RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher

La croisade contre la gratuité

Le Grand Soir poursuit la publication des « belles pages » du livre Gratuité vs capitalisme de Paul Ariès (Larousse). Les choses bougent sur le front de la mobilisation continue en faveur de la gratuité : après la parution du livre début septembre, le 1er octobre sera lancé un appel national pour une civilisation de la gratuité et le samedi 5 janvier se tiendra à Lyon le Forum national de la gratuité !

La croisade contre la gratuité

La croisade contre la gratuité a ses grands prêtres (recrutés dans toutes les écoles de pensée), ses églises (lobbies et autres think tank qui poussent à la marchandisation), ses actions de grâce (la charité et le conservatisme compassionnel), son paradis et son enfer, ses pénitences (les tarifs sociaux) et son dogme sacré, la célèbre « tragédie des communs » que récite tout converti. Cette croisade a certes remporté une bataille mais pas encore la guerre.

La légende de la tragédie des communs

L’écologiste Garnett Hardin (1915-2003) entendait apporter la preuve, en publiant, en 1968, dans la revue Science, son célèbre texte La tragédie des communs, que l’humanité serait totalement incapable de gérer une ressource sous forme de commun. D’abord utilisé pour dénoncer l’inefficacité des systèmes staliniens, cette thèse fut généralisée sous la forme d’une nouvelle doxa : l’accès libre à une ressource limitée engendrerait inexorablement sa sur-utilisation, et, donc, son érosion rapide, voire sa disparition ! Conséquence : seule l’appropriation par le marché ou l’Etat pourrait garantir la préservation des ressources naturelles. Cette thèse développe en fait l’argumentation de William Foster Lloyd favorable au contrôle des naissances et aux enclosures. Cet économiste du 19e siècle imaginait déjà un pâturage libre d’accès, sans aucune limitation, sans gestion concertée et rigoureuse. Hardin prend l’exemple d’un pâturage commun imaginaire et démontre que chaque éleveur « en tant qu’être rationnel cherche à maximiser son gain, en rajoutant librement une ou plusieurs bêtes à son troupeau, donc du surpâturage additionnel provoqué par la bête supplémentaire », avec pour conséquence la destruction assurée du pâturage.

Semblable idée s’avère être un pur exercice intellectuel reposant sur une méconnaissance crasse de ce qu’ont toujours été les Communs. Elinor Ostrom (1933-2012), prix Nobel d’économie, a depuis tordu le cou à cette légende en montrant que les Communs n’ont toujours existé qu’avec des règles collectives encadrant leurs usages, sauf dans l’imagination des dévots du capitalisme. L’hypothèse de Hardin fonctionne dans le cadre de la rationalité de l’homo-economicus qui n’est justement pas celle des communautés d’hier et de la société de la gratuité de demain.
On sait mieux aujourd’hui qui était Hardin et ce qui motivait sa haine du gratuit. L’écologiste était un grand lecteur de Malthus : « Un homme qui est né dans un monde déjà occupé (..) n’a aucun droit de réclamer la moindre nourriture et, en réalité, il est de trop. Au grand banquet de la nature, il n’y a point de couvert disponible pour lui ; elle lui ordonne de s’en aller, et elle ne tardera pas elle-même à mettre son ordre à exécution » (1).

Hardin fut, en bonne logique malthusienne, un eugéniste et même le principal dirigeant de l’American Eugenics Society (2). Cette obsession le conduira à dénoncer systématiquement les actions sociales menées aux Etats-Unis, à refuser la fiscalité redistributive, l’aide alimentaire aux pays du tiers-monde, à prôner la fermeture des frontières, la stérilisation des esprits faibles, la création d’un marché des droits à enfanter, car l’Etat, en soutenant les plus faibles, dégraderait le capital biologique de l’espèce (sic).

La question n’est pas celle du « trop d’humains » mais du « trop d’hyper-consommateurs » ! La meilleure façon de réussir la transition démographique reste la gratuité de ce qui permet de vivre bien, car la misère est le lit des grossesses nombreuses. Oserais-je dire qu’il y a toujours trop d’humains pour ceux qui ne les aiment pas ! Oserais-je dire que les amoureux de la gratuité sont fiers d’avoir en Garnett Hardin un adversaire aussi vil !

(1) Thomas Malthus, Essai sur le principe de population, Londres, 1798.
(2) Fabien Locher, « Les pâturages de la guerre froide, Garrett Hardin et la tragédie des communs » in Revue d’histoire moderne, N° 60, Belin, 2013.

URL de cet article 33842
  

Les guerres scélérates : interventions de l’armée US et de la CIA depuis 1945
William BLUM
Le livre "KILLING HOPE - U.S. Military and CIA Interventions Since World War II" de William Blum vient ENFIN d’être traduit en français. Editions Parangon "Nous possédons environ 60% des richesses mondiales, mais seulement 6,3% de la population mondiale... Notre tâche dans l’avenir est...de maintenir cette situation de disparité." George KENNAN, responsable de la planification du département d’Etat, 1948 "Ce livre très documenté relate plus d’une cinquantaine d’interventions américaines de 1945 à (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

Un socialiste est plus que jamais un charlatan social qui veut, à l’aide d’un tas de panacées et avec toutes sortes de rapiéçages, supprimer les misères sociales, sans faire le moindre tort au capital et au profit.

Friedrich Engels

L’UNESCO et le «  symposium international sur la liberté d’expression » : entre instrumentalisation et nouvelle croisade (il fallait le voir pour le croire)
Le 26 janvier 2011, la presse Cubaine a annoncé l’homologation du premier vaccin thérapeutique au monde contre les stades avancés du cancer du poumon. Vous n’en avez pas entendu parler. Soit la presse cubaine ment, soit notre presse, jouissant de sa liberté d’expression légendaire, a décidé de ne pas vous en parler. (1) Le même jour, à l’initiative de la délégation suédoise à l’UNESCO, s’est tenu au siège de l’organisation à Paris un colloque international intitulé « Symposium international sur la liberté (...)
19 
Le DECODEX Alternatif (méfiez-vous des imitations)
(mise à jour le 19/02/2017) Le Grand Soir, toujours à l’écoute de ses lecteurs (réguliers, occasionnels ou accidentels) vous offre le DECODEX ALTERNATIF, un vrai DECODEX rédigé par de vrais gens dotés d’une véritable expérience. Ces analyses ne sont basées ni sur une vague impression après un survol rapide, ni sur un coup de fil à « Conspiracywatch », mais sur l’expérience de militants/bénévoles chevronnés de « l’information alternative ». Contrairement à d’autres DECODEX de bas de gamme qui circulent sur le (...)
103 
Médias et Information : il est temps de tourner la page.
« La réalité est ce que nous prenons pour être vrai. Ce que nous prenons pour être vrai est ce que nous croyons. Ce que nous croyons est fondé sur nos perceptions. Ce que nous percevons dépend de ce que nous recherchons. Ce que nous recherchons dépend de ce que nous pensons. Ce que nous pensons dépend de ce que nous percevons. Ce que nous percevons détermine ce que nous croyons. Ce que nous croyons détermine ce que nous prenons pour être vrai. Ce que nous prenons pour être vrai est notre réalité. » (...)
55 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.