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Le racisme et le mouvement pour mettre fin à l’occupation israélienne (Counterpunch)

Le 6 août 2013, Jen Psaki, le porte parole de la Maison Blanche a créé l’évènement en déclarant au reporter de l’AP, Matt Lee, que les Etats-Unis avaient "décidé de ne pas décider" si le coup d’état militaire en Egypte était ou non un coup d’état, car, s’il l’était, cela aurait entraîné la suspension de l’aide annuelle d’environ 1,5 milliard de dollars US à l’armée égyptienne principalement. La politique de l’autruche n’est pas l’apanage du gouvernement, elle est aussi utilisée, semble-t-il, par des groupes qui ont pour but de "mettre fin à l’occupation israélienne" des terres palestiniennes.

Le problème a surgi quand un de ces groupes, la Campagne étatsunienne pour mettre fin à l’occupation israélienne (USCEIO), a voulu rédiger une déclaration de principe contre le racisme dans ses propres rangs. Le brouillon du document disait que l’USCEIO était opposée à "...toute forme de racisme, y compris l’Islamophobie, l’antisémitisme et toutes les autres formes de sectarisme..." Dans la discussion, un des participants (moi-même) a proposé d’ajouter le Sionisme aux formes de racismes déjà indiquées.

Le Sionisme joue de toute évidence un rôle essentiel dans l’injustice dont souffre les Palestiniens et par conséquent il ne peut absolument pas être ignoré par l’USCEIO. Mais le Sionisme est-il du racisme ?

Il y a plusieurs définitions du Sionisme mais il est habituellement défini comme un mouvement dont le but est de créer et de préserver un état juif en Palestine. Si vous êtes partisan d’un état juif, vous êtes un Sioniste (bien que certaines personnes prétendent défendre l’existence d’un état juif parce que les Sionistes en veulent un et non parce qu’ils seraient eux-mêmes sionistes).

Pour créer Israël qui se définit lui-même comme un état juif, il a été nécessaire de chasser la plus grande partie de la population non juive existante qui était deux fois plus nombreuse que la population juive à l’époque. Décider de qui devait partir ou rester a été facile : les juifs restaient, les non-juifs partaient. Est-ce que c’est du racisme ? A vous d’en décider.

Puis il y a eu la question de l’immigration. Qui peut devenir israélien ? les Juifs bien sûr, et parfois quelques non-juifs (qu’on espère voir se convertir éventuellement), s’ils sont des parents proches. Pas de chance pour les non-Juifs, y compris ceux qui avaient été chassés de chez eux. Et ça, c’est du racisme ?

La troisième et dernière question est celle du logement des citoyens israéliens en Israël. Plus de 93 % de la terre israélienne ne peut être achetée par des citoyens israéliens non-juifs.

Et j’en passe, et j’en passe, et le problème est que tout cela est fait au nom du Sionisme. Il est vrai que tous les Sionistes ne sont pas d’accord avec ça. Certains d’entre eux - souvent appelés Sionistes "contre l’occupation" - souhaiteraient qu’on rende aux Palestiniens les terres saisies par Israël pendant la guerre de 1967 et ils s’opposent à de nouvelles saisies de terres palestiniennes en Israël. Mais ils ne veulent pas qu’on rende aux Palestiniens le bien plus grand nombre de terres saisies avant 1967 ni qu’on permette aux Palestiniens de revenir sur les terres qu’ils possédaient dans ces territoires.

Pourquoi ? Parce qu’ils veulent ces terres pour leur état juif. Il ne faut pas que les Palestiniens reviennent sur leurs terres dans ces endroits-là parce qu’ils ne sont pas juifs. Est-ce que c’est du racisme ? A vous d’en décider.

On peut avoir des raisons stratégiques de coopérer avec les Sionistes anti-occupation même si ce sont des racistes. Ils critiquent Israël et parfois ils ont les mêmes objectifs que les militants qui ne sont pas racistes. C’est en réalité ce que le BDS (Boycott, Désinvestissement et Sanctions) a choisi de faire. Il a discrètement modifié sa déclaration d’intention originelle pour satisfaire un groupe de ces Sionistes (ceux qui soutiennent le BDS) qui est finalement parvenu à dominer le mouvement et qui a obtenu des résultats importants.

L’USCEIO aimerait aussi continuer à collaborer avec les Sionistes pro-BDS et anti-occupation. Malheureusement c’est incompatible avec une déclaration anti-raciste. Un exemplaire d’une telle déclaration a été signé par plus de 10 Palestiniens influents et publié sur le site Electronic Intifada (EI), mais il est peu probable qu’il soit adopté par l’USCEIO parce qu’il inclut le Sionisme en plus de l’islamophobie et de l’antisémitisme dans les formes de racisme. La solution semble donc être de "décider de ne pas décider" que le Sionisme est du racisme.

Quelles sont les conséquences de ce choix ? Comme il y a peu de groupes palestiniens, s’il y a en a, à l’USCEIO, on ne peut qu’en conclure que l’USCEIO préfère avoir comme membres des Sionistes plutôt que des Palestiniens ; il y a en effet peu de chances que les Palestiniens rejoignent les rangs d’un mouvement qui ne se positionne pas clairement contre le Sionisme et dont la position contre le racisme n’est pas cohérente, à la différence de la déclaration parue sur Electronic Intifada.

Est-il possible qu’un mouvement puisse inclure ces deux groupes ? Peut-être, mais pour cela il faudrait que l’USCEIO devienne une organisation anti-sioniste qui accepte des anti-Sionistes qui ont des intérêts stratégiques identiques aux leurs, au lieu d’être une organisation sioniste anti-occupation incluant des anti-Sionistes qui ne sont pas déterminés à s’opposer au projet Sioniste. C’est seulement dans ces conditions qu’une déclaration cohérente contre le racisme pourra être élaborée.

Paul Larudee

Paul Larudee est un écrivain militant des droits de l’homme et co-fondateur du mouvement pour briser le siège de Gaza par la mer.

Lisez aussi la réponse officielle de US Campaign to End the Israeli Occupation à Paul Larudee (http://www.counterpunch.org/2013/08/23/an-official-rejoinder-to-paul-larudee/)

Traduction : Dominique Muselet

»» http://www.counterpunch.org/2013/08/23/racism-and-the-movement-to-end-...
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