RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher
L’incompréhensible complicité médiatique

Aimeriez-vous recevoir une langue ? La farce électorale du Honduras

La langue de votre fils dans une boîte.

C’est lugubre.

Mais c’est pourtant ce que nous décrit Andrés Pavón, le président pour la défense des droits humains au Honduras (CODEH). [1]

Selon un témoignage rapporté par le président de la CODEH, deux jeunes contestataires de la dictature auraient été enlevés de leur domicile par une milice paramilitaire associée à la dictature Micheletti. On leur aurait coupé la langue. Quelques jours après l’enlèvement, les mères de ces deux jeunes gens auraient reçu ce qui semble être la langue de leur enfant avec la note suivante : « Voilà comment nous traitons la langue de ces chiens. »

Une atrocité.

Vérité, mensonge, qui sait, tous ces événements devraient être enquêtés sur place par des journalistes professionnels. Nos journalistes professionnels, Radio-Canada en tête, se gardent bien de nuire à la dictature.

Bien que ce fait lugubre reste à confirmer, d’autres assassinats sont prouvés.

La semaine dernière c’est le professeur (el maestro) Luis Gradis Espinal, 56 ans qui a été trouvé sans vie après avoir été séquestré par un groupe paramilitaire. [2]

Il était le dirigeant du Front National de Résistance Populaire de la localité de Nacaome, département de Valle, dans la zone sud du pays.

Monsieur Espinal se rendait dans la capitale pour retrouver un de ses enfants, quand il a été intercepté par un groupe armé sur un périphérique de Tegucigalpa.

Le Comité de Familles de Détenus Disparus au Honduras (COFADEH) a annoncé que "son corps sans vie a été trouvé, les pieds et les mains attachés, sur un chemin du village Las Casitas, au sud-ouest de la capitale, proche d’une zone où se trouvent plusieurs unités militaires".

L’organisation de défense des Droits de l’Homme du Honduras (CODEH) a dénoncé que le syndicat des professeurs est un objectif militaire et policier. Ce syndicat lutte ardemment depuis cinq mois à la restauration de la démocratie au Honduras.

Plusieurs de ses membres ont été assassinés pour avoir condamné le coup d’État et pour exiger le retour à l’ordre constitutionnel. Des centaines de professeurs (maîtres et maîtresses) ont été victimes de la brutale répression.

La COFADEH a aussi exprimé sa préoccupation pour le cas du professeur Marco Tulio Valdez, leader de la Résistance à San Lorenzo, Valle, "qui est fortement menacé par les autorités militaires qui ont pris le contrôle absolu de ce département".

Dans un communiqué, elle a rappelé que le meurtre de Luis Gradis Espinal s’ajoute à ceux de Roger Vallejo, Mario Contreras, Félix Murillo, Martà­n Barrientos et Tito Urquà­a.

Le Comité de Familles de Détenus Disparus au Honduras (COFADEH) ainsi que le comité pour la défense des droits humains au Honduras (CODEH) lance un cri d’alarme à la communauté internationale :

« Nous exhortons les communautés nationale et internationale pour qu’elles condamnent ces violations dont est victime le peuple hondurien par la dictature militaire, et réitérons à nouveau que les élections qui seront réalisées le 29 novembre prochain est une action des militaires, des policiers et des paramilitaires ».

La communauté internationale.

Radio-Canada en fait partie. Le quatrième pouvoir jadis au service de l’information est aujourd’hui au service de la dictature néolibérale.

Au lieu de condamner ces exactions, on nous "normalisera" les élections frauduleuses du 29 novembre au Honduras.

J’ai porté plainte à l’Ombudsman de Radio-Canada, Mme Julie Miville-Dechêne, pour que celle-ci enquête sur ces irrégularités concernant la couverture médiatique de Radio-Canada sur ce Coup d’État hondurien.

Précisément sur la désinformation soutenue pendant plus de quatre longs mois qui visait à discréditer le Président Élu et constitutionnel, M. Manuel Zelaya, victime d’un renversement militaire totalement hors des lois les plus élémentaires de la démocratie.

Mme Miville-Dechêne a refusé de donner suite à ma plainte, s’associant du même coup à Radio-Canada dans cette campagne de promotion de la dictature hondurienne.

Doit-on rappeler les atrocités des dictatures passées pour comprendre celle en cours depuis le 28 juin au Honduras ?

Rappelons simplement les escadrons de la mort qui sévissaient dans tous ces pauvres pays où des régimes sanguinaires et inhumains existaient.

Rappelons l’assassinat de Mgr Romero en pleine messe devant des centaines de fidèles. [3]

Rappelons la torture et l’assassinat des sours Léonie Duquet et Alice Domon par la dictature argentine [4].

Rappelons la vie de Soeur Yvonne Pierron, « Missionnaire sous la dictature » [5]

Doit-on déterrer les fosses communes comme celles du Guatemala, ou de tant d’endroits où les dictatures, les escadrons de la mort ont éliminé tant de pauvres gens qui avaient osé élever la voix avant que nos médias ne dénoncent ces horribles exactions ?

Nous connaissons les atrocités commises sous les Pinochet, Videla, Banzer, Arellano, Montt, Duarte, Somoza, Stroessner, Bordaberry et de tant d’autres.

Cette période dictatoriale à l’échelle du continent latino-américain a fait 40 000 morts et disparus. Des centaines de milliers de personnes ont souffert de la torture.

Comment est-ce possible alors que nous voyons, sous nos yeux se répéter l’horrible histoire, que nos professionnels ferment les yeux. Comment se fait-il que Madame Julie Miville-Dechêne, par son refus d’enquêter s’associe à ces atrocités ? Comment se fait-il que des journalistes, comme Jean-Michel Leprince, Ginette Lamarche ou Michel Labrèque, qui connaissent à fond ces histoires d’horreurs ferment les yeux sur cette répétition de l’histoire ?

Nos médias qui sont à l’affut de la moindre contestation en Iran, ferment les yeux sur les assassinats commis au Honduras. [6]

C’est une honte.

Le cirque médiatique de normalisation de la dictature de droite au Honduras est honteux.

On va nous parler de cette élection du 29 novembre comme d’un événement « démocratique » alors que près de deux cents candidats se sont retirés de l’élection.

Alors que le Président constitutionnel est gardé prisonnier dans son propre pays à l’ambassade du Brésil.

Alors que des milliers de citoyens sont terrorisés et confinés à leur demeure.

Alors que l’ONU n’enverra pas d’observateurs pour l’élection.

Alors que la grande majorité de la communauté internationale dénonce cette mascarade.

Nos médias vont nous présenter comme un résultat "de facto" à normaliser les conséquences de cette farce grotesque.

Comment comprendre cette attitude renversante de nos médias qui se gargarisent quotidiennement de démocratie et de droits humains pour justifier ou pour dénigrer à qui mieux mieux ?

Cette complicité médiatique qui supporte cette dictature est à la limite criminelle.

L’Histoire nous a clairement enseigné les rouages de ces atrocités, il est criminel de ne pas dénoncer ces affronts faits au grand jour contre la démocratie et les droits humains.

Serge Charbonneau
Québec
veliserdi@hotmail.com

P.S. : Pour ceux intéressés à approfondir cette complicité médiatique, entre autres de Radio-Canada en faveur de ce Coup d’État, je peux vous faire parvenir un dossier détaillé concernant la couverture médiatique des cinq derniers mois.

[1] http://ellibertador.hn/Nacional/3525.html

[2] Honduras : assassinat d’un dirigeant de la résistance au coup d’État
http://www.tlaxcala.es/pp.asp?reference=9365&lg=fr

[3] Il y a vingt-cinq ans, Mgr Oscar Romero était assassiné. L’actualité d’une vie.
http://www.alterinfos.org/spip.php?article946

[4] 30 ans après le coup d’État militaire de 1976
http://www.alterinfos.org/spip.php?article806

La dépouille de Léonie Duquet identifiée 30 ans après.
http://www.lepetitjournal.com/content/view/1994/303/

[5] Enjeux : - La voix d’Yvonne Pierron
http://www.radio-canada.ca/actualite/v2/enjeux/niveau2_7594.shtml

« Missionnaire sous la dictature »
http://www.laprocure.com/livres/yvonne-pierron/missionnaire-sous-dictature_9782020875004.html

RFI : Yvonne Pierron
http://www.rfi.fr/radiofr/editions/072/edition_63_20071016.asp

[6] http://www.radiomundial.com.ve/yvke/noticia.php?28036

URL de cet article 9544
  

Même Thème
TOUS LES MEDIAS SONT-ILS DE DROITE ? Du journalisme par temps d’élection
par Mathias Reymond et Grégory Rzepski pour Acrimed - Couverture de Mat Colloghan Tous les médias sont-ils de droite ? Évidemment, non. Du moins si l’on s’en tient aux orientations politiques qu’ils affichent. Mais justement, qu’ils prescrivent des opinions ou se portent garants du consensus, les médias dominants non seulement se comportent en gardiens du statu quo, mais accentuent les tendances les plus négatives inscrites, plus ou moins en pointillé, dans le mécanisme même de l’élection. Ce sont (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

Certains n’aiment pas la vérité. Pour tous les autres, il y a Wikileaks.

Julian Assange

Le fascisme reviendra sous couvert d’antifascisme - ou de Charlie Hebdo, ça dépend.
Le 8 août 2012, nous avons eu la surprise de découvrir dans Charlie Hebdo, sous la signature d’un de ses journalistes réguliers traitant de l’international, un article signalé en « une » sous le titre « Cette extrême droite qui soutient Damas », dans lequel (page 11) Le Grand Soir et deux de ses administrateurs sont qualifiés de « bruns » et « rouges bruns ». Pour qui connaît l’histoire des sinistres SA hitlériennes (« les chemises brunes »), c’est une accusation de nazisme et d’antisémitisme qui est ainsi (...)
124 
Hier, j’ai surpris France Télécom semant des graines de suicide.
Didier Lombard, ex-PDG de FT, a été mis en examen pour harcèlement moral dans l’enquête sur la vague de suicides dans son entreprise. C’est le moment de republier sur le sujet un article du Grand Soir datant de 2009 et toujours d’actualité. Les suicides à France Télécom ne sont pas une mode qui déferle, mais une éclosion de graines empoisonnées, semées depuis des décennies. Dans les années 80/90, j’étais ergonome dans une grande direction de France Télécom délocalisée de Paris à Blagnac, près de Toulouse. (...)
69 
Comment Cuba révèle toute la médiocrité de l’Occident
Il y a des sujets qui sont aux journalistes ce que les récifs sont aux marins : à éviter. Une fois repérés et cartographiés, les routes de l’information les contourneront systématiquement et sans se poser de questions. Et si d’aventure un voyageur imprudent se décidait à entrer dans une de ces zones en ignorant les panneaux avec des têtes de mort, et en revenait indemne, on dira qu’il a simplement eu de la chance ou qu’il est fou - ou les deux à la fois. Pour ce voyageur-là, il n’y aura pas de défilé (...)
43 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.