RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher

Non, les sanctions nucléaires contre l’Iran n’ont pas fonctionné

Des gens qui croient avoir tout compris disent que la mise en œuvre de l’accord sur le nucléaire iranien montre que « les sanctions ont marché » :

DougSaunders@Doug Saunders
Le paradoxe iranien : cette semaine a prouvé que les sanctions marchent. C’était donc la pire semaine que le Congrès des États-Unis pouvait choisir pour imposer de nouvelles sanctions
17 janvier 2016 10H42 -

C’est complètement faux. Les sanctions n’ont pas marché en ce qui concerne le problème nucléaire avec l’Iran. Les sanctions ne marcheront pas davantage contre le programme de missiles balistiques de l’Iran.

D’autres auteurs ont déjà expliqué cela en détails, mais il faut y revenir.

L’Iran considère, et a toujours considéré, le développement d’un programme nucléaire civil pour l’électricité et d’autres besoins, comme le seul moyen de devenir un Etat moderne entièrement développé. Les États-Unis et Israël ont voulu l’en empêcher. Israël considère l’Iran comme une puissance concurrente au Moyen-Orient et les Etats-Unis pensent que l’Iran est trop indépendant et trop puissant pour le laisser faire ce qu’il veut. Ces deux pays veulent limiter le développement de l’Iran, tant que l’Iran n’accepte pas de redevenir l’état-client qu’il était autrefois.

Le vecteur idéal pour faire pression sur l’Iran était son programme nucléaire et ils ont affirmé que « l’Iran n’avait pas le droit de disposer d’uranium enrichi ». Cette affirmation n’avait aucune valeur juridique car tout Etat a le droit naturel d’utiliser ses ressources comme il l’entend, mais les États-Unis se sont donné beaucoup de mal pour essayer d’imposer cette vision des choses. S’ils y étaient parvenus, cela leur aurait donné un droit de veto sur la manière dont l’Iran, et d’autres pays, géraient ou utilisaient leurs ressources naturelles.

C’est la résistance iranienne à la volonté des États-Unis d’imposer cette donnée qui a fait durer le conflit plus de 10 ans. Après les premières affirmations (fausses) selon lesquelles l’Iran développait des armes nucléaires, il y a eu des négociations qui ont fait des progrès rapides. L’Iran était disposé à restreindre ses activités et à autoriser une inspection complète de son programme nucléaire. Mais c’est l’affirmation étasunienne qu’il n’avait « pas droit à l’enrichissement » qui a empêché toute solution. Le négociateur britannique Peter Jenkins écrit :

Comme j’ai fait partie de l’équipe de négociation anglo-iranienne en 2004 et 2005 sur le nucléaire, je sais qu’en mars 2005, le président Hassan Rouhani et le ministre Javad Zarif, qui avaient alors des fonctions différentes, étaient prêts à sceller un accord très similaire, pour l’essentiel, à l’JCPOA.

A cette époque, l’Iran avait seulement quelques centrifugeuses expérimentales et peu d’uranium enrichi.

Mais les Etats-Unis ont voulu à toutes forces imposer l’idée que l’Iran n’avait pas le droit d’enrichir de l’uranium et cela a sonné le glas des négociations. Les sanctions ont suivi et l’Iran a réagi en développant ses capacités d’enrichissement. Plusieurs séries de sanctions se sont succédé et l’Iran a répondu à chaque fois en augmentant davantage ses capacités. Après la dernière série de sanctions, l’Iran a annoncé qu’il allait fabriquer de l’uranium fortement enrichi pour construire des sous-marins nucléaires.

C’est à ce moment-là que les États-Unis ont finalement compris qu’ils n’arriveraient pas à renforcer toujours davantage les sanctions internationales pour stopper le programme nucléaire de l’Iran. Cela leur laissait deux possibilités : Une violente agression militaire très coûteuse contre l’Iran suivie d’une longue occupation, scénario dont le peuple étasunien ne voulait absolument pas, ou des négociations et des concessions pour régler la question.

Une nouvelle série de négociations a commencé en novembre 2013 et au cœur des discussions, il y avait toujours le droit de l’Iran à l’enrichissement :

La question de savoir si l’Iran a ou non le droit d’enrichir de l’uranium au regard du droit international, est au cœur du différend vieux de dix ans sur son programme nucléaire et a compliqué la tâche de la diplomatie pour trouver une solution.

Les officiels iraniens ont clairement dit vendredi, le troisième jour des pourparlers de Genève, que « le droit » de l’Etat islamique d’enrichir l’uranium devait faire partie de tout accord provisoire visant à freiner son activité atomique en échange d’un allégement des sanctions.
...
Les États-Unis affirment qu’aucun pays n’a ce droit explicite aux termes du Traité de non-prolifération (TNP), le Pacte mondial conclu en 1970 pour empêcher la prolifération de bombes atomiques.

Au cours de ces négociations, en 2013, les États-Unis ont finalement cédé et quelques jours plus tard, un accord préliminaire fut conclu :

L’accord nucléaire initial conclu avec l’Iran, pendant le week-end, stipule clairement que la deuxième étape – ou « solution globale » – « comprendra un programme d’enrichissement défini conjointement avec des limites pratiques. »

Le libellé permet à Téhéran d’affirmer que les États-Unis et cinq autres puissances impliquées dans les négociations ont accepté que l’accord final, qui doit se faire dans les six mois, laisse l’Iran avec un programme d’enrichissement d’uranium à usage interne.

L’Iran a interprété cela comme la reconnaissance de son droit à enrichir de l’uranium. Une fois cette question clé résolue, la suite des négociations a porté sur diverses concessions mutuelles secondaires.

Comme on l’a appris seulement par la suite, les États-Unis avaient renoncé à imposer la clause « pas droit à l’enrichissement » même avant les négociations de novembre 2013 :

Les relations diplomatiques secrètes américano-iraniennes, qui ont contribué à faire avancer l’accord nucléaire intérimaire l’an dernier, ont démarré après qu’un message du président américain Barack Obama a été transmis à l’Iran : Les Etats-Unis seraient prêts à accepter un programme limité d’enrichissement iranien à usage interne dans le cadre d’un accord nucléaire dans lequel l’Iran prendrait des mesures concrètes et vérifiables pour garantir au monde entier que son programme nucléaire resterait exclusivement pacifique.
...
Le message d’Obama qu’il serait prêt à accepter un programme d’enrichissement iranien limité dans un accord par ailleurs acceptable a été transmis à l’Iran lors d’une réunion secrète à Oman en mars 2013, par une délégation américaine conduite par le secrétaire d’Etat adjoint Bill Burns, qui comprenait également Jake Sullivan, aujourd’hui conseiller à la sécurité nationale du vice-président Joe Biden, ainsi qu’Einhorn et Puneet Talwar, le conseiller sur l’Iran de la Maison Blanche.

Ce sont les États-Unis qui ont cédé et qui sont revenus sur leur position (indéfendable) selon laquelle l’Iran n’avait pas le droit d’enrichir de l’uranium. C’est cette concession des États-Unis – et non pas les sanctions – qui a ramené l’Iran à la table des négociations et qui a permis de mettre fin au conflit sur le programme nucléaire de l’Iran.

Moon of Alabama

Traduction : Dominique Muselet

»» http://www.moonofalabama.org/2016/01/no-the-nuclear-sanctions-on-iran-...
URL de cet article 29851
  

Même Thème
Hillary Clinton, la « Reine du Chaos »
Diana JOHNSTONE
1. Dans votre dernier livre, vous appelez Hillary Clinton la « Reine du Chaos. » Pouvez-vous expliquer pourquoi vous avez choisi ce sobriquet péjoratif pour décrire Hillary ? En un mot, la Libye. Hillary Clinton était si fière de son rôle majeur dans le déclenchement de la guerre contre la Libye qu’elle et ses conseillers avaient initialement prévu de l’utiliser comme base d’une « doctrine Clinton », ce qui signifie une stratégie de changement de régime façon « smart power » , comme un slogan de la (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

Une idée devient une force lorsqu’elle s’empare des masses.

Karl Marx

La crise européenne et l’Empire du Capital : leçons à partir de l’expérience latinoaméricaine
Je vous transmets le bonjour très affectueux de plus de 15 millions d’Équatoriennes et d’Équatoriens et une accolade aussi chaleureuse que la lumière du soleil équinoxial dont les rayons nous inondent là où nous vivons, à la Moitié du monde. Nos liens avec la France sont historiques et étroits : depuis les grandes idées libertaires qui se sont propagées à travers le monde portant en elles des fruits décisifs, jusqu’aux accords signés aujourd’hui par le Gouvernement de la Révolution Citoyenne d’Équateur (...)
Analyse de la culture du mensonge et de la manipulation "à la Marie-Anne Boutoleau/Ornella Guyet" sur un site alter.
Question : Est-il possible de rédiger un article accusateur qui fait un buzz sur internet en fournissant des "sources" et des "documents" qui, une fois vérifiés, prouvent... le contraire de ce qui est affirmé ? Réponse : Oui, c’est possible. Question : Qui peut tomber dans un tel panneau ? Réponse : tout le monde - vous, par exemple. Question : Qui peut faire ça et comment font-ils ? Réponse : Marie-Anne Boutoleau, Article XI et CQFD, en comptant sur un phénomène connu : "l’inertie des (...)
93 
Comment Cuba révèle toute la médiocrité de l’Occident
Il y a des sujets qui sont aux journalistes ce que les récifs sont aux marins : à éviter. Une fois repérés et cartographiés, les routes de l’information les contourneront systématiquement et sans se poser de questions. Et si d’aventure un voyageur imprudent se décidait à entrer dans une de ces zones en ignorant les panneaux avec des têtes de mort, et en revenait indemne, on dira qu’il a simplement eu de la chance ou qu’il est fou - ou les deux à la fois. Pour ce voyageur-là, il n’y aura pas de défilé (...)
43 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.