Imaginez un philosophe qui est diplômé de la meilleure école, il a appris tout ce qu’il est possible d’apprendre, il maîtrise sa langue, il connaît tous les philosophes modernes et passés... Il vit dans le monde du savoir. Un jour, il rencontre un extra-terrestre qui nous observe depuis maintenant quelques dizaines d’années et qui lui dit : vous êtes l’homme le plus sage que j’aie pu observer sur votre planète, une catastrophe est sur le point de détruire votre civilisation et je pense que vous êtes le seul capable de dire aux autres comment l’éviter, je ne peux vous donner qu’une seule indication, vous ne connaissez pas la solution. Maintenant, il est temps que je retourne sur ma planète, ma mission est terminée.
Le philosophe tourne et retourne les propos de l’extra-terrestre dans ses pensées. Il y a tellement de choses qu’il ne sait pas, mais si l’extra-terrestre est venu lui parler, c’est parce qu’il est philosophe et pas mathématicien, physicien ou économiste... quels sont les philosophes qu’il n’a pas approfondis ou qu’il n’aurait pas lus ? Pendant des mois, il fait des recherches, découvre des philosophes oubliés, des philosophes qui ne l’intéressaient pas... Mais il abandonne cette piste également, ce n’est pas possible de tout savoir. Cet extra-terrestre n’est pas venu sur terre pour faire peser sur moi une responsabilité qui n’est pas la mienne, je ne connais pas la solution et je ne peux pas la connaître. Pourtant, je ne suis pas chef d’État, ce n’est pas à moi de chercher celui qui pourrait la connaître, c’est donc bien moi qui ai la solution, solution que je ne connais pas et que je ne peux pas connaître, solution qui est simple et là sous mes yeux !
Un beau jour, en se réveillant, il comprend que l’extra-terrestre ne connaissait pas non plus la solution, sinon il aurait été stupide ou pervers de ne pas la lui donner. Cette solution est donc... que ce que je ne connais pas est tout aussi important que ce que je connais. Ce que nous connaissons peut être faux et ce que nous ne connaissons pas peut être vrai. La catastrophe est là devant nous car à force de croire que nous avons la connaissance, nous oublions celles des autres et nous oublions que nous ne savons pas tout. Il a aussi dit que je pouvais sauver la civilisation, quel est le rapport avec ce que nous ne connaissons pas ? Ne serait-ce pas que nous ne cherchons pas au-delà de ce que nous savons ? Ainsi, pour sauver la civilisation, la seule chose est d’abandonner, tout ou partie, de ce que nous connaissons, ce que nous croyons connaître et simplement d’imaginer autre chose ? Que disait Einstein déjà ? L’imagination est plus importante que la connaissance. La connaissance est limitée alors que l’imagination englobe le monde entier, stimule le progrès, suscite l’évolution. C’est cela, nous éviterons la catastrophe si nous admettons que nous sommes dans une impasse, que nos connaissances ne sont pas nécessairement les bonnes ! Dit autrement, nous devrons faire preuve d’imagination pour nous adapter aux changements, nous devons faire preuve d’intelligence !
Il m’a tout simplement dit que je devais dire aux gens de faire preuve d’intelligence, de chercher la solution dans leur imagination et pas dans ce qu’ils connaissaient.
[1] Ouvrage de l’auteur : « De quoi parlons-nous ? »
(http://phylogenese.blogspot.gr/p/list.html).