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Venezuela : Le Monde s’ouvre la voie de la désinformation à vie.


Mardi 5 septembre 2006.


Au jeu de la joute médiatique pour disqualifier la démocratie vénézuélienne, le journal Le Monde, s’est particulièrement illustré ces derniers mois. Les différends articles publiés sur la révolution bolivarienne avaient tous en commun leurs lots d’inexactitudes, de matrices d’opinions négatives et d’erreurs factuelles qui entretiennent une image erronée et mensongère du processus bolivarien.

L’article récent de Paolo A. Paranagua respecte bien cette logique en accumulant des anecdotes négatives au sujet du président Hugo Chavez, dont l’imputation à peine voilée de vouloir être président à vie. L’on se trouve encore une fois face un exemple de "journalisme d’imputation", pour reprendre le mot d’ H.Maler et R. Lambert à propos d’une autre tentative médiatique de déstabilisation du gouvernement bolivarien, qui fait fit des faits et de la réalité politique du pays qu’il prétend décrire.

Sous le titre "Venezuela : Hugo Chavez s’ouvre la voie pour une présidence à vie", Paolo A. Paranagua note que le président vénézuélien "a annoncé l’organisation d’un référendum ouvrant la possibilité, de se faire réélire indéfiniment". On peut déjà remarquer la différence cruciale qu’il y a entre le titre de l’article et la phrase du journaliste. Alors que le titre accuse clairement le président Chavez de dictateur, le contenu de l’article peut paraître plus modéré au lecteur, incluant la notion de réélection. Cependant à nier les mécanismes légaux de la démocratie vénézuélienne, le contenu de l’article poursuit finalement le même but que le titre.

Le référendum que veut organiser le chef de l’Etat vénézuélien sur ce thème le 2 février 2010, ne sera que consultatif. Comme l’a dit Chavez, " si [la majorité de l’électorat] répond oui, il faudra modifier la Constitution pour que la réélection puisse être indéfinie". Or sur ce point, l’article 343 alinéa 5 spécifie qu’un projet de réforme constitutionnelle n’est possible qu’au long d’un processus que devra ratifier au minimum 66% des députés de l’Assemblée Nationale. Aprés l’échec de la stratégie de boycott électoral des élections parlementaires du 4 décembre 2005, le palier des deux tiers de l’Assemblée Nationale apparaît comme une formalité, la totalité de l’hémicycle vénézuélien appuyant la gestion gouvernementale. Cependant, ce projet de réforme constitutionnel pour être validé doit, comme le stipule l’article 344 de la Constitution, être soumis à un referendum qui cette fois ne sera plus consultatif mais entérinera la modification constitutionnelle.

Comme on peut le voir, le pouvoir de l’Exécutif dans la réalisation de la modification de la Constitution se limite à un rôle de soutien à l’un ou l’autre choix du referendum populaire. Comme n’importe quel homme politique, il se prononce sur ce qu’il pense être le meilleur pour le pays de son point de vue. En aucun cas, comme le laisse entendre l’article du Monde, une modification du texte constitutionnel ne peut être un caprice présidentiel imposé au peuple souverain.

Mais c’est précisément l’objectif de l’article. Faire croire que Hugo Chavez règne tel un monarque sur la République Bolivarienne du Venezuela. Ainsi, lorsque Paranagua nous dit que "la Constitution de 1999 a été inspirée par M. Chavez lui-même", il oublie volontairement (ne mettons pas en doute ses compétences) de rappeler que si la trame du texte a bien été inspiré par le Président et ses proches conseillers, la Constitution a été élaboré tout au long d’un processus qui incluait un referendum pour savoir si le Venezuela devait changer ou non de Constitution, une élection d’une Assemblée Constituante qui va travailler plus de trois mois pour établir la Charte suprême, l’élaboration d’un cahier des charges faite par les organisations de base et transmit à cette assemblée constituante afin d’enrichir leur travail, et enfin la ratification de la nouvelle Constitution par referendum populaire.

En ne rappelant que la proposition du président Chavez au détriment de toutes les étapes du processus constitutionnel, Mr Paranagua fait coup double. D’une part, il nie tout le processus démocratique qui a donné naissance au texte constitutionel, et laisse entendre que Chavez au mépris des institutions et de la séparation des pouvoirs fait seul la pluie et le beau temps au Venezuela. D’autre part, il semble indiquer que comme Chavez a inspiré seul la Constitution, il peut très bien la modifier au gré de ses envies, et notamment pour être réélu indéfiniment. Or comme nous l’indiquons ci-dessus, les institutions vénézuéliennes et le peuple souverain ont le dernier mot dans le Venezuela démocratique.

Un autre révélateur du but politique poursuivi par le journalisme du Monde nous est donné par l’exemple du pays voisin du Venezuela. Le 19 octobre 2005, la cour constitutionelle de Colombie attribuait au Congrès le droit d’approuver la loi autorisant la réelection du président de la Colombie, Alvaro Uribe. Nous avons beau épluché les archives du Monde, nous ne trouvons aucun type d’article comme celui de Mr Paranagua pour s’inquiéter d’une dérive totalitaire du président Colombien, alors que celui-ci a été réélu le 28 mai 2006.

Dans sa volonté d’isoler Chavez de toute velléité démocratique, Mr Paranagua écrit : "M. Chavez brigue un second mandat de six ans le 3 décembre. Depuis l’instauration de la démocratie, en 1958, il est le premier président vénézuélien à bénéficier de cette possibilité." Placé dans le contexte général de désinformation que génère l’article, le lecteur du quotidien du soir peut à juste titre s’inquiéter de cette rupture avec presque 50 ans de démocratie représentative. Nous nous permettons de rappeler à Paolo Paranagua et à ceux qui le lisent que les présidents Carlos Andres Perez (1974-1979 et 1989-1993) et Rafael Caldera (1969-1974 et 1994-1999) ont tous deux été élu par deux fois président du Venezuela. Le cas d’Hugo Chavez n’est donc pas si étranger que ça à l’histoire démocratique vénézuélienne.

De même, l’exposition du "projet du chef de l’Etat vénézuélien par le journaliste du Monde" parait vide de sens et grandiloquent pour le lecteur français. Il est vrai qu’extraire 48 mots d’un discours programmatique de trois heures n’est pas chose aisé... Cependant, au vu des résultats éthiques, sociaux, économiques, internationaux, énergétiques du gouvernement bolivarien, l’extrait choisi par le journaliste fait tout à fait sens pour la majorité des vénézuéliens qui s’apprêtent à reconduire leur président pour poursuivre leur expérience révolutionnaire.

Le tableau dressé d’un Chavez dictateur ne serait pas complet sans le sempiternel rapprochement avec le président cubain Fidel Castro. Ne dérogeant pas à sa qualité de journaliste d’imputation, Paolo Paranagua nous signale comme conclusion de son article que "avant de revenir à Caracas, M. Chavez avait fait une escale à La Havane, où il a rendu visite à son ami Fidel Castro, au pouvoir depuis quarante-sept ans." Nous ne commenterons cette opinion que pour signaler au spécialiste de l’Amérique du Sud pour le quotidien du soir, que depuis le 31 juillet dernier, Mr Fidel Castro Ruz n’est plus au pouvoir dans l’île caribéenne.

Romain Migus



Venezuela : L’assassinat d’Hugo Chávez, par Greg Palast.

« Le communisme de Chávez est en train de nous tuer ! », par Ernesto J. Navarro et Romain Migus.


Les USA accusés de vouloir renverser Chavez avec des fonds secrets, par Duncan Campbell.




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