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Algérie, France, Maroc - Trois pays, deux crises.

Certains croient et d'autres veulent faire croire, que la question du Sahara Occidental est le principal obstacle à l'unité du Maghreb. C'est en particulier l'argument de la monarchie marocaine qui veut montrer ainsi que c'est l'Algérie, qui, par son attitude sur cette question, nuit aux intérêts de l'unité maghrébine.

Le problème n’est-il pas en réalité ailleurs, avec l’existence d’un côté d’une monarchie et de l’autre d’États républicains ? Comment pourrait se faire l’unité entre eux. N’y a-t-il pas incompatibilité ? En effet, l’unité du Maghreb signifie automatiquement la fin de la monarchie marocaine au sein d’une république unie du Maghreb. Ou alors il faudrait envisager la monarchie marocaine unifiant sous son leadership, comme l’avait fait la Prusse pour l’unité allemande, l’ensemble des pays du Maghreb, ce qui, d’évidence, est impossible.

Le grand projet d’unité du Maghreb peut donc apparaitre logiquement comme une menace à l’existence du trône marocain.

Vue sous cet angle, le conflit du Sahara Occidental peut donner lieu alors à une toute autre lecture. Dès le départ, la question de sa souveraineté sur le Sahara Occidental a été pour la monarchie marocaine une bouée de sauvetage, à un moment où le trône avait été ébranlé par des tentatives d’instaurer une république. La monarchie marocaine s’est alors totalement identifiée à la revendication de sa souveraineté sur le Sahara Occidental. Celle-ci représente donc un enjeu vital pour la pérennité du trône. Mais le retour de manivelle serait que tout échec sur la question du Sahara occidental signerait la fin du pouvoir monarchique. Ceci n’aurait pas été le cas si ce pouvoir avait été républicain. Il y aurait eu probablement beaucoup plus de possibilités de compromis et surtout, la possibilité de dépasser ce conflit à travers une dynamique d’unité maghrébine, laquelle parait elle-même bouchée pour les raisons déjà évoquées.

Républiques et monarchies

On retrouve, au Machrek (Orient arabe), la même problématique monarchies-républiques. La configuration de facteurs d’unité est à peu près identique qu’au Maghreb : culture, langue, histoire, géographie, sentiment d’appartenance arabo-musulmane et existence d’un ensemble qui avait été déjà uni dans le passé historique. Mais là aussi, il y a l’impossibilité pour les monarchies de se fondre dans un ensemble unitaire avec des républiques, car cela signifierait leur dissolution. L’unité arabe est une menace pour elles. D’ailleurs, dans un premier temps, elles ont réussi à affaiblir, avec l’aide occidentale, les républiques arabes les unes après les autres. Les contradictions dans cet espace arabo-musulman, allant du Machrek au Maghreb, semblent d’ailleurs se manifester de plus en plus fortement à travers une confrontation sous-jacente entre républiques et monarchies. On peut y ajouter aussi un autre élément commun aux deux parties du monde arabe, le soutien apporté en général par l’Occident aux monarchies et l’alliance nouée entre les monarchies et Israël, cela aussi bien au Machrek qu’au Maghreb.

Ne se retrouve-t-on pas ainsi, dans ces deux cas, Maghreb et Machrek, dans une situation historique où la progression vers l’unité nécessitera forcément partout le passage à des républiques.

Afrique du Nord ou bien Maghreb ?

Au Maghreb, les cheminements de l’Histoire ont amené à la conjonction actuelle de deux crises, une crise algéro-française et une crise algéro -marocaine. Outre qu’elles ont révélé l’empathie manifeste existant entre la France et la monarchie marocaine, ces crises rendent peu à peu apparents les contours de deux projets distincts de l’unité magrébine : l’un le vieux rêve nationaliste fondateur, celui du Grand Maghreb arabe, celui de l’unité politique d’un Maghreb de 100 millions d’habitants, allant de la Mauritanie à La Libye et l’autre le maintien des États actuels dans une Afrique du Nord conçue non pas comme une nation mais comme un espace géographique de voisinage et d’échanges.
Les mots ici ont une signification qui n’échappe à personne : parler de Maghreb ou d’Afrique du Nord situe deux visions radicalement différentes : l’une qui transcende les séparations coloniales et renoue avec une histoire millénaire, l’autre qui les fixe, voire qui les cristallise et les développe.

Un évènement sans précédent

Autre aspect de la conjonction de ces deux crises : elle a amené à un évènement qui pourrait être historique, s’il se confirme, celui où, pour la première fois un pays émergent, tel que l’Algérie, prend des sanctions contre une puissance supposée dominante. Que ces sanctions aient été prises de façon spontanée, dans un geste d’humeur, de fierté nationale, ou dans une perspective stratégique, ne change rien à l’affaire. C’est un fait et un évènement considérable. L’avenir dira bien sûr s’il s’agit d’un évènement sans lendemain ou bien marquant pour l’avenir.

S’il est marquant, il porte en lui, inévitablement l’indication d’un changement de rapport de force, et d’une évolution régionale et internationale. Comment a-t-il été possible ?Le plus probable est que l’Algérie s’est aperçue brusquement, pour dire les choses simplement, "qu’elle n’avait pas besoin de la France", économiquement, politiquement, culturellement. En effet, si on cherche aujourd’hui les secteurs en Algérie qui seraient dépendants de la France, sans autre alternative que française, on aurait peine à les trouver.

C’est comme si brusquement, un préjugé, une idée reçue, s’étaient écroulés. Beaucoup d’élites dirigeantes algériennes ont longtemps cru ou fait croire que l’Algérie "ne pourrait se passer de la France", qu’il "fallait être réaliste" etc... Ces élites présentaient en réalité leur propre dépendance culturelle, économique , financière, et surtout sociale comme étant celle du pays.
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Et comme toujours le conflit devient linguistique

La conjonction des deux crises actuelles exacerbe le nationalisme et donc le nationalisme linguistique. Comme toujours, le conflit linguistique alors pointe à l’horizon.. Des ministères annoncent leur passage total à la langue arabe dans leur administration et notamment dans leur correspondance. L’opinion publique se fait de plus en plus pressante pour la diffusion et l’utilisation de l’anglais. Étrangement, la francosphère locale semble actuellement bien plus inquiète par ce dernier aspect que par celui du renforcement de l’utilisation de la langue arabe auquel elle s’oppose d’habitude. En défendant le français contre l’anglais, elle laisse l’impression d’avoir intériorisé jusqu’à certains aspects historiques du nationalisme français dont l’anglophobie. Surréaliste.
Elle se voit ainsi dépossédée de la dernière ligne de défense de la francophonie, l’argument de l’utilité du français comme moyen d’accès à la technologie et aux sciences. En effet, avec un tel argument, comment s’opposer à l’anglais, puisque c’est précisément lui qui est la langue internationale d’accès à la connaissance scientifique et aux technologie en même temps que celle des relations économiques et commerciales mondiales. Ce serait d’une incohérence totale, et ce serait, d’évidence alors, faire passer les intérêts étroits d’un milieu social au-dessus de ceux généraux du pays. Indéfendable.

L’Algérie vit actuellement simultanément deux crises, l’une dans ses relations avec la France, l’autre dans ses relations avec le Maroc. Ces deux crises semblent interagir l’une sur l’autre, s’enchevêtrer et avoir des retombées multiples . Est-ce dû au hasard , une simple coïncidence, ou bien l’indication d’une relation profonde, organique, entre elles. L’avenir, certainement, le dira.

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Georges Séguy. Résister, de Mauthausen à Mai 68.
Bernard GENSANE
Il n’a jamais été le chouchou des médias. Trop syndicaliste, trop communiste, trop intransigeant à leur goût. Et puis, on ne connaissait même pas l’adresse de son coiffeur ! Seulement, à sept ans, il participe à sa première grève pour obtenir la libération de son professeur qui a pris part aux manifestations antifascistes de Février 34. Huit ans plus tard, à l’âge de quinze ans, il rejoint les rangs de la Résistance comme agent de liaison. Lui et les siens organisent de nombreuses évasions de militants (...)
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Je n’ai aucune idée à quoi pourrait ressembler une information de masse et de qualité, plus ou moins objective, plus ou moins professionnelle, plus ou moins intelligente. Je n’en ai jamais connue, sinon à de très faibles doses. D’ailleurs, je pense que nous en avons tellement perdu l’habitude que nous réagirions comme un aveugle qui retrouverait soudainement la vue : notre premier réflexe serait probablement de fermer les yeux de douleur, tant cela nous paraîtrait insupportable.

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