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Légitimer la violence ?

Rien, absolument rien, ne peut justifier la violence. En tout cas, c'est le mot d'ordre général. Et ceux qui l'affirment le plus fort, comme par exemple le gouvernement français, sont souvent les mêmes qui la pratiquent au quotidien et sans commune mesure. Car, d'après leur morale très variable, la violence se justifie en permanence.

Premièrement, la violence peut être défensive. Avec un budget militaire de 31,4 milliards d’euros, la France compte parmi les cinq plus grandes puissances militaires au monde. L’argument principal d’une telle force armée est bien entendu la défense contre l’agression potentielle. Ici, la justification de violence est la préparation contre des actes violents commis par d’autres États ou des civils (étrangers ou non).

Aussi, la violence se justifierait pour faire cesser la violence. Lorsqu’un dictateur persécute sa population, que des passeurs aident des migrants à se rendre en Europe ou que des groupes para-militaires terrorisent des populations , l’envoi des forces armées devient nécessaire. Toutes ces nouvelles "guerres humanitaires" sont légitimées pour contrer la violence. Cette même violence est utilisée lorsque des manifestations deviennent trop virulentes , celles-ci sont réprimées grâce à des armes, dites "non létales". Ici encore, la violence contre la violence.

La violence peut être aussi légitimée par un État comme prévention de risque. La guerre d’Irak, par exemple, à été déclenchée par les Etats-Unis pour prévenir les dégâts qu’auraient pu causer des armes de destruction massive. L’emprisonnement, autre forme de violence, est quant à lui requis pour prévenir des actes violents à venir.

L’État recours aussi à la violence dissuasive. Avec 290 armes nucléaires actives, une fois encore la France fait partie des grand champions de la violence potentielle. Une arme nucléaire étant capable de tuer des civils par milliers, la détention et l’entretien de telles armes est d’une violence symbolique inouïe. Mais une fois de plus, cette violence est légitimée par la dissuasion défensive qu’elle apporte.

Toutes les violences collatérales sont elles aussi légitimées très facilement. 500.000 enfants Irakiens morts suite à la première guerre en Irak ? Oui, mais "cela en valait la peine" nous dit Madeleine Albright. Les morts de civils tués sous les bombes sont elles aussi légitimées, car dans les guerres libératrices menées par l’occident, on ne fait toujours pas d’omelettes sans casser des oeufs.

La violence peut aussi se justifier pour des raisons économiques. Des migrants meurent en mer faute de moyens pour les aider ? Des Hommes meurent faute de soins en Grèce et ailleurs suite à la réduction des budgets ? Le tabac tue des milliers de personnes chaque année ? C’est regrettable, mais cette violence est justifiée par les enjeux économiques.

La révolte populaire est elle aussi légitimée, mais avec une géométrie variable. Les révolutions de couleurs, se passant hors des frontières de l’État sont traitées avec bienveillance voire soutenues militairement, du moins lorsque l’État y trouve son intérêt. Mais malheur à ceux qui se révoltent contre un dictateur allié de la France. Aussi, les résistants et révolutionnaires d’hier sont considérés comme des héros, mais des individus utilisant les mêmes méthodes aujourd’hui seraient persécutés et emprisonnés. La lutte légitime du peuple serait une relique du passé, qu’on expose dans les musées mais qu’on voudrait interdire aujourd’hui, comme une vieille tradition vouée à disparaître.

L’État ira même jusqu’à légitimer le terrorisme lorsqu’il est dans son intérêt. N’est-ce pas Laurent Fabius qui louait le « bon travail sur le terrain » de la filiale d’Al Qaïda en Syrie ? N’est-ce pas l’état Français qui saborda le Rainbow Warrior en tuant un militant écologiste ? Et comment évoquer les bombardements atomiques d’Hiroshima et de Nagazaki autrement qu’en parlant d’un acte "utilisant la terreur à des fins politiques" ?

En dernier lieu, tout bien considéré, la violence est légitimée sans aucune raison par les états occidentaux et la France en particulier. Car ces pays sont les premiers constructeurs et vendeurs d’armes, avec un regard nul sur l’utilisation qui est en faite ou pourrait en être faite.

On le voit donc, la violence est légitimée de mille et une façons par ceux qui l’exercent au quotidien. La perte d’une vie humaine, l’agression, la mutilation sont justifiées par les États​ dans bien des cas par tel ou tel argument. Tantôt les Droits de l’Homme, tantôt la sécurité, tantôt l’économie ou par tout autre moyen susceptible de permettre à l’État d’user de la violence.

Mais exercer la violence et la subir sont deux choses bien différentes. Et, dans ce dernier cas, le pouvoir étatique est très prompt à délégitimer toute violence en la considérant comme intolérable ou injustifiable. Car il semble bien qu’en aucun cas, aujourd’hui, la contestation populaire, ne devrait être violente. Rien ne semble pouvoir le justifier.

Contester l’État et les multinationales doit se faire de façon pacifique, et encore, uniquement dans le cadre autorisé par le pouvoir. Car le peuple, lui, n’a pas le droit d’user de ces excuses à la violence. Pas de violence défensive, pas de violence préventive, pas de violence contre la violence, pas de violence économique et surtout pas de violence collatérale. Ce privilège est réservé au seul État en position de domination. En fait, la seule violence inadmissible et intolérable pour les dominants est la violence du peuple contre l’État ou contre l’ordre établi, exercée par les dominés dans leur propre pays. Car cette contestation pourrait remettre le pouvoir du dominant en question ; les révolutions sont rarement pacifiques.

La lutte contre les guerres injustes, la menace nucléaire, le gaz de schiste, ou les licenciements, la défense contre l’agression publicitaire, l’aide aux plus démunis, la protection de l’environnement et celle de l’avenir de l’espèce humaine ; toutes ces contestations devraient être purement pacifiques. Mais dans ces domaines, quelles avancées les pacifistes ont-ils obtenus durant les 30 dernières années ? Le nombre de civils tués par les "coalitions" ne fait qu’augmenter, le nucléaire n’a jamais été aussi présent, tout comme la publicité. Le chômage en France atteint des sommets, les risques climatiques sont au plus haut et les inégalités ne cessent de se creuser.

En fonction du côté d’où elle vient, le terme même de "violence" sera totalement différent. Des manifestants brisant des vitres ou brûlant des voitures seront désignés comme de dangereux criminels, mais dans le même temps, un État qui se permet de laisser mourir des centaines de personnes en mer ne sera jamais qualifié comme tel. Lorsque les bombardements "humanitaires" tuent et mutilent des civils à l’autre bout du monde, on parle de simples "bavures", le pouvoir concédant au mieux de légers "regrets". Des syndicalistes se battant pour leurs emplois se verront traités comme des extrémistes alors que des entreprises bénéficiaires licencient à tour de bras pour aller exploiter la misère à l’autre bout du monde. Le trouble à l’ordre public ou le délit d’outrage et rébellion sont durement condamnés, mais les vendeurs d’armes sont érigés au rang de héros nationaux (Serge Dassault, par exemple, est depuis 2004 Grand officier de l’ordre national de la Légion d’honneur). Une fois de plus, les mots et leurs significations sont détournés afin de faire passer les plus violents de tous pour les défenseurs de la Justice et de la Liberté.

Malheureusement, la violence du peuple s’exprime lorsqu’il n’a plus d’alternatives. Car quelles alternatives lorsque le suffrage universel ne remplit plus ses fonctions ? Quand un président élu ne respecte aucune de ses promesses de campagne ? Quelles alternatives quand des projets se font au mépris de la démocratie, du droit, des populations et dans des conditions de corruption extrêmes comme à Sivens ou Turin ? Quelles alternatives pour le peuple lorsque la police impunie frappe, mutile et tue sans qu’aucune décision ne soit prise pour endiguer le phénomène ? Quelles alternatives lorsque la survie des générations futures est sacrifiée pour que certains puissent gagner toujours plus ? Quelles alternatives pour les citoyens contre la violence des grandes entreprises, locales ou multinationales ? Seule la loi et la protestation pacifique sont les seules options disponibles pour le peuple. Mais la protestation pacifique est ignorée ou réprimée et l’injustice omniprésente. Jamais la violence de l’État n’est mise en cause, celle-ci est légitimée, de fait, par l’usage même de la force, car l’Histoire est écrite par les vainqueurs. La loi du plus fort porte très bien son nom et est la règle partout.

Alors, tous pacifistes ? Les militants d’aujourd’hui se drapent dans un pacifisme automatique et irréfléchi, imposé par un système ultra-violent, comme s’il n’y avait pas d’autres alternatives. Malgré qu’au quotidien, et dans tous les domaines, les États justifient leur violence. La violence du dominant sur les dominés. Voila où se situe la morale étatique, la loi du plus fort, du plus riche ou du plus nombreux.

Ce texte n’est pas un appel à la violence. C’est un appel à moins de violence, plus de justice, de raison et de paix. S’il faut condamner les violences, alors il faut toutes les condamner, y compris les violences étatiques et celles du capital. Mais si, au contraire, la violence est justifiable, si on estime qu’elle peut être utile, voire nécessaire, que certaines causes méritent de se battre violemment, alors le pacifisme absolu des citoyens ne peut se justifier.

»» http://s-informer-pour-mieux-comprendre.com/2015/05/14/legitimer-la-violence/
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