Honduras : l’ombudsman de Radio-Canada rend sa décision

Le mystère qui me hante reste entier.

Comment est-ce possible que nos médias soient incapables de présenter l’information d’une façon neutre ?

Le Coup d’État du Honduras était un geste totalement anti démocratique et pourtant...

La décision de l’Ombudsman de Radio-Canada concernant l’attitude de Mme Lamarche face au Coup d’État du Honduras a été rendu. Elle préserve la chèvre et le choux.

Du bout des lèvres, l’ombudsman de Radio-Canada me donne raison sur un tout petit point dans ma protestation contre Ginette Lamarche. Voici sa conclusion :

Le reportage à la radio du 3 décembre 2009 sur le Honduras comportait une inexactitude, car on ne peut affirmer avec certitude que le président Manuel Zelaya avait la « volonté de passer outre à la constitution qui lui interdisait de se représenter pour un deuxième mandat ».

Exception faite de cette inexactitude, la couverture à la radio de la crise au Honduras, entre juin et décembre 2009, était équilibrée et impartiale.

Impartiale et équilibrée... De toute évidence, l’ombudsman n’a pas effectué une enquête comme celle effectuée par des universitaires britanniques concernant la BBC et le Venezuela [3].

Le 22 décembre à 15h00, (belle heure et belle date), Mme Martine Lanctôt, Directrice, traitement des plaintes et affaires générales - Information -, m’écrivait :

Monsieur,

Nous avons bien reçu vos commentaires concernant le reportage de Ginette Lamarche sur la situation au Honduras, diffusé au Radiojournal du 3 décembre 2009.

Vous considérez qu’il est faux de dire que le président Zelaya voulait modifier la constitution pour briguer un second mandat.

Il est bien stipulé dans la constitution hondurienne qu’il est strictement interdit, sous peine d’emprisonnement, de modifier la constitution pour pouvoir briguer plus d’un mandat présidentiel. Or Manuel Zelaya a été arrêté le jour même où il avait demandé la tenue d’un référendum demandant à la population d’accepter la tenue d’une assemblée constituante pour pouvoir modifier la constitution. Il espérait entre autres pouvoir rallonger le mandat présidentiel. C’est la formule qui a été pratiquée avec succès au Venezuela, en Bolivie, en Équateur et en Colombie. Zelaya n’a pu réaliser son projet de modification constitutionnelle puisqu’il a été arrêté par le coup d’État.

On constate que la désinformation est tellement assimilée par Radio-Canada qu’elle est incapable de parler de la simple réalité des choses.

Le Coup d’État est présenté comme un geste "normal" ayant empêché un geste "illégal" (sic).

Le mensonge dans la tête de Mme Lanctôt est devenu une "vérité".

Jamais Radio-Canada n’a mentionné et expliqué la quatrième urne.

Jamais Radio-Canada n’a parlé de la question devant être posée à la population le 28 juin.

C’est pourtant deux éléments d’une importance capitale dans les événements du Honduras.

Le 14 janvier dernier, je demandais donc à l’Ombudsman :

J’aimerais qu’on me dise, preuve à l’appui combien de fois Mme Lamarche a lu la question devant être utilisée pour la consultation populaire prévue le jour du Coup d’État militaire qui a déporté en pyjama avant que le jour ne se lève, le Président constitutionnel et élu, Manuel Zelaya hors de son pays ?

J’aimerais aussi savoir combien de fois Mme Lamarche a mentionné dans ses reportages qu’on avait déporté (ou déposé) Manuel Zelaya parce que celui-ci voulait un deuxième mandat ?

Ces deux questions sont demeurées sans réponse.

L’Ombudsman de Radio-Canada manque de ressources pour effectuer un travail plus en profondeur.

Dans sa réponse du 22 décembre à 15h03, Mme Lanctôt m’a précisé une quinzaine de reportages de Ginette Lamarche :

- 30 juin : Manuel Zelaya prend la parole à l’ONU - Manuel Zelaya a le soutien de l’ONU

- 1er juillet : Ultimatum OEA - Manuel Zelaya appuyé par l’ONU.

- 3 juillet : Situation au Honduras - Coup d’État au Honduras - OEA

- 5 juillet : Le Honduras quitte l’OEA - Retour incertain du président - L’armée reste inflexible

- 6 juillet : La situation demeure confuse - échec du président élu Zelaya - Obama appuie le président en exil du Honduras Manuel Zelaya

- 18 juillet : Pourparlers pour le retour de Manuel Zelaya au Honduras

- 23 sept : Président du Brésil plaide pour retour de Zelaya au Honduras

- 28 sept : La situation dégénère depuis retour de Zelaya

- 29 sept : La crise affecte économie Amérique centrale

- 5 oct : Rétablissement des libertés civiles - Les putschistes lèvent les mesures

- 14 oct : Retour au pouvoir de Zelaya

- 15 oct : Crise politique

- 30 oct : Retour au pouvoir de Zelaya

- 31 oct : Fin de crise au Honduras

- 29 nov : Présidentielle au Honduras

- 30 nov : Élections présidentielles Honduras et Uruguay

- 3 déc : Manuel Zelaya ne reviendra pas

Il aurait été intéressant de les scruter pour savoir à quel endroit Mme Lamarche mentionne la quatrième urne et lit la question de la consultation populaire du 28 juin. Question qui a provoqué le Coup d’État.

Le 14 décembre dernier

Des chercheurs de l’Université de l’Ouest de l’Angleterre (University of the West of England, Bristol [1]), ont mis en lumière une tendance systématique dans le traitement de l’actualité du Venezuela par la British Broadcasting Corporation(BBC). Lee Salter [2] et Dave Weltman ont analysé dix ans de reportage sur le Venezuela. Sur 304 reportages de la BBC publiés entre 1998 et 2008 seuls trois de ces articles relèvent ne serait-ce qu’un aspect positif de la politique de Chavez.

La BBC a échoué à informer de manière adéquate sur n’importe quelle initiative démocratique, législation en matière de droits de l’homme, programmes d’alimentation, de santé ou sur les programmes de réduction de la pauvreté. La Mission Robinson, le plus grand programme l’alphabétisation dans l’histoire de l’humanité n’a reçu que la mention "passable". [3]

D’après cette recherche la BBC semble ne jamais accepter la légitimité du président, insinuant constamment que Chavez manque d’appui électoral, jusqu’à le comparer à Hitler dans un article ("Venezuela’s Dictatorship’ 31/08/99).

On peut facilement faire un parallèle avec la couverture Radio-Canadienne du Coup d’État au Honduras.

La plupart des reportages sont exactement dans le sens de la note de Mme Lanctôt citée plus haut.

« Il est bien stipulé dans la constitution hondurienne qu’il est strictement interdit, sous peine d’emprisonnement, de modifier la constitution pour pouvoir briguer plus d’un mandat présidentiel. Or Manuel Zelaya a été arrêté le jour même où il avait demandé la tenue d’un référendum demandant à la population d’accepter la tenue d’une assemblée constituante pour pouvoir modifier la constitution. Il espérait entre autres pouvoir rallonger le mandat présidentiel. »

Il est clair que Radio-Canada a présenté Manuel Zelaya comme étant un président malhonnête et que le Coup d’État nous a été présenté comme étant un acte rétablissant la "légalité constitutionnelle" (sic).

Salutations,

Serge Charbonneau
Québec

P.S. : Présentement Mme Lamarche emboîte le pas à une nouvelle campagne de dénigrement contre Hugo Chávez, alias « la bête noire ». On l’accuse de tous les maux : http://www.radio-canada.ca/nouvelles/international/carte-interactive/reportages/2010/01/27/006-4689.shtml

Je vous invite à lire la réflexion de Monsieur Oscar Fortin :
Référendum révocatoire
Ce ne sont pas tous les pays qui disposent d’un mécanisme de destitution en toute légitimité d’un Président ou d’un Premier Ministre dont le peuple ne veut plus.
http://www.vigile.net/Referendum-revocatoire & http://www.legrandsoir.info/Referendum-revocatoire.html

Mme Lamarche va-t-elle couvrir les manifestations de demain (4 février) au Venezuela pour souligner le jour de la dignité.

C’est le 4 février 1992 qu’Hugo Chavez tenta un Coup d’État contre le régime corrompu de Carlos Andres Perez. Ce 4 février est souligné comme étant le jour ou le peuple s’est réveillé et s’est pris en main. Le Coup d’État par les armes a échoué, mais la population a découvert la force des urnes et la force de la démocratie participative.

On prévoit une grande marche à Caracas pour souligner ce 4 de febrero. Ginette Lamarche y sera-t-elle ?

Pour mieux comprendre la révision, lire « Radio Canada CONTRE Manuel Zelaya »
http://www.legrandsoir.info/Radio-Canada-CONTRE-Manuel-Zelaya.html

[1] http://www.uwe.ac.uk/

[2] http://www.uwe.ac.uk/sca/staff/salter.shtml

[3] http://www.michelcollon.info/index....

Documents joints
[PDF ] 57.7 kio
Révision Honduras
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COMMENTAIRES  

05/02/2010 12:21 par oscar fortin

Il nous faudrait des Serge Charbonneau par dizaines pour briser ce mur, en béton armé, de la désinformation concernant tout ceux et celles qui ne font pas acte de foi au veau d’or, ce dieu des oligarchies et des puissances impériales. La démocratie, la justice, la compassion humaine ne les intéressent pas plus qu’une marchandise monneyable. Il suffit de regarder ce qui se passe en Haïti pour constater que les urgences humanitaires sont bien loin derrières les préoccupations d’affaires et d’images, ces dernières, indispensables pour "sauver la face" en trompant le monde. La persistance de M. Charbonneau aura tout de même permis de briser le mythe "d’un ombudsman au service de l’information".

06/02/2010 19:52 par Marie T

Est-ce qu’on peut avoir une traduction, ou une définition, pour ombudsman ?

06/02/2010 21:25 par oscar fortin

expression anglaise qui désigne la personne ou l’organisme qui sert d’intermédiaire,dans le cas présent, entre la Société de Radio-Canada et les auditeurs et auditrices qui ont des réclamations ou des plaintes à faire. Une sorte d’arbitre... dont l’enracinement dans l’institution elle-même lui fait voir les choses de la couleur dominante de son institution.

30/06/2010 12:53 par Siempre Presente

Je suis québécois restant au Honduras depuis mars 2009, donc qui a vécu à 100% le coup d’état. Je suis d’ailleurs documentaliste et photographe. J’ai tenté plusieurs fois d’écrire à Radio-Canada pour leur dire que l’information qu’il circulait était complètement fausse et frauduleuse. Je leur ai expliqué dans un courriel de long en large comment était réellement la situation, les assassinats, les massacres, l’oppression, la vision et l’opinion réel de la majorité de la population. Je leur ai offert mes services au cas où ils auraient besoin de quelqu’un pour leur donner un peu plus de matériel afin d’avoir une vision plus neutre. J’ai plus de 15 heures de vidéos que j’ai filmé montrant des centaines de milliers de personnes manifestant en appuie à Mel Zelaya et à la "Cuarta Urna" (cela dans une seule ville) sur une population global de 7 millions de personnes... du jamais vu dans toute l’histoire de l’Amérique latine. Cependant ils n’ont même pas seulement prit la peine de répondre à aucun de mes messages, un mur de béton fait pour parer l’information divergente et protéger un système capitaliste vendu à des impériaux nord américains. C’est là qu’on voit que la corruption se fait tout au tant chez nous qu’ici à la seule différence que chez nous elle est mieux cachée grâce à un groupe de radio-télédiffusion qui savent bien parler et passer leur menterie en douceur à n’importe qui.. ce qui au bout de la ligne est peut-être plus pire qu’ici.. où au moins nous savons réellement à qui nous avons à faire.

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