RSS SyndicationTwitterFacebook
Rechercher

Décryptage

Je suis plus que fatigué par l’utilisation intempestive des mots « décryptage » et « décrypter » par les neuneux des médias dominants.

Lorsque l’on utilise un terme de manière surabondante (en ce moment, chez les djeuns’, c’est « genre ») ou fausse, il y a un problème, une entourloupe, une manœuvre. Que cela soit conscient ou pas importe peu.

Le dictionnaire Robert nous dit que décrypter c’est « traduire des messages chiffrés dont on ne possède pas la clé. Restituer le sens d’un texte obscur. »

La traduction d’un message chiffré implique que l’on casse un code qui a permis l’élaboration de ce message. On a tous en mémoire la célèbre machine allemande Enigma durant la Seconde Guerre mondiale, réputée inviolable mais qui, grâce à Alan Turing entre autres, fut retournée contre les Allemands.

Le sens littéral a facilement débouché sur un sens figuré : « restituer le sens d’un texte obscur ». Lorsqu’on se plonge dans la lecture d’un auteur ardu du style Schopenhauer (« genre ») il est parfois indispensable d’avoir affaire à une glose, simplificatrice ou pas, qui nous aide à déchiffrer, à éclaircir, bref à comprendre une pensée, une écriture peut-être déroutante au premier abord.

Nous ne connaissons pas ce genre de difficulté lorsque nous avons affaire aux neuneux moyens – ou même supérieurs – des médias qui prétendent nous aider à appréhender le sens de la parole dominante.

Ce « décryptage » dénote la complicité entre gens des médias et gens de la politique. Ils sortent du même moule (Sciences-po pour les plus en vue) et leur but n’est pas d’informer mais de produire de la communication. Or si informer c’est aller vers l’autre, lui donner quelque chose, l’enrichir, communiquer c’est aller de soi à soi dans une démarche autotélique. Lorsqu’un journaliste annonce qu’il va décrypter le discours du Premier ministre, cela sous-tend forcément un racisme de classe ou culturel.

URL de cet article 36924
   
Même Auteur
Éric Dupont-Moretti : "Condamné à plaider"
Bernard GENSANE
Il a un physique de videur de boîte de nuit. Un visage triste. De mains trop fines pour un corps de déménageur. Il est toujours mal rasé. Il sera bientôt chauve. Parce que ce ch’ti d’origine italienne est profondément humain, il est une des figures les plus attachantes du barreau français. Il ne cache pas sa tendance à la déprime. Il rame, il souffre. Comme les comédiens de boulevard en tournée, des villes de France il ne connaît que les hôtels et ses lieux de travail. Il a décidé de devenir (…)
Agrandir | voir bibliographie

 

Il faudrait d’abord étudier comment la colonisation travaille à déciviliser le colonisateur, à l’abrutir au sens propre du mot, à le dégrader, à le réveiller aux instincts enfouis, à la convoitise, à la violence, à la haine raciale, au relativisme moral, et montrer que, chaque fois qu’il y a au VietNam une tête coupée et un oeil crevé et qu’en France on accepte, une fillette violée et qu’en France on accepte, un Malgache supplicié et qu’en France on accepte, il y a un acquis de la civilisation qui pèse de son poids mort, une régression universelle qui s’opère, une gangrène qui s’installe, un foyer d’infection qui s’étend et qu’au bout de tous ces traités violés, de tous ces mensonges propagés, de toutes ces expéditions punitives tolérées. de tous ces prisonniers ficelés et interrogés, de tous ces patriotes torturés, au bout de cet orgueil racial encouragé, de cette jactance étalée, il y a le poison instillé dans les veines de l’Europe, et le progrès lent, mais sûr, de l’ensauvagement du continent. [...]

Aimé Césaire

© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.