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TEGUCIGALPA, VILLE DE FURIE

Traduit par Thierry Pignolet. Édité par Fausto Giudice

Le jour se lève.

J’ai traversé mes souvenirs d’un pas ferme et me suis arrêté au coin de l’histoire, sous le feu de couleur vert olive, pour que les chars d’assaut passent en trombe. Je me suis alors rappelé mon enfance de lumières perdues, quand je jouais à disséquer ce jardin de fleurs sous le regard lumineux et incandescent de Dieu, et j’ai revu mes figurines de plastique des céréales de Cornflakes, d’une époque révolue où jouer aux petits soldats était une joie de la vie. Aujourd’hui, c’est une angoisse de les voir en réalité, une horreur de voir leurs yeux effrayants de dévastation et leurs cuirasses de métal sur la poitrine -comme les animaux mythologiques d’une ère néolithique déjà vaincue par les paléontologues de la fin du monde.

La ville de Tegucigalpa est un camp de concentration, une ville minée par la haine, un gros village empêtré dans des bottes qui détruisent à chaque pas l’herbe de l’espérance, s’acharnant pour qu’elle ne repousse plus jamais. Même si la fleur de la résistance croît dans l’asphalte de leurs pas tordus.

Sur chaque trottoir, dans chaque rue, dans chaque allée s’engouffre avec force la lutte contre ces monstres de métal brillant, astiqués avec les chemises de misère de ce Honduras ; dans chaque carabine il y a la haine et l’utopie ; dans chaque T-shirt vert il y a le corps du délit ; dans chaque regard il y a une larme d’amour pour libérer le pays d’orangs-outangs de contrefaçon, issus d’une jungle phosphorescente de vers luisants politiciens sans éclat.

Le feu passe au rouge, il est temps que s’arrêtent les caravanes de fer pourri et les dinosaures de la poubelle universelle de l’histoire, il est temps d’allumer cette lumière rouge de la dignité qui mettra fin à la fureur effrénée de cette écurie métallique qui écrase un espoir selon eux existant -car ils sont convaincus que tout le pays se résume à un M-16.

Mes figurines de plastique sont tombées dans le jardin et se sont perdues entre le tas de feuilles mortes et les tourbillons secs de l’hiver. Je cours chercher de l’aide chez mon papa. Ce sont mes seuls jouets et le vieux, qui lit un petit livre d’Honoré de Balzac, me chuchote à l’oreille, comme un secret d’État sans président : « Laisse-les là , le plastique fond au soleil du matin ».

Il fait jour.


Sur l’auteur

L’artiste graphique Allan McDonald, Thierry Pignolet et Fausto Giudice sont membres de Tlaxcala, le réseau de traducteurs pour la diversité linguistique. Cette traduction est libre de reproduction, à condition d’en respecter l’intégrité et d’en mentionner l’auteur, le traducteur, le réviseur et la source.

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Viktor Dedaj

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