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La fabrication des maîtres

A deux ans (2012) d’une échéance électorale, qui n’a en vérité que peu de sens, (supprimez la fonction de Président de la République, vous verrez qu’il ne se passera... rien !), mais qui est présentée au « bon peuple » comme la quintessence de la démocratie, tout ce que le système dispose de moyens d’information, de faiseurs d’opinions, de piétaille politicienne,... se mobile pour conditionner l’opinion publique.

Il faut qu’à l’échéance fatidique les « esprits » soient disponibles pour ingurgiter les discours où on leur promettra — comme d’habitude - des « lendemains qui chantent ».

LE MAITRE ET LE NEANT

J’appelle — ici - néant, tout ce qui est en dehors de la quotidienneté, c’est-à -dire de ce qui fait l’essentiel de la vie de tout un chacun.

Les maîtres, comme la monnaie, se fabriquent ex nihilo, à partir de rien. Ce ne sont que de pur produits bureaucratiques qui n’ont qu’une seule fonction : assurer la pérennité du système.

Exemple : depuis des mois, on nous présente l’actuel Président du Fond Monétaire International, comme le « candidat alternatif » au pouvoir actuel en France, quasiment le futur président de la République. Mais qui « on » ?

Avez-vous entendu parler de lui dans les bureaux, les ateliers, les champs, les marchés,... ? Bref partout où les gens, comme vous et moi, vivent. Non certainement pas. En fait tout le monde s’en fout. Pourtant c’est cette question — comme beaucoup d’autres mineures, inessentielles et à mille lieux de nos préoccupations — qui défraient les chroniques radiophoniques, les chaînes de télé, les magazines « politico-pipeuls ». Un véritable produit préfabriqué nous est imposé par de multiples canaux, interférents avec des questions, elles essentielles, qui sont passées à la trappe.

Cet exemple démontre deux choses :

- cette élection appartient à un cercle restreint qui échappe largement aux citoyens,... elle se conçoit dans des sphères étrangères à la « vraie vie » ;

- le « produit proposé », largement élaboré dans le cadre du système marchand, est totalement étranger aux préoccupations du citoyen Lambda - pur produit de l’alliance politique-finance, il est le vecteur idéal pour le système.

L’intérêt d’une telle méthode c’est qu’elle assure que les choses ne changeront pas. Le « produit proposé » appartient au sérail des décideurs, des nantis, des parasites — milieu qui n’hésite pas à se qualifier abusivement d’ « élite » (?) - milieu dans lequel ils/elles sont tous interchangeables.

Tout ce que ce système dégénéré a de parasites, profiteurs, courtisans,... concours à capter notre attention, non pas sur ce qui est essentiel pour notre vie présente et future, mais ce qui est essentiel pour sa propre survie à lui.... Et comme nous sommes, en principe, dans un système dit « démocratique », il faut conditionner celles et ceux qui, croyant exercer un pouvoir, vont légitimer, celle ou celui qui va continuer à les exploiter.... Et ça marche depuis prés de deux siècles.

Reste pourtant à « vendre » le produit.

L’OPERATION MARKETING

Vendre le produit est l’affaire des partis politiques et des médias.

Le conditionnement se poursuit depuis des mois,... il n’est pas près de se terminer.

Certes, cette nomination ne fait pas l’unanimité dans les milieux politico-financiers,... les loups s’entredévorent — les intérêts des clans, le partage du pouvoir - mais le cadre de leurs affrontements est strictement limité par la survie du système et la mise à l’écart de tout risque d’interférence inopportune. Cette lutte de clans, entre partis gestionnaires, ou au sein d’un même parti, donne l’illusion d’un débat de fond, de lignes de fractures irréductibles, ... présenté au « bon peuple » comme un choix de société. Il n’en est évidemment rien. L’Histoire nous a montré que l’alternance des uns et des autres au pouvoir, sur le moyen terme, ne change rien. Mais cette illusion il faut l’entretenir. C’est là qu’interviennent les médias.

Le matraquage, très en amont de l’élection, prépare le terrain. On ne parle que de untel ou untel,... dont on ne sait d’où sort ce choix. L’opinion publique versatile et malléable est manipulée, sondée, orientée, conditionnée, « intéressée », guidée dans son choix limité... Tout est mis en oeuvre pour la séduire : appel aux milieux sportifs, médiatico-pseudo-culturels, journalistiques,... toute une galaxie de courtisans qui gravite autour du pouvoir, s’y alimente et s’y reproduit.

Des noms ?

Le sommet de la manipulation médiatique est le « débat politique ». Véritable spectacle avec une mise en scène particulièrement soignée, une annonce alléchante massivement répétée,... elle interpelle le quidam entre deux matchs de football. La comparaison sportive est d’ailleurs de rigueur pour donner plus de piquant à l’opération. Les « experts », politologues, faiseurs d’opinions et autres charlatans, qui gravitent dans les sphères des partis, du pouvoir, des médias et des salons parisiens viennent dans de multiples émissions causer, disséquer, analyser, prédire.

Les matchs, pardon, les débats sont préparés comme de véritables rencontres sportives. Les champions entraînés par une équipe de spécialistes en communication. Les mots utilisés disséqués, les répliques répétées, les attitudes étudiées, les mots soupesés, les petites phrases finement ciselées, les costumes testés...

Le combat, pardon, le débat, est annoncé comme un combat de gladiateurs. Les paris sont ouverts,...

Le « bon peuple » baigne littéralement dans une sauce savamment préparée dans laquelle on a ajouté des ingrédients conformes à ses goûts, le suspense est total, l’incertitude savamment maintenue.

On rajouté à cela une dose non négligeable de culpabilisation pour faire sauter les derniers doutes - « Songez à celles et ceux qui sont morts pour la démocratie. Amen ! »... et le tour est joué.

AU BOUT, ... LE BIPARTISME

Toute cette comédie, cette manipulation grotesque n’a qu’un seul et unique objectif : légitimiter le pouvoir qui garantira la pérennité du système marchand.

Faire entrer la masse des citoyens dans une logique, une mécanique de légitimation du pouvoir qu’il ne maîtrise pas, telle a été l’objectif du processus dit « démocratique »,... et il est en passe d’aboutir.

Aujourd’hui un candidat se promeut comme une marchandise. Le marketing politique a remplacé le dialogue et la réflexion. Le produit est prêt-digéré et consommable immédiatement.

Le jeu politique est devenu une véritable escroquerie ou le gagnant est toujours le même, le politicien et le perdant toujours le même, le citoyen.

Que ce soit A ou B rien ne changera. Seules les apparences changeront.

Le lendemain des élections, tout est comme avant.

Toute cette manipulation n’a qu’un seul objectif politique : promouvoir le bipartisme qui assure la stabilité du système. Présenté au « bon peuple » comme une stabilité et l’expression même de la sagesse ( ?) il permet de tourner en rond, en donnant l’illusion du changement,... en fait en assurant simplement une alternance au pouvoir en vue de sauvegarder le système marchand. Les « réformes » que font les uns, sont immédiatement assumées par les autres qui leur succèdent.

Ainsi, dans une « grande démocratie » se construit le pouvoir. Les apparences sont sauves et celles et ceux qui dénoncent cette escroquerie sont traités d’anti démocrates ( ?). Jouer ce jeu c’est se rendre complice, c’est consciemment accepter d’être trompé et refuser de le reconnaître au nom d’un civisme de courte vue.

Patrick MIGNARD

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COMMENTAIRES  

07/06/2010 09:10 par François Mary-Vallée

Considérer "les exercices du pouvoir" partout où ils s’expriment.

Maîtriser nos peurs et craintes.

Éviter les compromissions et cautionner ce que nous voulons voir...

En résumer : "s’affranchir".

07/06/2010 12:05 par Néo-Résistant

Rassurez-vous, la crédibilité des grands médias n’est pas aussi importante qu’ils le croient, on l’a bien vu en 2005 pour le Référendum sur le TCE où 95% de la presse avait fait une campagne effrennée pour le "OUI", désormais, de nombreux citoyens se méfient de l’information "orientée" des grand médias (vous pouvez jeter votre télé, moi c’est fait depuis 3 ans), surtout que maintenant, avec le net on peut s’informer ailleurs ; c’est d’ailleurs pour cette raison que les médias et les hommes politiques "bien pensants" sont souvent très critiques à propos des médias du net... facile de comprendre pourquoi...

Ce qui est inquiétant, c’est que pas loin de 80% des citoyens sont non politisés et intoxiqués par les médias "bien pensants", il est donc évident que c’est à la minorité dite agissante qu’appartient la possibilité de renverser (pacifiquement de préférence !) la vapeur et jeter le libéralisme dans les poubelles de l’histoire... c’est le pouvoir politique qui doit reprendre la main !

Au premier tour de 2012, je voterai pour le candidat du Front de Gauche et si au deuxième tour je n’ai le choix qu’entre deux libéraux... j’irai à la pêche !

http://www.everyoneweb.fr/marredelagauchecaviar/

07/06/2010 19:18 par D.D

Non néo résistant, je ne pense pas qu’il faille jouer le jeu de l’élection... De toute manière il est piégé et les politiciens, style Mélenchon, Buffet, Bové et autres, ne sont que des "cautions démocratiques" et ne jouent que pour des places et intérêts personnels. Tu tombes une fois encore dans le panneau.

07/06/2010 21:44 par Lulu

@ D.D : Il y a un peu plus de 200 ans personne ne votait et c’est pas pour autant que nos ancetres étaient moins malheureux puisqu’ils ont été jusqu’à couper la tête de leur maître auto proclamé.

Ceux qui tombent dans le panneau, c’est ceux qui s’endorment entre 2 élections et qui ne demandent pas de comptes aux élus : car c’est de cette manière qu’ils les transforment automatiquement en maîtres.

07/06/2010 23:48 par Jokarus

Bonjour à tous,

très bon article Mr Mignard.
J’adhère.
Que feront-ils lorsque plus personne ne votera ? Pourra-t’on alors parler de dictature ? Elle s’installe doucement...
Et quoi d’autre pour remplacer cette pseudo démocratie.
Je suis prompt à la critique mais quand vient l’heure de trouver une alternative, j’entrevois le chaos total.
J’ai bien des idées, mais le changement se ferait assurément dans la douleur car ils ne se laisseront pas faire, assurément.
Il y a-t’il un moyen de passer d’un régime à un autre, en douceur, pour nous ?
A chaque fois que j’ai posé cette question aux groupes proposant un autre système (dont je taierai le nom), on me parle de révolution sanglante.
Qu’en pensez-vous, tous ?

08/06/2010 23:09 par zdr

Sans serait-il utile que le corps enseignants versent dans le cursus scolaire pour le bac, une analyse approfondie d’Etienne de la Boétie, qui écrivait (en 1549) le "Discours de la servitude volontaire".
Celui-ci expliquait notamment que « Il y a trois sortes de tyrans. Les uns règnent par l’élection du peuple, les autres par la force des armes, les derniers par succession de race. Les hommes sont responsables de leur assujettissement au pouvoir. Pour sortir de cette domination il faut sortir de l’habitude. L’homme qui connaît la liberté n’y renonce que contraint et forcé. Mais ceux qui n’ont jamais connu la liberté servent sans regret et font volontairement ce que leurs pères n’auraient fait que par contrainte. La première raison pour laquelle les hommes servent volontairement, c’est qu’ils naissent serfs et qu’ils sont élevés comme tels." Comme le précise La Boétie, « on ne regrette jamais ce que l’on a jamais eu »

09/06/2010 00:06 par EW

@Jokarus

« Que feront-ils lorsque plus personne ne votera ? »

Cela n’arrivera pas.

« Pourra-t’on alors parler de dictature ? »

On peut en parler.

« Il y a-t’il un moyen de passer d’un régime à un autre, en douceur, pour nous ? »

Il suffit de fermer les yeux.

« A chaque fois que j’ai posé cette question aux groupes proposant un autre système (dont je taierai le nom), on me parle de révolution sanglante. Qu’en pensez-vous, tous ? »

Qu’ils ont tort d’avoir raison.

09/06/2010 09:49 par zdr

A jokarus :

A chaque fois que j’ai posé cette question aux groupes proposant un autre système (dont je taierai le nom), on me parle de révolution sanglante. Qu’en pensez-vous, tous ?

Quand on me pose cette question "Comment peut-on être communiste après les goulacs" ? Je réponds : "Comment peut-on être catholique après l’inquisition" ? C’est pas de moi, c’est de François Houtart.
En général, ça fait réfléchir :-))

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