Quand François taille ses moustaches, Kamel rase sa barbe

Dire que les parents en savent assez sur l’éducation de leurs enfants c'est avouer qu'on veut les tromper. C'est la dégradation éducative sous la vaine apparence d'un sérieux hypocrite qui nous fait prendre la patate de Mascara pour des truffes de Laghouat. Nouria pense que nous évitons à nos enfants un choc culturel élastique quand on ne leur parle pas en Chinois ou en Arabe littéraire. D’après les conseillers de Benghebrit, enseigner à notre enfant une langue autre que le Français est un signe de barbarisme chez Nouria. En faisant ainsi nous forcerons nos enfants à se braquer et se refermer sur eux-mêmes. Drôle de raisonnement.

Je commence mes idées par un passage d’Honoré de Balzac « Si le gouvernement avait une pensée, je le soupçonnerais d’avoir peur des supériorités réelles qui, réveillées, mettraient la société sous le joug d’un pouvoir intelligent. Les nations iraient trop loin trop tôt, les professeurs sont alors chargés de faire des sots. Comment expliquer autrement un professorat sans méthode, sans une idée d’avenir ? ».

Balzac parle de Madame Firmiani dans La Comédie Humaine. Madame Firmiani tenait pour les flâneurs une espèce d’auberge sans enseigne. Madame Firmiani est une femme mystérieuse....Ce prototype de femme existe chez nous.

Je rappelle à Madame Firmiani que la tête de nos enfants n’est ni un package expérimental ni un champ de bataille idéologique. La maladresse politique peut l’agiter. L’agitation dans la boite pensante entraine un futur perturbé. Le peuple est frappé par la bizarrerie politique qui remue cette boite. La boite pensante est secouée de partout. Elle résume le malsain de la situation actuelle. Les bruits des tiroirs vides du ministère de Benghebrit et les rumeurs des couloirs de ses directions d’éducation se font entendre dans le monde de la rue. La rue parle de la réforme de l’école algérienne et du génie de la deuxième génération et se demande d’où vient cette idée trop extravagante.

L’expérience nous enseigne que toute réforme apporte dans son vent une tension de peur de l’avenir accompagnée d’un malaise immédiat. Généralement, les experts initiateurs des reformes et les décideurs politiques impliqués sont conscients des effets secondaires de leurs actions. Ils ont intérêt à prendre leur précaution et faire attention à ne pas renverser les forces de stabilité dans la tête de nos enfants. Il est important de souligner que les résistances au changement naissent des inexpériences des faiseurs des réformes. Ils sont plus politisés qu’experts dans le domaine. Il ne faut pas non plus trop s’étonner du fait que la réforme actuelle du système éducatif menée par Benghebrit et son entourage cause de nombreuses critiques. Des critiques provenant de sources différentes. Ces sources sont toutes d’accord que application des reformes exige plus de temps de préparation et d’organisation. Une bonne éducation ne s’improvise pas et les réformes ne se résument pas dans un ouvrage pédagogique fait à la va vite, en cachette et sans évaluation d’expert. L’histoire nous fait leçon. Les relations diplomatiques entre la Chine et le Japon ont failli être coupées quand le Japon voulait modifier un texte dans un manuel scolaire. Ce texte touchait à l’histoire chinoise. Chez nous, Benghebrit veut changer tout un système scolaire et personne ne dit mot.

La problématique vient du fait que Benghebrit représente le décor restant des ruines de Benzaghou et ses réformes. Des ruines coloniales qui recherchent des rénovateurs dans un monde éducatif détruit par l’incompétence, la démagogie et le mauvais sens.

L’année 2016 est l’année de la réforme de l’éducation en France comme en Algérie. Les français reforment le collège. Les algériens reforment l’école. Cette action est bien dite dans l’adage chaoui : Quand François taille ses moustaches, Kamel rase sa barbe.

En France, Najat Vallaud-Belkacem, la ministre de l’éducation entame la réforme du collège. Chez nous, Benghebrit fait la même chose dans nos écoles. Avec ses deux femmes, l’Algérie et la France ont réellement connu un problème d’éducation. Voici ce que pense les français de la reforme de Najat Vallaud-Belkacem « C’est une réforme foncièrement bureaucratique, conçue et imposée du sommet, pétrie d’idéologie post-bourdieusienne, dont les racines conceptuelles plongent plutôt dans feue la Grande Révolution Culturelle Prolétarienne du grand timonier Mao Zedong, la terreur en moins, que dans les idéaux émancipateurs de Jules Ferry et Ferdinand Buisson. Il s’agit de forcer la majorité du peuple, dont le souci principal est de donner à ses enfants une éducation de qualité et les armes du savoir pour affronter le monde qui vient, à accepter le principe d’une école où les meilleurs élèves, les plus doués, seront freinés dans leur progression, pour ne pas laisser ceux qui le sont moins sur le bord du chemin. ». Les algériens disent la même chose des reformes de Benghebrit mais dans une langue différente.

Les éducateurs algériens se souviennent de la déclaration de Najat Vallaud-Belkacem, en visite en Algérie, Octobre 2015. La ministre française a démontré que son département intervenait non seulement dans la formation des instituteurs algériens, ou encore la formation des formateurs, mais aussi et surtout dans le contenu des matières pédagogiques. Deux ou trois mois avant cette visite, Noura Benghebrit chantait tout haut : les reformes de l’école sont faites par des Algériens sans aucune aide étrangère. Benghebrit avait peut-être raison. Dans son esprit, le coup de main français n’est pas considéré comme une main étrangère. Je pense que les deux dames prennent leurs idées d’une même source. Elles marchent mains dans la main vers le désastre intellectuel.

Tout ministre aime être applaudi même quand sa solution complique l’approche au problème. Le plus intelligent ne se précipite pas. Il attend. Il analyse le monde qui l’entoure. Il pèse le risque derrière une décision précoce ou non réfléchie. Le monde autour de nous bouillonne. Nous devons faire attention. Messaoud Boudia et Ahmed Khaled peuvent nous dire où va Benghebrit avec ses reformes discourtoises. Nous imaginons leur réponse et nous continuons notre imagination. Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà...

A l’école noyée, comme dans le stade marécageux où les hurlements politiques font échos, comme dans l’usine brûlante, sous le toit d’un palais frémissant sous les complots, se prépare aujourd’hui une nouvelle gouvernance. Dans cette gouvernance, les problèmes les plus durs de l’économie et de l’organisation politique seront débattus l’un après l’autre. Espérons que la nouvelle gouvernance prendra place dans la paix et le calme. Les maitres de la nouvelle Algérie mettront en place un conseil supérieur de l’éducation. Ce conseil décidera du sort de notre école. Les membres de ce conseil ne seront pas nommés par Benghebrit, Sellal ou autre. Ils seront élus par les maitres de l’éduction loin des tendances politiques. Dans ce conseil les vrais problèmes de l’école seront discutés et trouveront leurs solutions. Des solutions nouvelles seront dictées par le sentiment de justice et de droiture. Les compétents et les sages dans ce conseil soigneront les plaies de la société. De nouveaux espoirs se dessineront, de nouvelles conceptions de gouvernance apparaitront. Une idée nouvelle entrera facilement dans les esprits des jeunes algériens comme un rêve américain. Elle attire les désespérés. Des désespérés qui cherchent à améliorer leur train de vie.

Dommage pour ma belle-mère ! Elle ne fera pas parti de ce conseil. Elle va applaudir les nouveaux maitres et lancer des youyous de délivrance pour exprimer sa liberté.

Puisque nous ne sommes pas encore dans ce nouveau monde, ma belle-mère pense que l’école va perdre tout ce qu’elle possède après les reformes accélérées et non étudiées que Benghebrit veut imposer. Pour cette raison, elle n’aime pas Nouria. Elle pense que Benghebrit veut insister sur les valeurs algériennes en ignorant la réalité algérienne. Comme la majorité des maitres d’écoles, ma belle-mère pense qu’entre le savoir-être algérien et le vouloir-être français Nouria a perdu le Nord. Elle veut renaitre dans une autre sphère pour apparaitre comme Najat Vallaud-Belkacem.

Un enseignant dans mon village décrit cette dame. Benghebrit n’a pas la patience de l’enseignant. Il doute fort qu’elle a touché un morceau de craie dans sa vie. Elle se trompe de pays. Elle nie sa culture et se berce d’illusion. Il lui rappelle les paroles du soufi Djalâl ad-Dîn Rûmî « Vous prétendez venir de cette âme qui est l’origine de toutes les âmes. Vous êtes de cette ville qui est la ville de ceux qui sont sans ville. Le chemin de cette ville n’a pas de fin. Allez, perdez tout ce que vous avez. C’est cela qui est le tout. »

Benghebrit nous dit qu’il est important de ne pas choquer l’écolier avec une langue arabe littéraire. Elle pense que cette langue est une nouvelle langue pour nos enfants.

Le français était une langue nouvelle pour le père de Benghebrit. Nouria n’a jamais été choquée par cette langue étrange quand elle était écolière. Devenue responsable de l’éducation elle prend le masque du réformateur qu’elle portait pendant les années 70 quand elle militait dans Comité de Volontariat de la Révolution Agraire (CVRA). Venue du néant, elle prend le devant de la scène, adresse aux algériens les opérations de ses changements éducatifs. Devant cette situation lamentable et consternante, les discours les plus légitimes, celui de l’exercice du bon sens, de l’analyse technique, du pragmatisme de l’efficacité, de la culture du résultat, les uns à la suite des autres, se sont prononcés contre l’excès de zèle de Nouria. Un excès de zèle en adéquation avec la conjoncture du monde actuel.

En conclusion : Benghebrit est le sergent qui cache le bataillon français qui combat la Chine en terre africaine. La France voulait rester "le partenaire économique majeur" de l’Algérie. Elle a été détrônée par la Chine. La France dispose 620 collèges et lycées qui permettent à leurs élèves d’apprendre la langue de Confucius. Chez nous, la langue chinoise est ignorée par notre sergent. Dire que les parents en savent assez sur l’éducation de leurs enfants c’est avouer qu’on veut les tromper. C’est la dégradation éducative sous la vaine apparence d’un sérieux hypocrite qui nous fait prendre la patate de Mascara pour des truffes de Laghouat. Nouria pense que nous évitons à nos enfants un choc culturel élastique quand on ne leur parle pas en Chinois ou en Arabe littéraire. D’après les conseillers de Benghebrit, enseigner à notre enfant une langue autre que le Français est un signe de barbarisme chez Nouria. En faisant ainsi nous forcerons nos enfants à se braquer et se refermer sur eux-mêmes. Drôle de raisonnement.

Pr. Omar Chaalal

COMMENTAIRES  

12/09/2016 11:39 par Prof. Chitour

Cher professeur

J’ai lu avec attention votre cri du coeur et j’y souscris.
Il est vrai que l’on ne peut pas venir avec ses grands sabots bouleverser par des reformettes un système à temps de réponse long au risque probable d’augmenter l’entropie.
Mais nous sommes dans la dictature de l’éphémère ! Au lieu de travailler dans le calme et la sérénité en associant tout le monde sans exception -islamistes réfractaires compris- autour d’un projet : Quelle école pour quelle Algérie nous voulons à l’horizon 2030 ? Naturellement il nous faut un consensus social pour mettre l’école à l’abri des convulsions sociales et d tout ceux qui font leur miile d cetta anomie savamment entretenue avec deux champions : Ceux qui veulent nous arrimer à un ’accabya moyen-orientale et ceux qui pensent que le salut viendrait de l’ancienne puissance coloniale qui ne fait rien pour assumer son errance coloniale et qui fort de ses lobbys essaie encore d’imposer plus d’un demi siècle une doxa pour son profit.
D’où viendrait le salut ? Tant que l’on aura pas mis tout sur table et tenter de régler avec les outils et les défis du XXIe siècle le problème identitaire visant à faire émerger l’Algérien du futur sans complexe avec les langues ouvert sur le savoir universel avec des fondamentaux dont il ne fera pas un fond de commerce, on n’avancera pas
Donner une réputation de moderniste - ce que fait la presse francophone- sur lequel il y a une crispation des arabophones est malsain. Ce sera encore une fois une victoire à la Pyrrhus ! Le maitre mot est l’humilité, la parole apaisée pour mobiliser tout le monde autour d’une utopie. Je suis sur que l’enseignement supérieur - les enseignants- tenu soigneusement àl’écart peut être d’un grand apport tant il est vrai que l’éducation est un continuum qui va de l’école à l’université.
On l’aura compris il aurait fallu que le titulaire du poste ait eu le tableau derrière soi pour pouvoir parler aux enseignants. Ce n’est apparemment pas le cas
S’agissant de l’enseignement de l’anglais et du Chinois, il est urgent de les introduirre en force notamment dans les disciplines scientifiques mais de ça on en veut pas alors que dans le même temps en France toutes les publications sérieuses sont en anglais ! Chercher l’erreur !!

Merci pour votre contribution

Pr.C.E. Chitour

12/09/2016 17:33 par saïda b

Beaucoup de monde pense pour les autres : les citoyens, les parents, les enfants ...
Je vais m’en préserver et vous raconter une histoire, et une expérience.
J’ai enseigné l’anglais, Algérie (1974-85) où j’ai fait une expérience que je relate succinctement : une forme de cogestion de la relation de groupe avait permis d’instaurer une communication cordiale entre des groupes d’élèves (lycées) d’horizons socio-économiques et culturels et de scolarités contrastés qui s’ignoraient, au détriment d’une majorité de jeunes issus de la ruralité et des filles, privés de paroles. L’anglais était la seule langue "commune" ! Certains parlaient arabe et français, d’autres arabe et berbère, d’autres seulement arabe ou berbère. Une occasion rêvée pour une action pédagogique intégrale.

Quelques années plus tard, à l’occasion d’un remplacement en France en 1990, j’ai eu l’occasion d’adapter au pied levé le même procédé avec des collégiens de 4ème qualifiés les "plus durs du collège". En confrontation ouverte avec les adultes et l’apprentissage, ils n’avaient en effet pas beaucoup de tenue. Or, comme les lycéens des années plut tôt, les collégiens ont adhéré sans réserve à l’exercice de la pratique de la coopération. En l’espace de 3 cours, ils n’étaient plus de voyous confirmés mais des jeunes débordants de questionnement sur les méthodes d’enseignement !!

Interpellée à la fois par la similitude des effets dans des conditions aussi différentes et par les implications de l’erreur de qualification de leur conduite sur leur perception d’eux-mêmes, j’ai renoncé à l’enseignement et entrepris une formation de formateurs avec cette hypothèse en tête : ce que l’on nomme "inconduite" chez les jeunes, délinquance chez des plus grands, serait une expression spontanée d’un besoin de cohérence.

Trois stages pratiques réalisés auprès de publics "en difficulté" (détenus, classe de 3eme sans niveau, formateurs, 1991/92)) m’ont permis de vérifier mon hypothèse. Continuant ma recherche en aveugle, j’ai adapté l’objet et le contenu de mes interventions aux circonstances. La pratique logomotrice est l’aboutissement de cette expérience de terrain. Le Stage Intensif de Recentrage-Ancrage en est une application.
Le stage de base dure 6 séances, sur 3 à 12 semaines, et se pratique en groupe.
L’éducation nationale en France a dédaigné cet outil. L’éducation nationale en Algérie ne donne pas suite à mes propositions ... Qui serait intéressé par une initiation à cette pratique ? Ou une expérimentation suivie avec des enseignants, éducateurs, formateurs, soignants ...
Je vous donnerai le nom du site qui présente ma pratique si vous le souhaitez.
Je précise être à la retraite et disponible.
Cordialement

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12/09/2016 19:53 par depassage

C’est ce qu’on appelle la pensée au degré zéro. Kamel ne rase pas sa barbe, elle lui tient d’être et de poncif et François n’a plus de moustache depuis bien longtemps. Choisir son maître est une bien maigre consolation. Bien à vous cher profs.

12/09/2016 22:26 par vagabond

Pourtant cette Benghabrit est défendue par la génération des francophones algériens qui voient en la langue arabe, une langue de sous-développement. Ils en ont honte. Tout comme cette ministre qui ne sait s’exprimer qu’en français face à une population de moins en moins francophone.
Imaginez en France, un ministre de l’éducation s’exprimant en anglais avec la population...
Mais d’où vient-elle ? Quelle zaouia lui a donné ses titres de noblesse ?

La rupture est totale en Algérie, le peuple vit sans interaction avec l’Etat. Les ordures envahissent les villes et les espaces verts, la pollution n’est ni surveillée ni contrôlée, le service d’ordre est moribond, le président est peut-être décédé, il l’est de toute façon dans sa fonction, les écoles privées pullulent..., peuple et Etat s’agitent dans des univers parallèles.

Les actes de rares inrividus consciencieux sont la dernière chance du pays. L’Algérie va- t-elle enfanter un jour, des individus de la trempe de Kateb Yacine, Benyahia ou Ben Mhidi ?

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