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Le Média, ses ennemis, et les rentiers de l’information

Le Grand Soir a naguère exprimé des réserves relatives au MEDIA, sur des points précis : Gérard Miller prétendant sur France 2, où il faisait la promotion du MEDIA, que les homosexuels sont persécutés à Cuba, Catherine Kirpach délivrant un gros bobard sur la Venezuela dans le JT.
En donnant à lire cet article de Jacques Sapir, nous passons outre le fait que le soutien du GS au MEDIA depuis l’annonce de sa création ait eu essentiellement pour retour, à la première remarque, des insultes qu’il nous a demandé de publier (ce que nous avons fait).
Certes (comme le dit justement Jacques Sapir), le MEDIA est attaqué par la presse des milliardaires. Mais cela ne l’autorise pas à user des méthodes ressemblantes : fake news, peine à rectifier. En disant cela, en affichant une vigilance constructive, nous rendons service au MEDIA, même si ceux qui le pilotent ne le comprennent pas.
LGS

La chaîne de télévision sur internet « Le Média » a été attaquée par une bonne partie de la presse « officielle » ou mainstream depuis ces derniers jours. Ces attaques se sont appuyées sur deux problèmes différents : le désaccord entre la chaîne et une de ses présentatrices, Mme Aude Rossigneux, et l’émission de M. Claude El Khal sur les combats qui ont lieu en Syrie, dans la région de la Ghouta.

Au-delà du cas particulier de chacune de ces attaques, elles révèlent en réalité la défense forcenée d’un monopole et des privilèges qui y sont liés par la presse « officielle ». Elles témoignent de l’effondrement de l’esprit démocratique, remplacé par la simple défense des intérêts et des privilèges, dans cette dite presse.

De l’affaire Rossigneux et de son montage en épingle

Les attaques que Le Média a subi ont eu pour prétexte deux faits clairement distinct. Cette chaîne a décidé de mettre fin au contrat d’essai avec une journaliste-présentatrice, suite à un désaccord profond. Ce n’est guère étonnant compte-tenu de la jeunesse de cette chaîne, que n’émet que depuis le mois de janvier. On peut discuter à loisir des modalités, mais il est évident que si un désaccord majeur s’était fait jour, il ne pouvait y avoir d’autre issue que de mettre fin à la période d’essai de cette journaliste. Cependant, il faut souligner l’immense mauvaise foi dont ont fait preuve ceux qui ont pris prétexte de cet incident pour attaquer Le Média. Certains journaux ont publié des articles ne donnant que le point de vue de la plaignante et n’ont pas cherché à s’enquérir de celui de ses collègues restés en place, ni de la direction de Le Média. Ceci en dit long sur des comportements journalistiques où l’on confond désormais systématiquement « opinion » (et l’on a parfaitement le droit d’être opposé à la ligne politique de Le Média) et information. La carence en information invalide alors radicalement les opinions ! Ajoutons que certains ont eu l’audace de comparer le traitement réservé à Mme Rossigneux à celui qui avait été réservé à Mme Aude Lancelin lors de son éviction de L’Obs en 2016. Or, Mme Lancelin n’était pas juste arrivée dans cet hebdomadaire, mais y travaillait depuis des années et y occupait un poste de direction. Rien à voir au conflit entre Le Média et Mme Rossigneux. Cette dernière avait décidé de participer à l’aventure de la création de cette chaîne. Il s’est avéré que ses conceptions, en particulier en matière de présentation, différaient de celles des autres journalistes et responsables. Il était normal qu’elle ne soit pas confirmée dans son poste (et ceci sans préjuger des conditions dans lesquelles cela s’est fait). Dans le cas de Mme Lancelin on est à l’évidence devant une censure, et c’est fondamentalement différent. Que des professionnels se refusent de la comprendre, ou fassent mine de ne pas le savoir, montre simplement à quelles bassesses sont prêts ceux qui mènent une guerre idéologique ou, simplement, défendent leurs privilèges.

A-t-on le droit de parler sur le Syrie ?

Le cas des attaques suscitées par l’émission de M. Claude El Khal est différent dans la forme, mais il révèle le même problème de fond. Ce que l’on reproche à M. El Khal c’est d’avoir voulu prendre du recul sur les événements de la Ghouta, et d’avoir rappelé que nous manquons dramatiquement de sources indépendantes et fiables. Ce faisant, il a rempli son devoir de journalistes. Or, cela n’a pas plu. Des personnes se prétendant journalistes, et toujours à l’affût de sensationnel, mais sans vérifier leurs sources bien souvent, se sont précipitées en vociférant pour « dénoncer » ce journaliste.

Ho là, mesdames et messieurs ; quand on veut donner des leçons, il faut être irréprochables, et quand on monte sur le mât avoir le cul propre ! La presse « officielle » nous a abreuvés de nouvelles horribles sur la Syrie, nouvelles qui, dans de nombreux cas, ont été démenties, voire sérieusement corrigées. Et c’est ce « beau » monde qui vient nous parler des « Fake News » ? Rappelons ici que, sur le Kosovo [1], sur la guerre civile dans l’ex-Yougoslavie, le Koweït en 1990, voire sur la Roumanie, les mensonges les plus énormes ont été véhiculés par la presse dite « officielle ». Un peu de décence apparaît donc comme nécessaire. Cette procession de « grandes âmes » indignées parce qu’un journaliste a simplement fait son travail apparaît pour ce qu’elle : indigne !

Claude El Khal a d’ailleurs parfaitement répondu aux Tartuffes et autres Basiles sur son blog [2].

Une logique de monopole et de rentiers

Il faut maintenant revenir au fond de ce que révèlent ces deux affaires. Que Le Média rencontre une féroce opposition politique est clair. Mais, cela était prévisible. La violence des attaques qui avaient frappé Jean-Luc Mélenchon, et qui l’assaillent encore, indiquait bien que tout ce qui, de manière directe ou indirecte, serait lié à lui subiraient les mêmes assauts. Ceux qui, aujourd’hui, font mine de s’en apercevoir, sont bien naïfs. En fait, la fraction dominante, car elle s’est tellement réduite que l’on ne saurait l’appeler « classe » vit aujourd’hui dans une telle terreur de perdre son pouvoir et, avec lui, les avantages qui en découlent, qu’elle est – littéralement – prête à tout, y compris aux pires mensonges. Mais, la violence de ces attaques ne s’explique pas uniquement par ce réflexe de caste, par cette volonté politique.
On est, aussi, face à une réaction de « rentiers ». Dans les faits, nombre de journalistes (pas tous, heureusement) défendent une rente de situation qui, aujourd’hui, est très gravement menacée par la crise de légitimité et de crédibilité qui les frappe. Un sondage, réalisé par l’IFOP-Fiducial[3], a mesuré cela. On en rappelle ici les chiffres.

Tableau 1 :
« Diriez-vous qu’aujourd’hui en France, la liberté d’expression est menacée… ? »
(En % des réponses)

 Dans les médias dits traditionnels
(télévision, radio, presse)
Dans la société
d’une manière générale
Sur les réseaux sociaux
Oui, tout à fait252417
Oui, plutôt424330
TOTAL OUI676747
NON, plutôt pas272740
NON, pas du tout6613
TOTAL NON333353

Pour les personnes ayant répondu au sondage, les menaces se concentrent prioritairement sur les « médias traditionnels » et dans la société. Ce qui est aussi très intéressant est le nombre très faible de personnes répondant qu’il n’y a pas « du tout » de menaces sur la liberté d’expression : 6% de l’échantillon. On comprend, dès lors, que l’émergence de nouveaux médias, bien distincts des médias officiels, puisse apparaître comme une menace directe pour ces journalistes. Se sentant donc directement menacés, que ce soit dans leurs privilèges ou dans leur statut social, ces derniers réagissent de manière brutale et simultanée. On est en présence de la défense d’un monopole de fait, un monopole qui réagit dès qu’il se sent contesté. Il n’est donc besoin de supposer nulle coordination (même si, naturellement, on ne peut exclure qu’il y en ait une…). C’est le même comportement, d’ailleurs, qui vise les journalistes de RT, que ce soit aux Etats-Unis ou en France [4].

Contre la « caste » et pour le pluralisme

Il est donc clair aujourd’hui que la France a un problème avec ses journalistes, tout comme certains de ces derniers ont un problème avec la France et la société dans laquelle ils vivent. De ce point de vue, l’opprobre qui est portée, et non sans raisons, sur cette profession n’est pourtant ni bonne ni saine.

Jean-Luc Mélenchon a, sur son blog, écrit la phrase suivante : « Si la haine des médias et de ceux qui les animent est juste et saine, elle ne doit pas nous empêcher de réfléchir et de penser notre rapport à eux comme une question qui doit se traiter rationnellement dans les termes d’un combat. [5] » Le constat qui sous-tend cette phrase est juste. Il est surtout indiscutable. Mais, la formule de tête est boiteuse ; ce ne sont pas « les médias » qu’il convient de haïr, mais bien certains d’entre-eux, ceux qui chassent en meute, qui sont forts avec les faibles et faibles avec les forts. Il faut donc se donner les moyens, puisque l’information est redevenue « un combat », de développer un véritable pluralisme. Et, pour cela, repenser les aides à la presse, aides qui devraient être distribuées à une véritable presse indépendante et non à des journaux appartenant à des groupes de presse eux-mêmes propriétés d’oligarques.

Mais surtout, il convient de combattre sans trêve et sans relâche cette prétention des journalistes de la « caste » à être les seuls à pouvoir dire la vérité, eux qui se sont couverts d’approximations et de mensonges. Ils donnent une image effectivement haïssable de leur profession au moment même où d’honnêtes journalistes risquent, et hélas parfois perdent, la vie en cherchant à l’exercer. Ils sont, aujourd’hui, des dangers bien pire pour la liberté de la presse que tous les tyrans réunis.

Jacques SAPIR

[1] Voir la note confidentielle du ministère de la Défense allemand, analysée dans Jürgen Elsässer, La RFA dans la guerre du Kosovo, chronique d’une manipulation, Paris, L’Harmattan, 2002, p. 48-51, ou encore les rapports de Human Rights Watch, Civilian Deaths in the NATO Air Campaign, HRW Reports, vol. 12, n° 1 (D), février 2000, téléchargeable sur http://www.hrw.org/reports/2000/nato et Human Rights Watch, Under Orders – War Crimes in Kosovo, Genève, 2001, rapport consultable et téléchargeable sur http://www.hrw.org/reports/2001/Kosovo

[2] voir : laudeelkhal.blogspot.fr/2018/03/la-nouvelle-inquisition-et-les.html#more

[3] https://www.fiducial.fr/fr/Actualites-FIDUCIAL/Les-moyens-de-l-audiovi...

[4] Voir l’article d’Aaron Mathé dans Le Monde Diplomatique, https://www.monde-diplomatique.fr/2017/12/MATE/58207

[5] Blog du 26 février : https://melenchon.fr/2018/02/26/la-semaine-ou-macron-devisse-bain-de-b...

En complément (ajout du GS) :

»» https://www.les-crises.fr/russeurope-en-exil-le-media-ses-ennemis-et-l...

https://www.legrandsoir.info/comment-cuba-revele-toute-la-mediocrite-d...


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