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C’est long, mais j’espère que LGS va me le permettre, sinon c’est sans importance.
Disons que je comprends très bien ce que vous dites, mais je crois que vous ne comprenez pas ce que je veux dire. Il existe une méthode de raisonnement qui est à la base du B.a.-ba de toute compréhension qu’on appelle le discernement, la distinction. Ce que vous dites sur la nécessité et la proéminence de l’État est incontestable, car les actions collectives ne peuvent jamais être menées sans un minimum d’organisation. Donc, un État est une forme d’organisation qui permet à une société de fonctionner avec l’espoir qu’on arrivera un jour à une société qui s’autogère, ce qui est une utopie.
1) Si j’ai dit qu’une partie des capitaux échappe au contrôle de l’État, c’est pour dire que les États sont dépassés par l’ampleur du phénomène engendré par la finance et non pas pour dire que l’État n’est pas nécessaire ou que les bourgeois et les financiers n’en ont pas besoin bien qu’ils luttent par tous les moyens contre l’intervention de l’État dans leurs affaires.
2) Si Marx en constatant que la bourgeoisie est née en renversant l’ordre féodal, grâce à l’introduction d’un nouveau mode de production, il pensait que nécessairement la classe ouvrière par son rôle central dans la production des richesses finira par renverser ce nouvel ordre et instaurer un nouveau en négligeant, ce qui était normal à son époque, les capacités d’adaptation de ce nouvel ordre qui, pour asseoir sa durée et sa légitimité, n’a pas hésité à déclencher deux guerres mondiales ravageuses tout en continuant à entretenir des guerres de basses intensités qui peuvent facilement se transformer en une troisième guerre mondiale.
3) Si je distingue le capitalisme financier du capitalisme industriel, ce n’est pour dire qu’ils sont de nature différente, parce que tous les deux reposent sur l’exploitation des travailleurs pour des finalités, ma foi, très suspectes comme la satisfaction d’un ego individuel ou de classe infatué.
4) Maintenant voyons, ce qui les distingue. La distinction profonde est dans le rapport de l’argent avec l’industrie ou de l’industrie avec l’argent. À l’ère industrielle, c’était l’industrie qui dictait ses exigences à la finance et à l’ère de la finance, c’est la finance qui dicte ses exigences à l’industrie. Voilà en bref. Certes, une explication plus approfondie est nécessaire, mais je me limiterai à ce que je viens de dire. Il y a encore une autre façon de voir ce rapport entre l’industrie et la finance. Comme chaque système engendre sa culture et son idéologie, on peut voir ce rapport à travers cette lunette.
5) L’ère industrielle avait donné naissance à une bourgeoisie citadine avec des valeurs et une culture bien à elle tout en la partageant avec l’ensemble de la société pour bien asseoir son pouvoir et se faire désirer. En France par exemple, elle s’est appuyée beaucoup sur l’église et les intellectuels qui ont produit tout ce qu’on connaît comme culture produite au 19e s siècle et au début du 20e siècle avant que le processus ne soit interrompu par la première et la Deuxième Guerre mondiale et l’émergence des États-Unis comme première puissance mondiale qui annonce le début du capitalisme financier (je laisse de côté délibérément l’EX-URSS et les mouvements d’opposition au capitalisme). Toujours en France, la culture et l’idéologie du capitalisme financier ont commencé à s’affirmer à partir de mai 68. Lire FALD ici : https://www.legrandsoir.info/je-suis-un-debile-qui-n-a-rien-compris-a-1968.html.
6) Et tout ce que nous voyons et vivons aujourd’hui comme culture et idéologie, est du fait du capitalisme financier qui a besoin de toutes les libertés possible et imaginable pour continuer à prospérer d’où le slogan : il est interdit d’interdire. Ce sont les libertés dont lui a besoin qu’il défend comme les libertés de tous.
7) Concernant la culture et l’idéologie de l’ère industrielle, elles continuent à exister et leurs adeptes restent nombreux. Un grand nombre de sites leur sont dédiés et où on retrouve pêle-mêle des nationalistes sincères, des nostalgiques des colonisations et tout un bataclan que certains accusent de racistes, d’antisémites... parfois à raison parfois à tort. Si un peu le cas de l’islamisme que certains accusent d’alimenter l’antisémitisme, et que d’autres voient comme une résurgence, une renaissance ou encore une offensive de l’islam contre la civilisation occidentale, alors qu’il n’est que l’expression d’un monde féodal que les sociétés qui n’avaient pas fait leurs révolutions industrielles, continuent à entretenir. Expression que, si elle n’avait pas été attisée par l’offensive destructrice de l’Occident contre ces sociétés et son besoin de les renvoyer à l’âge de pierre, aurait vite été dépassée.
8) "Ce qui ne suppose pas, contrairement à l’interprétation stalinienne, la suppression de la classe bourgeoise, mais son assujettissement aux intérêts de l’état devenu prolétarien (Lénine 1918-polémique contre Kautsky-capitalisme d’état). Depuis les réformes Deng Xiao Ping (1980) on est dans cette situation en Chine."
Le cas de la chine n’est pas comparable à celui des pays occidentaux. Elle est passée du féodalisme au communisme, sans passer par une révolution industrielle et la création d’une classe bourgeoise. Donc, son retour à un capitalisme d’État lui était dicté par la nécessité de s’industrialiser tout en se retrouvant happé par le capitalisme financier qui en a fait l’usine du monde à cause d’une main-d’œuvre docile et à bon marché. Le capitalisme d’État supprime d’emblée la classe capitaliste qui n’est plus bourgeoise au sens historique du mot. Mais pour y arriver, c’est une autre histoire nécessitant un autre développement parce que l’Occident arrive à résoudre ses contradictions grâce à son expansionnisme qui fait par exemple des États africains des États défaillants. Les interventions de l’Occident en Afrique et au Moyen-Orient le prouvent comme un dessin d’enfant sans fioritures. Il n’y va pas pour seulement exploiter leurs ressources, mais aussi pour les vider de leurs éléments compétents et en faire des serviteurs zélés.