RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher
Il est plus dangereux d’être un ancien ami de Washington que d’être son ennemi de toujours.

Pourquoi vendre des S-400 aux alliés de l’ennemi ?

Moscou vient de vendre des Systèmes de défense aériens S-400 à la Turquie et à l’Arabie saoudite. Dans le premier cas un paiement préalable aurait apparemment été réalisé alors que dans le second cas l’intention en aurait été rendue publique.

Ceci présentant immédiatement la question pour laquelle Moscou accepterait de vendre ses précieux systèmes d’armes à des pays qui sont non seulement des alliés peu fiables, mais aussi de facto des alliés des Étasuniens.

La “réponse atlantiste” à la question représente quelque chose comme ceci : “Le soutien envers le pouvoir de Poutine » est ébranlé , l’économie russe est en déliquescence, la Russie est à court de devises et comme elle n’a que deux choses à exporter, des armes et de l’énergie, elle tente désespérément d’en vendre à n’importe qui".

Et, vrai ou faux, pour les gens ordinaires nous pouvions lire ceci il y a deux semaines :

Le soutien de la Russie pour Poutine pourrait être plus fragile qu’il n’apparaît. La première raison étant les sanctions économiques occidentales qui ont choqué et causé du tort au commerce russe et aux citoyens ordinaires. Une autre raison en est la dépendance de l’économie russe aux énergies fossiles et aujourd’hui alors que les prix de l’énergie sont au plus bas et non prévue pour remonter rapidement. Le maintien de la légitimité de Poutine étant basé sur le maintien de la prospérité, les problèmes économiques sont un problème pour lui.

Bien que personne dans le rapport ne semble prendre en compte que la « Russie de Poutine » vend des armes couramment, les participants voient probablement ces ventes comme d’autres indications d’ «  une catastrophe économique ». Pour eux « la Russie aurait effectivement déclaré une guerre politique à l’Occident, même si l’Europe et les EU ne l’auraient pas encore intégré ». Ces gens pensent, qu’afin de maintenir la Russie sous son pouvoir autocratique, il désire lui montrer que la Liberté à Berlin, Londres, ou Washington, n’a rien d’enviable ». C’est à la suite de tels fantasmes qui plombent ces « cercles de pensée », (qui paient leurs participants généreusement), depuis des années qu’ils s’étonnent toujours des actes de Moscou. Une année plus tôt, par exemple, quelques-uns des « meilleurs penseurs du Politico Cabinet » constataient qu’il était évident que « la Russie en Syrie était dans la tourmente et que le temps ne jouait pas en sa faveur ». Et un an après un d’entre eux disait que la Russie était économiquement lessivée et politiquement »grillée ». Les réalités ont plié tout ça. La Syrie n’est pas un tourment pour la Russie, la Russie n’est pas isolée, elle ne s’est pas écroulée, ses chefs ne sont pas fous, son économie ne s’est pas effondrée, le soutien à l’équipe de Poutine est solide, les sanctions n’ont choqué personne, et les ventes d’armes ne sont pas la dernière carte jouée avant l’écroulement.

Où ces gens décèlent une mauvaise santé de la Russie et une hostilité pour la Liberté, d’autres voient une réponse rationnelle aux années d’expansion de l’OTAN et à la destruction par Washington des coutumes et lois internationales, aux Opérations de « Regime Change » et aux invasions drapées dans des allégations vertueuses ? Moscou pense – très rationnellement – qu’elle est sur a liste des cibles de Washington et à mon avis c’est la destruction de la Libye sous prétexte de Défense des Droits de l’Homme qui a finalement convaincu l’équipe de Poutine qu’ils devraient un peu plus s’occuper des capacités de défenses russes.

Subséquemment, l’expérience de l’Ukraine et de la Syrie ne peuvent qu’avoir renforcé cette conviction. La vente des S-400 doit dans ce sens plutôt être vue comme un composant d’une politique prophylactique contre à la fois les guerres chaotiques de Washington et e l’OTAN et comme une protection pour la Russie que comme une résistance maligne aux conseils bien intentionnés.

La vente des S-400 est actuellement un geste géostratégique d’importance.

La première question à poser est quoi, exactement, peut-être vendu à un membre de l’OTAN, la Turquie, et à des alliés des EU comme l’Arabie saoudite ? Je doute que les S-400 possèdent l’entièreté des capacités du Système S-400 que la Russie utilise pour elle-même. Premièrement, Almaz-Antey est actuellement au travail sur la suite des évolutions du modèle. Deuxièmement, je serais très surpris, si bien caché au sein des circuits il n’y avait pas un système IFF* qui préviendrait toute tentative d’utilisation contre un aéronef russe, et un code d’autodestruction si quelqu’un de non autorisé voulait s’introduire trop loin au sein du système. Et pour ceux qui pensent que personne ne voudrait de systèmes avec ces limitations la réponse est simple : qui à part les fabricants peut savoir où se trouvent de telles limitations ? Comment et quand pourraient-il les désactiver ?

Nous en avons une confirmation ici :

« Nous ne leur avons donné aucun des codes systèmes ou électroniques. Suivant l’accord, le service technique peut uniquement être réalisé par la Russie et eux, (les Turcs), n’ont rien à gagner à tenter d’entrer dans le système » a déclaré une source militaire russe à Gazeta.ru.

Et ici :

« Toutes les craintes au sujet d’une fuite de technologie sont grandement exagérées, spécialement aussi loin que les missiles antiaériens sont concernés », déclare Khodorenko. « Même s’ils cherchent à démonter le système jusqu’à tenter de trouver quelques secrets militaires il se retrouveront avec rien au bout »

Aussi à la question de savoir si Moscou a risqué que les secrets du S-400 tombent en de mauvaises mains, je peux témoigner que les risques en sont grandement réduits sinon complètement éliminés.

Le Système S-400 est généralement considéré comme très capable, même si à ma connaissance il n’en a encore jamais été fait usage en situation de combat. Sa crainte a pu réduire la menace des aéronefs EU en opération en Syrie et un général EU a déclaré : « l’introduction des systèmes A2/AD en Syrie a créé la première zone interdite de vol pour l’Europe. Il s’agit d’un Système mobile et complet intégrant différents missiles et une entière suite de radars, centres de gestion et centres de commande".

Il y a un nombre varié de combinaisons et de variations possibles, on ne sait pas exactement les versions que chacun a pu acheter, avec des portées effectives jusqu’à 400 km contre des objectifs comme des missiles balistiques, des missiles de croisière, et toutes sortes d’aéronefs. Un grand nombre de cibles peut être suivies et plusieurs missiles à la fois "fixés" par le système de détection et de commandement. Comme la majorité des systèmes russes, (Et soviétiques) , il s’agit de produits d’années d’évolution, de tests, et d’apprentissage.

Aussi sur le papier le système est réellement formidable. Et depuis qu’il est testé il y a une unanimité sur le fait qu’il est aussi efficace qu’annoncé. En conclusion il est admis que les systèmes vendus à la Turquie et à l’Arabie saoudite sont inutilisables contre les Forces Aérospatiales Russes et sont protégés contre toute tentative de piratage de leurs secrets. Mais ils ont été achetés comme des systèmes de défenses efficaces contre des cibles non russes.

Et pourquoi cela ? Ils savent que Washington possède une histoire démontrant qu’elle trahit souvent ses "anciens" associés. Saddam Hussein était utile jusqu’à ce qu’il ne le soit plus. Comme Manuel Noriega, Ben Laden, Khadafi qui a connu son époque de coopération, ainsi que Bashar Al assad après le 9 septembre. Il est plus dangereux d’être un ancien ami de Washington que d’être son ennemi de toujours. Chacun, d’Ankara à Riyad, peut envisager la possibilité de devenir un "ancien ami" de Washington. On peut se rappeler qu’Erdogan a attribué le coup d’Etat de l’année dernière contre lui aux influences de Washington et que Riyad peur considérer un autre virage de son ancien patron occidental.

En bref, chacun d’eux, Ankara ou Riyad surveillent des signes de la part de Washington, suggérant que quelque chose se prépare vers le pire. Ainsi que Hussein, Noriega, Ben Laden, Khadafi, et Assad, peuvent en témoigner, les attaques aériennes sont la principale forme militaire d’expression du déplaisir Washingtonien. Si vous ne possédez qu’un antique et pauvre système de défense aérienne soviétique des années 80, (ou de l’équipement EU truffé de systèmes IFF cachés à l’intérieur), vous vous retrouvez sans défenses et l’aviation EU a quartier libre chez vous.

Par contre avec des S-400 vous avez une chance. Ou au moins une alternative. Et c’est la signification géopolitique de ces ventes.

La possession du Système S-400 donne à ses propriétaires la possibilité d’une politique étrangère indépendante de celle de Washington.

C’est pourquoi ça n’est pas seulement une vente d’armes. C’est plutôt un moyen de changer le jeu géopolitique.

Patrick ARMSTRONG
23 octobre 2017.

Traduit par Geb avec les erreurs involontaires d’usage.

*IFF : ’"Identification, Friend or Foe".
Système d’identification électronique permettant de reconnaître un aéronef ennemi ou ami à distance.

»» https://patrickarmstrong.ca/2017/10/23/why-sell-s-400s-to-the-other-si...
URL de cet article 32478
  

Même Thème
Interventions (1000 articles).
Noam CHOMSKY
à l’occasion de la sortie de "Interventions", Sonali Kolhatkar interview Noam Chomsky. Depuis 2002 le New York Times Syndicate distribue des articles du fameux universitaire Noam Chomsky, spécialiste des affaires étrangères. Le New York Times Syndicate fait partie de la même entreprise que le New York Times. Bien que beaucoup de lecteurs partout dans le monde peuvent lire des articles de Chomsky, le New York Times n’en a jamais publié un seul. Quelques journaux régionaux aux Etats-Unis (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

« L’ennemi n’est pas celui qui te fait face, l’épée à la main, ça c’est l’adversaire. L’ennemi c’est celui qui est derrière toi, un couteau dans le dos ».

Thomas Sankara

Analyse de la culture du mensonge et de la manipulation "à la Marie-Anne Boutoleau/Ornella Guyet" sur un site alter.
Question : Est-il possible de rédiger un article accusateur qui fait un buzz sur internet en fournissant des "sources" et des "documents" qui, une fois vérifiés, prouvent... le contraire de ce qui est affirmé ? Réponse : Oui, c’est possible. Question : Qui peut tomber dans un tel panneau ? Réponse : tout le monde - vous, par exemple. Question : Qui peut faire ça et comment font-ils ? Réponse : Marie-Anne Boutoleau, Article XI et CQFD, en comptant sur un phénomène connu : "l’inertie des (...)
93 
Reporters Sans Frontières, la liberté de la presse et mon hamster à moi.
Sur le site du magazine états-unien The Nation on trouve l’information suivante : Le 27 juillet 2004, lors de la convention du Parti Démocrate qui se tenait à Boston, les trois principales chaînes de télévision hertziennes des Etats-Unis - ABC, NBC et CBS - n’ont diffusé AUCUNE information sur le déroulement de la convention ce jour-là . Pas une image, pas un seul commentaire sur un événement politique majeur à quelques mois des élections présidentielles aux Etats-Unis. Pour la première fois de (...)
23 
Médias et Information : il est temps de tourner la page.
« La réalité est ce que nous prenons pour être vrai. Ce que nous prenons pour être vrai est ce que nous croyons. Ce que nous croyons est fondé sur nos perceptions. Ce que nous percevons dépend de ce que nous recherchons. Ce que nous recherchons dépend de ce que nous pensons. Ce que nous pensons dépend de ce que nous percevons. Ce que nous percevons détermine ce que nous croyons. Ce que nous croyons détermine ce que nous prenons pour être vrai. Ce que nous prenons pour être vrai est notre réalité. » (...)
55 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.