RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher

De la “ titrisation ”

Pas d’affolement : on ne va pas évoquer les actifs financiers, les obligations boursières, les créances, mais plutôt la manière dont il convient d’écrire les titres d’ouvrage. On parlera donc littérature et cinéma.

Je crois qu’autrefois j’aurais aimé rejoindre les rangs des imprimeurs, d’authentiques savants capables d’appréhender des centaines de normes, de règles, en un mot des techniciens à la croisée des mondes manuel et intellectuel.

Il faut s’efforcer de respecter les règles en matière d’édition comme il convient de respecter les feux de circulation. Cela rend la vie plus simple. Si j’écris « J’adore les misérables » ou « On ne badine pas avec l’amour d’Alfred de Musset », ou bien « II faut qu’une porte soit ouverte ou fermée » du même Alfred, je risque d’installer la confusion chez mes lecteurs.

Comme presque toujours, nos errements viennent d’outre-Manche et d’outre-Atlantique (je ne parle pas de l’outre-Rhin car la langue allemande est un cas à part). Les Grands-Bretons et les Étasuniens ont tendance à mettre des majuscules un peu partout (What’s New Pussycat ? contre Quoi de neuf Pussycat ?, For Your Eyes Only contre Rien que pour vos yeux, “ Let It Be Me ” contre “ Je t’appartiens ”). Nous, non, mais nous sommes contaminés par ce qui n’est pas notre grammaire, notre culture, nos traditions.

Alors faut-il écrire « J’ai vu l’avare de Molière », « J’ai vu L’avare de Molière », « j’ai vu l’Avare de Molière » ou « j’ai vu L’Avare de Molière » ? Sans oublier que, depuis que nous disposons de traitements de texte, il vaut mieux mettre le titre de l’œuvre en italiques. Nous écrirons donc : « J’ai vu l’Avare de Molière ». Ça marche aussi pour la sculpture ou la peinture : « Quelle est l’influence de Camille Claudel dans le Baiser de Rodin ? ». Ou encore : « J’aimerais bien revoir la Joconde ».

Citer le nom d’une œuvre obéit à des règles simples mais précises. Autrefois, on soulignait les titres. Maintenant, les italiques des traitements de texte permettent d’écrire sans ambiguïté : “ Le Chêne et le Roseau ” compte parmi les Fables de La Fontaine. Á noter que roseau prend une majuscule car il est en miroir par rapport au chêne. Pour les journaux, revues, pour les émissions qui constituent une œuvre, les italiques s’imposent : France-Soir, Initiative Communiste, Affaires sensibles. Pour les sites internet, nous sommes encore en plein flottement : pour l’instant, j’écris Le Grand Soir et non Le grand Soir ou Le Grand Soir, ou encore Le grand soir.

Les textes courts – articles, chansons, chapitres, contes – qui font partie d’un ensemble et qui ne constituent pas des publications isolées sont le plus souvent mis entre guillemets : “ Un cœur simple ” de Flaubert fait partie du recueil Trois contes (et non 3 Contes).

Seul le premier mot d’un titre d’œuvre prend une capitale initiale : Voyage au bout de la nuit, Du contrat social, l’Éducation sentimentale. Les noms propres conservent leur majuscule : Michel Strogoff, Madame Bovary, Babbitt.

Si le titre commence par un adjectif ou un adverbe, on ne met pas de capitale après le premier substantif : Vingt Ans après, Cent ans de solitude.

Si le titre constitue une phrase à lui seul, seul le premier mot prend une capitale : Autant en emporte le vent, Touchez pas au grisbi !. Si le titre ne constitue pas une phrase, on capitalise le premier substantif : les grandes Espérances. Á noter l’exception des Fleurs du Mal, Baudelaire ayant exigé cette seconde capitale. Si un adjectif est placé entre l’article et le substantif ou après le substantif, il commencera par une capitale : les Trois Mousquetaires, la Vingt-cinquième heure, les Femmes Savantes, le Courrier Picard.

Lorsqu’un titre contient une comparaison ou une symétrie, les substantifs qui le composent commencent généralement tous par une capitale : Crime et Châtiment, le Zéro et l’Infini. Si le titre contient un mot composé, le deuxième élément commence par une capitale : le Procès-Verbal, l’Affaire Saint-Fiacre. On ne met jamais les titres en abrégé : Madame Bovary, Madame de.

Pour ce qui est des chiffres, il faut respecter les choix des auteurs : l’Assassin habite au 21, 1984 (version française, Nineteen Eighty-Four, version originale), Quatrevingt-treize, (Hugo ne s’était pas vraiment expliqué sur cette graphie : « J’ai déjà fait observer que Quatrevingt ne veut pas de trait d’union. C’est un seul mot. Ne pas l’oublier. »)

Attention à la Bible et au Coran : « J’ai lu la Bible », mais « J’ai une bible à la maison » ; « Passe-moi ton exemplaire du Coran », mais « Tu trouveras des corans en solde chez le bouquiniste ».

Problème de l’article contracté : « J’ai assisté à une représentation du Cid » (et non pas de le Cid), « J’aime le Baudelaire des Fleurs du Mal », « J’aime l’humour des Joyeuses Commères de Windsor  », « J’ai une édition du XIXe siècle des Trois Mousquetaires », « Je pense aux “ Petites madmaselles ” de Gilbert Bécaud », « Il nous a parlé du Rouge et le Noir » (et non du Noir), « Je n’ai pas trop aimé sa critique de les Salauds vont en enfer ».

Pour ce qui est des films, les règles peuvent être différentes. Lorsque le titre commence par un article défini, seul le premier substantif prend la majuscule : les quatre Filles du docteur March, le Rideau déchiré, la Femme du boulanger. Si un adjectif précède le substantif, il commence par une majuscule : le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain. Mais l’adjectif ne porte pas la majuscule lorsqu’il suit le substantif : la Lettre écarlate. Lorsque l’article commence par un article indéfini, les mots qui suivent ne portent pas la majuscule : Une si jolie petite plage. Si le titre est une phrase, aucun des mots qui suit l’article ne porte la majuscule : Elle boit pas, elle fume pas, elle drague pas, mais... elle cause ! Le cave se rebiffe. Si un titre est composé de plusieurs substantifs au même niveau, ils portent tous la majuscule : Le Bon, la Brute et le Truand. Mais dans Diabolo menthe, le statut de menthe est inférieur à celui de diabolo.

On l’a dit, les Britanniques et étasuniens mettent des majuscules un peu partout. Les Italiens sont parcimonieux : La dolce vita, La ciociara. Les substantifs allemands commençant par une majuscule, ça y va, outre-Rhin : das Kapital, die Entwicklung des Sozialismus von der Utopie zur Wissenschaft, die Brücke. Les Espagnols sont plus modérés : La piel que habito, Mar adentro, Abre los ojos, Cien años de soledad, Don Quijote de la Mancha.

E la nave va…

URL de cet article 36847
  

Même Auteur
Maurice Tournier. Les mots de mai 68.
Bernard GENSANE
« Les révolutionnaires de Mai ont pris la parole comme on a pris la Bastille en 1789 » (Michel de Certeau). A la base, la génération de mai 68 est peut-être la première génération qui, en masse, a pris conscience du pouvoir des mots, a senti que les mots n’étaient jamais neutres, qu’ils n’avaient pas forcément le même sens selon l’endroit géographique, social ou métaphorique où ils étaient prononcés, que nommer c’était tenir le monde dans sa main. Une chanson d’amour des Beatles, en fin de compte très (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

"L’un des grands arguments de la guerre israélienne de l’information consiste à demander pourquoi le monde entier s’émeut davantage du sort des Palestiniens que de celui des Tchétchènes ou des Algériens - insinuant par-là que la raison en serait un fonds incurable d’antisémitisme. Au-delà de ce qu’il y a d’odieux dans cette manière de nous ordonner de regarder ailleurs, on peut assez facilement répondre à cette question. On s’en émeut davantage (et ce n’est qu’un supplément d’indignation très relatif, d’ailleurs) parce que, avant que les Etats-Unis n’envahissent l’Irak, c’était le dernier conflit colonial de la planète - même si ce colonisateur-là a pour caractéristique particulière d’avoir sa métropole à un jet de pierre des territoires occupés -, et qu’il y a quelque chose d’insupportable dans le fait de voir des êtres humains subir encore l’arrogance coloniale. Parce que la Palestine est le front principal de cette guerre que l’Occident désoeuvré a choisi de déclarer au monde musulman pour ne pas s’ennuyer quand les Rouges n’ont plus voulu jouer. Parce que l’impunité dont jouit depuis des décennies l’occupant israélien, l’instrumentalisation du génocide pour oblitérer inexorablement les spoliations et les injustices subies par les Palestiniens, l’impression persistante qu’ils en sont victimes en tant qu’Arabes, nourrit un sentiment minant d’injustice."

Mona Chollet

Appel de Paris pour Julian Assange
Julian Assange est un journaliste australien en prison. En prison pour avoir rempli sa mission de journaliste. Julian Assange a fondé WikiLeaks en 2006 pour permettre à des lanceurs d’alerte de faire fuiter des documents d’intérêt public. C’est ainsi qu’en 2010, grâce à la lanceuse d’alerte Chelsea Manning, WikiLeaks a fait œuvre de journalisme, notamment en fournissant des preuves de crimes de guerre commis par l’armée américaine en Irak et en Afghanistan. Les médias du monde entier ont utilisé ces (...)
17 
Analyse de la culture du mensonge et de la manipulation "à la Marie-Anne Boutoleau/Ornella Guyet" sur un site alter.
Question : Est-il possible de rédiger un article accusateur qui fait un buzz sur internet en fournissant des "sources" et des "documents" qui, une fois vérifiés, prouvent... le contraire de ce qui est affirmé ? Réponse : Oui, c’est possible. Question : Qui peut tomber dans un tel panneau ? Réponse : tout le monde - vous, par exemple. Question : Qui peut faire ça et comment font-ils ? Réponse : Marie-Anne Boutoleau, Article XI et CQFD, en comptant sur un phénomène connu : "l’inertie des (...)
93 
Reporters Sans Frontières, la liberté de la presse et mon hamster à moi.
Sur le site du magazine états-unien The Nation on trouve l’information suivante : Le 27 juillet 2004, lors de la convention du Parti Démocrate qui se tenait à Boston, les trois principales chaînes de télévision hertziennes des Etats-Unis - ABC, NBC et CBS - n’ont diffusé AUCUNE information sur le déroulement de la convention ce jour-là . Pas une image, pas un seul commentaire sur un événement politique majeur à quelques mois des élections présidentielles aux Etats-Unis. Pour la première fois de (...)
23 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.