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Bruno Jeudy, vrai marathonien et faux journaliste

Un vif débat – une altercation verbale – a opposé le 8 décembre à 20h 45 le gilet jaune Christophe Couderc à Bruno Jeudy, pilier de BFM-TV. Jeudy a accusé Couderc d’être un faux gilet jaune car militant politique. Couderc n’a pu alors rétorquer que Jeudy était un faux journaliste.

On pourrait tout de suite donner raison à Couderc dans la mesure où Jeudy est l’un des responsables d’un magazine qui ne brille pas par la qualité de ses analyses politiques, à savoir Paris Match. Mais là, on friserait le procès d’intention et les mânes de l’atlantiste et anticommuniste viscéral Raymond Cartier en seraient dévastées.

Non, Jeudy est un faux journaliste parce que, comme les piliers de BFM (ou de CNEWS), il ne respecte pas les règles du journalisme. Un journaliste en plateau de télévision est censé accueillir un invité, avec courtoisie si possible, lui poser des questions, attendre la fin des réponses et relancer s’il estime que ces réponses sont insuffisantes. Telle n’est pas du tout la pratique de Jeudy et des autres piliers.

Authentique marathonien, Jeudy a du souffle, ce qui lui permet de couper la parole de ses invités et de se lancer, pendant plusieurs minutes si nécessaire, dans un argumentaire complètement personnel. Point n’est besoin de se demander vers quel côté penche notre fringant coureur à pied, lui qui est l’auteur de Nicolas Sarkozy de Neuilly à l’Élysée, Sarkozy et ses femmes, et Sarkozy côté vestiaires (on attend Sarkozy et son bidet ou encore Macron est-il hétéro ?).

En plateau comme ailleurs, Jeudy est le chien de garde qui aboie contre tout ce qui n’est pas de droite – donc ce qui n’est pas macroniste – et monte la garde auprès des banques et de ses employeurs milliardaires, propriétaires de BFM-TV.

Il suffirait que les hommes et femmes politiques appartenant à la vraie gauche boycottent les plateaux de BFM-TV et de CNEWS en réservant leur prestation pour le Canal 27 de France Info, disons pendant un mois, pour déstabiliser l’arrogance de ces chiens de garde des milliardaires.

Si le personnel politique tentait de mettre au pas les médias, on crierait au scandale. Le fait que les médias aient mis au pas le personnel politique ne scandalise plus personne.

Bernard Gensane

PS : Licia Meysenq, une jeune journaliste, a regardé BFM pendant 3 jours. Son témoignage, brut de décoffrage :

J’avais du mal à comprendre la défiance des gens vis à vis de BFM. Je suis journaliste et diplômée d’une école. J’ai donc décidé de regarder exclusivement BFM pendant trois jours. La suite va vous étonner.

Premier jour de mon long calvaire : surlendemain de la manif du 1er décembre. On apprend que plusieurs personnes sont blessées par des tirs de lacrymo. Une personne est décédée (Marseille) une autre a perdu sa main Pendant ce temps BFM passe en boucle un reportage sur ...

Les CRS agressés par "les manifestants". Oui ... Les manifestants. Aucune personne ne parle des blessés, ni des conditions de travail desdits CRS (qui ont bossé plus de 20H. Ce sera le seul reportage de la journée.

(On parle quand même de multinationales dont la moitié payent pas leurs impôts en France, on est sur les champs élysées je rappelle c’est pas des patrons de PME). Le mec censé être journaliste continue sa litanie sur "les touristes qui vont avoir une mauvaise image de la France.

Donc les gilets jaunes racontent qu’ils galèrent à bouffer le soir et BFM est en boucle sur les Qataris qui pourront pas acheter des sac Chanel. Je suis journaliste, payée au smic. Je comprends pas tellement la logique de ce confrère.

Je rappelle qu’un journaliste ne doit pas donner son opinion mais interroger des gens. Je suis sceptique quant à la démarche de BFM, voire j’ai envie de brûler ma télé. En plateau un gilet jaune - enfin. Ils ont trouvé le seul GJ macroniste (il a voté macron et compte le refaire)

Blanquer est sur le plateau- s’en suit 40 minutes de non vérification des faits total - on explique que la France est "en pointe pour faire payer les impôts aux Gafa - sans que personne intervienne. C’est pas de l’info, c’est un espace politique.

Le gilet jaune appelle les lycéens à ne plus bloquer les lycées et à se calmer, Blanquer approuve. Le gilet jaune appelle à ne pas manifester le samedi qui suit. On se demande encore si c’est une chaine d’info.

Le reste de la semaine, c’est pareil et en pire. On répète en boucle "qu’il y aura des morts", je savais pas que les journalistes étaient des prophètes. Une journaliste dit "les manifestants passent à l’offensive avec du sérum physiologique".

Je savais pas que de l’eau pouvait servir d’arme de guerre. Tout ce que j’ai appris à l’école (bien vérifier ses sources, ne jamais émettre de jugement de valeur ni d’avis personnel, bien vérifier à l’équilibre des paroles) n’est pas appliqué par BFM

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Le fait est que les slogans du type "soutenons nos soldats" n’ont aucun sens... Et c’est tout l’objectif d’une bonne propagande. Il vous faut créer un slogan auquel personne ne s’oppose, et tout le monde y adhérera. Personne ne sait ce qu’il veut dire parce qu’il ne veut rien dire. Son importance réside dans le fait qu’il détourne l’attention d’une question qu’il aurait fallu poser : soutenez-vous notre politique ? Mais ça c’est une question qu’on n’a pas le droit de poser.

Noam Chomsky

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