RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher

Marx et le capital fictif

Imaginons de nombreux capitalistes qui construisent des lotissements, des logements par milliers. Ils investissent des capitaux importants, dans l’espoir d’en retirer un bénéfice. S’ils ne trouvent pas en face d’eux autant d’acheteurs solvables, ils ne vendent pas leurs maisons et vont droit à la faillite. Le capital qui aurait pu, une fois les ventes réalisées, être réinvesti dans de nouveaux chantiers de construction, est au contraire immobilisé sous la forme de maisons invendables, et les ouvriers du bâtiment sont licenciés.

L’une des implications de ce cycle de circulation du capital, c’est que celui-ci existe alternativement sous deux formes, l’argent ou la marchandise. Cela signifie qu’il existe toujours une accumulation de marchandises et une accumulation d’argent, qui passent périodiquement d’une forme à l’autre.

Au fur et à mesure que le chantier avance, le capitaliste paye ses ouvriers, les matières premières, …etc. Il dépense son capital, mais ne le fait pas d’un seul coup. Il reste donc, jusqu’au dernier payement, une partie de ce capital qui n’est pas encore employée.

Déposée dans une banque, cet argent peut fonctionner comme capital pour d’autres capitalistes, sous la forme du crédit. Peu importe à notre fabricant de maisons, que l’argent qu’il retire lorsqu’il en a besoin ne soit pas celui qu’il a déposé, puisque la somme est la même. Or, ce crédit offre de nombreuses applications intéressantes pour le système capitaliste.

Une banque pourrait prêter de l’argent à des acheteurs potentiels, pour leur permettre d’acheter ces maisons qui viennent d’être construites. Pour nos capitalistes, la question est résolue : si les acheteurs ne peuvent plus rembourser leurs traites, c’est devenu l’affaire de la banque et plus la leur.

Puisque les acheteurs remboursent régulièrement et qu’ils rembourseront, à terme, plus d’argent qu’ils n’en ont emprunté, la reconnaissance de dette devient un papier qui rapporte de l’argent à celui qui la détient. Mais elle contient aussi le risque de ne pas être remboursée, si l’emprunteur se révélait insolvable. Alors, pour la banque, il existe une solution : revendre ce papier, qui contient à la fois un argent potentiel et un risque potentiel, en le jetant sur le marché.

Pour l’acheteur, ce papier ne représente plus une maison, un ensemble de maisons, des marchandises, mais seulement de l’argent déconnecté de la marchandise. On peut l’acheter, le vendre, spéculer dessus. On est alors dans la fiction de l’argent qui engendrerait de l’argent. C’est l’une des composantes que Marx appelle le capital fictif, dans la mesure où il ne représente pas de l’argent réel, mais seulement la possibilité, l’espoir de gagner de l’argent.

La dette publique n’est pas une question nouvelle, même si elle est sous le feu de l’actualité. Elle constitue un élément structurel de la politique économique des États. Aujourd’hui, presque tous émettent des bons du trésor, tout en remboursant des dettes antérieures. Tant que les rentrées, fiscales pour l’essentiel, permettent d’entretenir ce cycle, cela ne pose pas de problème aux prêteurs, qui voient dans les bons d’État des valeurs fiables.

C’est l’un des effets de la croissance du capital fictif, pour lequel l’argent semble se valoriser directement en argent : tout titre, qu’il soit action ou bon d’État, est évalué en fonction du risque qu’il contient par rapport au profit potentiel qu’il engendre.

Une partie croissante du budget de l’État est donc constitué de ce capital fictif, ce qui le rend vulnérable aux crises financières qui s’y déroulent. Or, de la même manière que l’on peut assurer une maison ou une voiture, il est aujourd’hui possible d’assurer un risque financier sur le marché : c’est le rôle des CDS (crédit default swap). Ces titres font eux-mêmes l’objet d’un marché, qui est la logique même du capital fictif puisqu’ils contiennent un profit potentiel, de l’argent se valorisant en argent.

Dés lors, il devient possible de spéculer sur les risques de banqueroute d’un État : c’est ce qui s’est passé avec la crise grecque, portugaise, Espagnole, Italienne et maintenant Française. De ce point de vue, l’État est exactement dans la situation d’une entreprise qui restructure pour restaurer ses profits : réduction massive des salaires des fonctionnaires, blocage des recrutements et non-remplacement des départs en retraite, et amélioration de la « productivité » par des mesures fiscales.

Autrement dit, l’État est, dans le capitalisme actuel, un moyen de valorisation du capital comme un autre, la manière dont il s’y prend pour fournir cette valeur ajoutée n’ayant d’importance que lorsqu’il risque de ne plus y parvenir.

Par A.K d’après Karl MARX pour Conscience Citoyenne Responsable

http://2ccr.unblog.fr/2012/03/23/marx-et-le-capital-fictif/

URL de cet article 16275
  

Même Thème
"Pour sauver la planète, sortez du capitalisme" de Hervé Kempf
René HAMM
Le titre claque comme un slogan que l’on clamerait volontiers avec allégresse. Quel immense dommage que si peu de Vert(-e)s adhèrent à ce credo radical, préférant, à l’image de Dominique Voynet Daniel Cohn-Bendit ou Alain Lipietz, quelques commodes replâtrages ! Les déprédations gravissimes de l’environnement découlent d’un mode de production uniquement mû par « la maximisation du profit ». La crise économique actuelle, corollaire des turbulences qui ont frappé la bulle des hedge funds et des subprimes, (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

Rien ne fait plus de mal aux travailleurs que la collaboration de classes. Elle les désarme dans la défense de leurs intérêts et provoque la division. La lutte de classes, au contraire, est la base de l’unité, son motif le plus puissant. C’est pour la mener avec succès en rassemblant l’ensemble des travailleurs que fut fondée la CGT. Or la lutte de classes n’est pas une invention, c’est un fait. Il ne suffit pas de la nier pour qu’elle cesse :
renoncer à la mener équivaut pour la classe ouvrière à se livrer pieds et poings liés à l’exploitation et à l’écrasement.

H. Krazucki
ancien secrétaire général de la CGT

Médias et Information : il est temps de tourner la page.
« La réalité est ce que nous prenons pour être vrai. Ce que nous prenons pour être vrai est ce que nous croyons. Ce que nous croyons est fondé sur nos perceptions. Ce que nous percevons dépend de ce que nous recherchons. Ce que nous recherchons dépend de ce que nous pensons. Ce que nous pensons dépend de ce que nous percevons. Ce que nous percevons détermine ce que nous croyons. Ce que nous croyons détermine ce que nous prenons pour être vrai. Ce que nous prenons pour être vrai est notre réalité. » (...)
55 
Ces villes gérées par l’extrême-droite.
(L’article est suivi d’un « Complément » : « Le FN et les droits des travailleurs » avec une belle photo du beau château des Le Pen). LGS Des électeurs : « On va voter Front National. Ce sont les seuls qu’on n’a jamais essayés ». Faux ! Sans aller chercher dans un passé lointain, voyons comment le FN a géré les villes que les électeurs français lui ont confiées ces dernières années pour en faire ce qu’il appelait fièrement « des laboratoires du FN ». Arrêtons-nous à ce qu’il advint à Vitrolles, (...)
40 
Hier, j’ai surpris France Télécom semant des graines de suicide.
Didier Lombard, ex-PDG de FT, a été mis en examen pour harcèlement moral dans l’enquête sur la vague de suicides dans son entreprise. C’est le moment de republier sur le sujet un article du Grand Soir datant de 2009 et toujours d’actualité. Les suicides à France Télécom ne sont pas une mode qui déferle, mais une éclosion de graines empoisonnées, semées depuis des décennies. Dans les années 80/90, j’étais ergonome dans une grande direction de France Télécom délocalisée de Paris à Blagnac, près de Toulouse. (...)
69 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.