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Un pays entre compromission et répression

Monde en action : le Mexique toujours privé de paix civile

Durant les six ans de la présidence de Felipe Calderon, ce ne sont pas moins de 70 000 personnes qui moururent des suites des violences liées au narcotrafic. L’offensive contre le crime organisé était devenue à la fin du dernier mandat de Calderon, l’objectif prioritaire de son gouvernement.

Pendant les premiers mois du nouveau président mexicain Peña Nieto, en place depuis décembre 2012, on compte déjà 6 300 victimes liées au narcotrafic (chiffres du premier semestre 2013). C’est beaucoup mais c’est déjà un progrès si l’on considère que sur la même période, le chiffre des victimes du dernier semestre 2012 s’élevait à 7 700. A Mexico qui était depuis longtemps l’une des capitales les plus dangereuses du monde, la criminalité serait en baisse. C’est donc plutôt une bonne nouvelle même si les causes de ce phénomène de baisse générale de la délinquance à Mexico et dans le pays sont à relativiser.

Le Président Enrique Peña Nieto a promis de continuer la collaboration avec les Etats-Unis pour éradiquer les « capos » de la drogue mexicaine, et de s’attaquer aux enlèvements, aux séquestrations contre rançons et à toutes les extorsions criminelles diverses dont souffre, depuis des décennies, le peuple mexicain.

Le sang continue de couler le long de la frontière avec les Etats-Unis et, fait relativement nouveau, dans la cité balnéaire d’Acapulco. Il s’agit à chaque fois de luttes internes opposant des cartels se disputant un territoire. Le chiffre de 6 300 homicides du premier semestre marque une baisse réelle de 18 %. II ne faut cependant pas pavoiser : la situation s’améliore mais à un rythme très lent.

Un budget sécurité doublé sous Calderon

Des actions efficaces avaient été prises dans les prisons pour y réduire la violence endémique. Pour certains, la diminution de ce semestre ne s’explique pas par les « mesurettes » du nouveau président mais par le simple fait que ,probablement, il y a moins de disputes territoriales entre gangs. Ces derniers auraient stabilisé leurs espaces de commerce. On sait que les affrontements les plus sanglants se déroulaient dans la ville de Ciudad Juarez à la frontière du Texas. Dans cette ville, la bataille entre gangs s’est terminée par la victoire du cartel de Sinaloa, principal groupe de narcotrafiquant du pays qui a imposé sa domination sur le cartel de Juarez. Les homicides y ont baissé alors de 90 %.

Au même moment, l’Etat du Michoacán a vu croître une violence de plus en plus radicale au fur et à mesure que divers groupes criminels se déchiraient pour la production et la distribution de la coca. Ces derniers jours, les attaques inédites contre des installations électriques ont privé de courant 420 000 personnes, démonstration de force du crime organisé dirigé contre l’Etat fédéral mexicain.

Depuis mai, dans le Michoacán, les autorités ont déployé massivement l’armée et la police pour contenir cette violence générée par l’affrontement entre le cartel des Chevaliers templiers et des groupes armés d’autodéfense créés pour résister à ce groupe. Ce cartel se finance par le racket tout en délivrant un discours teinté de références religieuses. De fait, les agriculteurs de la région comme à Apatzingan, zone importante de commercialisation du citron, se sont organisés en rondes d’autodéfense pour se protéger des narcotrafiquants. Le gouvernement fédéral soupçonne cependant certains groupes d’autodéfense de recevoir de l’aide d’autres groupes criminels en particulier du groupe « Nouvelle génération », implanté dans l’Etat voisin du Jalisco, où est situé Guadalajara, la deuxième ville du Mexique. Le Michoacán avait été le premier Etat à accueillir des militaires lorsque l’ancien président Felipe Calderon décida de déployer des dizaines de milliers de soldats dans le pays pour lutter contre les cartels de la drogue, en 2006.

Une nouvelle stratégie

Au mois de mai devant Barack Obama en visite officielle, Peña Nieto avait réaffirmé sa volonté de continuer la lutte contre la drogue. En fait, Pena Nieto a revu toute la stratégie de l’Etat. Il ne s’agit plus de démembrer comme autrefois les cartels ou d’emprisonner les « capos » mais de s’opposer aux actions contre la population civile. Peut-on dès lors parler d’un « partenariat » gouvernemental entre "capos" et gouvernement mexicain ? Certains le murmurent. Il s’agit non pas d’affronter les cartels – l’échec de la politique Calderon – mais de composer avec et d’en limiter les débordements vers les civils. Par ailleurs, la collaboration entre la police fédérale, la police régionale et le parquet semble plus solide sous Peña Nieto.

Felipe Calderon, l’ancien président est devenu chercheur à l’Université de Harvard et vient de défendre sa politique sécuritaire dans un long article publié dans la revue académique Latin American Policy Journal. Cet article, important pour les spécialistes de la sécurité urbaine latino-américaine, insiste et présente comme victoire de sa politique sécuritaire la chute de la criminalité à Ciudad Juarez dont il attribue la pacification à son plan de sécurité intégral. L’article tend à présenter le cas de la ville frontalière de Juarez comme un modèle de politique sécuritaire. Il l’est mais à condition de bien connaître aussi le détail de la prise de pouvoir du cartel de Sinaloa sur le cartel de Juarez. Ce sont ces deux éléments concomitants qui expliquent le succès de cette politique et la relativise aussi.

Michel Lhomme

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