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Ils ne savaient pas dans quel guêpier ils se fourraient : Le coût de la guerre, à l’américaine (mondediplo.com)

La dernière fois que j’ai vu des soldats étasuniens en Afghanistan, ils étaient silencieux. Ils se trouvaient dans un état de sidération, provoqué autant par les fusillades, les explosions, qui leur avaient infligé de terribles blessures, que par les médicaments que les médecins leur avaient administrés sur le champ de bataille ; on les descendait d’un hélicoptère sanitaire pour les faire admettre dans un hôpital militaire, où ils seraient branchés à des machines qui mesureraient la quantité de vie à sauver qu’il restait en eux. Ils étaient en sang. Ils étaient des morceaux manquants d’eux-mêmes. Ils se taisaient.

Ce silence est le souvenir que je conserve, de la période que j’ai passée dans des services de traumatologie, parmi les blessés, les mourants, les morts. On aurait presque dit qu’ils s’étaient enfui de leur propre corps, et avaient abandonné cette chair ensanglantée sur les lits à roulettes, à des chirurgiens qui étaient prêts à tenter le coup du salut. Par la suite, quelquefois bien plus tard, ils reviendraient peut-être habiter ce que les médecins étaient parvenus à sauver. Ils relèveraient peut-être ces corps, ou ce qu’il en restait, pour les faire marcher à nouveau, ou bien courir, ou encore skier. Peut-être s’habilleraient-ils, trouveraient-ils un emploi, concevraient-ils un enfant. Mais je garde le souvenir des premiers jours, ceux de leur évacuation en urgence, et de leur admission dans un hôpital pour lequel l’expression « silence de mort » semblait avoir été inventée.

Ils se ressemblaient si peu. Plus précisément, ils ressemblaient si peu aux soldats que j’avais vus lors de mon premier passage dans ce pays. À l’époque, ils étaient chauffés à blanc par les événements du 11 septembre 2001, et se déplaçaient avec l’assurance agressive de machos que leur entraînement, ainsi que leur propre façon de se mettre en scène, faisaient planer.

Je me souviens des tout premiers soldats que je vis en Afghanistan. Ce devait être en 2002. À cette époque, un très petit nombre de troupes étaient présentes sur le terrain, en ce pays – la plupart étaient maintenues sur le pied de guerre, mais avec l’Irak en tête, où elles iraient réaliser les rêves de gloire de George W. Bush et Cie – et elles ne tenaient pas garnison à Kaboul, la capitale afghane, mais à la campagne, où leur mission officielle consistait à rechercher Oussama ben Laden.

Je me trouvais dans le nord, dans le stade historique Dasht-e-Shadian, près de la ville de Mazâr-e-Sharif, où j’assistais à un après-midi de bouzkachi, le sport traditionnel afghan dont les rencontres opposent des hommes à cheval, paysans pour la plupart, qui se disputent la possession d’un veau mort. Le stade était célèbre, non seulement parce que les rencontres de bouzkachi les plus disputées du pays s’y déroulaient, mais aussi à cause de ce jour, à l’époque de l’occupation soviétique de l’Afghanistan, où des habitants de la région invitèrent 50 soldats soviétiques à profiter du spectacle à Dasht-i-Shadian, où ils les massacrèrent.

J’étais assise dans les gradins, en compagnie d’amis afghans, lorsqu’une escouade d’étasuniens, en tenue de combat, fit irruption dans la loge des dignitaires, et interrompit la partie. Certains d’entre eux insistèrent pour monter les chevaux. Le seigneur de guerre de la région, qui présidait les jeux, fit signe aux cavaliers afghans d’aider les américains à se mettre en selle. Par la même occasion, ils soufflèrent sans doute à leurs chevaux de s’emballer, pour s’enfuir au galop, en les jetant à terre.

D’une démarche un peu raide, ils refirent à pied le chemin qui les séparait de la tribune d’honneur, ramassèrent leurs fusils, et en firent des tonnes pour tourner l’incident en sujet de rigolade – pour proclamer, haut et fort, qu’ils étaient des « chics types ». Mais les hommes afghans aux visages impassibles, qui composaient l’assistance fournie, avaient pris leur mesure. Un ami me dit une chose que je n’ai jamais oubliée, au cours des années suivantes, alors que j’assistais aux « progrès » de la guerre : « Ils ne savent pas dans quel guêpier ils se sont fourrés ».

Le jour suivant, j’aperçus une autre escouade de soldats étasuniens dans le bazar du centre ville. Au milieu des boutiques, à une heure de grande affluence, ils s’étaient déployés en éventail, en tenue de combat, devant la boutique d’un marchand de tapis renommé, et avaient adopté la position de tir, un genou au sol. Ils pointèrent leurs fusils d’assaut en direction de femmes qui faisaient leurs courses ; vêtues de la burqa blanche de Mazâr, elles étaient clouées sur place, comme autant de fantômes terrorisés. Les Étasuniens assuraient la protection de leur lieutenant, qui se trouvait à l’intérieur de la boutique, à la recherche d’un souvenir à ramener de son séjour en terre étrangère.

Je ne saurais dire exactement à quel moment les militaires étasuniens firent entrer dans Kaboul cette attitude bravache. Mais dès 2004, les Étasuniens se trouvaient là, en armes, derrière les murs de bases urbaines fortifiées ; à l’abri de barrières de béton et de sacs de sable géants, leurs postes de contrôle y arrêtaient la circulation, et interdisaient l’accès aux voies publiques. Leurs convois patrouillaient les rues de la ville à toute allure ; dans les tourelles des véhicules blindés, des mitrailleurs se tenaient sur le qui-vive. Des femmes, à demi-aveuglées sous leurs burqas, amenaient leurs enfants pour les guider, dans le dédale de rues devenues tout à coup dangereuses.

Entrent les guerriers

J’étais venue en Afghanistan pour travailler avec ces femmes et ces enfants. En 2002, j’avais commencé à passer les hivers là-bas ; je parcourais le pays, mais j’étais installée à Kaboul. Des écoles, que les talibans avaient fermées depuis longtemps, ouvraient à nouveau, et je m’étais portée volontaire pour aider les enseignants d’anglais à raviver leurs souvenirs de la langue qu’ils avaient étudiée, puis enseignée, dans ces écoles, avant que le souffle des guerres n’emporte tant de choses. Je travaillais également, en collaboration avec des femmes afghanes et des personnes d’autres nationalités — en petit nombre, à l’époque —, pour faire démarrer des organisations, des services, destinés aux femmes et aux filles que la guerre avait brutalisées, et que l’obligation prolongée de rester chez elles avait hébétées. Elles émergeaient en silence, pareilles à des somnambules, pour constater que la vie, telle qu’elle l’avait connue autrefois, s’en était allée depuis longtemps. La plus grande partie de Kaboul s’était également évaporée, il n’en restait qu’un paysage de gravats, après des années de guerre civile, puis d’abandon par les talibans, enfin de bombardements américains.

Après que les talibans eurent fui ces bombes, les premiers soldats qui patrouillèrent les rues en ruines de Kaboul, furent des membres de l’ISAF, la Force Internationale d’Assistance et de Sécurité, que les Nations Unies avaient mise en place, afin de protéger la capitale. Turcs, espagnols, britanniques, et autres, flânaient dans le centre ville, coiffés de bérets ou de casquettes – pas de casques, ni d’armures –, et pénétraient dans les boutiques, comme l’auraient fait des touristes ordinaires. Ils garaient leurs véhicules militaires, et permettaient aux enfants de les escalader, autant qu’ils le voulaient. Les Afghans semblaient prendre la présence des soldats de l’ISAF du bon côté, comme si elle leur semblait plutôt amicale, rassurante, quoique discrète.

Puis, les Étasuniens agressifs les supplantèrent. Dans mes classes d’anglais, les enseignants commencèrent à me demander de les aider à rédiger des lettres destinées à l’armée étasunienne, dans lesquelles ils réclamaient un dédommagement pour des amis, des voisins, dont les enfants s’étaient fait renverser par des soldats en excès de vitesse. Une enseignante me demanda, « Pourquoi les Américains se comportent-ils de cette manière ? » ; je n’avais, à l’époque, aucune réponse à lui fournir.

Dans le cadre de mon travail, alors que j’essayais d’obtenir, non pas que justice soit faite, mais que les afghans soient indemnisés, je me retrouvais confrontée de plus en plus souvent à ces soldats. En tant que grand reporter, il était également de mon devoir d’assister de temps à autre aux points presse, concoctés par les théoriciens militarisés de Washington, qui spéculaient sur un monde à venir de marchés libres, dominé par une Amérique propageant la démocratie, et assurant une sécurité sans failles dans ce qu’ils rebaptisaient bizarrement la « patrie ».

Le Pentagone préparait des présentations Power Point, surchargées de graphiques, de flèches, qui indiquaient comment, en fin de compte tout avait un rapport avec tout le reste, en un blablabla circulaire coupé du monde réel. Des subordonnés, en poste à Kaboul, prononçaient ces discours devant des journalistes américains qui prenaient des notes, consciencieusement, pour en faire ces histoires, qui allaient bientôt nous devenir familières, de stratégies et tactiques nouvelles, dont chacune garantissait la réussite de la Guerre Afghane de Washington, malgré le ballet incessant des commandants en chef, dont l’un chassait l’autre, année après année.

Pour les fonctionnaires étasuniens qui s’en étaient retournés à Washington, la guerre était de toute évidence une construction théorique, et la victoire dépendait de la manière d’imaginer ces stratégies gagnantes, ou d’en choisir une parmi celles utilisées lors de guerres précédentes – disons, l’Irak, ou le Vietnam –, avant d’envoyer ces gosses effrontés, ceux que je verrais dans ce stade des environs de Mâzar-el-Sharif, les mettre en œuvre. En résumé, la guerre n’était qu’un plan de développement, codé sous la forme d’une série de graphiques vidéo-projetés. Pour les Afghans, dont la terre servait de terrain de jeux aux guerres modernes, dévastatrices, de Washington, depuis plus de 20 ans, elle ressemblait à tout, sauf à cela.

Franchement, je n’aimais pas les soldats étasuniens qu’il m’arrivait de rencontrer, à cette époque. Contrairement aux troupes de l’ISAF, qui avaient l’apparence de vrais gens, vêtus d’uniformes, les Étasuniens se comportaient comme des Soldats (S majuscule) Power Point, ou, ainsi qu’ils préféraient qu’on les appelle, des Guerriers (G majuscule). Ils ne se comportaient que rarement comme de vrais gens. En premier lieu, on semblait les avoir entraînés à violer l’espace personnel de tout civil ayant l’infortune de les croiser. Avec un bruit sec, ils se mettaient au garde-à-vous à quelques centimètres de votre visage, avant de cracher des phrases qui vous éclaboussaient la chair, récitant une leçon que ne leur avaient pas enseignée leurs mamans.

Avec le temps, cela dit, leur agressivité préenregistrée, mais effrayante, finit par susciter ma sympathie, ma curiosité, mon désir d’en savoir plus sur eux, ce qu’ils avaient été comme ce qu’ils étaient devenus, au-delà des apparences. C’est ainsi qu’à l’été 2010, j’empruntai le gilet d’armes d’un ami, et demandai l’autorisation d’embarquer avec des soldats étatsuniens. À l’époque, le général Stanley McChrystal massait des troupes (et des journalistes) dans le bastion taliban de la province de Helmand, dans le sud-ouest de l’Afghanistan, en prévision d’une épreuve de force affichée comme « décisive » avec les insurgés. Quant à moi, on me donna l’autorisation de me rendre sur une base opérationnelle avancée, qui se trouvait dans le nord-est de l’Afghanistan, à la frontière avec le Pakistan, un endroit où, selon la rumeur, il ne se passait rien. En fait, les soldats américains y « tombaient au champ d’honneur », à une cadence qui prenait leurs officiers par surprise, et les inquiétait.

J’arrivai à un moment où ces officiers s’étaient réfugiés derrière des portes closes, et ne laissaient plus filtrer aucune information – plus d’exposés Power Point pour présenter à la presse (moi), le visage impassible, les estimations des « progrès ».

Pour TomDispatch, j’écrivis un article sur cette base, en y incluant une information qui me valut une avalanche de courriers électroniques scandalisés, de la part des femmes, ou des petites amies, des Guerriers. Ce n’était pas ma description des morts de soldats qui les dérangeait, mais ma remarque concernant la blessure invalidante la plus fréquente sur cette base, à savoir une entorse – conséquence d’un jogging effectué sur le terrain rocailleux d’un désert d’altitude. Comment osais-je proférer pareille horreur, me demandaient ces femmes. Elle rabaissait les grands Guerriers de notre nation. Elle constituait une insulte, à l’égard de tous les Étasuniens patriotes.

Ces courriers m’enseignèrent une chose. Une fois déployés, les soldats des États-Unis n’ont plus le droit d’être de « vrais gens », même aux yeux de celles et ceux qui leur sont le plus chers. Pour leurs petites amies, leurs femmes, qui restent à la maison, seules, et ont des factures à payer, des enfants à élever, ils ne peuvent être que des Guerriers mythiques, dont l’histoire reconnaîtra l’importance, qui vont jusqu’à sacrifier leur propre vie pour sauver la nation. Sinon, à quoi bon ?

Où sont donc passés les soldats ?

Le vrai sens de leur sacrifice est peut-être celui-ci : il signifie que rien n’avait de sens, ni cette guerre choisie, revancharde, ni celle en Irak. Il n’y eut que des gamins en uniformes, dont la plupart, à ce moment, savaient qu’ils n’avaient pas su dans quel guêpier ils se fourraient, et se battaient désormais pour leur survie, ainsi que celle de leurs illusions. Ils arpentaient les rues de la base, deux par deux, compagnons d’armes qui se dirigeaient vers le DFAC (le mess), la blanchisserie, les latrines, le gymnase. Ils passaient leur temps sur internet, ou pendus aux téléphones dédiés à l’international, à la fois entrés en guerre, et sortis de la guerre, jusqu’à l’arrivée des ordres, quelle que fut leur provenance : Washington, Kaboul, Bagram, ou encore la pièce aux rangées de cartes, derrière la porte close du bureau du commandant de la base. Alors, et ceci se produisit quotidiennement, au cours de mon séjour sur la base, des patrouilles devaient effectuer des sorties, à pied ou en voiture, dans les montagnes alentours, sur lesquelles flottaient les drapeaux talibans. Très souvent, à leur retour, il leur manquait des hommes.

Qu’était-il arrivé à ces garçons, qui étaient présents au DFAC, au petit déjeuner ? Morts, ou déchiquetés, victimes d’un tireur embusqué, ou de l’explosion d’une mine antipersonnel, des hélicoptères les avaient évacués vers un hôpital, puis, … quoi ?

Ils se logèrent dans ma mémoire. Un peu moins d’un an après, je n’avais pas réussi à les oublier, et comme, officiellement, je n’étais plus une journaliste fouineuse, mais une chercheuse travaillant pour une université renommée, je sollicitai à nouveau l’autorisation d’être embarquée au sein de l’armée. Cette fois-ci, je demandai à suivre les blessés, qui partaient de ce désert d’altitude baptisé « zone de combat », en direction du service de traumatologie de la Base Aérienne de Bagram, où ils embarquaient à bord d’un C17, en compagnie des équipes médicales qui les prenaient en charge jusqu’au Centre Médical Régional de Landstuhl, en Allemagne – le plus grand hôpital étasunien, hors du pays – avant de les ramener, à bord d’un autre C17, à « Walter Reed », le Centre Médical de l’Armée, à Washington ou, dans certains cas, chez eux.

Au fil des ans, le nombre de gamins qui effectuèrent ce voyage retour vers les États-Unis par pont aérien sanitaire, ne cessa d’augmenter. Costsofwar.com a évalué à 106 000 le nombre d’Étasuniens blessés en Irak et en Afghanistan, ou évacués de ces zones de guerre, pour cause d’accident, ou de maladie. Comme tant de soi-disant « blessures invisibles » ne sont en fait diagnostiquées, qu’après le retour des soldats chez eux, le nombre exact de blessés est certainement bien plus élevé. En témoigne le fait que, depuis Juin 2012, le Ministère des Anciens Combattants a établi un diagnostic de névrose de stress post-traumatique pour 247 000 d’entre eux, ou encore celui que, depuis le 31 Mai 2012, plus de 74 500 anciens combattants de ces guerres aient rempli un dossier de pension d’invalidité, auprès du même Ministère. D’ores et déjà, les contribuables ont dépensé 135 milliards de dollars, sous forme de soins médicaux ou de pensions d’invalidité pour les anciens combattants d’Afghanistan et d’Irak, pensions dont le montant cumulé à long terme, devrait culminer à 754 milliards de dollars, aux environs de 2050.

Et puis il y avait ceux qui étaient « tombés au champ d’honneur », les morts, que des avions-cargos règlementaires rapatriaient à la Base Aérienne de Douvres, dans des « caisses de transfert » métalliques. On les transférait ensuite à la morgue officielle de l’armée, au cours de cérémonies qui furent interdites aux médias, et donc au public, jusqu’en 2009 – ramenés d’Irak, ou d’Afghanistan, on en dénombrait au moins 6 656, en Février de cette année. Au cours de ces deux guerres, ce sont au moins 300 employés du privé, sous contrat avec l’armée, qui ont également trouvé la mort. Ajoutez à cette liste le nombre de suicides survenus après le déploiement, ainsi que celui des soldats ou anciens combattants dépendants aux dérivés de l’opium, dont les Géants de l’Industrie Pharmaceutique ont encouragé la consommation, et que les médecins militaires ont préconisés, soit pour les maintenir en état d’accomplir des missions, soit pour les guérir de leurs « expériences » de guerre, après qu’ils se furent effondrés, psychologiquement.

Cela fait dix ans que les premiers anciens combattants des guerres d’Irak et d’Afghanistan sont rentrés aux États-Unis, c’était en 2003, et pourtant je n’ai encore jamais parlé à un soldat invalide, ou à des membres de la famille d’un soldat, qui aient jugé appropriée, suffisante, la prise en charge dont il ou elle bénéficia, de la part du Ministère des Anciens Combattants. De l’aveu même de ce Ministère, il s’écoule un temps si long avant de parvenir à une décision en matière d’allocations pour anciens combattants, ou simplement pour obtenir un rendez-vous, que certains d’entre eux meurent au cours de cette attente.

C’est ainsi que, depuis leur retour, un nombre incalculable de soldats ont été pris en charge par leurs parents. J’ai rendu visite à une maison des Grandes Plaines dans laquelle, depuis bientôt dix ans, un ancien combattant reste étendu sur son lit d’enfance, où sa mère lui prodigue les soins dont il a besoin ; puis à une autre maison, en Nouvelle-Angleterre, dans laquelle un ancien combattant passa une dernière soirée sur les genoux de son père, avant de se donner la mort.

En suivant la piste des anciens combattants esquintés, afin de pouvoir écrire mon nouveau livre, Ils étaient Soldats : L’histoire secrète des conditions du retour des blessés des guerres de l’Amérique, j’ai fini par comprendre le degré de souffrance qu’eux et leurs familles endurèrent, tout comme les Afghans, à cause des délires – qui enfreignent à la législation internationale, pour nombre d’entre eux – des dirigeants de cette nation, mais aussi d’autres Étasuniens influents, militaires ou non, qui détiennent un pouvoir plus grand que celui des soldats, et qui ont moins de comptes à rendre que les soldats.

À l’image des soldats, ce pays change. Les « amenez-les moi » fanfarons du décideur à l’origine du processus préventif qui finit par engloutir des enfants des pauvres, des patriotes, sont aujourd’hui mis en sourdine. À l’heure qu’il est, en Afghanistan comme en Irak, Washington fait des pieds et des mains pour que le retrait ressemble le moins possible à une défaite voire, pire, à un gâchis inutile. La plupart des Étasuniens ne posent plus de questions sur les objectifs que les guerres devaient atteindre.

Sous le coup de la colère, un officier de l’Armée de Terre, dont la fin de carrière approchait, me donna cette instruction : « Suivez l’argent ». J’avais passé mon temps en compagnie de pauvres gosses, en quête d’un avenir honorable, qui font le sale boulot de l’armée des États-Unis. Ils font partie des 1% les plus démunis de la nation. Mais, comme me le dit cet officier de carrière furieux, « Ils ne font qu’appliquer les ordres ». La guerre est au service des autres 1%, ceux qui sont au sommet, elle est ce grand moteur qui donne l’impulsion au transfert des richesses du Trésor Public vers le haut, où leurs poches ouvertes les attendent. La traque de cet argent révèle la véritable raison derrière le choix des conflits. Selon les propres termes de cet officier désenchanté, les guerres ont rendu ces profiteurs « putain de monumentalement riches ». Les perdants sont les soldats, et leurs familles.

Ann Jones

http://mondediplo.com/openpage/they-didn-t-know-what-they-were-getting-into

Le nouveau livre d’Ann Jones sort aujourd’hui : They Were Soldiers : How the Wounded Return from America’s Wars — the Untold Story, un projet coopératif de Dispatch Books et Haymarket Books. Jones, qui est grand reporter en Afghanistan depuis 2002, a écrit deux autres livres qui traitent de l’impact de la guerre sur les civils : Kabul in Winter et War Is Not Over When It’s Over.

traduction Hervé Le Gall

 http://echoes.over-blog.com/2014/02/ils-ne-savaient-pas-dans-quel-guêpier-ils-se-fourraient-le-coût-de-la-guerre-à-l’américaine.html
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COMMENTAIRES  

04/02/2014 15:39 par Antar

Oui, et la souffrance des Afghans et autres Irakiens ne pèse pas lourd. Pauvres soldats étasuniens. Mais comme dirait Viktor, ’’bien fait pour ta gueule, t’avais qu’à pas y aller...’’

04/02/2014 16:43 par vagabond

J’en reviens pas ! Du romantisme sur des assassins en uniforme. On ne va tout de même pas pleurer pour eux ?
Qui parle de la population afghane, des enfants afghans ? De leu vie ou plutôt de leur mort ?

04/02/2014 16:45 par vagabond

Et cette photo...

04/02/2014 20:48 par babelouest

C’est simple. C’est attendu. Ce "moins de un pour cent" (moins de un pour cent mille ?) confit dans son rêve de puissance tue le reste de l’Humanité (ou plutôt une Humanité à laquelle ils se sont soustraits). Quintuplement (au moins) isolés de ce Monde qui les hait et qu’ils ignorent, ils continuent à massacrer la Vie dont ils ne savent même pas ce qu’elle veut dire. Qui coulera la Nef des Fous ?

04/02/2014 22:45 par chb

@ vagabond
Evidemment que le larmoiement convenu du Diplo est gênant. Alors, « On ne va pas pleurer pour eux » ? Pt’êt’ ben qu’ si.
Comme on peut pleurer, quand même, pour ces conscrits qui ont eu 20 ans dans les Aurès. J’en ai rencontré, des gars partis sur ordre pour aller pacifier les fellagas et qui depuis leur retour n’ont pas fait une seule nuit paisible. Le stress post traumatique, qui n’existait pas à l’époque, en a atteint des mille et des cents. Fils de résistants ou même de collabos, ils avaient suivi leurs aînés, partant bon gré mal gré casser du niacoué ou du chleuh. Engagés pour échapper à leur milieu, pour commencer leur vie dans la gloire, ou appelés à la guerre par un président qui ne voulait pas la faire, héros indemnes comme salauds blessés ont été victimes aussi au cours de ces corvées de bois dont ils n’osèrent jamais parler à leurs proches.
L’article met en évidence les motivations économiques d’une grande partie des jeunes étatsuniens envoyés en AfPak. Sans les exonérer totalement, Jones rappelle qu’ ils ne savaient pas, et que beaucoup en bavent maintenant. God & my country regardent ailleurs, les profiteurs regardent leurs poches gonfler, comme d’hab. A la guerre comme à la guerre : salauds de ricains par ci, françafricains par là, les ptits gars qui sont allés punir ou démocratiser n’ont pas fait le bon choix. Et les voilà majoritairement bernés.

04/02/2014 22:53 par latitude zero

Moralès toi qui voulais voyager te voilà éparpillé !

05/02/2014 10:55 par vagabond

Ah oui ? Et ceux qui exhibent sur la photo les restes d’un être humain ? Je devrai pleurer pour eux ? La conscience est gratuite pourtant.

05/02/2014 12:12 par Anne Wolff

Il faut aussi se rappeler le contexte dans lequel ils sont partis, alors que les infos télé étaient présentées avec en permanence un baromètre du risque terroriste, du jour, sur le sol des USA, gradué du vert au rouge, il oscillait en permanence entre orange et rouge foncé. Le bourrage de crâne, la manipulation de la fibre patriotique, le sentiment bien ancré d’être non des envahisseurs mais des protecteurs des citoyens des USA, de leur familles menacées directement par le risque terroriste.
Et aussi nombreux ceux qui ce sont engagés en étant dans l’illusion de ne jamais devoir participer à aucune guerre et pour qui c’était la possibilité, la seule, l’unique de faire des études...
Et zut à la fin... on peut très bien avoir une immense compassion pour les peuples envahis, pleurer en voyant ce qu’ils endurent, avoir la rage face à la barbarie étasunienne (ou plus exactement des multinationales) et avoir aussi considération du sort des militaires et vétérans... comme dit Babelouest, ce sont les 1/100 000 qui sont derrière tout cela qui sont réellement la cause du mal et nous sommes tous bien placés pour connaître l’étendue de leur pouvoir de désinformation, de manipulation et de conditionnement.

Tous les militaires ne sont pas des héros qui mettent leur vie en jeu pour dénoncer leur constat, mais beaucoup, oui, prennent conscience d’avoir été manipulés, instrumentalisés et beaucoup ne s’en remettent jamais, si j’en crois des vétérans de ma connaissance - devenus pour plusieurs SDF - l’horreur n’est pas ce qu’ils ont subi mais ce qu’ils ont du faire à d’autres... ils ne s’étaient pas engagé pour cela, ils ne s’en remettront jamais... mais comme me disais l’un d’eux, en larmes, quand tu y es, il s’agit aussi de sauver ta peau. Il a sauvé sa peau ais plus jamais sa conscience ne le laissera tranquille.

Bradley Manning aussi était soldat des EU, lui aussi s’était engagé... d’autres que lui ont fait des chemins similaires au sien en voici un tragique exemple (et Snowden avait choisi de travailler pour la NSA),
Il ne faut surtout pas sauver le soldat Needham
Il y a les Needham, et puis les autres les Opérations Spéciales, les privés, ce ne sont pas les mêmes soldats... et ce sont les Opérations Spéciales à présent qui ont le pouvoir au Pentagone et dominent la militarisation du monde. Les formations qu’ils reçoivent sont des processus de déshumanisation, la question est : qui a ordonné la mise au point de tels programmes et dans quel but, au profit de qui ?
Des formations qui sont à présent prodiguées aux militaires et polices d’au moins 134 pays dans le monde...

05/02/2014 13:09 par rouge

Un article sur la souffrance des assassins ? C’est à lire au second degrés j’espère. Un peu à l’image d’un article sur les souffrances des divisions SS ou des Einsatztruppen en URSS par exemple. On attendrait plutôt des articles sur les souffrances afganes. Avec des noms et de l’émotion. Merci.

05/02/2014 17:58 par Antar

@ Anne Wolff,

C’est d’accord, cependant a-t-on jamais fait preuve d’une telle empathie envers les soldats allemands de la seconde guerre mondiale qui, à l’instar des soldats américains, ont été endocrinés par la propagande nazie et à qui on a refusé la notion d’obéissance hierarchique aux ordres comme ligne de défense...

05/02/2014 18:45 par Dwaabala

C’est aussi efficace que de faire un reportage du côté des populations dont on peut, au moins par analogie, imaginer la souffrance ; alors qu’ici l’envers du décor se révèle à travers un portrait des États-Unis gravé au vitriol.

05/02/2014 19:54 par Dominique

Il faut mettre ce livre dans son contexte, celui des USA, celui d’un pays tout entier consacré à la guerre, celui d’un pays en guerre contre le reste du monde, celui d’un pays où les médias sont majoritairement dédiés à la propagande de guerre, celui d’un pays où, que ce soit sur les télé-réseaux ou dans les kiosques à journaux, il n’y a pas un média étranger.

De plus, quand on voit que l’OTAN est impliquée dans presque toutes les guerres des ricains, et qu’avant que les USA ne prennent la relève d’une Europe sur le déclin, celle-ci avait pavé la voie en colonisant toute la planète, nous sommes mal placé pour donner des leçons. Même mon pays la Suisse ne fait pas partie du club des anciens colonisateurs pour une seule raison, le manque d’accès à la mer, et c’est pas faute d’avoir essayé, voir par exemple Marignan qui sonnât définitivement le glas des rêves de conquête de la Suisse de l’époque. Et aujourd’hui la Suisse avec des banques "Too big to fail" comme l’UBS et le Crédit Suisse et des multinationales comme Nestlé, fait définitivement partie des 0,01 % qui font et refont le monde à leur image. Et en Suisse comme dans le reste de l’Europe et aux USA, nous avons le même problème qui est que l’humanité, comme la politique et la guerre ont été confisqué par un petit groupe de salauds.

J’ai connu un vétéran de la guerre du Vietnam. Il m’a dit que vu son nom de famille, il n’aurait jamais du la faire, mais comme il était le mouton noir de la famille, il s’est retrouvé sur un navire de la marine US à entrer les coordonnées des cibles des missiles que cette marine envoyait quotidiennement sur le Vietnam. Il n’a jamais vu le champ de bataille, mais cela ne l’empêche pas, toujours aujourd’hui, de faire des cauchemars quotidiens, à tel point qu’il du s’organiser pour travailler de nuit.

Ce livre s’adresse avant tout aux ricains, et il essaie de leur faire comprendre ce que Madonna a compris à la fin de sa carrière : les choses ne sont pas ce qu’elles paraissent être.

05/02/2014 21:07 par Anne Wolff

Cela fait un moment maintenant que je m’intéresse à la militarisation du monde, et aussi à cette perméabilité qui existe entre Opérations Spéciales, Bandes de Narcotrafiquants, Armées privées, … et également à cette question dont la réponse reste une sorte de mystère tragique « Comment devient-on tortionnaire ? »
Parce que nous sommes à présent confrontés à une fabrication industrielle de tortionnaires potentiels ou avérés dans le monde entier. Et que l’idéal fondateur est bien celui de l’armée nazie et en particulier des SS : des soldats dénués de sentiments.
Que cette fabrication volontaire puisse se faire à une telle échelle, c’est qu’elle est le résultat de méthodes éprouvées qui ont fait leurs preuves aussi bien dans l’armée nazie, que lors de la bataille d’Alger, un grand classique dans la formation des tortionnaires de l’Ecole ex des Amériques. Et que depuis les méthodes ont été perfectionnées par la pratique et systématisée… et nous en voyons au quotidien les effets dans les zones en guerre officielle ou occulte, mais aussi parfois dans des commissariats de quartier. Elle est également planifiée de manière à être le plus efficace possible, en étendue géographique et en nombres de répresseurs.
Et là, on se trouve dans un paradoxe d’échelle, on ne peut juger de la même manière un tortionnaire en tant que personne et en tant que produit collectif d’une programmation volontaire extérieure. Entre les deux échelles, il y a un saut qualitatif… mais pas seulement, on se trouve face à un problème gravissime d’une ampleur sans cesse grandissante, une fabrique industrielle de tortionnaires à l’échelle planétaire dans le cadre d’un projet clairement défini, qui s’exprime sans détours dans le programme du Pentagone (à présent dirigé par les opérations spéciales) actuellement J.V. 2020 et qui transforme des petits gars, de toutes nationalités, qui dans un autre contexte auraient peut-être été des braves types, en machine à tuer, à semer la terreur et à faire souffrir qui se répandent sur la planète avec une rapidité inquiétante ? Comment mettre un terme à cela ? Comment faire que dans toutes les armées fleurissent des Chavez et des ANEMOI (association de militaire espagnols qui luttent contre l’actuelle fascisation de l’armée),…
Et dans la recherche de réponses à ces questions, oui, j’apprécie qu’une journaliste fasse bien son boulot et nous éclaire sur des sujets tabous pour certains, les bons et les méchants ? C’est exactement le schéma de tiers exclu dans lequel nous enferme la dichotomie hollywoodienne.
Ici un article en espagnol,
Piden olvidar su 
corta vida de sicario
un enfant sicaire au service des narcos, au Mexique, entre 11 et 14 ans, il a décapité 4 personnes et en a torturé d’autres, il a 17 ans et après 3 ans d’emprisonnement il va être intégré dans un centre de réinsertion. Ils sont nombreux dans sa situation… Quel avenir pour eux ? Au profit de qui, in fine ? Les mêmes qui ont envoyé les soldats des USA en Afghanistan, les héritiers de ceux qui ont armé et approvisionné les armées fasciste dès la guerre d’Espagne…

06/02/2014 04:18 par Dominique

Anne,

Je me suis un peu intéressé à l’histoire des religions ainsi qu’à leurs dogmes. Sur leur histoire, il est intéressant de remarquer que la guerre organisée apparaît dans l’histoire avec l’antiquité. Selon Engels, la religion a suivi l’évolution de la société, selon d’autres auteurs, cette évolution a été conjointe. Peu importe, l’important est de constater que la guerre organisée va de pair avec ce qu’Engels appelle les religions de domination et que William Prescott appelle les religions organisées. Or toutes ses religions ont des dogmes de base qui, en occident au nom de l’immuable conflit du bien et du mal, et dans le reste du monde au nom de la complémentarité du yin et du yang, attribuent aux choses des qualités qu’elles n’ont pas comme le bien, le mal, le yin ou le yang.

À partir de là, il est possible de séparer les dieux (le bien), l’homme et le reste de la création (le mal), de séparer l’esprit (le bien) de la chair (le mal), ainsi que de séparer les hommes entre eux, certains se retrouvant plus proche des dieux que les autres.

Ces dogmes de base de nos religion sont donc la justification morale à la fois de l’exploitation de le nature par l’homme, de la fabrique de frustrés violents qu’est notre société et de l’exploitation de l’homme par l’homme. Ces dogmes de base de nos religions sont donc la justification morale de tous les racismes (que ce soit envers les non humains ou envers les humains) et de toutes les violences.

Cela a empiré avec l’industrialisation, renaissance, époque où l’Europe est passée d’une ontologie analogiste à une ontologie animaliste. Voir Par delà nature et culture de Philippe Descola. Pour Descola, l’ontologie est la cause de la distribution des humains et des non humains. Le social est donc une conséquence. Marx avait déjà compris cela dans l’idéologie allemande, et il nous fait remarquer, qu’une fois qut’un certain rapport avec la nature est donné dans la société, l’évolution historique temps à renforcer ce rapport avec la nature, ce qui à son tour renforce les rapports sociaux. De tout ceci nous pouvons déduire que notre société est dans un cercle vicieux du pire, et que le seul moyen pour en sortir consiste à briser ce cercle vicieux.

Je ne vois qu’un seul moyen pour cela, remplacer le racisme institutionnel de notre société par son antidote : le respect, à commencer par le respect de la nature. Pour un marxiste cela implique qu’il n’est pas suffisant de subordonner l’économie à la satisfaction des besoins humains et qu’il faut d’abord la subordonner à la satisfaction des besoins de la nature.

06/02/2014 08:55 par vagabond

Si j’ai bien compris, vu le passé de vos pays respectifs, vous ne pouvez vous identifier qu’aux assaillants et pas aux victimes ? Certes, ces victimes là portent le turban ou le voile et ne sont pas très "photogéniques".
Le problème de l’humanité actuelle est qu’elle intellectualise tout quand elle ne fait pas des horreurs des films pour divertir. Une sale guerre est une sale guerre (certes la guerre est toujours sale), il n’y a rien d’autre que la révolte du cœur et le "cri" pour la faire cesser surement pas la réflexion, sinon celle de trouver la solution pour la faire cesser. Débattre sans cesse pendant que des gens meurent est une insulte à la vie. C’est en faisant de ces horreurs toujours en cours des sujets de discussion que l’on oublie que des humains de chair et de sang sont en train de mourir.
Ce texte est d’un romantisme révoltant, identique à celui des films hollywoodiens qui montrent le brave GI face aux "barbares" d’une part et tentant doucereusement de se rebeller contre ses chefs.
Vous dites endoctrinement ? Ce n’est plus aussi facile de nos jours avec toutes les informations accessibles qui mettent le doute sur la vérité de ceux qui fabriquent les guerres. Ce n’est pas l’endoctrinement mais le sentiment de supériorité qui laisse croire que l’autre qu’on combat n’est que de la vermine.
Je n’éprouve aucune empathie envers les criminels de tous les bords.

06/02/2014 12:40 par Lionel

@Anne Wolf un ouvrage qui devrait mettre tout le monde d’accord : Françoise Sironi, "Bourreaux et victimes, psychologie de la torture", O. Jacob, 1999.
Je pense également que la question n’est pas de se désintéresser des victimes en se penchant au chevet de leurs bourreaux, mais bien de comprendre de quelle manière on fabrique à volonté et en masse des personnes rigoureusement "normales" au départ en monstres.
La question peut être posée de différentes façons, que l’on parle de l’Afghanistan ou des enfants-soldats d’Afrique, de l’Algérie à Guantanamo !
Attention de ne pas tomber dans le panneau de la justice "plus juste" en allant jusqu’à désirer le retour de la peine de mort ou de l’incarcération à vie sous l’immonde prétexte de la soi-disant volonté de réparation ou d’indemnisation.
Il ne s’agit pas d’amender les coupables ni de se contenter de simplisme qui dit " ils n’avaient qu’à pas y aller", nous avons plus ou moins toutes et tous des amis ou cousins qui sont partis pour l’Algérie et sont revenus mutiques ( on en a déjà parlé ), alors on ne parle plus à ces gens ? Ou encore on fait semblant de ne pas savoir ce que l’on a fait d’eux ? Le tonton dont on croit savoir qu’il a été à la corvée de bois plus souvent qu’à son tour, avec lequel on boit le Pastis malgré tout mérite-t-il la décapitation ou le bannissement alors que nous aurions été situés dans la même configuration, nous aurions été les bourreaux à notre corps défendant ???
Pas de fausse hypocrisie ni de faux semblants, cette société qui nous déplaît est pourtant la nôtre et nous avons notre part de responsabilité. Ce que nous avons à faire à minima est de ne pas négliger la compréhension de l’histoire et des méthodes psychologiques qui nous font fabriquer des machines de guerre, des tueurs, des tortionnaires !
Le tout afin d’asseoir notre civilisation, quoiqu’en disent les hypocrites !

06/02/2014 14:31 par Anne Wolff

@Vagabond à peine la peine de te répondre… si tu ne comprends pas qu’on est pas obligé de choisir parmi les victimes les bonnes et les mauvaises… cela ne fait que confirmer qu’on est mal barre. Des Kaibils du Guatemala en passant par tous les enfants sicaires ou pandilleros, aux jeunes recrutés par les milices islamistes jusqu’aux enfants soldats US, y compris les jeunes israéliens transformés en machines de destruction sélectives, oui la compassion, va au-delà des origines des uns et des autres pris dans le même attracteur fatal, celui qui nivelle les différences et détruit les histoires personnelles pour transformer partout sur la terre des jeunes gens en machine à tuer formatés par la même matrice, au service des mêmes puissants qui dirigent et possèdent les quelques corporations qui occupent le Grand Marché qu’est devenu le monde. (autre exemple d’attracteurs fatals :le devenir SDF et le devenir Junk qui aux USA et ailleurs ont les mêmes cibles).

Complément d’info, un autre article de la même auteure qui existe en version anglaise et espagnole
Los niños soldados de EE.UU.
Version originale en anglais

Un bref résumé de ce texte qui traite des enfants soldats aux EU.
Il existe aux USA 3402 écoles qui ont formé 557 129 enfants au moment (12-2013) où le texte est écrit. La quasi-totalité d’entre eux est d’origine hispano –sino ou afro-étasunienne. L’enseignement général y est médiocre, mais des gamin(e)s de 14 ans y ont déjà appris à défiler au pas armes à la main.
Ces écoles qui prennent en charges des enfants des quartiers urbains les plus misérables – où l’enseignement est jeté dans la pourriture de l’austérité – coûtent beaucoup plus cher aux contribuables que ne le feraient les budgets nécessaires pour créer un enseignement de qualité, elles ont pour fonctions d’être un Corps d’entraînement de réserve d’Officiers Mineurs et constitue la réserve de chair à canon de l’Empire.
Deux courts extraits
« Le Pentagone ne séquestre pas réellement les enfants, ni ne les expédie physiquement sur le champ de bataille. A la place le but est de convertir ces jeunes « cadets » (…) en « esclaves volontaires », tellement dupés par le scénario du maître qu’ils acceptent de bonne grâce qu’il apparaisse comme leur choix personnel »
Ce qui donne comme résultat
"Une jeune afro-étasunienne de 16 ans, première de sa classe, et s’est déjà engagée à l’armée dit avoir choisi le métier des armes. Son instructeur – [un colonel blanc qu’elle considère comme le père qu’elle n’a jamais eu, leur a dit en classe] « Notre guerre va durer très longtemps (…) jusqu’à ce que nous ayons exterminé le dernier Musulman de la Terre ». Elle veut aider à sauver les EU en dédiant sa vie à « la grande mission qui nous attend »
C’est un aperçu,le texte est long. Il s’agit d’un véritable lavage de cerveau opéré sur des gamins vulnérables, destiné à servir de chair à canon, et à qui on a bourré le crâne en leur introduisant un imaginaire de héros sauveurs de patrie. Et ce sont en grande partie ceux-là qui finiront dans les hôpitaux ci-dessus quand ce n’est pas en psychiatrie ou vétéran bousillé laissé pour compte .
Après il y a encore beaucoup à dire à ce sujet et immensément à traduire pour que les francophones commencent à avoir un petit aperçu de comment fonctionne cette militarisation du monde et comment elle fabrique en masse des machines à tuer qui se prennent pour l’élite des héros sauvant la civilisation de la barbarie.(Il faut lire les commentaires de Kaibils parlant d’eux-mêmes pour comprendre la profondeur du mal, considérés comme des assassins par les populations victimes, ils se voient eux en élite de l’élite, capables de tuer sans aucun sentiment... pour SAUVER LE MONDE ! désolée je ne trouve plus ces liens édifiants)
Petit kaibil guatémaltèque, gamin jihadiste de nos banlieues ou d’ailleurs, enfant soldat d’ici et là, gosses-réserve de chair à canon des zones pourries US, ceux issus des mêmes quartiers déportés qui finissent dans les pandillas d’Amérique Latine ou comme sicaires au service des narcos (ou des Corporations, ce qui coïncide en général), partout dans le monde… qu’on en finisse avec ces vies volées…

06/02/2014 16:42 par Dominique

On peut même rajouter que pendant que les USA et Israel apprennent la haine à leurs enfants à l’école, Israel torture les enfants palestiniens et met en prison pour de longues années ceux qui craquent. Quand aux USA, ils ne sont pas en reste, eux qui sont capables d’emprisonner sans jugement des enfants dans leur camp de torture de Guantanamo.

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