Les pays émergents, en tout cas les plus riches d’entre eux, se veulent « décomplexés ». Afin de posséder les outils économiques allant de pair avec le nouveau poids qu’ils représentent désormais dans le concert mondial, les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) entendent s’exonérer du FMI et de la Banque mondiale pour financer leurs infrastructures. Surtout la Chine …
Devant les désirs hégémoniques visibles de Pékin, les autres partenaires sont d’une prudence de lynx. Du coup, la création de la structure concurrente aux grands financiers mondiaux actuels risque de se hâter lentement.
En effet, les intentions des BRICS relèvent pour l’heure plus du chiffon rouge à l’attention de Christine Lagarde (NDLR : la directrice générale du FMI) que de la bombe définitivement programmée et réglée.
Ils avancent donc à pas comptés pour créer leur banque de développement : la « New Development Bank », NDB. Mais il ne s’agit encore seulement que d’un principe arrêté par ceux qui dessinent pourtant de plus en plus précisément le paysage économique mondial.
Réunis cette semaine pour leur cinquième sommet à Durban en Afrique du Sud, les BRICS ont chiffré à 4.500 milliards de dollars leurs besoin en infrastructures pour d’ici 2018.
Mais le capital de départ de la NDB, voulu idéalement à 50 milliards de dollars (10 milliards par pays) ne va pas être simple à collecter.
Les russes, prudents, proposent deux milliards par Etat. Ce qui a soulagé les sud africains un tantinet soucieux de sortir la somme initialement prévue : 10 milliards de dollars représenteraient environ 2,5% du Produit intérieur brut de Pretoria.
La politique des fondateurs de la New Development Bank sera plutôt de parler des projets, d’abord, et des sommes pour les réaliser, ensuite.
ARC-EN-CIEL
La nouvelle banque, lorsqu’elle ouvrira ses portes, sera aussi un peu déséquilibrée de part le poids relatif de ses membres. La Chine, virtuellement première puissance économique mondiale, présente une force de frappe infiniment plus conséquente que ses petits copains.
On se tâte également sur la localisation du siège de la NDB que Jacob Zuma, le président Sud Africain aimerait accueillir au sein de la nation arc-en-ciel.
Pour le moment, le désir de rivaliser avec la banque mondiale ou le FMI semble au moins aussi important dans les esprits que celui de disposer d’un outil favorisant les infrastructures supportant le commerce.
Au départ, les BRICS devaient aussi mettre en réserve une partie de leurs réserves de changes (au total 4.400 milliards de dollars dont les trois quarts détenus par Pékin), à hauteur de 200 milliards afin d’intervenir en cas de choc conjoncturel. La somme envisagée a finalement été divisée par deux à Durban.
Les débats y ont été quelque peu contenus par la crainte de voir les nouvelles institutions des BRICS se retrouver de fait sous la coupe du grand frère chinois, très présent sur le continent africain, et dont les richesses produites sont supérieures de 25% à ceux des quatre autres partenaires réunis.
Pékin devra donc s’attacher à apaiser les inquiétudes d’ici les prochains rendez-vous des BRICS : le G20 de Saint-Pétersbourg en septembre et le futur sommet des BRICS au Brésil prévu en 2014.