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Il était une fois en Macronie ... l’affaire Geneviève Legay

Commencé en novembre dernier, le mouvement des Gilets Jaunes occupe toujours, quatre mois et demi plus tard, la une de l'actualité hebdomadaire. Et pour cause. En cherchant à enrayer la crise tout en évitant d'y répondre, le gouvernement ne fait que jeter de l'huile sur le feu. Dans le même temps, en opérant constamment des changements de stratégie (apaisement, fermeté, pourrissement ...), il ne fait que complexifier la situation sur le terrain. Entre accalmies et regains de tensions ... les samedis se suivent mais ne se ressemblent pas. C'est dans ce contexte que survient, lors de l'acte 19, ce qu'il conviendra d'appeler "l'affaire Geneviève Legay". Retour sur un imbroglio en plusieurs actes.

Un mouvement un peu en perte de vitesse

Après le tumultueux acte 18, le gouvernement avait prévenu : pour l’acte 19, il allait y mettre les moyens. Il faut dire que l’acte 18 avait surpris tout le monde. D’un côté bien sûr, le mouvement n’était toujours pas terminé (il entrait quand même dans son 5ème mois de mobilisation), mais d’un autre, l’effectif des manifestants avait plutôt tendance à décroître au fil du temps. Quant aux sondages, ils semblaient montrer une lassitude de l’opinion publique face à la répétition des scènes de castagne et de casse. Une lassitude qui profitait pleinement au président Macron puisque pendant qu’il jouait la montre avec son grand débat, sa côte de popularité ne cessait d’augmenter. C’est d’ailleurs cette "stratégie du pourrissement" que semblait vouloir jouer le gouvernement, tant on pouvait parfois s’étonner de la facilité avec laquelle les manifestants les plus turbulents (Black Blocs et autres Gilets Jaunes) pouvaient rejoindre les cortèges de manifs puis commencer à tout casser, parfois à quelques (dizaines de) mètres seulement des forces de l’ordre. Une stratégie d’ailleurs corroborée par certains représentants de police eux mêmes, lesquels étaient venus expliquer sur les plateaux télé que les "consignes face aux casseurs n’étaient pas claires" (et même pour certains qu’ils "avaient ordre de ne pas intervenir") (1).

Un acte 18 explosif

Un mouvement en perte de vitesse donc, et du coup, un pouvoir qui commençait un peu à relâcher la pression. Macron au ski, Castaner en boite de nuit, et une flopée de ministres se succédant chez Hanouna pour expliquer les bienfaits de la politique gouvernementale. Merde alors ! Et les 4 mois de manif, et la consultation nationale, et les principales revendications des Gilets Jaunes (impôt sur la fortune, RIC), où en était-on ? Qu’est ce qui avait changé ? Á quoi tout cela avait-il bien pu servir ? Aucune annonce, rien ... juste un président continuellement en train de se mettre en scène à blablater (dans les écoles, au milieu d’ados ...).

Dans ce contexte, arrive l’acte 18. Et là, c’est le drame. Vitrines cassées, commerces incendiés (Fouquets, Swarovski ...), la capitale est sans dessus dessous et la stratégie du gouvernement se retourne alors contre lui. En conséquence de quoi, le président (rentré précipitamment du ski), demande à ses acolytes de prendre toutes les mesures qui s’imposent afin que cela ne se reproduise plus. Résultat : un préfet de police qui saute (le fusible du moment), la mise à contribution de l’armée (censée protéger les bâtiments publics, mais sans avoir à gérer directement les manifestants ...) et surtout, un durcissement des méthodes de police.

Une police qui va désormais "aller au contact"

Fini la fête, le gouvernement a désormais décidé de montrer les muscles. Tenu au courant du bordel en préparation pour l’acte 18 (renseignements, réseaux sociaux ...), Castaner annonce d’ailleurs dès la veille une "réflexion élargie", "dans les mois qui viennent", sur un "changement de doctrine de maintien de l’ordre" (2). Question : sachant que la doctrine actuelle consiste à "maintenir les manifestants à distance", en quoi consiste cette nouvelle doctrine ? Le ministre de l’intérieur nous explique tout ça quelques jours plus tard (entre l’acte 18 et l’acte 19), dans la foulée du limogeage du préfet de police de paris : nous avons "fait évoluer en profondeur" la doctrine de maintien de l’ordre ... "Nous avons défini une stratégie de mobilité, de contact, de réactivité, d’interpellation, en assumant les risques que cela comportait" (3). Une volonté de plus grande fermeté, avec des arguments quasi identiques à ceux qu’avaient avancé le premier ministre E. Philippe quelques jours plus tôt : "si nous avons une stratégie qui permet aux forces de l’ordre d’être plus mobiles, d’être plus dynamiques, d’être plus fermes, il y a plus de risques" de blessés (4).

Geneviève Legay ? Y a pas eu contact

C’est donc dans ce contexte de changement de stratégie, où la police est désormais chargée "d’aller au contact", que survient, lors de l’acte 19, l’accident de Geneviève Legay. Renversée lors d’une charge de police à Nice, la septuagénaire s’effondre, victime de plusieurs fractures au crâne et de 5 côtes cassées (5). Mais dès le lendemain, alors que Madame Legay est toujours hospitalisée et dans un état grave, le président donne le ton : "Cette dame n’a pas été en contact avec les forces de l’ordre. Elle s’est mise en situation d’aller dans un endroit interdit, de manière explicite, et donc d’être prise dans un phénomène de panique." (6) Pas en contact avec les forces de l’ordre ? Tiens donc. Une argumentation absurde, qui est pourtant reprise dans la foulée par le maire de Nice ("Je sais que ce n’est pas dans un heurt avec la police" ... "je crois que ce sont des blessures superficielles")(7) et surtout par le procureur, lequel avance au passage quelques pistes :
il y avait derrière elle trois personnes, "un journaliste qui filmait, une autre manifestante et une autre personne à la casquette marron". "On ne voit pas qui la pousse" (8). Curieux, on dirait qu’on cherche un manifestant à qui faire porter le chapeau.

Qui pour porter le chapeau ?

S’ensuivront d’autres informations consternantes. Comme celle de ces street medics (médecins & secouristes portant assistance aux blessés lors des manifestations) d’abord empêchés de secourir Geneviève Legay puis finalement gardés à vue pendant plusieurs heures (9). Ou celle de ces journalistes empêchés (par la direction du CHU) d’accéder à la chambre de Geneviève Legay (malgré l’accord de cette dernière) (10), alors que des policiers avaient pu la visiter (avec des motivations plus ou moins claires) le lendemain même de l’accident (11). Mais la charge la plus lourde viendra des témoins mêmes de l’accident : de la victime elle même, tout d’abord, qui affirme avoir été poussée par un policier, mais aussi de divers enregistrements vidéos (12) et même d’un rapport de police reconnaissant une bousculade par "un homme portant un bouclier" (13). Des preuves accablantes obligeant finalement le procureur de Nice à revenir sur ses dernières déclarations (2 jours après l’accident, il déclarait encore qu’elle avait été poussée dans le dos par des manifestants (14)) et à chercher un nouveau coupable. Alors qui ? Macron ? Philippe ? Castaner ? Le préfet des Alpes Maritimes ? Le commissaire ayant ordonné la charge ? Non, non, juste un "policier isolé" qui en "écartant le bras de la manifestante vers la droite", a ainsi provoqué sa chute ... (15)

* * * * *

Quelque jours après que Castaner est venu vanter sa bonne gestion de l’acte 19 ("les consignes de fermeté" ont été appliquées" ... "les résultats sont là") (16), on apprend concernant "l’affaire Legay" qu’une information judiciaire est finalement ouverte pour "violence volontaire par personne dépositaire de l’autorité publique (le policier isolé, ndr)". Ben ... et la nouvelle stratégie gouvernementale de "plus de contact" avec "plus de risque de blessés" alors, elle n’y est pour rien ?

Circulez, y a rien à voir. Mensonges, manipulations, lâcheté ... ça se passe comme ça en Macronie.

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