Quand Bernie Sanders et son mouvement de masse deviennent « le pire cauchemar » de ceux qui gouvernent le monde...

Maintenant que même les plus sceptiques et incrédules, semblent commencer à prendre – enfin – conscience que Bernie Sanders est un candidat très sérieux à la présidence des États-Unis, il est plus que temps qu’on se penche un peu sur ce qui fait que le contenu de sa candidature soit inédit, historique et révolutionnaire, au sens propre du terme. En somme, sur ce qui fait que ses adversaires de tout bord, de Trump à l’establishment Démocrate et aux grands capitalistes qui gouvernent le monde, aient si peur de ce Bernie qui monte en flèche et fassent tout leur possible pour le “neutraliser”...

Alors, de quoi tout ce beau monde a-t-il peur ? La réponse n’est pas trop difficile : Il a surtout peur non pas du programme de Bernie Sanders mais de l’énorme mouvement populaire que ce même Bernie a lancé en novembre 2018 et qui est toujours en train de se construire ! Un mouvement populaire qui n’a pas de précédent dans l’histoire des États-Unis ni par ses dimensions ni par sa radicalité et la détermination de ses jeunes militants et militantes d’en découdre avec ce système et ses représentants politiques ! Comme l’a dit récemment si bien Noam Chomsky : “Encore plus menaçant que les propositions de Sanders de mener à bien des politiques du genre New Deal, je crois que c’est qu’il inspire un mouvement populaire engagé résolument dans l’action politique et l’activisme direct afin de changer l’ordre social – un mouvement du peuple, surtout des jeunes, qui n’ont pas encore intériorisé les normes de la démocratie libérale : Que les gens sont des “étrangers ignorants et importuns” qui doivent être des “spectateurs, pas des participants agissants”, autorisés à pousser un levier chaque quatre ans mais à retourner juste après devant leur écran de télévision et leurs jeux vidéo tandis que les “gens responsables” s’occupent des choses sérieuses”. (1)

Et force est de constater que la raison profonde de la peur ou même de la terreur qu’inspirent à ceux d’en haut ces millions de jeunes activistes, est qu’ils et elles transforment en force bien matérielle les idées dites “dangereuses”, et ce faisant, imposent un nouveau rapport de forces au niveau tant social que politique ! Ce qui a plusieurs conséquences dont celle d’assurer la continuité du mouvement populaire de masse et de rendre moins efficaces sinon inopérantes les politiques de répression ainsi que la propagande du pouvoir. Pourquoi ? Mais, parce qu’il suffit une balle pour éliminer une personne – comme par exemple Bernie Sanders – quand elle devient trop dangereuse, mais il faut bien plus pour battre et éliminer un mouvement populaire radicale et de masse qui veut “changer la vie et le monde”...

Évidemment, loin de nous l’idée de sous-estimer l’importance (capitale) du programme de Bernie Sanders, car c’est ce programme – ainsi que son exemple personnel – qui ont inspiré et mobilisé ces millions de jeunes et de moins jeunes. En effet, les propositions, les positionnements et les revendications qui sont contenus dans ce programme couvrent tous les domaines de l’activité humaine, proposent des réponses et des solutions aux graves problèmes existentiels qu’affronte tant la société nord-américaine que l’humanité, tout en faisant le pont entre la satisfaction des besoins immédiats de la grande majorité de la population et la vision d’un monde radicalement différent.

Alors, s’agit-il d’un programme “révolutionnaire” ou d’un ensemble de revendications et des mesures “bourgeoises” qui feraient de Bernie Sanders un politicien pratiquement “comme les autres” ? A première vue, aucune des mesures et politiques phares du programme de Bernie Sanders comme, par exemple, “assurance santé pour tous”, “enseignement gratuit pour tous” ou même abolition des prisons privées et annulation totale de la dette étudiante, ne peut être qualifiée de “révolutionnaire”. D’ailleurs, plusieurs d’entre elles sont – à juste titre – présentées par Bernie lui-même comme inspirées du précédent historique du New Deal rooseveltien dont il se revendique ouvertement. Mais, qu’est-ce qu’il y avait de « révolutionnaire » au mot d’ordre “Pain, Paix et Terre” des Bolcheviks qui a enflammé la population russe et permis qu’elle soit suffisamment motivée pour faire une révolution comme celle d’Octobre 1917 ? En somme, ce qui fait qu’une revendication devienne révolutionnaire ce n’est pas tant ses qualités intrinsèques mais plutôt la dynamique sociale et politique qu’elle libère et développe dans un contexte et un moment historique donnés. Et force est de constater que le programme de revendications transitoires de Bernie Sanders est actuellement en train de développer une telle dynamique subversive...(2)

La preuve ? Mais, elle est offerte par les réactions des uns et des autres. C’est à dire de ceux d’en bas et de ceux d’en haut qui l’interprètent, chaque camp à sa façon et selon ses intérêts, comme une claire incitation à la révolte contre le système et ses principales forces économiques et politiques. Pour ceux d’en bas (salariés, minorités, femmes, indigènes, migrants et victimes de toute oppression), ce programme est déjà devenu une source d’inspiration, une arme de combat et aussi un drapeau qu’on brandit haut et fort. Et en tant que tel il a déjà fait ses preuves avec un succès sans précédent. Mais, pour les autres, c’est a dire ceux d’en haut (Trump, l’establishment Démocrate, les grands médias et surtout les grands intérêts capitalistes) c’est tout simplement la pire des menaces existentielles ou plutôt « le pire cauchemar » comme aime le répéter publiquement Bernie lui-même.

Alors, il arrive ce qui devait arriver : Ceux d’en haut déclarent une guerre sans merci à Bernie et au mouvement populaire qui le soutient. C’est logique et ça ne pouvait pas être autrement du moment que Bernie et ses amis, les jeunes députées et sénatrices Alexandria Ocasio-Cortez, Ilhan Omar, Rashida Tlaib et Pramila Jayapal en tête, osent attaquer nommément et publiquement les ennemis (capitalistes) dont ils promettent la fin prochaine. Et cette guerre est – déjà – impitoyable : tous les coups sont permis jour après jour (3), jusqu’à ce que Bernie soit définitivement « neutralisé » et son mouvement battu en brèche. Tous les coups, même les plus extrêmes et les plus répugnants et barbares car l’enjeu de cet affrontement de classe à mort est d’une taille plus qu’énorme et de dimensions historiques...

Notes

1. Interview à C.J. Polychroniou : https://truthout.org/articles/noam-chomsky-sanders-threatens-the-establishment-by-inspiring-popular-movements/

Cette interview de Noam Chomsky ainsi que des milliers de textes, vidéos et images de première main venant des États-Unis et concernant tout ce qui se passe au sommet mais surtout à la base de la société nord-américaine, sont postés heure après heure sur le Facebook "Europeans for Bernie’s Mass Movement" que nous avons lancé il y a 3,5 ans et que nous conseillons vivement aux lecteurs de gauche : https://www.facebook.com/EuropeansForBerniesMassMovement/

2. Il est pour le moins regrettable que les gauches européennes n’arrivent pas à comprendre que ce qui se passe aux États-Unis depuis 4 ans est d’une importance historique pour la gauche et le mouvement ouvrier du monde entier, et donc pour elles-mêmes aussi. Pourtant, elles auraient tout à gagner en tissant des liens et en développant des mouvements de solidarité active avec le mouvement radical de masse nord-américain, maintenant qu’il est à l’épicentre d’un affrontement de classe gigantesque et à l’issue tout a fait incertaine. Et tout ça indépendamment de leur devoir internationaliste tant négligé par les temps qui courent...

3. Une des dernières manifestations de cette guerre quotidienne contre Bernie a été la publication des résultats de la primaire emblématique de l’osa avec un retard de plus de 72 heures ! Ce qui a permis au jeune poulain de l’establishment et du grand capital Pete Buttigieg de se poser en triomphateur et à Joe Biden d’éviter de payer le prix de son résultat humiliant tandis que Bernie a été empêché de tirer avantage de sa victoire, ayant remporté très nettement le vote populaire. Le fait que la société Shadow responsable de ce scandale ait travaillé en 2016 pour le compte de Hillary Clinton, et qu’elle soit actuellement employée et payée par les campagnes de Jo Biden et de Pete Buttigieg est évidemment une pure coïncidence...

COMMENTAIRES  

06/02/2020 18:35 par Danael

Une peur au point de trafiquer les résultats ? Nothing new.

Max Blumenthal 6 février
À l’heure d’écrire ces lignes, 12 heures après la fin du vote dans le caucus du Parti Démocrate de l’Iowa, les résultats n’ont toujours pas été annoncés[1]. Les dysfonctionnements dans la publication des résultats sont dus à une application défaillante développée par une société bien nommée, Shadow Inc.
Cette entreprise est composée d’anciens membres des campagnes d’Hillary Clinton et de Barack Obama. Elle a été créée à partir d’argent relativement opaque provenant d’un organisme à but non lucratif du Parti Démocrate financé par des milliardaires de fonds spéculatifs, dont Seth Klarman. Fervent bailleur de fonds de lobbies défendant les colons israéliens, Klarman a également contribué directement à la campagne de Pete Buttigieg.
Le retard dans la publication des résultats du vote a privé le sénateur Bernier Sanders d’un discours de victoire. Il était le vainqueur présumé de ce premier vote des primaires démocrates. Bien qu’aucun sondage n’indiquait que Buttigieg avait gagné, celui qui est maire de South Bend, dans l’Indiana, s’est tourné vers Twitter pour se proclamer vainqueur en toute confiance.

En français : https://www.investigaction.net/fr/un-milliardaire-pro-israelien-et-soutien-de-buttigieg-derriere-lapplication-a-lorgine-du-fiasco-des-primaires-democrates-dans-liowa/
En anglais : https://thegrayzone.com/2020/02/04/pro-israel-buttigieg-seth-klarman-iowas-voting-app/#more-20231

06/02/2020 23:19 par robess73

bel article yorgos .par contre il faut préciser ce que vous entendez par "gauches europeennes".cest tres flou.a signaler par exemple l article de JLM.qui contredit votre affrimation ..

07/02/2020 06:25 par guy

Yorgos et Bernie ......on dirait une marque de Yaourt !

07/02/2020 09:45 par Assimbonanga

Déclarer qu’on est vainqueur le premier et le tenir pour acquis ? Mais ce n’est pas nouveau. Je l’ai vu dans la télévision, dans mon feuilleton POLDARK, saison 2. Donc, ça date au moins du XVIIIè siècle ! Dans un instant de confusion lors du dépouillement, il suffisait de s’asseoir le premier sur la chaise de député et hop, vous étiez le député !
Ah la la, comme vous pouvez être naïf !
Bon allez, il y a quand même des joies en ce bas monde. Regardez comment que les Auverhonalpins ont de la chance : ils ont le plus beau président de région, avec sa barbe poivre et sel, un véritable Ken de Barbie de la maturité. Tellement beau que le magazine de la région reprend quatre fois cette même photo à l’intérieur de ses pages. La Région Auvergne-Rhône-Alpes n°11
Vous voyez bien que le monde peut être beau et que l’argent public peut servir à des actions utiles, comme de diffuser le reflet dans le miroir de L. Wauquiez.
Mais za par ça, c’est qui qu’a un ego démesuré, hein ?

07/02/2020 12:14 par Claude

Cela nous change des repas frelaté servis au quotidien par notre tété et la presse aux ordres.

07/02/2020 23:19 par François de Marseille

Bernie Sanders dans la course ... 1 point pour Emmanuel Todd ?

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