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Pourquoi Jérôme Laronze, éleveur, a-t-il été abattu par les gendarmes

A marche forcée, le paysan peut crever.

Richard Ferrand, le pilier d’En marche, tremble et je ris jaune. Ma mère me l’avait dit "il est absurde de vouloir réunir la gauche et la droite, c’est une escroquerie où vont s’empiffrer les opportunistes de gauche et de droite ". Ainsi parle le bon sens populaire qui ne voit dans ce mouvement que la naissance du parti des opportunistes prêts à tout.

Des opportunistes qui n’ont rien à voir avec un vol de blanches colombes et qui viennent avec leur histoire nous rappeler qu’ils ont déjà une bien belle manière de voir et de pratiquer les choses de la vie politique. Se mettre en marche avec nous, disaient-ils, c’est combattre pour la transparence, contre le déclin de la morale, pour dénoncer tous les pourris et ériger la morale en vertu cardinale. Mais voilà qu’un vilain petit canard cancane, caquette, nasille que Richard Ferrand n’aurait pas eu un comportement au-dessus de tout soupçon lorsqu’il était le directeur général des Mutuelles de Bretagne. Il aurait tout simplement abusé son monde par des opérations ou des contrats dont certains de ses proches auraient bénéficié. Au moment de la mise en place du projet de loi « de moralisation de la vie publique », c’est la panique à bord et l’équipage d’En Marche fait ce qu’il faut pour réduire les fuites. Le garde des sceaux reste muet, le parquet national financier aussi et le procureur de Brest estime le 26 mai 2017 qu’il n’y a pas matière à enquête judiciaire. Il s’agit là d’une conspiration silencieuse pour tout verrouiller et poursuivre la campagne à marche forcée pour atteindre au plus vite les ordonnances et en finir avec le code du travail et peut-être aussi avec le Code de la mutualité qui semble manquer de souplesse pour conduire au mieux les petites affaires entre amis. En tout cas, rien ne change et la claudication d’En Marche ne tient pas qu’à cette affaire ; il est un symptôme plus aggravant que chacun de nous peut entendre en suivant la campagne télévisée où se distingue le spot d’En Marche.

Je l’ai découvert le 5 juin et j’en suis encore tout remué car, en matière de démocratie, c’est le bouquet : "nous avons décidé de vous représenter" disent-ils ! Le renouvellement prend une drôle de direction. Nous ne sommes plus dans le modèle où il y a ceux qui se présentent et ceux qui décident qu’ils seront ou non leurs représentants. En guise de renouvellement c’est la même chose qu’avant avec, en plus, l’outrecuidance de l’aveu, "nous avons décidé de vous représenter". C’est bien là le mal politique qui aura, en partie, déclenché la colère saine d’une majorité d’électeurs, précisément en raison de la confiscation du pouvoir par une classe d’élus. Le slogan traduit bien l’idée qu’ils ont de la représentation où c’est eux qui décident et non les citoyens qui choisissent.

Cette inversion est un détournement de démocratie. Le problème de la représentation n’est pas nouveau si on en croit ce qu’écrivait Octave Mirbeau en 1888 dans La Grève des électeurs : "Surtout, souviens-toi que l’homme qui sollicite tes suffrages est, de ce fait, un malhonnête homme, parce qu’en échange de la situation et de la fortune où tu le pousses, il te promet un tas de choses merveilleuses qu’il ne te donnera par et qu’il n’est pas, d’ailleurs, en son pouvoir de te donner. L’homme que tu élèves ne représente ni ta misère, ni tes aspirations, ni rien de toi ; il ne représente que ses propres passions et ses propres intérêts, lesquels sont contraires aux tiens". En tout cas, au niveau de ceux qui nous annoncent le renouvellement il y a du bruit sur la ligne telle Marielle de Sarnez prise dans les mailles du filet qui retient déjà Marine Le Pen : ils reviennent avec les mêmes tares et les mêmes œillères. Regardez Ferrand qui mène sa campagne à marche forcée, loin des priorités de son ministère où s’affairent, et ce n’est pas une surprise, les incontournables bureaucrates qui font tourner la machine. A-t-il vu sur sa route le paysan tué par les gendarmes à Cluny ? Il ne m’a pas semblé qu’il ait prononcé le moindre mot de compassion où la moindre interrogation sur le sujet et pourtant là est la vie, la vie ordinaire et essentielle pour le pays de ceux qui décident de ceux qui seront leurs délégués et non pas leurs maîtres à penser.

C’est au beau milieu de cette vie que le samedi 20 mai, Jérôme Laronze, éleveur à Trivy en Saône-et-Loire, a été tué par les gendarmes de Cluny (en Saône-et-Loire).

Depuis longtemps et comme de nombreux paysans, Jérôme Laronze dénonce « l’hyper-administration qui n’apporte rien aux agriculteurs, sinon de l’humiliation et des brimades. Mon cas, dit-il, est anecdotique mais il illustre la réglementation qui conduit à une destruction des paysans. » En fait, il est l’objet d’un harcèlement administratif qui atteint le point de rupture le 6 juin 2016 lorsque des fonctionnaires de la Direction Départementale de la Protection des Populations (DDPP) procèdent à l’identification de ses bovins dans ses pâtures, en présence d’une dizaine de gendarmes alors qu’il n’avait jamais fait obstacle aux précédents contrôles. Or, les bêtes paniquent devant cette présence policière les armes au poing et une vingtaine d’entre elles se précipitent dans le ruisseau. Certaines ne survivront pas. Cet épisode, relaté en détail dans une lettre adressée à la presse, a profondément choqué Jérôme. « Plus tard on m’a demandé de ne rien dire concernant ces bêtes pour que mon dossier soit régularisé ».

L’intervention de la famille de Jérôme et des membres de la Conf en juin 2016 avait permis que l’avant-dernier contrôle se déroule pacifiquement et que les forces de l’ordre restent en retrait. La situation de Jérôme était bien connue des services de l’État.
Alors, pourquoi ce 11 mai ? Ce 11 mai 2017 où, quand les contrôleurs sont arrivés avec des gens en armes, il était sur son tracteur. « J’ai toujours été courtois et je n’ai jamais manqué d’égards pour les contrôleurs ». Mais ce jour là il est pris de la colère du juste et il cherche à effaroucher les gendarmes au volant de son tracteur. C’est bien connu, la maniabilité d’un tracteur à travers champs représente un danger singulier. Mais de qui se moque-t-on ?
Après quelques jours de cavale, il est signalé aux autorités par un habitant du village de Sailly. Deux gendarmes se rendent alors sur les lieux, gilets pare-balles et armes à la main. À leur arrivée, il tente de s’échapper au volant de sa voiture mais il est abattu par trois tirs mortels dans des circonstances troublantes.

Comme toujours, c’est la farandole d’articles de presses et de rumeurs qui le présentent comme "n’allant pas bien" et/ou "ne s’occupant pas de son cheptel" alors qu’il n’en est rien et qu’il exprimait toujours avec humour et lucidité, une critique assez fine de sa situation et des craintes sur sa personne en raison de sa liberté de parole. Le 12 juillet 1989 à Louxiol dans le Doubs, Christian Dornier, que les médias ne présenteront pas comme paysan, tire sur tout ce qui bouge. Le bilan est terrible, des enfants, des adultes et des vieillards tombent sous ses coups de fusils : quatorze morts et huit blessés. La télé annonce "un drame de la folie" et convie quelques personnes ensanglantées à parler face à des micros pointés, tels des becs de rapaces sourds.

Seule dissonance, la voix d’un jeune agriculteur qui percera le bruit médiatique pour parler d’endettement et des folles conditions de travail de la terre.
Rien n’a changé et le paysan qui souffre n’est pas invité à prendre le train du partage en marche. Le renouvellement n’annonce pas le bonheur des producteurs de richesses, il vise simplement, et avec une réelle arrogance, la bonne santé du CAC 40. Il suffit de regarder le nombre de paysans candidats de la République en Marche pour comprendre toute l’attention que ce mouvement porte aux producteurs de richesses qui donnent pourtant à la France les couleurs d’une campagne fertile et nécessaire. Alors, je pleure de colère car le renouvellement annoncé se manifeste brutalement par la mise à mort d’un paysan à bout de souffle, victime d’un harcèlement innommable, digne d’un état totalitaire où le citoyen qui travaille doit fermer sa gueule et bosser pour le capital. Regardez bien l’identité des candidats d’En Marche et vous n’aurez plus aucun doute : la plupart sont des durs à cuire issus des vieux partis, comme ils disent, favorables au néolibéralisme, et les autres constituent une armée d’opportunistes de tous bords, en accord avec le choix de réformes commandées par l’Europe et le turbocapitalisme. Cela risque de s’accélérer et de déraper si les législatives donnent à Macron une majorité sans partage.

Aujourd’hui je pense à Jérôme que je ne connaissais pas mais qui ressemble à d’autres paysans avec lesquels je travaille et qui n’en peuvent plus des contrôles, des directives de ceux qui vivent à leur crochet car, enfin, c’est bien de cela qu’il s’agit et dont nos gensdelettres et gensdetélé ne parlent jamais : une exploitation abusive du travail de ceux qui produisent et qui s’endettent souvent pour suivre les consignes des orienteurs dogmatiques du développement agricole, des conseillers en tout, des façons culturales aux emprunts en passant pas le choix des machines et autres dépenses.

Tout le monde sera payé grâce à la production du paysan sauf lui dont le travail n’est jamais pris en compte. Jérôme, je ne t’oublierai pas et rien de ce que je ferai ne le sera sans me retourner vers toi. Le véritable renouvellement n’est pas un renouvellement mais devrait être une révolution à la couleur d’une proximité avec les citoyens, le vrai sel du pays, sans hiérarchie.

Guy CHAPOUILLIÉ

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