RSS SyndicationTwitterFacebook
Rechercher
Histoire du drapeau vénézuélien

Le drapeau de Bolivar

L’Histoire du drapeau vénézuélien est à chercher dans les turpitudes de la guerre d’indépendance. Pour le journal L’Humanité, Romain Migus revient sur les changements et les enjeux autour de l’étendard national du pays de Chávez et Bolivar [LGS]

“Jeune femme, donnez-moi plusieurs mètres de tissu jaune, bleu et rouge, voulez-vous ?” s’exclame l’homme dans un français remarquable.

 Je vous prépare ça de suite, lui répond la marchande".

Nous sommes dans un commerce de la ville de Jacmel dans la toute nouvelle République indépendante d’Haïti. L’amateur de tissu est un général vénézuélien. Très introduit dans les cours royales européennes, amis des pères fondateurs des États-Unis, il s’est aussi distingué pendant la Révolution française. Aux côtés de Kellermann, de Dumouriez et du peuple français en armes, il s’est illustré à la victoire fondatrice de Valmy.

“Pour qui, et où dois-je faire livrer le tissu, Monsieur ? lui lance la mercière haïtienne, comprenant en un coup d’œil que son interlocuteur n’est pas de l’île.

 Je suis Francisco de Miranda, lance l’homme en se retournant vers la porte. Vous m’apporterez le tissu sur mon bateau, le Leander. Nous appareillons demain à l’aube, et ces couleurs doivent flotter en haut du mat. Nous partons libérer notre Amérique du joug espagnol. Votre tissu sera notre étendard”.

Hissé pour la première fois le 12 mars 1806

Ce qui deviendra le drapeau vénézuélien -mais aussi dans des variantes, le drapeau colombien et équatorien- fut donc hissé pour la première fois le 12 mars 1806 au mat du navire qui emmène Miranda vers son destin. Le 3 août 1806, après avoir débarqué à La Vela de Coro, l’étendard est planté en terre vénézuélienne.

Le 9 juillet 1811, quelques jours après la déclaration d’indépendance du Venezuela, le drapeau de Miranda est officiellement proclamé symbole de la toute jeune Nation. Trois bandes horizontales jaune, bleue et rouge ; respectivement symboles de l’amour à la Patrie, de la mer, et du sang versé pour l’émancipation.

Au cours de son histoire, il subira de nombreux changements tout en conservant les couleurs originales. Dès le mois de mai de 1817, sept étoiles vinrent orner le drapeau national, afin de rendre hommage aux sept provinces qui signèrent l’acte d’indépendance du Venezuela.

Mais quelques mois plus tard, en novembre 1817, Simón Bolivar y rajoute une étoile pour incorporer la province de Guyana récemment libérée. Le « drapeau du Libertador » ne durera guère. Alors que les rêves d’une grande Colombie, unissant les pays libérés par Bolivar s’éteignent avec lui, le drapeau vénézuélien reviendra aux sept provinces initiales pendant près de 150 ans.

Chávez et le sens des symboles 

Cette querelle aurait pu en rester là mais le Venezuela est une terre rebelle où l’Histoire rebondit au fur et à mesure que le pays engendre ses héros. Le 27 novembre 2005, lors de son émission hebdomadaire Aló Presidente, le président Hugo Chávez va se livrer à un exercice de pédagogie dont il a le secret. Pendant plus d’une heure, le Comandante va expliquer à la Nation l’histoire des symboles patriotiques depuis l’achat des rouleaux de tissu par Miranda. “Sur notre écusson, à côté de la corne d’abondance, de nos armoireries, et de la gerbe de blé, le cheval se dirige vers la droite mais regarde à gauche. Pourtant, dès 1822, les écussons de la Grande Colombie représentait un cheval galopant vers la gauche. Ce cheval c’est le cheval bolivarien, indomptable !”, s’enflamme Hugo Chávez. Même son de cloche à propos des étoiles du drapeau. “Le drapeau de Bolivar contenait huit étoiles. Les symboles initiaux du projet bolivarien ont été progressivement effacés de notre Histoire”. Inadmissible pour l’initiateur de la Révolution bolivarienne. Un projet de loi sera envoyé à l’Assemblée nationale afin de redéfinir le sens des symboles patriotiques.

L’opposition s’étrangle : “il tourne le cheval vers la gauche, vers le socialisme”. Peu importe que Karl Marx n’avait que quatre ans lorsque cette symbolique équestre fut utilisée pour la première fois. Dans la société vénézuélienne polarisée, le vieux drapeau, celui aux sept étoiles et au cheval arqué, deviendra un symbole de la contre-révolution.

Le 9 mars 2006, la République Bolivarienne du Venezuela officialise son nouveau drapeau en hommage au père de la Nation. Et malgré les tempêtes, l’esprit de Bolivar continue de flotter sur cette terre révolutionnaire.

Romain MIGUS

»» L’Humanité
URL de cet article 36391
   
Même Thème
Ainsi parle Chávez
Hugo Chávez, figure du Venezuela et de l’Amérique latine contemporaine, si critiqué et diffamé dans la plupart des médias, était indéniablement le président métisse, issu d’une famille pauvre, avec lequel les classes populaires pouvaient s’identifier. Pendant 13 ans, chaque dimanche, il s’est adressé à son peuple dans une émission appelée « Allô président », fréquemment enregistrée sur le terrain et en public. Ce livre recueille certaines de ses allocutions. Tour à tour professeur, (…)
Agrandir | voir bibliographie

 

"L’un des grands arguments de la guerre israélienne de l’information consiste à demander pourquoi le monde entier s’émeut davantage du sort des Palestiniens que de celui des Tchétchènes ou des Algériens - insinuant par-là que la raison en serait un fonds incurable d’antisémitisme. Au-delà de ce qu’il y a d’odieux dans cette manière de nous ordonner de regarder ailleurs, on peut assez facilement répondre à cette question. On s’en émeut davantage (et ce n’est qu’un supplément d’indignation très relatif, d’ailleurs) parce que, avant que les Etats-Unis n’envahissent l’Irak, c’était le dernier conflit colonial de la planète - même si ce colonisateur-là a pour caractéristique particulière d’avoir sa métropole à un jet de pierre des territoires occupés -, et qu’il y a quelque chose d’insupportable dans le fait de voir des êtres humains subir encore l’arrogance coloniale. Parce que la Palestine est le front principal de cette guerre que l’Occident désoeuvré a choisi de déclarer au monde musulman pour ne pas s’ennuyer quand les Rouges n’ont plus voulu jouer. Parce que l’impunité dont jouit depuis des décennies l’occupant israélien, l’instrumentalisation du génocide pour oblitérer inexorablement les spoliations et les injustices subies par les Palestiniens, l’impression persistante qu’ils en sont victimes en tant qu’Arabes, nourrit un sentiment minant d’injustice."

Mona Chollet

© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.