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Barack Obama : « les américains n’accepteront pas d’être numéro 2 ».

États-Unis : la signification du vote de 2 novembre !

Imaginer un monde sans pays

Ni raison pour tuer ou mourir

Et aussi sans religion

(John Lennon)

Au mois d’août dernier, le président des Etats-Unis d’Amérique, Mr Barack Obama, avait déclaré et je cite que : « les américains n’accepteront pas d’être numéro 2 ». Cette déclaration confirme et renforce le grand malaise qui traverse la société américaine, en particulier la classe moyenne majoritaire et les couches défavorisées.

L’économie américaine souffre depuis une décade des revers récessifs obligeant les autorités fédérales et locales à adopter des mesures impopulaires de taxation excessive et de sombres coupes budgétaires. La crise immobilière, ajoutée aux mauvaises habitudes de gaspillage de biens de consommation et le lourd fardeau de deux guerres placent le pays au bord d’une explosion sociale. Les bornés de la droite classique et de l’extrême, au lieu d’approcher la crise avec des idées fraiches, c’est-à -dire sortir de la boite, ils procèdent par la politique des blâmes. Ils responsabilisent les 12 millions d’illégaux, composés majoritairement de Mexicains, comme cause essentielle du chômage galopant avoisinant maintenant les 10%. Ces mexicains qui se trouvent sur le territoire américain arrivent massivement après avoir franchi la frontière passoire entre les deux pays.

Les « pèlerins », se croyant toujours au 17 e siècle, conjurent les homosexuels et lesbiennes comme sources de malheur qui s’abattent sur le pays. Ils invitent le peuple à la prière tout en rappelant leur « destinée manifeste », ce qui renforce une conviction qui fait peur. A ce propos, Friedrich Nietzche, grand philosophe allemand, a déclaré que « les croyances (convictions) sont plus dangereuses pour la vérité que les mensonges ». Donc, la résolution de la crise n’est pas pour demain, parce que les racines de ces maux sont profondes et globales, toute véritable solution doit passer par une relecture, voir même une remise en question des solutions traditionnelles. Celles de jadis qui accordent plus d’avantages aux riches et à leurs compagnies pour qu’ils puissent réinvestir dans l’économie à des fins de création de nouveaux emplois. Quelle absurdité, lorsqu’on considère que les richesses accumulées par les capitalistes ne sont pas exclusivement dues au marché local, donc pas d’obligations nationales ou patriotiques. Voila le décor dans lequel les législatives américaines eurent lieu le 2 novembre dernier.

Tous les sondages d’avant les élections scandaient haut et fort le retour des républicains au contrôle de la chambre basse, voir même le sénat. Mettant fin ainsi a deux ans de contrôle total du pouvoir par le parti démocrate. En dépit d’une fin de campagne marquée par une implication active du président et d’autres poids lourds du parti démocrate pour empêcher la descente aux enfers, il était déjà trop tard. Fox news, d’un coté, avec Glenn Beck, Pat O’reilly, Karl Rove…de l’autre avec une pléiade de commentateurs radiophoniques, dont Rush Limbaugh, s’harmonisaient pour mettre fin à l’expérience du premier noir à la présidence.

Ceux qui vivent aux Etats-Unis font l’expérience d’un moment très difficile avec ce taux de chômage trop haut pendant trop longtemps. Par contre, retourner les républicains au pouvoir, est-elle la bonne solution ? Considérant le fait que c’était sous l’administration de George Bush que la situation économique commençait à se dégrader de cette façon, laissant ainsi derrière elle un trop lourd héritage à son successeur. Donc ramener au pouvoir ceux-là même qui avaient contribué à la détérioration de l’économie pour la fixer constitue en soi une décision hautement périlleuse. D’autant plus que les républicains revendiquent le pouvoir sous la rubrique de se défaire de toutes les grandes décisions prises par l’administration actuelle, en particulier le programme de santé. Ils promettent de réduire le déficit budgétaire, d’en finir avec le « big government », de réduire les taxes…Aucun expert en économie ne voit comment ces mesures vont faire la différence, c’est-à -dire créer de nouveaux jobs.

Le Washington Post, parlant de la première décade du nouveau siècle, la qualifie de « décade perdue » dans un éditorial. Le siècle a mal commencé, pourtant très prometteur avec un surplus budgétaire de plusieurs billions de dollars laissés par le prédécesseur de Bush, Bill Clinton. Tout a mal tourné lorsque les « neo-cons » proposaient un nouveau Pearl Harbor pour s’assurer que le 21e siècle soit totalement américain. Le 11 septembre a lieu, entrainant le pays dans deux guerres non-nécessaires. Chacune coûtant plus de 200 millions de dollars quotidiennement aux contribuables américains.

Pourquoi la droite en veut tellement la tête d’Obama ?

A côté des considérations politiques inhérentes au jeu politique, il y a aussi des raisons idéologiques profondes liées à l’occident. D’abord, l’ascendance de Barak à la présidence marque le bond en avant du multiculturalisme aux Etats-Unis avec lequel les conservateurs ne peuvent vivre. Il faut par tous les moyens le tuer dans l’oeuf parce que c’est le « radix malorum » « la racine de tous les maux », donc le démon. Le multiculturalisme qui prône l’inexistence de cultures et de civilisations supérieures met en danger le « destin manifeste » des américains, en réalité du monde occidental. Dans un pays, ou toutes les nationalités et races s’harmonisent peu à peu, à un point tel que dans 50 ans on prédit qu’il n’y aurait plus de races majoritaires. Donc, un noir à la Maison Blanche fait flamber la passion des nostalgiques du monde ancien. L’avènement d’Obama est perçu comme un mauvais cauchemar dont il faut vite se réveiller. Ce n’est pas une réalité, mais un mauvais rêve qui doit être conjuré au simple stade de rêve.

Apres la défaite de son parti aux dernières législatives, Barak Obama se préparait à visiter 3 pays de l’Asie : l’Inde, l’Indonésie et la Corée du sud. Automatiquement on a déclenché la machine infernale à lyncher contre le président. On ne lui a même pas donné un jour pour digérer la défaite, l’offensive est permanente. Glenn Beck du Fox News, a fait état à l’opinion publique américaine que le président gaspille l’argent des contribuables en dépensant 200 millions de dollars par jour au cours de sa visite de 10 jours en Asie. Et que 3 porte-avions militaires sont mobilisés pour assurer sa sécurité. Le Pentagon l’a démenti par l’intermédiaire de son porte-parole Geoff Morrell, en qualifiant ces allégations d’ « absolument absurdes » et de « très comique ». La Maison Blanche a déclaré que les 200 millions dont on parle « n’ont aucune base réelle ». Je prends cet exemple pour illustrer la haine profonde des conservateurs à l’ endroit de l’administration actuelle. N’importe qui, le plus mentalement débile, peut déterminer l’absurdité d’une telle information, mais on la présente dans les grands médias comme manchette, ce qui pousse des observateurs sensés à questionner la crédibilité de ces journalistes. Il ne s’agit plus de dire la vérité ou d’informer, c’est de la propagande mensongère à l’état pur, on ne se soucie pas de l’éthique et des dommages que peuvent provoquer la diffusion de ces salades. L’important c’est le résultat, c’est-à -dire effacer le couple multi-culturaliste noir de la Maison Blanche.

Maintenant en Amérique, l’indécence est acceptable. Un observateur a fait remarquer que la guerre afghane coûte 190 millions de dollars par jour, donc il est impossible que le coût quotidien du voyage présidentiel atteigne les 200 millions. Ils le savent bien, mais cela fait partie de la stratégie de lynchage : tout exaspérer et diaboliser. Il y a quelques mois de cela, je parlais à un professeur américain, un grand fan de John Lennon, il précisa que les conservateurs peinent de voir se matérialiser la prophétie de Lennon. Dans son étrange chanson intitulée « Imagine »*, le chanteur-poète imagine un autre monde :

There’s no heaven

It’s easy if you try

No hell below us

Above us only sky

Imagine all the people living for today

Imagine there’s no country

It isn’t hard to do

Nothing to kill for

And no religion too

Imagine all the people

Living life in peace

L’extrémisme débridé à l’endroit d’Obama peut être interprété comme une réaction convulsive de tout esprit déséquilibré à la veille d’une potentielle fin de règne. C’est un état démentiel proche de la folie furieuse n’écartant rien comme méthode permettant d’atteindre l’objectif fixé et réfute la raison comme outil de pensée normative. Ceux qui atteignent cet état de névrose critique, en général développent des comportements dégénérescents allant d’exagérations verbales à la criminalité odieuse. Les experts avaient identifié des comportements hystériques similaires chez beaucoup de criminels tristement célèbres, dont Mark David Chapman, l’assassin de Lennon.

L’esclavage, l’extermination des indiens, le sexisme à l’ endroit des femmes, le racisme contre les noirs…constituent des rappels obscurcissants pour l’histoire de l’occident. De même que le refus de l’état français de restituer à Haïti les 21 milliards de dollars extorqués près deux siècles de cela pour reconnaitre l’indépendance de ce pays de nègres. En guise d’admettre leurs culpabilités, les conservateurs assument ces périodes d’horreur, pas pour les dépasser mais pour les instituer comme identité occidentale. Dick Cheney, ancien vice-président américain, conçoit les déclarations conciliatoires du président Obama dans les sommets internationaux comme une façon de « voyage[r] dans le monde demandant pardon ». Par insinuation, le président est entrain d’affaiblir le pays. Au contraire, il devrait s’engager à mener « la guerre qui mettra fin à toutes les guerres » pour parodier l’ancien président américain, Woodrow Wilson.

Obama est perçu comme trop intellectuel, pas assez yankee. Ce grand pays qui m’avait accueilli lorsque le mien, Haïti, m’avait rejeté, là ou j’ai donné naissance à 3 de mes enfants, non c’est impensable. Dire d’un président qu’il est trop intellectuel pour assumer la haute fonction présidentielle constitue une atteinte grave à la décence et à l’esprit humain. Jimmy Carter est parmi les très rares présidents ayant accédé au pouvoir pendant 4 ans à n’avoir pas fait tonner les canons, après quoi ils sont tous solidaires dans l’art de faire la guerre. Président Obama n’a encore déclaré de guerre à aucun pays, il poursuit les guerres de Bush en Irak et Afghanistan. Ce comportement non-martial rend malade les « warmongers » de Washington qui entendaient chevaucher d’autres invasions militaires en Iran, Corée du nord et Venezuela. Obama confronte les mêmes problèmes que Kennedy qui s’opposait à la stratégie du complexe militaro-industriel. Dans l’état actuel de l’économie, beaucoup de conservateurs croient fermement dans l’équation guerre\richesse pour sortir le pays de la récession. Cette mentalité guerrière, typique à tout empire, est une menace réelle pour la paix internationale, et un défi pour l’humanité.

Depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, les peuples du monde entier s’attendent à l’émergence d’un courant de pensée dépourvue de toute essence impériale et de l’arrogance traditionnelle des nations riches et fortes. Une pensée traduisant les particularités de tous les peuples et de toutes les cultures dont aucun état n’a le monopole. C’est ce que certains appellent un « nouvel ordre mondial ». Ce rêve prend encore du recul sur tous les continents, à l’exception de l’Amérique du sud, la réaction militariste est en effervescence, comparativement aux années 90 quand l’Europe empruntait le chemin du social. Les coups d’état en Haïti de 2004, celui du Honduras il y a un an de cela et la dernière tentative de coup en Equateur ébranlent les pensées les plus optimistes.

Les résultats des élections législatives de 2 novembre dernier annoncent ce qui va se passer en 2012. D’ailleurs, les conservateurs le disent ouvertement que c’était un referendum contre Obama. Les Bourbons vont revenir ! L’administration actuelle ne reflète pas la tendance va-t-en guerre ou bombe, bombe, bombe souhaitée aux affaires. L’ironie autour de ces élections, c’est la propagande communiste à l’endroit du président Obama, en même temps ces accusateurs célèbrent annuellement leur victoire sur le socialisme avec la chute du mur de Berlin. Quoiqu’on est entrain de construire de nouvelles « murailles de Chine » le long de la frontière avec le Mexique et dans la bande de Gaza en Palestine. Cette propagande médiévale nous renvoie aux temps forts de la guerre-froide des années 60 en Amérique latine. Quand les généraux pilonnèrent leurs adversaires politiques sous les prétextes mensongers de communiste pendant que l’occident applaudissait.

Ceux qui à l’étranger, observaient le discours politique au cours de la campagne électorale s’indignaient du taux de mensonges, de braquages politiques et de matraquages idéologiques qui animaient la littérature politique. On dirait un pays du tiers-monde en mal de « démocratie » qui se cherche, trébuchant à chaque pas sous l’exigence de la communauté internationale à organiser des élections sous peine de voir couper leurs vivres internationaux.

Les élections du 2 novembre marquent la volonté inébranlable de récupérer le pouvoir politique. Les conservateurs sont avides. D’après eux, Obama est un extra-terrestre venu d’une autre galaxie qui s’est accaparé du pays ; chauffés à blanc ils veulent le reprendre. Ils accusent les illégaux, les minorités, le communisme comme responsables, tout en s’innocentant. C’est une période où tous les coups sont permis, le président n’est pas Américain, il est Kényan, il est socialiste, il gaspillage l’argent des contribuables dans des voyages stériles, qui pourtant devraient créer plus de 50.000 nouveaux emplois. C’est une opposition systématique confondant le bien et le mal, ceux qui soutiennent Obama sont des démons, par contre, eux, des anges en croisade. Voilà le sens du vote de 2 novembre.

Joël Léon.

Bibliographies :

The death of the west, livre de Patrick Buchanan

The tyranny of metaphor, article de Robert Malleck paru dans Foreign Policy

Think again : global aging, article de Phillip Longman

Georg Lukacs, History and class consciousness

Herbert Marcuse, Eros and civilization

John Lennon, chanson "Imagine" et déclarations :

*« Imaginez »

il n’y a pas de paradis

c’est facile si vous essayez

pas d’enfer sous nos pieds

au-dessus de nous seulement le ciel

imaginez tous les gens vivant pour aujourd’hui

imaginez qu’il n’y ait pas de pays

ce n’est pas difficile à faire

rien pour tuer

et pas de religion non plus imaginez tout le peuple

vivant la vie en paix

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