RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher

Devons-nous vraiment adorer Vaclav Havel ?

Il n’est guère de figure parmi les restaurateurs capitalistes à l’Est qui n’ait été plus adulée parmi les politiciens, les experts médiatiques et les universitaires américains que Vaclav Havel, dramaturge devenu le premier président de la Tchécoslovaquie post-communiste puis le président de la République tchèque.

Tous les gens de gauche qui admirent Havel semblent ne pas vouloir voir certaines choses à propos de lui : son obscurantisme religieux réactionnaire, sa répression anti-démocratique de ses opposants de gauche et son profond dévouement à un système capitaliste débridé, creusant les inégalités économiques.

Élevé avec gouvernantes et chauffeurs au sein d’une famille richissime et farouchement anti-communiste, Havel dénonçait dans la démocratie « le culte de l’objectivité et de la moyenne statistique » et cette idée que l’on puisse réaliser des efforts sociaux rationnels et collectifs pour résoudre la crise environmentale. Il a lancé des appels à l’émergence d’une nouvelle race de dirigeants politiques qui s’appuieraient moins sur « une pensée rationnelle, cognitive », démontreraient « de l’humilité face à l’ordre mystérieux de l’Être » et « croiraient en leur propre subjectivité comme principal lien les unissant à la subjectivité du monde ».

Apparemment, cette nouvelle race de leaders serait une sorte de penseur supérieur élitiste, pas si différent du philosophe de Platon, doté d’un « sens de la responsabilité transcendentale » et d’une « sagesse archétypale ». Havel n’a jamais expliqué comment cette sagesse transcendantale archétypale se transformerait en décisions politiques concrètes, au profit de qui et aux dépens de qui.

Havel a demandé un effort national afin de sauver la famille Chrétienne dans la nation Chrétienne tchèque. Se présentant comme un homme de paix, et tout en prétendant qu’il ne vendrait jamais d’armes à des régimes oppressifs, il a vendu des armes à la Philippines et au régime fasciste en Thailande. En juin 1994, le Général Pinochet, qui a assassiné la démocratie Chilienne, a été signalé en train d’acheter des armes en plein coeur de la République tchèque - sans qu’Havel ne nie les faits.

Havel s’est rallié sans la moindre réserve à la guerre du Golfe de George Bush, une entreprise qui a tué plus de 100 000 civils Irakiens. En 1991, aux côtés de plusieurs autres leaders pro-capitalistes est-européens, Havel a voté avec les États-Unis pour condamner les violations des droits de l’homme à Cuba. Mais il n’a jamais dit un seul mot pour condamner les violations des droits de l’homme auSalvador, en Colombie, en Indonésie ou dans quelque autre Etat client américain que ce soit.

En 1992, en tant que président de la Tchécoslovaquie, Havel, le grand démocrate, a demandé à ce que le parlement soit suspendu et qu’on lui permette de gouverner par décret, pour mieux faire passer ses « réformes » libérales. Cette même année, il a ratifié une loi qui a fait de la défense du communisme un acte de trahison passible d’une peine de huit années d’emprisonnement. Il prétendait alors que c’était la Constitution tchèque qui rendait sa ratification nécessaire. En fait, comme il le savait bien, cette loi violait la Charte des droits de l’Homme, incluse dans la constitution Tchèque. En 1995, il a soutenu et ratifié une autre loi démocratique privant les communistes et anciens communistes de tout accès à l’administration publique.

La propagation de l’anti-communisme est restée une priorité absolue pour Havel. Il a mené une « campagne internationale effrénée » pour maintenir en vie deux stations de radio de guerre froide, financées par les Etats-unis,Radio Free Europeet Radio Liberty, afin qu’elles puissent continuer à saturer les ondes est-européennes avec leur propagande anti-communiste.

Sous le gouvernement Havel, une loi a été adoptée criminalisant la diffusion de la haine nationale, religieuse et de CLASSE. En effet, les critiques des grands intérêts financiers étaient désormais illégales, assimilées de façon injustifiable avec la bigoterie religieuse ou ethnique. Le gouvernement d’Havel a mis en garde les syndicats contre toute implication en politique. Certains syndicats militants ont vu leurs biens confisquées et remis à des syndicats plus conciliants.

En 1995, Havel annonçait que la « révolution » contre le communisme ne serait pas achevée tant que tout ne serait pas privatisé. Le gouvernement d’Havel a liquidé les biens de l’Union de la jeunesse socialiste - ce qui comprenait des camps de vacances, des salles de jeux, des équipements culturels et scientifiques - plaçant les biens sous la direction de cinq sociétés privées, au dépens de jeunes que l’on laissait désormais traîner dans les rues.

Sous des programmes Tchèques de privatisation et de « restitution de biens », entreprises, commerces, bâtiments, logements et une bonne partie de la terre publique ont été bradés à des capitalistes tchèques ou étrangers. Dans les républiques Tchèques et Slovaques, on a redonné à d’anciens aristocrates ou à leurs héritiers toutes les terres que leurs familles possédaient avant 1918, sous l’Empire austro-hongrois, dépossédant les anciens occupants et les plongeant pour nombre d’entre eux dans la misère.Havel a lui-même repris possession à titre personnel de biens publics qui avaient appartenu à sa famille quarante années auparavant. Tout en se présentant comme un homme dévoué à faire le bien des autres, il s’est en fait pas mal débrouillé pour lui-même. Voilà pourquoi nous n’éprouvons pas les plus doux sentiments qui soient pour Vaclav Havel.

Michael Parenti

Source : Blackshirts and Reds, 1997

Traduction AC pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/

URL de cet article 15452
  

Même Auteur
Histoire et Mystifications. - Comment l’Histoire est fabriquée et enseignée...
Michael PARENTI
Analyste politique progressiste de tout premier plan aux États-Unis, Michael PARENTI, docteur en Sciences Politiques de l’Université de Yale, est un auteur et conférencier de renommée internationale. Il a publié plus de 250 articles et 17 livres. Ses écrits sont diffusés dans des périodiques populaires aussi bien que dans des revues savantes, et ses textes engagés l’ont été dans des journaux tels que le New York Times et le Los Angeles Times. Ses livres et ses conférences, informatives et (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

"Avec une bonne dose de peur et de violence, et beaucoup d’argent pour les projets, je pense que nous arriverons à convaincre ces gens que nous sommes là pour les aider."

Un commandant a expliqué la logique derrière les mesures extrêmement répressives
(prises par les forces d’occupation pour faire régner l’ordre en Irak)
[New York Times, Dec. 7, 2003]

Hier, j’ai surpris France Télécom semant des graines de suicide.
Didier Lombard, ex-PDG de FT, a été mis en examen pour harcèlement moral dans l’enquête sur la vague de suicides dans son entreprise. C’est le moment de republier sur le sujet un article du Grand Soir datant de 2009 et toujours d’actualité. Les suicides à France Télécom ne sont pas une mode qui déferle, mais une éclosion de graines empoisonnées, semées depuis des décennies. Dans les années 80/90, j’étais ergonome dans une grande direction de France Télécom délocalisée de Paris à Blagnac, près de Toulouse. (...)
69 
"Un système meurtrier est en train de se créer sous nos yeux" (Republik)
Une allégation de viol inventée et des preuves fabriquées en Suède, la pression du Royaume-Uni pour ne pas abandonner l’affaire, un juge partial, la détention dans une prison de sécurité maximale, la torture psychologique - et bientôt l’extradition vers les États-Unis, où il pourrait être condamné à 175 ans de prison pour avoir dénoncé des crimes de guerre. Pour la première fois, le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture, Nils Melzer, parle en détail des conclusions explosives de son enquête sur (...)
11 
Le fascisme reviendra sous couvert d’antifascisme - ou de Charlie Hebdo, ça dépend.
Le 8 août 2012, nous avons eu la surprise de découvrir dans Charlie Hebdo, sous la signature d’un de ses journalistes réguliers traitant de l’international, un article signalé en « une » sous le titre « Cette extrême droite qui soutient Damas », dans lequel (page 11) Le Grand Soir et deux de ses administrateurs sont qualifiés de « bruns » et « rouges bruns ». Pour qui connaît l’histoire des sinistres SA hitlériennes (« les chemises brunes »), c’est une accusation de nazisme et d’antisémitisme qui est ainsi (...)
124 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.