RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher
16 

La solidarité avec le Venezuela n’est pas à la hauteur requise.

La révolution bolivarienne n’est pas un accident de l’histoire mais bien le fruit d’une histoire nationale, son prolongement. En 1989, un président social-démocrate fit tirer sur le peuple. Le "caracazo" se solda environ par 3000 morts. Ce jour là, le bipartisme (libéral) et l’alternance AD/COPEI, naufrageaient. Les jeunes militaires "bolivariens" qui tentèrent et assumèrent le "golpe" patriotique raté de 1992, voulaient "terminer l’œuvre de Bolivar" et non copier le "modèle cubain".

La révolution vénézuélienne n’est nullement arrivée, comme l’on disait jadis familièrement, ni dans les fourgons de l’Armée Rouge ni dans ceux des FAR cubaines.

Elle constitue un processus unique, original, endogène. Chavez et le mouvement populaire se sont "radicalisés" dans une relation dialectique d’inter-action, notamment à cause de l’hostilité bornée de Washington (comme à Cuba en 1959, 1960...), et des manœuvres déstabilisatrices orchestrées (ou soutenues) par le "géant du nord" . En 1998, Hugo Chavez penchait plutôt du côté de la "troisième voie blairiste".

Si le comandante en est arrivé à prôner un "socialisme du 21ème siècle", il le conçoit comme un chantier, un dépassement du capitalisme par la voie électorale, par la démocratie représentative et participative, dans le respect du pluralisme politique ; il s’appuie sur la bataille d’idées, la mobilisation et l’implication permanentes du peuple dans les "conseils communaux", les "communes socialistes", la socialisation... Nombreuses sont les déclarations où Hugo Chavez rejette le "soviétisme", l’étatisme, le parti unique...

Alors pourquoi donc la question vénézuélienne est-elle si paralysante pour la plupart des intellectuels occidentaux ? Si difficile à assume r ? Elle constitue un débat éthique et politique majeur pour l’avenir émancipateur, en Amérique latine comme ailleurs. Force est de constater que la solidarité, avec une révolution menacée quotidiennement par le plus puissant des impérialismes, n’est pas à la hauteur de la stratégie putschiste de l’opposition, pressée d’en découdre, par la violence, sans tenir compte du calendrier électoral, et des Etats-Unis, pressés de retrouver leur mainmise sur les immenses réserves de pétrolières du Venezuela.

Je connais de nombreux militants, des électeurs de gauche-gauche, qui sont retenus, freinés par l’incessant matraquage médiatique et la stigmatisation de la révolution bolivarienne, de ses dirigeants, démocratiquement élus. Pour la plus grande partie de l’opinion publique, l’image du Venezuela est mauvaise, liberticide. Sociaux-libéraux et néolibéraux consensuent en rond et en boucle pour dénigrer, souvent criminaliser, sur la base d’a priori, hier Hugo Chavez, aujourd’hui le président Nicolas Maduro ; leurs amis "démocrates" à Caracas n’ont pas reconnu l’élection de ce dernier, contrairement à la communauté internationale.

Le pilonnage idéologique est tellement violent que même lorsqu’il ne se passe rien, on l’impute aux chavistes. Chauffée à blanc, l’opinion publique paraît, à première vue, peu perméable à nos arguments. Faut-il pour cela "faire profil bas", céder à l’idéologie dominante ? Ce serait suicidaire tant du point de vue de l’internationalisme que de notre combat en France. En défendant le Venezuela on ne fait sans doute pas carrière, on ne gagne peut-être pas des millions de voix, mais on gagne en cohérence politique, en fidélité à des valeurs de base du mouvement ouvrier et révolutionnaire. Le courage, lorsqu’il s’agit d’aller à contre-courant, d’affronter les tempêtes sans perdre le cap, finit toujours par payer. Hier, ce qui freinait paraît-il la solidarité, c’étaient les relations amicales de Chavez avec le président iranien Ahmadinejad. Et aujourd’hui ?

Qui a dit par ailleurs que la solidarité internationaliste impliquait la cécité, l’inconditionnalité ? Elle suppose une attitude généreuse, ouverte, lucide, voire critique (en évitant de "donner des leçons" à ceux qui font l’histoire). Notre regard reste par trop européocentré. L’Europe et ses partis progressistes ne sont plus le nombril du monde, ni une référence, pour nos camarades "latinos". Sans nostalgie d’un quelconque modèle, nous avons cependant beaucoup à apprendre des expériences de transformation sociale au Venezuela, en Bolivie, en Equateur... des avancées révolutionnaires en cours. Toute victoire des peuples du continent est aussi la nôtre.

A Caracas, à La Paz, à Quito, à La Havane, comme hier à Madrid, se joue la possibilité de changer la vie et le monde. Cela suppose de notre part une solidarité politique et concrète qui aille au-delà des communiqués et des bonnes intentions.

Jean Ortiz

URL de cet article 24636
  

Même Auteur
CHE, PLUS QUE JAMAIS (ouvrage collectif)
Jean ORTIZ
Recueil d’interventions d’une vingtaine d’auteurs latino-américains et européens réunis à Pau en avril 2007 pour un colloque portant sur l’éthique dans la pratique et la pensée d’Ernesto Che Guevara, une pensée communiste en évolution, en recherche, qui se transforme en transformant, selon les intervenants. Quatrième de couverture On serait tenté d’écrire : enfin un livre sur le Che, sur la pensée et la pratique d’Ernesto Guevara, loin du Che désincarné, vidé d’idéologie, doux rêveur, marchandisé, (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

Lorsque l’on tente, comme ce fut le cas récemment en France, d’obliger une femme à quitter la Burqa plutôt que de créer les conditions où elle aurait le choix, ce n’est pas une question de libération mais de déshabillage. Cela devient un acte d’humiliation et d’impérialisme culturel. Ce n’est pas une question de Burqa. C’est une question de coercition. Contraindre une femme à quitter une Burqa est autant un acte de coercition que l’obliger à la porter. Considérer le genre sous cet angle, débarrassé de tout contexte social, politique ou économique, c’est le transformer en une question d’identité, une bataille d’accessoires et de costumes. C’est ce qui a permis au gouvernement des Etats-Unis de faire appel à des groupes féministes pour servir de caution morale à l’invasion de l’Afghanistan en 2001. Sous les Talibans, les femmes afghanes étaient (et sont) dans une situation très difficile. Mais larguer des "faucheuses de marguerites" (bombes particulièrement meurtrières) n’allait pas résoudre leurs problèmes.

Arundhati Roy - Capitalism : A Ghost Story (2014), p. 37

L’UNESCO et le «  symposium international sur la liberté d’expression » : entre instrumentalisation et nouvelle croisade (il fallait le voir pour le croire)
Le 26 janvier 2011, la presse Cubaine a annoncé l’homologation du premier vaccin thérapeutique au monde contre les stades avancés du cancer du poumon. Vous n’en avez pas entendu parler. Soit la presse cubaine ment, soit notre presse, jouissant de sa liberté d’expression légendaire, a décidé de ne pas vous en parler. (1) Le même jour, à l’initiative de la délégation suédoise à l’UNESCO, s’est tenu au siège de l’organisation à Paris un colloque international intitulé « Symposium international sur la liberté (...)
19 
"Un système meurtrier est en train de se créer sous nos yeux" (Republik)
Une allégation de viol inventée et des preuves fabriquées en Suède, la pression du Royaume-Uni pour ne pas abandonner l’affaire, un juge partial, la détention dans une prison de sécurité maximale, la torture psychologique - et bientôt l’extradition vers les États-Unis, où il pourrait être condamné à 175 ans de prison pour avoir dénoncé des crimes de guerre. Pour la première fois, le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture, Nils Melzer, parle en détail des conclusions explosives de son enquête sur (...)
11 
Analyse de la culture du mensonge et de la manipulation "à la Marie-Anne Boutoleau/Ornella Guyet" sur un site alter.
Question : Est-il possible de rédiger un article accusateur qui fait un buzz sur internet en fournissant des "sources" et des "documents" qui, une fois vérifiés, prouvent... le contraire de ce qui est affirmé ? Réponse : Oui, c’est possible. Question : Qui peut tomber dans un tel panneau ? Réponse : tout le monde - vous, par exemple. Question : Qui peut faire ça et comment font-ils ? Réponse : Marie-Anne Boutoleau, Article XI et CQFD, en comptant sur un phénomène connu : "l’inertie des (...)
93 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.