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L’Ecole, est-elle obligée de suivre le modèle de l’entreprise ?

La notion de l’école autrefois n’est plus la même aujourd’hui. Des modifications au niveau du cursus, des activités, des programmes, et des finalités font que le changement soit considérable. S’il est normal que l’établissement scolaire reflète la gestation et le dynamisme de la société, la remise en cause de son rôle et de son abnégation pose plus d’une question. L’école publique ne l’est plus vraiment : elle est de plus en plus sectatrice. Son désintéressement est remis en question d’autant plus qu’elle sert des particuliers aux dépens des intérêts communs. La scolarité ne tient plus tellement au savoir et à la connaissance : c’est une manœuvre destinée plus à la professionnalisation. Du fait, l’établissement scolaire prendra progressivement l’apparence d’une manufacture qui prépare des compétences à la demande.

Vers les années 70, un nouveau concept commence à submerger sur la scène : c’est le New Management public ou la nouvelle gestion du public, autrement dit introduire dans la gestion des affaires publiques des méthodes de décision et de gestion reposant sur une « approche de marché », censée être plus efficace. Du fait, les dirigeants animés par un esprit de la concurrence et du résultat commencent à avoir une approche pragmatique de la gestion du secteur public ; et les citoyens seront considérés comme des consommateurs des services de l’état et de l’enseignement en l’occurrence. L’état pense à diminuer les charges. Il ira même jusqu’à charger des entités autonomes pour la gestion de quelques secteurs, et c’est là que la privatisation va s’infiltrer dans le domaine pédagogique, et le savoir et la connaissance seront abordés selon la loi du marché : ils sont au plus payant. Peu importe qu’ils appartiennent au domaine ou non, ces propriétaires ne sont que des investisseurs qui ne considèrent l’établissement scolaire comme une source de revenu : c’est l’école capitaliste.

Ce changement de conception chez les dirigeants sera vite reflété chez les pédagogues. C’est alors qu’on commence à utiliser un jargon des entrepreneurs tels les objectifs ou les compétences ou encore le projet et les statistiques seront utilisées davantage pour accréditer ou discréditer telle ou telle stratégie. Cependant, le changement le plus évident serait celui d’un renversement au niveau de l’échelle des valeurs. On enseigne désormais selon les valeurs de l’entreprise. La sagesse, la dignité, l’honnêteté ; valeurs sûres et universelles de l’école d’antan se trouvent reléguées derrières d’autres, qui riment avec l’égoïsme du capitaliste qui règne, telles le succès, le rationalisme, la productivité ou l’utilité.

Mais il faudrait se rendre à l’évidence : si cette nouvelle pensée de l’école à des bienfaits, celui de faire bouger l’école et de la faire sortir de son immobilisme serait le plus évident. La rigidité de l’école traditionnelle lui cause des difficultés. C’est un fardeau qui fait qu’elle ne suit plus le rythme de la société. Les statistiques, les pourcentages, la rentabilité, pour ne reprendre que ce termes de cette nouvelle gestion, témoignent en faveur du système actuel basé sur le résultat.

Or ce système, quoiqu’il soit efficace, n’est pas exempt de tout reproche.

D’un côté, orienter massivement les élèves vers les branches rentables fait que des disciplines littéraires et humaines se disparaîtront avec le temps puisque tout le monde cherchera à avoir un diplôme demandé au marché du travail. Adieu les matières qui développent le beau et le bien !

D’un autre côté, fixer d’avance des compétences qui répondent subtilement aux besoins de l’entreprise n’est-ce pas faire de l’école une pépinière qui fournit un capital humain selon les besoins du marché ? N’est-ce pas avilir une institution à vocation universelle et la rendre au service des classes élitaires et puissantes ?

De surcroît, parviendrons-nous par le biais de ces compétences, même atteintes à merveille, à former des personnes équilibrées, ou alors cette professionnalisation du cursus scolaire aboutira à des performances décousues, à des individus avec du savoir-faire sans savoir-être ? Avec une science sans conscience ? Avec des compétences monnayables sur le marché du travail ?

Au moment où on demande à ce que l’école garde son autonomie à l’égard de certaines idiologies politiques, religieuses ou économiques, on constate que l’école actuelle, et pour répondre aux contraintes socioéconomiques, fait des grandes concessions le plus souvent pour répondre aux instructions managériales. On se demande jusqu’à quel point l’école va encore renoncer à ses principes d’antan pour satisfaire les intérêts du libéralisme et du capitalisme.

Adil GOUMMA

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COMMENTAIRES  

16/08/2017 20:46 par irae

Cela dépend de ce qu’on veut en faire.
Produire des esclaves productifs et sans esprit critique on continue dans la veine tout pour le patronat.
Si non on revient aux fondamentaux, culture, philosophie, épanouissement...

17/08/2017 00:56 par babelouest

Un e école qui évoluerait sur ce modèle serait aberrante : ce qu’on appelle "l’honnête homme" sait s’adapter à un peu tout ; si l’on ne forme que des candidats à des besoins à court terme, très vite ils auront une inadaptation de plus en plus importante, et ne seront plus "utiles", ce qui sera contre-productif. Il faudra de plus en plus vite former des formateurs de plus en plus vite obsolètes, ce qui sera encore plus contre-productif. La machine va assez vite s’enrayer. Le processus est déjà en route, dans une génération ce sera bien pire.

Le capitalisme étant une aberration majeure, rien de cela n’est étonnant. Qu’il se suicide ainsi inconsciemment est dans la nature des choses.

17/08/2017 01:03 par LEO

On se dirige à une éducation à la soumission du système capitaliste : consommer sans chercher trop à comprendre !

17/08/2017 09:33 par Assimbonanga

Autre question proposable : l’Assemblée Nationale est-elle obligée de suivre le modèle de l’entreprise ?
Ou encore : le gouvernement est-il obligé de suivre le modèle de l’entreprise ?
Ils n’y sont peut-être pas obligés mais forcés !

17/08/2017 11:39 par Dominique

L’école obligatoire n’a jamais eu d’autres buts que de former de bons citoyens-ouvriers. Il n’y a jamais été question de former des êtres humains libres. Pour cela, elle a toujours utiliser des moyens adaptés aux circonstances historiques du moment. Dés lors croire que l’école d’aujourd’hui serait pire ou meilleure que celle d’hier est un leurre.

Ceci prend tout son sens quand l’on voit que l’école enseigne deux choses : le contenant et le contenu.

Le contenu est l’ensemble des matières enseignées, c’est là-dessus que les élèves sont notés et plus tard, dans leur vie professionnelle, il n’utiliseront que quelques pour cent de ce contenant, ceci même dans le cas de celles et ceux qui suivent des filières techniques.

Le contenant est la grammaire culturelle, à commencer par la soumission à l’autorité. C’est la chose principale que l’école nous enseigne et cela nous suit jusque dans la tombe.

Après parler de l’école permet aussi de parler des différences entre tradition orales et traditions écrites. L’école oblige les élèves à rester assis pendant des heures, le résultat est que la plupart du temps, ils sont complètement dissipés, quand ils ne prennent pas leurs profs pour des con-ne-s. Au contraire avec les traditions orales les enfants sont libres de s’intéresser à ce qu’ils veulent. Le résultat est qu’ils s’intéressent à ce qui leur plait, qu’ainsi ils peuvent rester concentrer pendant des heures et leur état de conscience est proche de celui que l’on atteind par la méditation.

De plus, ont nous dit "L’histoire a été écrite par les vainqueurs". Ceci montre que les traditions écrites se prêtent à toutes les manipulation : puisque cela est écrit, cela doit être vrai. Au contraire avec les traditions orales, quelqu’un qui racontent des mensonges a toutes les chances de s’emberlificoter, ceci d’autant plus que chacun peut lui répondre.

Un exemple, dans la bible les premiers israélites sont situés en Palestine. Les sionistes utilisent la bible comme un cadastre pour justifier leurs prétentions sur une terre qui ne leur appartient pas et sur laquelle ils n’ont jamais été invités. Or des décennies de fouilles archéologiques dans cette région n’ont livré aucun vestige juifs. Cette absence juive est confirmée par les égyptiens. Ceux-ci notaient tout sur leurs papyrus et ils étaient, avant les romains, les maîtres de la Palestine. Or les historiens n’ont trouvé aucune mention des juifs dans les archives de l’Egypte antique, zéro mention. Même une célébrité comme Moïse est inconnue des égyptiens, alors que selon la bible il est censé leur avoir foutu un sacré bordel. De plus l’esclavage n’est devenu une pratique courante que plus tard avec l’occupation romaine.

Par contre des fouilles dans une région comprise entre le Yemen et l’Arabie saoudite ont révélé les plus anciens vestiges juifs connus. Ils datent d’une époque qui correspond à Moïse. Or nous savons aussi que toutes les bibles actuelles descendent de la bible des septantes, bible traduite à Alexandrie dans la bibliothèque qui a cramé par 70 rabbins juifs. Il est dés lors certains que ceux-ci ont déplacé le lieu d’origine des premiers juifs du Yemen à la Palestine. Quelques passages leur ont d’ailleurs échappés...

Le résultat d’une tradition écrite est qu’aujourd’hui, celui qui conteste la version sioniste, version livrée par la bible, se voit accuser d’anti-sémitisme, ceci même s’il est juif. A ces gens-là, je ne leur poserait donc qu’une seule question, et je veux une réponse : Pour qu’un état soit reconnu, il semble légitime qu’il aie des frontières reconnues ! Où sont vos frontières ? incluent t’elles Jérusalem, la Cisjordanie, Gaza et le Golan ?

17/08/2017 23:08 par nathalie

L’école n’est plus un lieu pour le savoir mais un espace pour former des ressources humaines à la demande

18/08/2017 14:00 par nathalie

Le capitalisme impose ses instructions aux dirigeants de l’éducation nationale. Ces derniers cachent cette réalité sous prétexte de suivre le rythme et les transformations de la société

20/08/2017 19:06 par lectrice

Cela continuera jusqu’à ce qu’ils veulent
produire une génération qui réfléchit,crée, innove
et produit à son tour et pas qui applique sans comprendre.

22/08/2017 16:17 par daniel

Les responsables de l’éducation ne possèdent pas la latitude nécessaire pour tracer les objectifs purement pédagogiques. Ce sont les entrepreneurs capitalistes qui s’en chargent. Les pédagogues exécutent !!
La pédagogie au service du capitale

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