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La folie du tactile

Sous l’emprise des mass media, l’homme moderne souffre d’une certaine anomalie...

La pensée moderne intime à l’individu le devoir d’être communicatif, lui recommande le sens du partage, l’engage à être communicatif et l’invite à rester informé et à être interactif. Mais trop c’est trop.

L’Autre c’est l’enfer disait-on pour inciter cet être fébrile à l’autonomie et consolider sa force de caractère. Et si l’homme moderne insiste et ne cesse de nourrir ce désir martyrisant de se plonger dans la fournaise d’autrui ?!

Nous assistons actuellement à de drôles de rapports sociaux régis par le pouvoir de la vision et définis par des images et des vidéos, où nos accords et nos désaccords, nos dissensions et nos confluences sont iconisés, et où s’exprimer se réduit en clic. Le spectacle s’est abusé de nous.

Le produit principal de la société moderne est le show. Toutes les intentions sont focalisées sur le spectacle. Qu’il soit grand ou petit, ce qui importe c’est le désir d’être transporté, de fuir la réalité. Le spectacle nous domine. Le spectacle, compris dans sa totalité, est à la fois le résultat et le projet du mode de production existant. Il n’est pas un supplément au monde réel, sa décoration surajoutée. Il est le cœur de l’irréalisme de la société réelle. Sous toutes ses formes particulières, information ou propagande, publicité ou consommation directe de divertissements, le spectacle constitue le modèle présent de la vie socialement dominante. *

Opter pour le spectacle est un choix du conscient et de l’inconscient. La réalité de ce monde nous inquiète tellement que les Smartphones deviennent un refuge, les applications un mode de pensée, et les publications chatouillantes des réseaux sociaux un havre de paix.

Avec une faculté de discernement plus ou moins éveillée, on se doute de la véracité de la publication, de l’intention bienveillante ou malveillante du publicateur et on ne sait exactement à quoi il joue ; mais on continue quand même à gober. L’intelligence est congédiée, l’abrutissement est reposant !

Parmi les aspects négatifs de la domination de l’économie du visuel c’est de réduire son consommateur à l’extrême passivité. Certes, les nouvelles formes de diffusion lui garantissent le droit de réagir, cependant et dans la plupart des cas il accepte passivement. Il ne dit rien. Ce pauvre paresseux passe aux yeux de ces producteurs de l’image à un chiffre ou à un « vu » de plus si on emprunte le langage du Facebook. Il est dégradé de la catégorie d’un être à celle d’un avoir.

Ce consommateur des médias est dominé par un téléphone beaucoup plus intelligent que lui. L’appareil le possède alors que le demeuré pense qu’il maîtrise la chose et que le temps qu’il passe à tapoter reste acceptable. « Je pense que je suis dans les normes » se dit-il refusant d’admettre qu’il passe un temps considérable de sa vie dans le virtuel. Il est obsédé !

Derrière un écran un peu plus grand que sa paume, il déniche le moindre incident, partage l’anecdote la plus banale afin de créer un événement capable de chasser l’ennui, de combler le vide. Il est vide !

Cet individu qui proclame le droit d’être au courant de toutes les nouvelles, en reçoit de toutes sortes. Mais à l’heure actuelle et avec ce monde en ébullition, il ne s’informe que de celles qui le plongent dans l’incertitude et la perplexité. Il est inquiet !

Pendant une poignée de secondes, il aime, adore, s’étonne, s’attriste et s’indigne pour des faits peu importants et peut être insignifiants pour lui dans d’autres contextes. Il passe, dans ce laps de temps, de la nostalgie au futur, d’un partisan à un opposant, tout dépend de la publication et de son humeur du moment. Il est lunatique. Il est capricieux !

Incapable de savourer à lui seul les moments de contentement ou de satisfaction, ou du moins de vivre le moment, il cherche à le faire partager avec l’inconnu, avec cet Autre qui lui pèse trop sur les épaules. C’est comme si le bonheur est beaucoup pour lui. Se croyant beaucoup plus important qu’il n’en est en réalité, il est aux abords de la folie des grandeurs. Il lui arrive même de publier ses intimités et ses pensées pour celui qui s’en fiche probablement pas mal. Le malheureux est au mode vedettariat. Il est dérangé. Il est fou. C’est la folie du tactile !

Adil GOUMMA  

* Guy Debord. La Société du Spectacle, Troisième édition, 1992. p. 11

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