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L’histoire vue par le Commandement central des Etats-Unis : « 2014 – Le groupe terroriste syrien ISIS envahit l’Irak »

Une grande partie de l’armée, des services secrets et des politiciens des Etats-Unis veulent se dédouaner de la création de l’Etat islamique en Irak et en Syrie. Et pour cela ils ont recours à une falsification sans précédent des faits historiques. Ils inventent des récits fantaisistes qui gomment complètement leurs propres erreurs.

Le Commandement central (CentCom) des Etats-Unis a mis en place une coalition militaire de plusieurs pays pour se battre contre ISIS. L’opération est connue sous le nom de « Résolution Inhérente ». CentCom a créé un site Web pour promouvoir l’opération. Sur la page A propos de ce site, nous trouvons les renseignements « historiques » suivants sur ISIS :

HISTOIRE

À l’été 2014, un nouveau groupe terroriste, né à la faveur du chaos engendré par la guerre civile en Syrie, a traversé la frontière syro-irakienne et s’est emparé de grandes pans du territoire irakien dans la vallée de l’Euphrate et au nord de l’Irak. Plusieurs villes irakiennes sont tombées aux mains des envahisseurs qui avaient pris le nom d’ « État islamique ». A la fin de l’été, Bagdad lui-même paraissait menacé par l’EI.

Ceci n’est pas seulement très éloigné de la vérité, mais c’est un ramassis d’inventions scandaleuses dont le but est de nier et de déformer ce qui est réellement arrivé. ISIS n’a pas été créé en Syrie, mais en Irak ; le groupe existait bien avant 2014 et son existence n’a rien à voir avec la guerre contre la Syrie. Dire qu’ISIS est venu de Syrie, en 2014, et a envahi l’Irak est comme affirmer qu’Hitler a envahi l’Allemagne en 1944.

ISIS s’est créé en Irak à cause de la guerre des Etats-Unis contre l’Irak. Les membres dirigeants d’ISIS, des anciens combattants d’Al-Qaïda en Irak, se sont retrouvés, en 2006, dans le Camp Bucca, un camp américain de prisonniers en Irak, et y ont planifié la création du Califat d’ISIS.

Selon une enquête de CBS News, au moins 12 des principaux dirigeants de ISIS sont passés par le Camp Bucca, y compris l’homme qui allait devenir le leader du groupe, Abou Bakr al Baghdadi. CBS News a des photos de 10 d’entre eux vêtus des combinaisons de prison jaunes de Bucca.
...
« Je pense qu’il est indéniable que l’une des principales causes de la croissance explosive d’ISIS après 2010 a été Bucca. C’est là qu’ils se sont rencontrés et c’est là qu’ils ont tout planifié » a affirmé Patrick Skinner.

Skinner fait partie du groupe Soufan et est un ancien agent de la CIA qui a passé pas mal de du temps en Irak.

Il est indéniable qu’ISIS est né en Irak des années avant la guerre contre la Syrie :

Octobre 2006 – Le leader d’AQI, Abu Ayyub al-Masri , annonce la création de l’Etat islamique d’Irak (ISI), et nomme Abou Omar al-Bagdadi comme leader.

Avril 2010 - Abu Bakr al-Bagdadi devient leader d’’ISI après Abou Omar al-Bagdadi et Abou Ayyoub al-Masri tués dans une opération conjointe des Etats-Unis et de l’Irak.

Avril 2013 - ISI annonce avoir absorbé un groupe syrien soutenu par Al-Qaïda, Jabhat al-Nusra, aussi connu sous le nom de Front al-Nusra. Al-Baghdadi dit que son groupe se fera désormais appeler Etat islamique en Irak et au Levant (ISIS). Le leader du Front Al-Nusra, Abu Mohammed al-Jawlani, s’oppose aux efforts d’ISIS pour fusionner avec son groupe.

La CNN saute 2011 dans sa chronologie, l’année où le chef d’Al-Nusra, Abu Mohammed al-Jawlani, a été envoyé par al-Baghdadi en Syrie, depuis l’Irak, pour réorganiser les cellules d’Al-Qaïda qui avaient été secrètement créées en Syrie bien avant que les premières manifestations y aient lieu. Al-Jawlani, qui avait également été emprisonné dans le Camp Bucca, est arrivé en Syrie en mars 2011 au moment où les premières manifestations contre le gouvernement syrien venaient de commencer :

Selon un leader du mouvement jordanien salafiste et ultra-orthodoxe interdit, al-Bagdadi a envoyé al-Golani et Abu Jleibeen, un haut responsable d’Al-Qaïda lié par son mariage à al-Zarqawi, se battre en Syrie ...

Comme pour Ahrar al-Shams, les cellules de Jabhat Al-Nusra ont été secrètement créées avant même que la « révolution » en Syrie ne commence :

Le groupe Ahrar a commencé à former des brigades « après la révolution égyptienne », a affirmé Abu Zayd, bien avant le 15 mars 2011, date à laquelle la révolution syrienne a débuté avec les manifestations de la ville agricole du sud de Daraa.

Prétendre que l’Etat islamique est né en Syrie, comme CentCom le fait, c’est dire exactement le contraire de ce qui est vraiment arrivé. L’État islamique sous Baghdadi a envoyé des combattants et des dirigeants en Syrie pour déclencher et intensifier la « révolution » contre l’État syrien. Les racines religieuses et philosophiques d’ISIS sont ancrées dans le wahhabisme et sont d’origine saoudienne, et non syrienne ou irakienne.

Voilà, ci-dessous, un autre récit mensonger élaboré par les éléments de la CIA et les politiciens américains qui ont lancé la guerre contre la Syrie sous forme de « révolution de couleur ». Voyez ce grand titre de CBS tellement faux qu’on en reste coi : Obama a rejeté le plan de la CIA qui aurait pu stopper ISIS : Officiels

La CIA, en 2012, a présenté un plan détaillé d’une opération secrète visant à éliminer le président syrien Bachar al-Assad du pouvoir, mais le président Obama a refusé de l’approuver, ont confié à NBC News des officiels américains dont certains sont encore en fonction.
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Petraeus, [Le chef de la CIA], et d’autres responsables qui soutenaient le plan pensent qu’il aurait pu empêcher la montée d’ISIS, l’utilisation d’armes chimiques par Assad, la crise européenne des réfugiés, et les dizaines de milliers de morts civils qui ont eu lieu depuis, selon d’anciens officiels.

Renverser le gouvernement syrien aurait créé plus de chaos en Syrie, ce que l’Etat islamique, déjà établi en Syrie à l’époque sous la forme de Jabhat al-Nusra, aurait très probablement utilisé pour se saisir Damas et prendre le pouvoir en Syrie. Tout le reste n’est qu’une vue de l’esprit qui ne tient aucun compte de la supériorité militaire que des groupes Takfiri comme Ahrar, Nusra et ISIS ont toujours eu par rapport aux rebelles « modérés » djihadistes qui ont le soutien direct des Etats-Unis. L’article de CBS parle aussi de l’ancien agent de la CIA qui fut à l’original du plan d’action secrète. Il semble être en désaccord avec ce que le grand titre de CBS affirme :

Laux dit que rétrospectivement, il ne croit plus que son plan secret, ni n’importe quel autre plan, aurait pu arrêter la progression d’ISIS ni mettre fin à la sanglante guerre civile en Syrie. Selon lui, « il n’y avait pas de modérés ».

C’est effrayant de penser que le Commandement central, qui est censé combattre l’Etat islamique, puisse croire à sa propre propagande, à savoir qu’ISIS est venu de Syrie. On ne peut pas lutter avec succès contre ISIS si on ne connaît pas son origine réelle : la guerre des Etats-Unis en Irak et la performance insignifiante, pour ne pas dire carrément nulle, de CentCom au cours de cette guerre.

Traduction : Dominique Muselet

 http://www.moonofalabama.org/2016/04/us-centcom-history-in-2014-the-syrian-terrorist-group-isis-invaded-iraq-.html
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COMMENTAIRES  

04/04/2016 12:24 par Sidonie

Et la France, à travers son nouveau Ayrault des Affaires étrangères n’est pas en reste d’accablante sottises mensongères que relate RI sous le titre : Sans foi ni honte : Après avoir aidé ISI à prendre Palmyre, la France blâme maintenant Assad de lavoire perdue (http://russia-insider.com/en/incredible-having-backed-syria-rebels-france-now-scolds-assad-not-defending-palmyra-harder/ri13701) en s’en moquant longuement, totalement stupéfié par ces déclarations du ministre français : « La reprise de Palmyre est une victoire de Bachar el-Assad, mais également pour la coalition. “On ne va pas se plaindre que Palmyre ne soit plus aux mains de Daech. Palmyre, aux yeux de beaucoup, c’est un symbole”, a déclaré Jean-Marc Ayrault, en visite à Alger. “Mais en même temps, quand Palmyre a été conquise par Daech (en mai 2015, NDLR), on ne peut pas dire que le régime de Damas ait été très défensif. On peut le regretter. Peut-être que, s’il y avait eu à l’époque une réaction aussi forte, on n’en serait pas là, on aurait pu éviter la prise de Palmyre”, a-t-il estimé.

pour lire la suite : http://www.dedefensa.org/article/le-ayrault-sont-fatigues

05/04/2016 17:46 par Roger

Ph.Grasset (dedefensa.org) analyse depuis longtemps cette perversion de la psychologie américaniste qui consiste à développer dans une "guerre de communication" des "narratives" et des "perceptions" faussées de la réalité. Amplifiées par des media aux ordres, cela devient une "réalité virtuelle" plus puissante que la "vérité des situations" décrites, au point d’auto-intoxiquer les auteurs de ces fables qui prennent ainsi les vessies qu’ils ont gonflées eux-mêmes pour des lanternes...Bien entendu nos "élites" sofériniennes ne sont pas de reste, et la politique étrangère de la France passe sans sourciller des fables de Fabius à la Z’ayrault pensée d’Ayrault !

06/04/2016 00:57 par Bruno

Au fur et à mesure que l’actualité halète, je me suis aperçu effectivement qu’au grès du changement du rapport de force, nos médias classiques, qui sont le bras symbolique armé du "Ministère des Affaire Étranges", ont une fâcheuse tendance à réécrire l’Histoire passée.

On informe sur l’actualité chevauchante pour mieux effacer ses propres traces de sang laissées dans la neige ou dans le sable d’Irak, de Syrie ou d’ailleurs. Le sang que l’on a commit, pas le sien bien sûr. Car les victimes sont ailleurs. Par centaines de milliers, elles sont à jamais muettes et n’ont aucun sponsor connu.

Voyez M.Obama, un incroyable parcours à lui tout seul. Le même homme qui disait hier - comme notre ancien "Ministre des Affaires Etranges", un dénommé Laurent Fabius - qu’ Isis c’était du tonnerre qu’il faisait du " bon boulot " avec Al-Nosra ! ... qu’éventrer le corps d’un soldat assassiné et lui bouffer le cœur encore palpitant, c’était déjà un peu de la démocratie en barre, même si les formes tardaient à se domestiquer.

Voyez -le encore ce monsieur qui part désormais à la tête d’une "nouvelle croisade", vers de nouvelles aventures et qui guerroie contre ses amis d’hier : Al-Qaïda, Al Nosra, Isis, Daesh, tous ces monstres à lui, ses Golems.

Face à la Russie, Potus ( Président-of-the-united-states) réécrit l’Histoire, en même temps que la voiture-balai médiatique passe la serpillière derrière lui. Il faudra écrire un jour sur la puissance symbolique de l’Empire qui non seulement efface le passé à mesure que l’actualité le déjuge, mais qu’à force de raturer le story-telling, c’est tout le grimoire des crimes anciens qui finit par se brouiller et que surgit au cœur du présent, un passé qui n’a jamais existé mais qui a pourtant fière allure. Un passé faussaire que des armées de sous-traitants médiatiques actualisent aux gardes- à -vous avec l’innocence d’un condamné à mort, subitement gracié.

Puissance de l’Empire, que d’écrire le passé. Un passé qui n’a jamais existé. Puissance de l’Empire que celui d’effacer de la mémoire l’enchaînement des faits, ces faits oubliés qui désormais ne conduisent nulle part ailleurs que dans la tête de Barak Obama. Cet homme tout sourire, diable et bon dieu tout à la fois, qu’éternise le flot rouge & continu de victimes anonymes et n’ayant pas vraiment tout à fait existé.

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