compléter l’article la BBC, voici l’opinion des Taïwanais sur les promesses de Nancy Pelosi : https://www-globaltimes-cn.translate.goog/page/202208/1272298.shtml?_x_tr_sl=auto&_x_tr_tl=fr&_x_tr_hl=fr&_x_tr_pto=wapp

Il faut aussi rappeler que le candidat Chang Ya-chung, partisan de l’unification avec la Chine continentale, a obtenu 32,2% des suffrages lors des derniers élections du KMT en octobre 2021.
Lire : https://chineenquestion.wordpress.com/actualites/revue-de-presse/revue-presse-2021/#ChineTaiwan

Pour tenir compte de l’histoire, il conviendrait de dire "la région taïwanaise de la Chine" au lieu de Taïwan. Ce qui va à l’encontre des raccourcis journalistiques y compris dans les médias alternatifs.
Lire : http://french.peopledaily.com.cn/Chine/n3/2022/0803/c31354-10130361.html

07/08/2022 22:20 par Xiao Pignouf

@CN46400

D’ac pour le remplacement de la ROC par la RPC à l’ONU mais ça :

et d’autres curiosités politiques comme le soutien, ultérieur, des kmers "rouges" aussi bien par les USA que par Mao

Je vois pas bien le rapport avec Taïwan.

07/08/2022 23:08 par Geb

Merci Xiao pour ton article documenté et clair..

Au moins après on sait de quoi on parle sur un sujet que peu, (Dont moi-même), maîtrisaient jusqu’ici.

07/08/2022 23:10 par guy

un bel exposé digne d’un bon élève de 4ème ....

08/08/2022 04:48 par Danael

@Guy
Je doute que les élèves de 4e année puissent avoir accès à un exposé aussi concis et clair, hélas ! Mais vous vouliez peut-être ne mettre que votre suffisance dans votre commentaire. C’est bien pauvre tout ça.

08/08/2022 07:03 par babelouest

Dans sa réponse mielleuse-fielleuse, guy a omis de préciser qu’il s’agissait d’un élève de la Quatrième Dynastie, époque où lui était déjà décédé depuis fort longtemps..... Merci Ciao Pignouf pour ce précieux résumé !
.
Je me demande ce que deviendra à l’avenir le frère de mon gendre, installé à Taipei depuis pas mal d’années maintenant. Se dépatouiller avec le mandarin ancien (langue officielle de Taïwan) a déjà dû être un cap difficile !

08/08/2022 10:45 par Xiao Pignouf

Merci à tout le monde pour vos encouragements.

Même à toi, guy, car tu as en quelque sorte raison : ce sont des choses, au risque que ça te donne de l’urticaire, que des enfants de quatrième devraient savoir. Mon but n’était évidemment pas de faire une histoire fouillée et approfondie de Taïwan, sinon je n’aurais pas appelé ça « Brève histoire de Taïwan ».

Juste le recensement d’évènements et de faits liés entre eux qui démontrent aussi objectivement que possible la légitimité des revendications de la Chine sur Taïwan.

@Serge Lefort

Merci pour vos ajouts.

il conviendrait de dire "la région taïwanaise de la Chine" au lieu de Taïwan

Euh, sauf à ne pas comprendre le sens de votre propos, c’est la même chose, quoique « province » au lieu de « région » serait plus juste, un peu comme si vous disiez « province shanghaienne » eu lieu de « Shanghai » ou « province tibétaine » au lieu de « Tibet ». Le français n’a pas encore adjectivé tous les noms des provinces chinoises. Parfois je pense que la traduction devrait être de rigueur, du genre Pékin, Canton, Macao... ça éviterait d’écouter les journalistes ou les officiels français massacrer les noms chinois. D’autant que quand vous lisez un document ou un article sur lequel il est fait mention de ce type d’adjectif, sachez que dans sa version chinoise ce type d’adjectif n’existe pas tel quel en chinois, mais uniquement sous une forme équivalente à « de Taïwan ».

En effet, un des défis du PCC dans le cas d’une éventuelle réunification, c’est la réintégration dans la RPC de l’ennemi de toujours, le KMT, même si celui-ci est aujourd’hui pro-chinois et bien que ce soit sous la doctrine « Un pays, deux systèmes ». Les retournements de veste sont courants.

La première fois en 60 ans que des membres du KMT se sont rendus en visite officielle sur le continent, c’est en 2005. Et ils l’ont fait au risque d’être poursuivis par le gouvernement taïwanais (DPP) de l’époque pour avoir violé les lois de la République de Chine, elles-mêmes fondés sur le droit civil japonais et allemand, interdisant notamment au citoyens taïwanais toute collaboration avec le PCC.

08/08/2022 13:33 par Petronilla Petronillum

C’est quand meme intéressant de voir que les partisans de la réunification font parti du... Guo Ming Tang, par lequel tout a commencé, dans sa fuite à Taiwan, et par la création de la République de Chine en 1950.

Quant au chinois ancien pratiqué à Taiwan (le chinois classique), c’est quand meme un vrai délice, par rapport au chinois moderne en cours en Chine continentale, plus simple certes, mais plutot sans saveur. Les sinophiles, meme avec une connaissance un peu sommaire de la langue (ou ancienne, comme moi), ne pourront jamais lire un poème des Tang en chinois moderne !
(pardon pour les accents, c’est mon clavier)

08/08/2022 14:25 par CN46400

@Xiao Pinouf
C’est vrai que la rencontre Nixon-Mao (72) n’a pas concerné que Taïwan, mais elle n’est pas pour rien dans les relations USA-Chine qui ont perduré jusqu’en 89 (Tien an men) sur un fond anti-soviétique. Ce qui a, tout aussi incontestablement, favorisé la NEP de Deng, l’Occident tablant alors sur un reniement, par l’économie, du marxisme par le PCC....

08/08/2022 17:16 par J.J.

Merci Xiao pour cet excellent article qui m’a appris beaucoup de choses. Bien sûr, il y aurait encore beaucoup de choses à dire. C’ est déjà bien. Mais il y en a qui sont toujours jamais contents !

08/08/2022 20:12 par Vania

@Xiao, Synthèse excellente. Merci beaucoup.
@guy, Votre commentaire est lamentable. La suffisance ne remplace pas la connaissance !

09/08/2022 00:42 par Xiao Pignouf

@CN46400

C’est vrai que la rencontre Nixon-Mao (72) n’a pas concerné que Taïwan

Comme je l’ai dit dans mon com précédent, je suis tombé d’accord avec vous sur le fait que cette rencontre et le remplacement de la ROC par la RPC à l’ONU sont des évènements signifiants. C’est votre mention faite au soutien de Mao aux Khmers rouges que je ne parviens pas à relier à Taïwan.

09/08/2022 05:47 par guy

@danael
j’aurais du préciser "4ème de mon époque" car je vous le concède , les 4ème de nos jours ont plus un niveau cm2,allez 6ème ....

09/08/2022 07:51 par Xiao Pignouf

Et Taïwan, qui se croit aujourd’hui plus japonaise que chinoise,

Cette formulation n’est pas exactement ce que je voulais dire. Plutôt : Taïwan se croit plus proche du Japon que de la Chine.

09/08/2022 07:56 par Serge LEFORT

@Xiao Pignouf

Euh, sauf à ne pas comprendre le sens de votre propos, c’est la même chose, quoique « province » au lieu de « région » serait plus juste...

1) J’ai tout simplement voulu dire que l’usage courant de "Taïwan" était connoté comme celui d’un État alors que, selon le droit international, ce n’est pas le cas :
Le 25 octobre 1971, la résolution 2758 de l’ONU a rétabli les droits légitimes de la République populaire de Chine (https://digitallibrary.un.org/record/735611).
Le 15 décembre 1978, les États-Unis ont reconnu le Gouvernement de la République populaire de Chine comme le seul gouvernement légal de la Chine et ont déclaré qu’ils retireraient la reconnaissance diplomatique de Taïwan (https://history.state.gov/milestones/1977-1980/china-policy).

2) J’ai repris la terminologie utilisée par la presse chinoise dans les éditions française, anglaise et espagnol :
- "région taïwanaise de la Chine" http://french.peopledaily.com.cn/Chine/n3/2022/0803/c31354-10130361.html
- "China’s Taiwan region" http://en.people.cn/n3/2022/0802/c90000-10130302.html
- "región Taiwan de China" http://spanish.peopledaily.com.cn/n3/2022/0803/c31621-10130309.html
L’édition chinoise dit "中国台湾地区" (zhōngguó táiwān dìqū = Chine Taïwan région) http://hb.people.com.cn/n2/2022/0803/c194063-40064872.html
Voici la copie d’écran du début de l’article : http://el.coyotito.free.fr/ARCHIVES/CHINE/PRESSE/zhongguo-taiwan-diqu.png

3) Le terme "province", au sens de partie distincte d’un pays, est prématurée... Il sera peut-être utilisé après la réunification. Patience...

09/08/2022 08:11 par Xiao Pignouf

@Petronilla Petronillum

Le KMT n’a jamais cessé de retourner sa veste. Ce qui les intéresse, c’est le pouvoir. Ils n’ont pas pu l’avoir sur le continent, ils sont allés le prendre sur Taïwan. Maintenant qu’ils ne l’ont plus sur Taïwan, ils espèrent peut-être le ravoir sur le continent. Je crois qu’ils peuvent toujours rêver.

09/08/2022 13:19 par Paulo D.

Magnifique article ! Quel travail ! Un pinaillage de détail, on dit habituellement Armée populaire de libération, APL, et non ALP.

On pourrait ajouter que pour prendre le relais des Japonais sur l’île le pouvoir de Chiang Kaï-shek commence par commettre un massacre en février-mars 1947. On parle maintenant de l’Incident 228 (pour 28 février, début des événements). On ne sait pas le nombre de morts, 10 000, 15 000 ou 20 000. L’enquête continue démocratiquement. Le pouvoir politique actuel aussi pro-yankee que pro-japonais prétend utiliser l’effroyable événement pour faire de la propagande anti-chinoise. Le discours est en gros que les Chinois ont alors massacré les Taïwanais. Infâme manipulation. (Voir par exemple : https://www.taiwannews.com.tw/en/news/4457731). Sur France culture est validée l’utilisation de cet événement tragique pour alimenter le chauvinisme taïwanais : "C’est devenu un moment central dans, effectivement, la façon dont les Taïwanais conçoivent leur identité". (Ecouter, à partir de 17:30, https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-cours-de-l-histoire/taiwan-l-histoire-de-l-autre-chine-7296920). En fait Chiang Kaï-shek commettait le même genre de massacres partout en Chine. Les Taïwanais, qui avaient dans allégresse célébré le départ des Japonais deux ans plus tôt, se sentaient aussi chinois que les Cantonais ou les Hunanais. Dans cette période de guerre civile, les Taïwanais comme tant d’autres dans toute la Chine s’étaient soulevés contre le pouvoir tyrannique et corrompu de Chiang Kaï-shek, tenu à bout de bras par les Etats-Unis. Ils ne s’étaient pas révoltés contre la Chine.

09/08/2022 13:33 par Xiao Pignouf

@Serge Lefort

Merci pour ces précisions.

09/08/2022 18:02 par Xiao Pignouf

@Paulo D.

Merci. ALP (Armée de Libération du Peuple) = APL (Armée populaire de libération). Les deux occurrences coexistent sur le Net. C’est normal, elles ont strictement le même sens, c’est-à-dire Armée de Libération constituée par et pour le peuple.

10/08/2022 02:56 par Serge LEFORT

Xiao Pignouf écrit (c’est moi qui souligne) :

Et Taïwan, qui se croit aujourd’hui plus japonaise que chinoise [...]
Cette formulation n’est pas exactement ce que je voulais dire. Plutôt : Taïwan se croit plus proche du Japon que de la Chine.

Ooops, cette formulation renvoie à la France a peur de Roger Gicquel sur TF1 le 18 février 1976 (https://fr-fr.facebook.com/Ina.fr/videos/roger-gicquel-et-laffaire-patrick-henry-la-france-a-peur-1976/658622517932690/).

Il conviendrait de dire (liste non limitative) :
- des politiciens du PDP prônent l’indépendance avec l’aide des États-Unis et l’alliance avec le Japon (pétainistes taïwanais) contre la Chine bien que le Japon ait occupé militairement l’île de 1895 à 1945 ;
- la majorité des politiciens du KMT sont en faveur de la réunification avec la Chine continentale, mais ils restent anticommunistes car ils croient aux vertus de la démocratie occidentale ;
- d’autres politiciens du PDP prônent l’indépendance avec l’aide des États-Unis au nom d’une mythique identité taïwanaise d’origine aborigène (taïwanais de souche).

La population de la région taïwanaise de la Chine est issue d’un brassage plurimillénaire de migrants d’origines diverses. Les aborigènes en constituent une partie, mais ni la première ni la principale. Ils se sont naturellement mélangés à d’autres groupes ethniques et principalement à ceux d’origine chinoise qui ont migré entre 50 000 et 20 000 avant l’ère chrétienne occidentale.
Lire : LI Xiaobing, The History of Taiwan, 2019 [Livre en ligne : http://el.coyotito.free.fr/ARCHIVES/CINEMA/LIENS/CHINE-Taiwan.rtf].

10/08/2022 09:59 par Xiao Pignouf

@Serge Lefort

Je ne comprends pas la comparaison que vous faites de mes propos. Il s’agit de dire qu’à Taïwan existe un sentiment, pas partagé par tous mais par une bonne part et de la population et de partis dit « démocrates », une nostalgie, un lien d’affection avec l’ancien colonisateur, sentiment qui s’est matérialisé dans l’hommage excessif du DPP à Shinzo Abe.

« Le syndrome de l’orphelin de Taïwan est bien connu (et a des origines historiques déterminées : l’exil du parti nationaliste du continent, la mise à l’écart du concert des nations au profit de la République populaire de Chine, etc.). Mais ici, on peut légitimement se poser la question : Taïwan est-il nostalgique de la Chine ou du Japon ? S’agit-il de récréer un nouveau rapport amoureux ? Filial ? Cape n° 7 est le plus grand succès du cinéma taïwanais depuis des lustres. L’« Avatar » de la production locale – avatar dans le sens de film à succès à l’instar du film de Cameron, mais également dans celui de « représentant », c’est-à-dire celui qui est envoyé dans les festivals internationaux et dans les communautés diasporiques du monde entier – est donc une voix qui ne s’exprime ni en mandarin ni en taïwanais, mais bien clairement en japonais. L’idée de l’individu taïwanais n’est-elle pas – surement aussi par réaction à la crainte de la surpuissance chinoise qui menace de l’engloutir dans son monopartisme – de plus en plus tournée vers le Pacifique, et par conséquent, vers le Japon ? Les Taïwanais se représentent de plus en plus sans voix, ou privés de voix ; ou, pour mieux dire encore, orphelins de la parole japonaise, de la légitimité, de la poésie et de la force de la langue japonaise. Cette tentative de redéfinir l’identité nationale se présente donc comme un compromis entre la recherche des racines et le besoin d’indépendance et se décline en tous cas sous la forme d’un mouvement centripète qui vise à éloigner toujours plus l’identité culturelle taïwanaise de la Chine pour la rapprocher du Japon. »

Source : https://books.openedition.org/pumi/12240?lang=fr

10/08/2022 19:08 par guy

@xiao
Vous etes raccord avec pelosi finalement . Ça fait quel effet ?

11/08/2022 03:18 par Serge LEFORT

@Xiao Pignouf
En remerciement du lien sur L’ambiguïté de la nostalgie du Japon à Taïwan vue à travers le cinéma voici celui d’Études taïwanaises - Carnet de recherche de l’Association francophone d’études taïwanaises (AFET) : https://etudestaiwan.hypotheses.org/.

Pour revenir à la phrase de Roger Gicquel qui ouvrait le journal de 20 heures (la messe télévisuelle de l’époque), nous sommes formatés depuis si longtemps par les manipulations sémantiques des médias que nous ne nous en rendons plus compte.
Dire la France a peur est un abus de langage car la France est une entité géopolitique et non une personne. Il s’agit dans ce cas d’une injonction pervers : vous devez avoir peur !
La formulation Taïwan se croit est une hyperbole fallacieuse car tous les Taïwanais ne se croient pas plus proche du Japon que de la Chine. L’article cité ne dit pas combien de Taïwanais seraient nostalgiques de la colonisation japonaise, mais se limite à une partie du champ cinématographique : Plusieurs films de cinéastes taïwanais contemporains manifestent un rapport trouble et ambigu avec le Japon, teinté à la fois de nostalgie, de rêverie et de regret face au départ de l’ancien colonisateur (paragraphe 12). 


Pour conclure sur la région taïwanaise de la Chine (appellation correspondant au droit international) au lieu de spéculer sur l’avenir des différents programmes politiques (indépendance avec l’aide des États-Unis et ou sans l’alliance avec le Japon ou réunification avec la Chine continentale avec ou sans statut "un pays, deux systèmes"), il convient de s’interroger sur l’opinion réelle de la population taïwanaise.
Selon mes sources (en inglés desafortunadamente), la majorité serait favorable au statu quo c’est-à-dire ni indépendance ni réunification.
Bibliographie : http://el.coyotito.free.fr/ARCHIVES/CINEMA/LIENS/CHINE-Taiwan.rtf

11/08/2022 11:19 par Xiao Pignouf

@Serge Lefort

Merci pour votre réponse.

Je veux bien admettre que ma formulation est tendancieuse. Mais laissez-moi l’expliquer.

Lorsque je dis que Taïwan se croit plus proche du Japon, c’est comme si je disais que la France se croit plus proche des USA que d’aucun autre peuple et d’aucune autre nation. Ce qui n’est pas forcément représentatif de la réalité. En effet, l’emploi du verbe « se croire » implique une illusion, une chimère, ainsi que c’est le cas pour la France, perpétuellement trahie par ceux qu’elle croit être ses alliés. Dans le cas de Taïwan, c’est une double illusion, car derrière le Japon, les USA se tiennent en embuscade, ce que j’exprime un peu plus loin dans le texte. Ensuite, ce n’est évidemment pas chaque Français(e) qui se croit proche des USA, comme ce n’est pas le cas de chaque Taïwanais(e) de se croire proche du Japon, c’est une tendance dans la politique internationale menée par le pays. Taïwan n’est ici qu’une synecdoque.

Le statu quo, s’il arrange les affaires des Taïwanais (en tout cas de certains) n’est qu’un pis aller pour la Chine. Elle s’en est contentée jusque-là en jouant de patience depuis plus de 70 ans, c’est bien pour cette raison que la conduite américaine est entièrement responsable de la fragilisation de ce statu quo qui punira d’abord Taïwan.

13/08/2022 11:04 par sixiangjiaoyu

@xiaopignouf
Dire que le statu quo est un pis-aller pour la Chine est faire très bon marché des avantages que la paix qui règne dans la région depuis des décennies apporte non seulement à la Chine et à Taiwan mais au monde entier.
La provocation de Mme Pelosi est inacceptable mais l’idée que pour cette raison ou une raison similaire le statu quo puisse être remis en cause devrait nous remplir d’effroi.
Les enquêtes d’opinion réalisées par le bureau des affaires du continent taïwanais ainsi que par le centre de recherches des élections de l’Université nationale Chengchi de Taipei indiquent d’une manière peu surprenante que le maintien du statu quo est jugé souhaitable non pas par "certains taïwanais" mais par leur immense majorité (autour de 80%).
Le statu quo est une garantie pour la paix et la stabilité dans une région qui, si la guerre devait y revenir, connaîtrait des souffrances et des destructions d’une proportion inimaginable. Dans les faits, l’appartenance de Taiwan à la Chine est une fiction à laquelle tout le monde a intérêt à feindre de croire mais dont le contenu réel se résume à la dépendance de l’économie taïwanaise au continent et guère au-delà.
La "Libération" de Taiwan ou "la réunification de la Chine" sont des objectifs qui peuvent être repoussés indéfiniment sans dommage réel pour personne. Dire que la Chine a fait preuve de patience pendant plus de 70 ans sur ce sujet, c’est dire qu’elle a eu la patience de vivre en paix avec ses voisins.
Les discours qui font de la "réunification" une nécessité impérieuse ou quelque chose qui ressemblerait à une urgence sont, dans la situation actuelle et dans le futur prévisible, fondamentalement bellicistes. Comme le PCC se plaît à le répéter, le retour de Taiwan dans le giron de la mère-patrie est inévitable mais le fait que certaines choses soient inévitables n’impliquent pas que les pratiques utiles à les retarder soient vaines. La certitude de la mort n’est pas une raison de ne pas prendre soin de sa santé. Une organisation qui déploie tant d’efforts pour combattre un virus respiratoire devrait en faire autant pour éviter les pluies de missiles.

13/08/2022 13:29 par loulou la pétroleuse

A sixiangjiaoyu,

Pour le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, certes je le suis ! Comme du droit des femmes à disposer de leur corps.
Encore faut-il que les peuples puissent exprimer leur volonté sans que des puissances étrangères et totalement indifférentes à leur droit viennent y substituer leurs propres discours.
C’est ce que font systématiquement les représentants des oligarques étazuniens, et pas seulement en Asie. C’est aux chinois de négocier leurs solutions et le respect de leurs droit, qu’ils habitent HK, le Thibet, Taïwan ou n’importe quelle autre province chinoise. Les armées américaines n’ont pas à s’en mêler et n’ont rien à faire dans le détroit de Taïwan.

Cela fait par exemple au moins une décennie que les USA cherchent à s’emparer des grandes entreprises taïwanaises, Sud coréennes et autres qui ont réussi dans le domaine des semi-conducteurs, grâce entre autres à leurs échanges avec le reste de la Chine. Est-ce l’intérêt d’un peuple, quel qu’il soit, de se laisser piller ?

Nous avons toutes proportions gardées le même problème en France, à ceci près que nos gouvernements sont complices de notre dépouillement, comme celui de Taïwan... et contrairement à celui de la Chine.

13/08/2022 19:31 par sixiangjiaoyu

A Loulou la pétroleuse,

La paix règne dans cette partie du monde depuis des décennies et elle a été incontestablement profitable à tous les habitants de la région.
Le déclenchement d’une guerre serait en revanche une catastrophe d’une ampleur terrifiante.
Quand on dit que le Tibet ou Hong Kong, c’est la Chine, on dit en réalité quelque chose de différent que quand on soutient que Taiwan, c’est la Chine. Le principe d’auto-détermination des peuples n’est pas déterminant ici mais la situation concrète. Hong Kong et le Tibet sont administrés par le gouvernement chinois. L’armée populaire de libération ne rencontrerait aucune opposition sérieuse si les choses venaient vraiment à dégénérer dans ces deux endroits. D’ailleurs, malgré qu’elle ait manifesté sa présence, elle n’est pas intervenue lors des événements de Hong Kong.
Taïwan n’est pas sous administration chinoise et il est difficile d’imaginer que cette situation évolue dans un proche futur sauf recours à la force.
C’est pourquoi le maintien du statu quo est essentiel : c’est la seule façon de garantir la paix dans la région. Taiwan ne doit pas déclarer son indépendance et la Chine ne doit pas tenter de faire rentrer l’île sous son administration par la force.
Les provocations et les manœuvres militaires sont condamnables mais ne doivent pas conduire à affirmer que le statu quo est fondamentalement remis en question.
Non à la guerre.

14/08/2022 09:12 par loulou la pétroleuse

A sixiangjiaoyu

La paix règne dans cette partie du monde depuis des décennies et elle a été incontestablement profitable à tous les habitants de la région.

Est-ce la Chine qui cherche à provoquer la guerre ?
Est-ce la Chine qui défie les USA en faisant patrouiller ses avions et navires militaires le long de leur côtes ?

Je ne prétends pas être une "experte" mais il ne me parait pas évident que la Chine ait intérêt à provoquer une guerre :
- d’abord si guerre il y avait, elle se produirait sur son propre terrain (je ne crois pas qu’il soit nécessaire de développer les conséquences que ça aurait pour la Chine, ses oligarques et ses peuples - la Chine a tout à y perdre)
- Seuls les USA bénéficieraient d’un conflit militaire en Asie (pas même Taïwan)
- C’est sur le plan économique que la Chine peut se défendre le plus efficacement contre les fomenteurs de guerre, et elle a déjà pris des mesures qui peuvent nuire considérablement à l’économie occidentale (celle qui profite aux oligarques occidentaux, et qui ne cesse d’appauvrir les populations des pays "alliés" des USA).

Sur le plan militaire chacun montre actuellement ses muscles. Le vrai soucis me semble être : jusqu’où les USA sont-ils prêts à pousser le bouchon ? Jusqu’à quel point sont-ils convaincus d’avoir le dessus ?
Il est plus économique et moins risqué pour eux de s’abriter derrière Taïwan (comme ils s’abritent en Europe derrière l’Ukraine). Je veux croire que c’est pour cette raison que la Chine montre ses muscles autour de Taïwan, et qu’elle est consciente qu’une intervention militaire la priverait des avantages d’un statut quo majoritairement accepté par la population de Taïwan, sachant que le temps est son meilleur allié pour la réunification de l’ensemble de la Chine, qui a déjà suffisamment éprouvé les déchirements et les horreurs de la colonisation.

14/08/2022 10:01 par Xiao Pignouf

@sixiangjiaoyu

Dans vos derniers commentaires, aucune mention des États-Unis. Pourtant, ils sont le facteur essentiel, et même exclusif de déstabilisation de la région. Ces temps-ci, ce serait même leur activité à plein temps d’instaurer le chaos là où ça les chante. Certes, vous faites les gros yeux à Pelosi comme si elle avait décidé seule d’aller provoquer la Chine à Taïwan, mais vous édulcorez de facto la responsabilité de la Maison Blanche.

Encore une fois, il ne s’agit pas d’appeler la RPC à intervenir militairement pour reprendre Taïwan, mais seulement de prouver par des éléments matériels, historiques et légaux, la légitimité de ses revendications sur Taïwan. C’est un point qu’il me semble nécessaire de clarifier autant que possible pour des lecteurs français qui n’auraient qu’une connaissance limitée voire nulle de l’histoire de la région. Prôner une quelconque action armée serait contre-productif. En tant que personne raisonnable, comme la majorité d’entre nous, je préfère que la réunification puisse se faire sans que le peuple taïwanais n’en souffre de quelque manière que ce soit. Dans ce sens, le statu quo est un moindre mal pour les deux parties : Taïwan n’est pas tout à fait chinoise mais elle n’est pas tout à fait un pays.

Maintenant, il y a cela et il y a la réalité. Et la seule maîtresse de la réalité, ici, c’est la Chine. Ce n’est pas vous ni moi, ni personne d’autre et surtout pas les Américains. Et la réalité, si vous avez lu les documents que Serge Lefort a mis en lien, notamment le livre blanc intitulé "La question de Taiwan et la réunification de la Chine dans la nouvelle ère, au point 3 de son préambule, c’est que « la réunification complète de la Chine est un processus qui ne peut être arrêté » (sic).

14/08/2022 16:28 par Alamut

Pendant que LGS discute tranquillement du sexe des anges au sujet du différend Chine/Taïwan lors d’un "débat" sur la chaine LCI suite à la mort d’un homme abattu par la police à Roissy le 10 Août,le trop connu Christian Prouteau a fait remarquer :

"Je ne comprends qu’une telle FAUNE puisse circuler librement dans cet aéroport !".

La citation est approximative mais le sens et le mot FAUNE sont bien les bons.Personne n’a bronché sur le plateau.
La préfecture toujours délicate s’est contentée de la "neutralisation d’un INDIVIDU".

Devons-nous partager la déchéance morale d’un Prouteau déjà déshonoré par plusieurs affaires et "sauvé" par Mitterrand ?.

Toujours plus bas !C’est leur devise. Une véritable entreprise d’abrutissement est en marche !

14/08/2022 18:43 par pierreauguste

Même si je crois que parler de Taïwan ou d’autres lieux au monde voir d’autres sujets qui paraissent sans importance à priori ,méritent un écrit et des commentaires,"Toujours plus bas !C’est leur devise"concernant entre autres choses quasiment tous les "experts"télévisuels,est très très réel.Ils ne semblent plus s’arrêter dans leur ignominie.Merci de le dire,car il faut le signaler chaque fois puisque le fond du trou n’est plus trés loin.....

15/08/2022 00:09 par Serge LEFORT

Comme je suis en vacances avec ma petite famille, je n’ai pas le temps d’analyser le Livre blanc sur "La question de Taiwan et la réunification de la Chine dans la nouvelle ère", mais j’ai noté que selon la logique chinoise l’économie prime sur la politique et que la croissance de la République populaire de Chine depuis 1978 (grâce à Deng Xiaoping) est favorable au changement (toujours difficile) :

Le volume du commerce inter-détroit n’était que de 46 millions de dollars américains en 1978. Il est passé à 328,34 milliards de dollars américains en 2021, multiplié par plus de 7 000. Le continent a été le plus grand marché d’exportation de Taïwan au cours des 21 dernières années, générant un important excédent annuel pour l’île. Le continent est également la principale destination des investissements hors île de Taïwan. Fin 2021, les entreprises taïwanaises avaient investi dans près de 124 000 projets sur le continent, pour une valeur totale de 71,34 milliards de dollars.
- - -
Les statistiques du Fonds monétaire international montrent qu’en 1980, le PIB du continent était d’environ 303 milliards de dollars, soit un peu plus de 7 fois celui de Taïwan, qui était d’environ 42,3 milliards de dollars ; en 2021, le PIB du continent était d’environ 17 460 milliards de dollars américains, soit plus de 22 fois celui de Taïwan, qui était d’environ 790 milliards de dollars américains.

Ainsi, le développement de la République populaire de Chine, après 113 ans de colonisation par les puissances occidentales (Angleterre et France principalement), a créé les conditions d’une réunifications gagnante-gagnante (patience) :

Le développement et les progrès de la Chine, et en particulier l’augmentation constante de sa puissance économique, de sa force technologique et de ses capacités de défense nationale, constituent un frein efficace aux activités séparatistes et à l’ingérence des forces extérieures. Ils offrent également un vaste espace et de grandes opportunités d’échanges et de coopération à travers le détroit. Alors que de plus en plus de compatriotes taïwanais, en particulier des jeunes, poursuivent leurs études, créent des entreprises, recherchent un emploi ou vont vivre sur le continent, les échanges, les interactions et l’intégration trans-détroit s’intensifient dans tous les secteurs, les liens économiques et les liens personnels entre les peuples des deux côtés s’approfondissent, et nos identités culturelles et nationales communes se renforcent, menant les relations trans-détroit vers la réunification.

Tout le reste n’est que blabla...

15/08/2022 02:27 par Georges Rodi

> sixiangjiaoyu

Une fois reconnu le fait que les Bretons, ou les Basques, ont des caractéristiques culturelles (langue, traditions...), voire même génétiques, qui les distinguent des Berrichons, il est généralement admis qu’ils font partie du "Peuple" français.

Certains le contestent, au nom desdites caractéristiques justement.
Il n’en reste pas moins que leur droit à disposer d’eux-mêmes est manifestement nié.
Oui parce que là, "nous" parlons d’ethnies, "nous" ne parlons pas de Peuples.
Et c’est ainsi en Espagne, au Royaume-Uni, en Turquie, en Inde...

Et ne parlons surtout pas des peuples natifs, aux US ou en Australie, ou de ce qui se passe en Israel.
Pas un souci pour Pompeo, Pelosi et consorts...
Quelle hypocrisie franchement...

Peut-être est-ce dû au fait que la définition de "Peuple" remonte à la notion de "Dèmos" dans l’antiquité grecque : l’ensemble des citoyens sur qui le pouvoir est exercé par une oligarchie, exclu des prérogatives politiques, et défini par la pauvreté, le labeur et le grand nombre.

Effectivement, Corses, Bretons, Basques, Catalans (...), le peuple français dans son ensemble subit le pouvoir exercé par une oligarchie, étrangère au territoire de France de surcroît.
Et en France, les citoyens ont le droit de vote...
Quelle bonne blague...
Lorsque l’on voit les résultats, c’est clair qu’il n’y a rien de mieux pour exclure un Peuple des prérogatives politiques réelles qui sont prises par l’UE.

Cela dit, je lis assez souvent l’expression "Peuple Taïwanais".
En quoi donc les Taïwanais formeraient-ils un "Peuple" différent du Peuple chinois ?
La culture ?
Les traditions ?
Les gènes peut-être ?
Parce que du côté des éléments matériels, historiques et légaux, la revendication de la Chine sur Taïwan est légitime.
Non, non... Ce qui fait que dans les médias occidentaux les Taïwanais sont devenus un Peuple différent du Peuple chinois, c’est parce qu’ils ont le droit de vote.

Ahhh, nous en sommes tellement fiers de la Démocratie.
C’est forcément ce qu’il y a de mieux pour les Taïwanais.

Si, et seulement si, ce que l’on souhaite réellement, c’est les garder sous influence des US.

La visite de Pelosi n’a fait qu’entériner une réalité.
Depuis 2016, Taïwan a passé commande pour 20 milliards de $ en armements aux US... Et les contacts politiques se multiplient d’année en année.
C’est une négation totale, profonde des accords signés entre les US et la Chine.
Dans une interview donnée à la BBC, Tsai Ing-wen a déclaré « Nous sommes déjà un pays indépendant. Nous nous appelons la République de Chine, Taiwan. Nous avons notre propre système de gouvernement. Nous avons un gouvernement, nous avons une armée, nous avons des élections »...

Il n’y a plus de statu quo. Même Kissinger l’a constaté.
C’est fini.
Inutile d’en rêver le maintien.
Et ce n’est bien sûr pas la Chine qui en est responsable.

15/08/2022 12:15 par sixiangjiaoyu

A Georges Rodi, Loulou la pétroleuse et Xiao Pignouf.

La rhétorique selon laquelle le statu quo serait fondamentalement remis en cause ou même qu’il n’existerait plus est une exagération dangereuse.

La question de la paix rend celle des droits historiques, moraux ou humains complètement dérisoires. Ce n’est pas parce que Taiwan est une partie inaliénable de la Chine ou parce que le peuple taïwanais à le droit à l’autodétermination qu’il faut défendre le statu quo. C’est parce que la guerre dans la région serait une catastrophe d’une ampleur inimaginable.

Les choses sont ce qu’elles sont : Taiwan, c’est la Chine mais la Chine n’administre pas Taiwan et il est très hypothétique de croire qu’une réunification rapide serait possible autrement que par la force.

Or, l’idée que la réunification ne saurait tarder semble assez commune ces derniers temps en Chine.
Dans un article récent publié sur Guancha, Song Luzheng, chercheur à l’Université de Fudan, exprime par exemple l’opinion que la "résolution définitive du problème des deux rives n’est pas pour dans longtemps".

La préférence pour l’option pacifique est évoquée en début d’article quand l’auteur souligne la complémentarité des deux économies (Il prend l’exemple des capacités de production de semi-conducteurs de TSMC et les "capacités avancées de design de puces du continent ainsi que son large marché").

Cependant, le reste de l’article détaillé les conditions nécessaires pour réussir l’unification et aucune ne relève de la négociation.
La première est la "puissance réelle" de la Chine (qui est remplie).
La deuxième, des soutiens internationaux puissants (La Russie)
La troisième, la neutralité européennne.
La cinquième, l’instabilité politique aux États-Unis avec par exemple des controverses autour de la possibilité d’une candidature Trump.

La quatrième mérite d’être soulignée : il s’agit du maintien du DPP au pouvoir à Taiwan pour trois raisons 1) le fait que l’attitude provocante du DPP créé un "espace moral" pour intervenir 2) parce que si le KMT revenait au pouvoir, on pourrait soupçonner la Chine de chercher à résoudre le problème par la force 3) parce qu’au moment de devoir accepter l’unification, il est préférable que ce soit le parti le plus opposé à ce processus qui doive l’accepter (L’auteur fait un parallèle avec le fait que Nixon étant républicain, a pu normaliser les relations américaines avec la Chine sans être soupçonné de sympathie pour Mao alors que si le président avait été démocrate, cela n’aurait pas été possible).

Song Luzheng estime que la visite de Pelosi a donné aux manœuvres militaires chinoises une légitimité morale que les pays occidentaux auraient contesté si elles avaient été exécutées de manière préventive. Il juge que le maintien du DPP au pouvoir est utile à l’unification car ce parti fournit des justifications morales à l’intervention chinoise.

Bien entendu, il ne s’agit que de l’opinion d’un commentateur mais elle indique que, pour certaines personnes en Chine, les provocations américaines et le maintien au pouvoir du DPP sont des opportunités à saisir.

Cependant, si celles-ci devaient être concrétisées, la guerre serait difficilement évitable.

https://m.guancha.cn/SLZ/2022_08_14_653612.shtml

15/08/2022 12:27 par Autrement

Georges Rodi :

Peut-être est-ce dû au fait que la définition de "Peuple" remonte à la notion de "Dèmos" dans l’antiquité grecque : l’ensemble des citoyens sur qui le pouvoir est exercé par une oligarchie, exclu des prérogatives politiques, et défini par la pauvreté, le labeur et le grand nombre.

En tant qu’Helléniste, je me dois de rectifier cette définition sommaire du Démos antique.
C’est justement une certaine propagande scolaire et universitaire made in USA qui présente la démocratie antique de cette façon, et qui prétend se réclamer de Périclès et d’une tradition émancipatrice !
En réalité, depuis Solon (abolition de l’esclavage pour dettes), puis Clisthène et Périclès, le démos athénien, c’est le peuple en tant qu’acteur politique, éclairé (ou aveuglé...) par les orateurs en séances publiques, mais libre de ses choix et votant en démocratie directe : l’Assemblée est celle de tous les citoyens. La liberté de parole est assurée, et tout citoyen a le droit de se présenter à la tribune pour exposer son point de vue (parrhêsia).
L’ostracisme (droit des citoyens à révoquer des élus) permet au démos de destituer les dirigeants qui ont abusé de leur pouvoir.
Évidemment, les restrictions sont nombreuses par rapport à l’ensemble de la population, et je n’entre pas dans les restrictions et objections bien connues, notamment le fait que c’est seulement une minorité de la population qui a le droit de citoyenneté, et la fameuse affirmation de Thucydide concernant Périclès : "Sous le nom de démocratie, c’était le premier des citoyens qui gouvernait". Mais n’est pas Périclès qui veut...

La démocratie est appelée en effet (et est effectivement) le gouvernement du grand nombre des citoyens, par opposition à l’oligarchie, "gouvernement du petit nombre". De toutes façons les "oligarques" antiques ont très peu de points communs (il y en a quand même... témoin le portrait de l’Oligarque qui se pavane sur l’agora, parmi les Caractères de Théophraste, disciple préféré d’Aristote), avec ceux qu’on appelle ainsi dans le monde moderne, tant du point de vue de l’économie que de celui des mentalités.

Par exemple, même si ce que nous connaissons comme "impôt" n’existe pas, il existe le système des "liturgies", c’est-à-dire des contributions obligées (non par la loi mais par la coutume), système selon lequel les propriétaires terriens et les citoyens les plus riches sont tenus de pourvoir à toutes les dépenses essentielles de la cité-état, et donc restituent au peuple tout entier une partie importante du surplus de leurs revenus.

Mais ce qu’il faut voir avant tout, c’est que la démocratie athénienne marque l’émergence historique, - à partir de sociétés primitives où les travailleurs pauvres n’ont aucun droit et où seule s’exerce la domination des puissants ou d’un monarque, - d’une forme de société nouvelle et émancipatrice dans laquelle les citoyens ont des droits effectifs et des libertés juridiquement reconnues.

Pas de meilleur exemple que les vainqueurs de Salamine dans les Perses d’Eschyle, qui se revendiquent comme citoyens et combattants d’une cité libre, face au "mode de production asiatique" incarné par le Grand Roi et ses guerres de conquête.

Pardon pour cette digression, mais je ne peux pas laisser dire que la "démocratie" occidentale est dérivée du modèle antique : c’est un abus de langage typiquement orwellien, honteusement exploité par la propagande des ploutocraties occidentales qui se prétendent "progressistes", - comme appeler "plan social" un plan de licenciements, ou "réforme" une flagrante régression...

15/08/2022 17:25 par Autrement

J’ajoute que loin d’être l’invention d’oligarques exploiteurs, l’émergence de la démocratie athénienne dans l’histoire est le résultat de luttes sociales acharnées, qui ont duré plus d’un siècle, entre les paysans, artisans et petit peuple de la ville, contre l’aristocratie terrienne. Solon, Clisthène et Périclès, tous trois des aristoi dignes de ce nom, ont eu l’intelligence d’inventer des solutions économiques, sociales et constitutionnelles propres à satisfaire (au moins pour un temps de prospérité) les exigences du démos.

L’essor culturel, artistique et civilisationnel d’Athènes (où étaient institutionnalisées les récitations publiques d’Homère, base de l’éducation) est le fruit de cette brève éclaircie, proprement quoiqu’ incomplètement, démocratique :

Achille est-il compatible avec la poudre et le plomb ? Ou même l’Iliade avec la presse ou mieux encore la machine à imprimer ? Est-ce que le chant et la récitation, est-ce que la Muse ne disparaissent pas nécessairement devant la presse à bras, est-ce que ne s’évanouissent donc pas des conditions nécessaires à la poésie épique ?

Mais la difficulté n’est pas de comprendre que l’art grec et l’épopée sont liés à certaines formes sociales de développement. La difficulté réside dans le fait qu’ils nous procurent encore une jouissance esthétique et qu’ils gardent pour nous, à certains égards, la valeur de normes et de modèles inaccessibles.

Un homme ne peut redevenir enfant, ou alors il retombe en enfance. Mais ne prend-il pas plaisir à la naïveté de l’enfant, et ne doit-il pas encore aspirer lui-même à reproduire sa vérité à un niveau supérieur ? Dans la nature enfantine, chaque époque ne voit-elle pas revivre son propre caractère dans sa vérité naturelle ? Pourquoi l’enfance historique, là où elle a atteint son plus bel épanouissement, n’exercerait-elle pas le charme éternel d’un stade à jamais révolu ? Il y a des enfants mal élevés et des enfants trop tôt adultes. Nombre de peuples de l’Antiquité appartiennent à cette catégorie. Les Grecs étaient des enfants normaux. Le charme qu’exerce sur nous leur art n’est pas en contradiction avec le stade social embryonnaire où il a poussé. Bien plutôt il en est le résultat, bien plutôt il est indissolublement lié au fait que les conditions sociales insuffisamment mûres où cet art est né, et où seulement il pouvait naître, ne pourront jamais revenir.

Karl Marx, Introduction à la critique de l’économie politique.

Nous ne sommes pas si loin de la réflexion (merci à ses initiateurs !) sur l’histoire de la Chine, ou d’un examen approfondi de la Constitution de Cuba, ou de la réflexion sur les confusions que peut provoquer l’application d’un terme du vocabulaire politique à des réalités historiques différentes.
L’Histoire est par excellence la science du singulier (voir Lucien Sève).

15/08/2022 17:34 par loulou la pétroleuse

A sixiangjiaoyu,

Juste 1 remarque :
- Je ne sais pas qui est Song Luzheng. Il se peut que ce soit un journaliste influent, mais pour ce que je sais de la politique chinoise, ce ne sont pas les journalistes qui la définissent mais le comité central du PCC. On peut trouver ça critiquable mais on ne peut pas lui attribuer a priori les rêves de toute puissance d’un journaliste. On ne peut considérer ses intentions qu’à partir des documents qu’il émet lui-même.
Dans le cas qui nous préoccupe le seul document sur lequel on puisse s’appuyer pour juger des intentions du gouvernement chinois c’est le livre blanc qu’il vient de publier et dont Serge Lefort nous a trouvé une traduction.

Pour ma part, je l’ai déjà écrit plusieurs fois, je suis viscéralement pour le droit des peuples (et des femmes) à disposer d’eux (et d’elles) mêmes (pour moi c’est fondamentalement le même combat), et ce n’est pas du tout ce qu’impose, depuis des siècles, la politique étazunienne, ni celle de la France non plus... sauf à de brèves périodes de son histoire, les seules dont je sois fière.

16/08/2022 00:48 par Georges Rodi

> Autrement

Merci pour le point sur la démocratie grecque :)
Mais c’est d’avantage la notion de "peuple" qui me posait question.
Pas celle de démocratie.
Quelle est la définition du "demos" ?

Et enfin, pourquoi, comment peut-on parler de "peuple taïwanais" ?
L’utilisation de cette expression est courante en France.
Même Xiao l’utilise parfois, inconsciemment... Moi-même aussi probablement.
Alors que l’on pourrait parler... des Taiwanais, ou des habitants de Taïwan, ou des citoyens de Taïwan...

Il me semble que lorsque l’on parle de "peuple taïwanais" et de "peuple chinois". on laisse entendre qu’il y a des différences, des caractérisques culturelles, historiques qui seraient propres aux Taiwanais.
D’où ma question... Lesquelles ?

Or, ce n’est pas innocent.
C’est une thèse partisane, défendue par les indépendantistes, que de mettre en avant des liens culturels, historiques (et génétiques) entre Taïwan et le Japon.

16/08/2022 03:26 par Georges Rodi

> sixiangjiaoyu

Le statu quo entre la Chine et Taïwan n’est plus un sujet rhétorique.
Les US ont longtemps pratiqué une "ambiguité stratégique" sur ce sujet.
Une attitude jugée hypocrite par Beijing, un moyen de retarder la réunification, de vendre des armes... mais pas plus.
Cela a été fondamentalement remis en cause.
La visite de Pelosi a mis le dernier clou au cercueil.

Il y a d’abord eu l’administration Trump qui s’est montrée anti-chinoise.
Beijing a laissé du temps à l’administration Biden de corriger le tir.
Il s’avère que c’est encore pire.

Au passage, je ne crois pas du tout à l’hypothèse d’une Nancy Pelosi n’en faisant qu’à sa tête.
En matière de déstabilisation, les étasunniens sont des gens très sérieux, capables de développer des actions sur des dizaines d’années.

Préalablement à cette visite de Pelosi, le gouvernement chinois a multiplié les avertissements.
C’était une ligne rouge à ne pas franchir.
Ce n’est pas une exagération que de le constater : cette ligne rouge a été franchie.
Et avec allégresse, les transgressions se multiplient.

L’ambiguité stratégique étasunienne n’existe plus.
Le statu quo n’existe plus.
L’OTAN, qui défends en ce moment même la paix et les valeurs démocratiques en utilisant comme avant-garde un régime néo-nazi corrompu mis en place par un coup d’état d’état, déclare considérer officiellement la Chine comme une menace...
Les engagements et les valeurs occidentales ont-elles encore la moindre valeur ?
Beijing ne croit plus du tout en ces fables, c’est évident.
Pas plus que le reste du monde, qui n’est plus le même, et ne le sera plus jamais.

Oui, je partage l’idée qu’une guerre dans la région serait une catastrophe.
Et je suis bien plaçé pour m’inquiéter d’un conflit.
Je n’ai pas l’impression que la Chine va lançer une invasion militaire mais elle peut craindre la prochaine provocation, qu’une base américaine se fasse à Taïwan par exemple.
En face, elle doit montrer sa détermination, et il va y avoir des mesures politiques et économiques de prises, la mise en place d’un blocus peut-être rapidement... Nous verrons.

La Chine n’est pas du genre à se laisser entraîner dans un conflit.
Que la réunification puisse se faire pacifiquement en prennant du temps, cela a toujours été un souhait du côté chinois, et l’histoire le prouve... Encore fallait-il que le but de la réunification soit partagé. Les US, dans les faits, ne font même plus semblant d’y croire.

Tout comme V. Poutine en décembre de l’année dernière, et ses propositions pour négocier pacifiquement une sécurité réciproque... Les US et l’OTAN en ont tenu compte ?
La paix... De quoi parle-t-on... Non seulement les US s’en fichent, mais ils sont friands de conflits du moment qu’ils ne touchent pas leur terre.
Ils en besoin pour faire tourner leur économie.
Depuis que les Etats-unis existent, c’est la réalité, l’évidence, inutile de tourner autour du pot.
C’est la seule menace qui pèse sur Taïwan.
Tsai Ing-wen n’est qu’une potiche au service des US dans cette histoire.

16/08/2022 17:22 par guy

Même les chinois commencent à en avoir pleins les bottes d’être chinois ! https://youtu.be/8AFXZxaHGOI

17/08/2022 01:31 par Serge LEFORT

Petit détail historique : la duplicité des États-Unis concernant la région taïwanaise de la Chine date du 1er janvier 1979, date d’application du Taiwan Relations Act (voté le 19 avril 1979 !) :
- Le 15 décembre 1978, les États-Unis ont reconnu le Gouvernement de la République populaire de Chine comme le seul gouvernement légal de la Chine et ont déclaré qu’ils retireraient la reconnaissance diplomatique de Taïwan (https://history-state-gov.translate.goog/milestones/1977-1980/china-policy?_x_tr_sl=auto&_x_tr_tl=fr&_x_tr_hl=fr&_x_tr_pto=wapp) ;
- 1er janvier 1979 entra en vigueur la loi sur les relations avec Taïwan qui se donnait comme mission (divine) d’assurer la sécurité de l’île en lui fournissant (massivement) des armes (https://web--archive--2017-ait-org-tw.translate.goog/en/taiwan-relations-act.html?_x_tr_sl=auto&_x_tr_tl=fr&_x_tr_hl=fr&_x_tr_pto=wapp).

17/08/2022 18:10 par Serge LEFORT

Deux articles pour compléter notre réflexion :
- 17/08/2022, Entretien de l’ambassadeur de Chine en France (https://francais.rt.com/france/100368-tensions-autour-taiwan-retrouvez-entretien-rt-ambassadeur-chine-france-video)
- 17/08/2022, La question juridique complexe de l’indépendance taïwanaise (https://asiatimes-com.translate.goog/2022/08/the-complex-legal-question-of-taiwanese-independence/?_x_tr_sl=auto&_x_tr_tl=fr&_x_tr_hl=fr&_x_tr_pto=wapp)

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