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Near Death experience ou : comment j’ai failli mourir d’ennui.

Une vague médiatique nous submerge, qui porte aux nues Houellebecq acteur, que ce soit dans L’enlèvement de Michel Houellebecq (passé à la télé pendant les vacances) ou dans Near Death experience, actuellement sur les écrans : a star is born ! non seulement un grand acteur, mais un personnage, une icône, quelque chose comme Max Sennett ou Monsieur Hulot, voire un Hamlet en chair et en os faisant passer son désespoir à travers un humour noir déjanté.

On aimerait tellement y croire, on aimerait qu’il se passe quelque chose de stimulant dans le cinéma français ! Hélas ! le film ne démarre jamais : il se traîne (pendant pas beaucoup plus qu’une heure et demie, heureusement) au rythme du coup de mollet nonchalant de son héros Paul ; on reconnaît au passage les gags célébrés par les critiques comme désopilants, sans être seulement tenté de sourire (dans ma salle -10 à 12 spectateurs -, aucun rire ne s’est fait entendre).

Qu’est-ce qui pèche donc ? Tout, le scénario comme le protagoniste, en tant qu’acteur comme en tant que personnage : Delépine et Kervern ont confondu fantaisie et paresse ; plutôt que de construire quelque chose, ils gagnent du temps en montrant longuement de beaux paysages de montagne, totalement hors sujet, car lorsque Houellebecg apparaît, il semble plaqué sur eux, et les paroles du film jouent contre le paysage (Paul finit par avouer qu’il donnerait les paysages les plus sublimes pour le confort de son vieux canapé en cuir molletonné !) ; ou bien, ils introduisent des personnages qui ne font que passer (ils sont censés l’empêcher de se suicider, en fait on comprend qu’il ne cherche que des prétextes) ; ou encore ils remplissent avec des scènes qui, dans leur esprit, doivent être d’un humour surréaliste, et qui tombent dans un grotesque involontaire pitoyable (la séquence du "petit cycliste" montre bien le niveau de créativité des auteurs) ; en désespoir de cause, ils s’essaient à un fantastique plan-plan, voix céleste off à l’appui.

Quant au héros, Paul, on n’y croit pas une seconde ; mais inutile de s’y attarder, de toutes les critiques et interviews, il ressort que Kervern et Delépine n’ont qu’un argument : Houellebecq. C’est le concept du film : braquer la caméra sur Houellebecq, enregistrer ce qui sort de ses lèvres boudeuses, et qui est censé exprimer sa philosophie, et filmer ce qui se passe. Or, il ne se passe rien (on aimerait parfois voir à sa place Benoît Poelvoorde, on se dit que, peut-être, lui aurait tiré quelque chose de telle ou telle scène).

Pourquoi Houellebecq s’est-il donc lancé dans le métier d’acteur ? En littérature, c’est certainement le personnage le plus marquant depuis Sartre, Genet, Koltès, bref, depuis les années 60-70 : Les Particules élémentaires étaient un pavé dans le marigot français ( je ne m’occupe pas des idées de Houellebecq, je ne considère qu’un critère ; une œuvre est-elle stimulante ?) ; mais il a aussi construit sa notoriété sur son personnage, dont il joue dans ses romans. Les Particules étaient en grande partie de l’auto-fiction, dans La Carte et le territoire, l’auteur s’introduit dans son roman sous son vrai nom, donnant de lui-même une image canonique, déjantée et alcoolisée.

Sans doute la trouve-t-il si réussie qu’il a voulu la diffuser et la rentabiliser aussi par le cinéma. Mais, surprise, dans ce passage à l’écran, elle se dégonfle comme une baudruche. Dans ses romans, le personnage Houellebecq est médiatisé par le style ; dépouillé de son manteau de mots, le roi est nu.

Houellebecq ne joue pas : sans doute ses réalisateurs et lui pensent qu’il n’a pas besoin de jouer, le spectateur est censé tomber sous le charme de sa voix blanche (n’est pas Depardieu qui veut !) et de son look trash. Mais, face à la caméra, Houellebecq est stérile, il n’exprime rien, et plus les plans fixes sur son visage se prolongent, plus on s’ennuie. Autant le personnage de papier est drôle, autant l’individu Houellebecq filmé est insipide. Rien de plus pathétique que la scène du jeu de la barbichette : à la vue de la tête à Houellebecq, son partenaire est pris d’un fou rire – qu’aucun spectateur ne partage. Dans le film, Paul se vexe qu’on rie de lui ; si, en vrai, Houellebecq allait dans les salles voir les réactions, il serait capable, sinon de violence, en tout cas d’insulter ces abrutis de spectateurs qui ne succombent pas à sa vis comica ! Aussi Paul nous ôte-t-il de la bouche ce commentaire : "Paul, tu parles trop et tu ne te suicides pas assez".

Mais le personnage filmé de Houellebecq n’est pas seulement insipide, il y a pire. La première image du film s’attarde lourdement sur Paul en train de siroter un pastis avec des collègues, vu de profil : on ne peut que remarquer que ce profil est lippu (à qui faudrait-il penser : Artaud ? Céline ?) et on réalise, comme le fait remarquer Causeur, que Houellebecq s’est fait une tête de sans dents, ce qui se confirme quand il prend la parole en off : il a du mal à articuler.

A-t-il voulu prendre les stigmates de la pauvreté pour manifester sa solidarité ? On sait bien que l’individu et le personnage Houellebecq n’aiment pas les hommes (et encore moins les pauvres ! Houellebecq est beaucoup plus à son affaire dans le cercle de Bernard-Henri Lévy !). Alors, pourquoi cette tête d’édenté ?

Houellebecq joue à pousser de plus en plus loin son look trash : comme Mrs. Simpson sans doute, il professe qu’on n’est jamais ni trop riche ni trop maigre. La caméra insiste avec un simplisme lourdingue sur ses guibolles poussives, et, au cas où on n’aurait pas compris, elle se fixe tout aussi lourdement sur leur ombre, pour essayer de leur donner une allure giacomettienne. Mais que faudrait-il en conclure ? Que Houellebecq, Christ post-moderne, a pris sur ses étroites épaules toute la misère du monde ?

Au contraire, clodo de luxe, dandy à l’envers, Houellebecq marque par cette silhouette étriquée sa morgue et son snobisme : à une époque où les footballeurs, les stars de Hollywood, les monstres amphibies que sont devenus les nageurs ont banalisé les corps athlétiques, il semble que le grand chic soit d’obtenir un corps mou et efflanqué. Houellebecq applique ainsi son style kitsch à sa propre personne.

Mais il va peut-être trop loin : son profil lippu apparaît comme une parodie insultante de tous ces Français qui ont de plus en plus de mal à se payer des soins dentaires. Le succès du mot de Valérie Trierweiler n’est pas un hasard ; il suffit de regarder autour de soi (hors de Saint Germain des Prés), ou même de se regarder dans la glace : les bouches à trous, naguère caractéristiques des pays du Sud, sont de retour dans le Nord ex riche.

Rentrez donc dans vos romans, Michel Houellebecq, vous y êtes plus agréable à rencontrer que dans la vie ou sur les écrans. Mais peu importe la vacuité du film et de son héros, BHL étend à ses amis le privilège de ne recevoir dans les medias que des critiques enthousiastes.

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« Cremada » de Maïté Pinero
Bernard Revel
Prix Odette Coste des Vendanges littéraires 2017 Maïté Pinero est née à Ille-sur-Têt. Journaliste, elle a été correspondante de presse en Amérique Latine dans les années quatre-vingts. Elle a couvert la révolution sandiniste au Nicaragua, les guérillas au Salvador et en Colombie, la chute des dictatures chiliennes et haïtiennes. Elle a écrit plusieurs romans et recueils de nouvelles dont « Le trouble des eaux » (Julliard, 1995). Les huit nouvelles de « Cremada », rééditées par Philippe (…)
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Je crois vraiment que là où il y a le choix entre la couardise et la violence, je conseillerais la violence.

MAHATMA GANDHI

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