RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher

L’augmentation "raisonnable" du SMIC

Je n’ai plus le souvenir exact du jour où j’ai écouté l’information que je vais commenter : était-ce vendredi ou était-ce samedi ? En tout cas, c’était sur France 3, et il y était question de l’augmentation du SMIC prévue par le gouvernement. Il était dit que cette augmentation serait "raisonnable".

Que veut dire "raisonnable" ? Le dictionnaire historique Robert de la langue française (page 3074), nous apprend qu’il s’agit d’une chose qui est "conforme à la raison". Et, plus loin, que ce terme s’applique "aux personnes qui se conduisent avec mesure et de façon réfléchie, sens dont procède l’application à un commerçant /modéré/ [je souligne] dans ses exigences (1673) probablement d’après /prix raisonnables/. Plus loin on lit, à propos de l’adverbe "raisonnablement", conformément à la sagesse, spécialement, avec modération.

On aura donc compris qu’un SMIC augmenté de façon "raisonnable" est un SMIC très peu augmenté (en l’occurrence de 2 %), soit, en salaire net, un peu plus de 20 euros par mois. Qu’y a-t-il de "raisonnable" à augmenter le salaire d’un ouvrier (ou d’une ouvrière) de 20 euros par mois ? Par rapport à son loyer, par rapport au prix de son essence, au prix des vêtements de ses enfants, au prix de sa carte de bus, en quoi est-il "raisonnable" de n’augmenter son salaire que de 20 euros ?

On peut, au contraire, imaginer qu’une toute petite hausse des prix, de l’ordre de 0,1 % - et encore juste une seule hausse mensuelle - des produits de base du supermarché (huile, farine, sucre, pâtes, riz, savon, chocolat), ou des tarifs du coiffeur, ou des prix des carburants, "mange" très largement (et bien au-delà  !) cette "raisonnable" augmentation de 2 %. En quoi est-il donc "raisonnable " de laisser dans leur gêne, dans leur détresse, des compatriotes qui comptent leur argent sou par sou ? Ce qui serait "raisonnable", ne serait-ce pas plutôt une augmentation du SMIC (à l’époque SMIG) telle qu’elle avait été entérinée par les accords de Grenelle de 1968, à savoir de 35 % ? Une valeur de 35 % sur un salaire brut de 1400 euros, cela fait, en brut, 490 euros, soit (si on admet que la moitié est formée par des cotisations) une valeur en net de 250 euros. Voilà qui est raisonnable ! Voilà qui permet à une famille d’employés ou d’ouvriers de voir venir...

En fait, ce "raisonnable" ne se comprend que si l’on prend en compte de tout autres critères et de tout autres intérêts que ceux des salariés au SMIC : les critères (et les intérêts) de la Commission de Bruxelles, de la Banque Centrale Européenne (BCE), du Fonds Monétaire International, de l’OCDE, du Medef, etc. Pour tous ces doctes organismes, il n’est, en effet, pas "raisonnable" que les salariés soient rémunérés avec autre chose qu’avec des aumônes. Car, derrière l’augmentation du SMIC, il en va des "grands équilibres macroéconomiques", du déficit budgétaire, de la "compétitivité des entreprises hexagonales", et, à côté de ces intérêts grandioses, que pèse le salaire d’un ouvrier ? Que pèse son bien-être ? Que pèse sa dignité ?

Ce qui est révélateur, avec ce simple adjectif, c’est que les journalistes qui l’emploient (et dont on suppose qu’ils n’ont pas, eux, des salaires "raisonnables", ni des augmentations "raisonnables") s’avouent ainsi spontanément, ingénument, du côté des riches et des
puissants...

Autre information, sur France Inter, samedi, Denis Astagneau, expédie en quelques mots la destitution - plus que litigieuse, comme le dit Le Monde diplomatique - du président paraguayen Fernando Lugo, président de gauche, surnommé "l’évêque des pauvres" (il fut en effet ecclésiastique dans une vie antérieure). Ce qui est révélateur, c’est qu’Astagneau conclut son information, plus que brève, en disant que Fernando Lugo était "empêtré dans une affaire d’enfant naturel et de corruption" (je cite de mémoire).

En quoi est-ce révélateur ? En ce que cela fait office (Astagneau, évidemment, ne le présente pas ainsi) d’explication à la destitution du président Lugo [dont, vu la brièveté de l’information, on ne connaît ni les tenants ni les aboutissants]. L’auditeur d’Astagneau est donc tout naturellement amené à penser que quelqu’un qui a eu un (ou des) enfant(s) naturel(s) et qui n’est pas très clair à ce sujet, et qui, de surcroît, est corrompu, n’a aucune légitimité à gouverner et qu’il est donc normal qu’on le destitue. On n’en saura pas davantage sur Fernando Lugo. Et le Paraguay, c’est si loin, c’est si pauvre, et c’est si enclavé : qui s’y intéresse ?

Philippe Arnaud

URL de cet article 17085
  

Histoire et Mystifications. - Comment l’Histoire est fabriquée et enseignée...
Michael PARENTI
Analyste politique progressiste de tout premier plan aux États-Unis, Michael PARENTI, docteur en Sciences Politiques de l’Université de Yale, est un auteur et conférencier de renommée internationale. Il a publié plus de 250 articles et 17 livres. Ses écrits sont diffusés dans des périodiques populaires aussi bien que dans des revues savantes, et ses textes engagés l’ont été dans des journaux tels que le New York Times et le Los Angeles Times. Ses livres et ses conférences, informatives et (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

Toute manifestation à Cuba (ou à Miami, d’ailleurs) qui ne commence pas par "Abajo el bloqueo" (quoi qu’on dise ensuite) est une escroquerie ou une croisade de fous. Et brandir un drapeau états-unien à Cuba, c’est comme brandir un drapeau israélien à Gaza.

Viktor Dedaj

Analyse de la culture du mensonge et de la manipulation "à la Marie-Anne Boutoleau/Ornella Guyet" sur un site alter.
Question : Est-il possible de rédiger un article accusateur qui fait un buzz sur internet en fournissant des "sources" et des "documents" qui, une fois vérifiés, prouvent... le contraire de ce qui est affirmé ? Réponse : Oui, c’est possible. Question : Qui peut tomber dans un tel panneau ? Réponse : tout le monde - vous, par exemple. Question : Qui peut faire ça et comment font-ils ? Réponse : Marie-Anne Boutoleau, Article XI et CQFD, en comptant sur un phénomène connu : "l’inertie des (...)
93 
"Un système meurtrier est en train de se créer sous nos yeux" (Republik)
Une allégation de viol inventée et des preuves fabriquées en Suède, la pression du Royaume-Uni pour ne pas abandonner l’affaire, un juge partial, la détention dans une prison de sécurité maximale, la torture psychologique - et bientôt l’extradition vers les États-Unis, où il pourrait être condamné à 175 ans de prison pour avoir dénoncé des crimes de guerre. Pour la première fois, le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture, Nils Melzer, parle en détail des conclusions explosives de son enquête sur (...)
11 
L’UNESCO et le «  symposium international sur la liberté d’expression » : entre instrumentalisation et nouvelle croisade (il fallait le voir pour le croire)
Le 26 janvier 2011, la presse Cubaine a annoncé l’homologation du premier vaccin thérapeutique au monde contre les stades avancés du cancer du poumon. Vous n’en avez pas entendu parler. Soit la presse cubaine ment, soit notre presse, jouissant de sa liberté d’expression légendaire, a décidé de ne pas vous en parler. (1) Le même jour, à l’initiative de la délégation suédoise à l’UNESCO, s’est tenu au siège de l’organisation à Paris un colloque international intitulé « Symposium international sur la liberté (...)
19 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.