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De la réhabilitation de la Commune de Paris cette « tentative totalitaire, putschiste » et « idéologie qui cherche à imposer, au détriment de l’individu, son ordre ».

Il y a un peu plus de deux semaines, le mardi 29 novembre 2016, les parlementaires ont approuvé à la majorité un texte, présenté par le groupe socialiste, « proclamant ... la réhabilitation de toutes les victimes de la répression de la Commune de Paris ».

La résolution « juge nécessaire que soient mieux connues et diffusées les valeurs républicaines portées(1) par les acteurs de la commune de Paris de 1871 » et « Souhaite que la République rende honneur et dignité à ces femmes et ces hommes qui ont combattu pour la liberté au prix d’exécutions sommaires et de condamnations iniques ».
Relents versaillais et chouannerie oblige, la droite proteste. L’extrême droite n’est pas en reste.

Il aura donc fallu près d’un siècle et demi pour que le pays qui se réclame des valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité réhabilite, sans audace, les femmes et les hommes qui, 72 jours durant, ont appliqué, pratiqué, généralisé, vécu et partagé authentiquement ces principes, justifiant ainsi la devise : « Paris a hissé le drapeau de l’humanité ». Cette « réhabilitation » très tardive, ne soldera toutefois pas « l’indicible infamie » que fut la mise à mort de Paris libre par une bourgeoisie capitularde, cruelle et haineuse.

Pour avoir défendu les principes et les fondements d’une véritable émancipation sociale, trente mille femmes et hommes, au moins, seront exécutés par l’armée des « Versaillais » durant la Semaine sanglante. Pour rappel, à ces tueries de masse commandèrent des officiers supérieurs- bourreaux et criminels de guerre. Ils le furent aussi en Algérie, entre autres, où ils se firent la main en ordonnant, dirigeant et organisant avec ardeur, massacres de masse, enfumades et famines de la population algérienne. Ces génèraux s’appelaient : Mac-Mahon, nommé commandant en chef de l’armée versaillaise par Adolphe Thiers, Changarnier, Chanzy, Ducrot, Lacretelle, Ladmirault, Palikao, Trochu, ou encore l’ignoble Galliffet qui se glorifiait de massacrer les révolutionnaires parisiens faits prisonniers.

Ouvrons une courte parenthèse pour dire ici, après d’autres, que le terme le plus juste pour parler des révolutionnaires parisiens est celui de Communeux, ainsi qu’ils se nommaient. Le terme communard, formé du suffixe ard, qui est une marque de péjoration, de dépréciation, a été fabriqué, comme souvent, par les vainqueurs « versaillais », puisque c’est à leurs historiens-idéologues que revint l’écriture, falsifiée, mais dominante, de l’histoire. Redonner vie au mot Communeux, serait un moindre hommage, en plus du nécessaire respect de la réalité historique.

Ceci étant, une telle résolution et un tel vote, venant de l’actuelle majorité, laissent perplexe, déroutent. En effet, comment une majorité qui a adopté, sans débat et sans état d’âme, grâce à l’outil très démocratique du 49-3, « la loi travail », dite « El Khomri », synonyme de régression sociale et anthropologique, en un mot une loi « versaillaise », peut-elle réhabiliter un mouvement révolutionnaire, « une révolution des travailleurs », dont l’objectif suprême était l’affranchissement des travailleurs de l’exploitation capitaliste. Car la Commune, comme nous le rappelle Marx, « c’est la classe productrice voulant s’émanciper de la classe des exploiteurs, de leurs serviteurs à gages, de leurs parasites d’Etat, de ceux-là qui confirment l’adage français : "les valets du diable sont pires que le diable".

Difficile, avec la meilleure des volontés, de ne pas y voir une manœuvre politicienne, une démarche insincère, un enfumage politique, une mystification idéologique, pratiques dans lesquelles les sociaux-démocrates, et leurs multiples variantes, « social-libéralisme », « social-moderne », « blairisme », sont passés maîtres.
A cette loi-travail, combattue massivement par la « classe productrice » d’aujourd’hui, on peut agréger, sans forcer le trait, quelques décisions et positions de l’actuelle majorité, qui corrompent quelque peu cette « réhabilitation ».

Ferry-Famine le « capitulard  ».

Pour mémoire, n’est-ce pas sous le signe de Jules Ferry, « comparse de Thiers » dans la capitulation et la trahison face aux Prussiens, que le quinquennat présidentiel a été inauguré. Qui plus est, ce sinistre personnage fut, avec Adolphe Thiers, l’un des acteurs et commanditaires de l’ensanglantement de Paris, de la répression sauvage et des tueries de masse des révolutionnaires parisiens, que le même Ferry identifie au « hideux drapeau rouge (qui) déploie son haillon sanglant ». Quelle crédibilité accorder au souhait « de rendre leur dignité à ces femmes et ces hommes qui ont combattu pour la liberté au prix d’exécutions sommaires et de condamnations iniques », alors qu’agent de premier ordre, de ces « exécutions sommaires et condamnations iniques », il est honoré, célébré, par cette même majorité, au plus haut niveau de l’Etat, le 15 mai 2012 ?

Maire de Paris durant le siège prussien, ce « pauvre avocat famélique » affame le peuple parisien et spécule sur les denrées alimentaires, car « Non content d’organiser la famine à Paris, il s’est arrangé pour faire fortune au moyen de cette famine », note Marx, d’où le surnom de Ferry-Famine, que lui attribua le peuple de Paris.

Ses lois sur la gratuité de l’école -1881- et sur l’école obligatoire et laïque, -1882- seules justifiaient cet hommage, avait-on précisé lors de cette célébration. Pour l’histoire, les révolutionnaires parisiens s’étaient prononcés, dès mars 1871, pour une école publique, laïque, obligatoire, intégrale et gratuite, et l’organisèrent là où ils le purent. Dès sa proclamation, la Commune décida de laïciser les écoles de la ville de Paris, « en écartant l’élément religieux et clérical, la Commune a pris l’initiative d’émanciper intellectuellement le peuple », note Marx.

A propos de l’école de Jules Ferry, n’était- elle pas, entre autres, fondée sur la soumission et le dressage des enfants des classes populaires, dites classes « dangereuses ». Seule l’imagerie d’Epinal et une histoire falsifiée donnent cette école comme une initiative humaniste et généreuse. La lecture de sa lettre aux instituteurs (1883) est à cet égard éloquente, en ce qu’elle montre que l’institution scolaire a été pensée et conçue comme un appareil idéologique au service des intérêts des classes dominantes (2) et possédantes, et du contrôle social des classes populaires au profit des exploiteurs.

On refuse de dire que l’école laïque de J. Ferry avait aussi pour objectif de barrer la route, ainsi qu’il l’affirmait, aux écoles, « ouvertes aux fils d’ouvriers et de paysans, où l’on enseignera des principes totalement opposés, inspirés peut-être d’un idéal socialiste ou communiste emprunté à des temps plus récents, par exemple à cette époque violente et sinistre comprise entre le 18 mars et le 24 mai 1871 ».

Comprenne qui pourra, mais c’est cette « époque violente et sinistre » que l’actuelle majorité « réhabilite », en même temps qu’elle inaugurait, le 15 mai 2012, le mandat présidentiel, en glorifiant avec pathos l’auteur de cette abjecte calomnie.

Insisterions-nous sur le Ferry raciste et colonialiste ? Rappelons juste, au passage, son apologie des « races supérieures » devant le Parlement, en 1885, en sa qualité d’élu républicain : « Messieurs, il faut parler plus haut et plus vrai ! Il faut dire ouvertement qu’en effet les races supérieures ont un droit vis à vis des races inférieures parce qu’il y a un devoir pour elles. Elles ont un devoir de civiliser les races inférieures.[...] Mais de nos jours, je soutiens que les nations européennes s’acquittent avec largeur, grandeur et honnêteté de ce devoir supérieur de la civilisation .[...]

De ce lourd et ignoble passif, il ne sera question que « d’égarement », en ce 15 mai 2012, un mois si emblématique de l’histoire de la Commune de Paris.

Pour ne pas conclure, permettez-moi une question à un kopeck, quant à l’identité de l’auteur de la citation qui titre ce texte ? Non, ce n’est ni Thiers, ni Ferry, ni Favre. L’auteur de ce jugement est Monsieur Valls, alors ministre de l’intérieur. Commentant la position, pendant la Commune de Paris, de Clemenceau, qu’il admire, il déclare : « Ce que la foule peut provoquer le distance pour toujours, me semble t-il, de toute tentative totalitaire, putschiste, et de toute idéologie qui cherche à imposer, au détriment de l’individu, son ordre », (Georges Clemenceau, un tigre au grand cœur. Émission de S. Bern, Secret d’histoire, diffusée par France 2 le 03 décembre 2013).
Ainsi donc les parlementaires de la majorité ont « réhabilité » le 29 novembre 2016, des « femmes et » des « hommes qui ont combattu pour la liberté », mais aussi « une foule » coupable d’une « tentative totalitaire, putschiste » et d’« une idéologie qui cherche à imposer, au détriment de l’individu, son ordre ».

En 2008, il confessait : « J’ai mis du temps à admettre que j’aurais plus facilement applaudi le Tigre que le fondateur de l’Humanité. Maintenant, j’assume. » À Jaurès, il préfère Clemenceau qui avait refusé de « se laisser abuser par l’idéologie binaire de la lutte des classes ». (Pour en finir avec le vieux socialisme... et être enfin de gauche », entretiens avec C. Askolovitch, Ed. Laffont).

Dès lors, on se demande à quoi rime la « réhabilitation » de cette « foule », ou de cette « vile multitude », dixit Adolphe Thiers.
Mais, ne dit-on pas que la duplicité parle avec deux bouches ?

Smaïl HadjAli

Notes.
1) En ce qui concerne l’usage du verbe porter, voir le papier de B. Gensane : https://www.legrandsoir.info/porter-disent-ils.html
2) Dialectique oblige, la classe ouvrière organisée saura subvertir la loi sur l’école et s’en servir comme un outil pour son émancipation politique et sociale. Cf., les effets contradictoires de la reproduction sociale dans le système capitaliste.

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