A la fin de sa vie, Churchill était une vieille baderne réac mais il avait conservé un humour très acéré. On se souvient de son anéantissement lors du résultat des élections législatives de 1945. Pensez donc : lui, le grand chef civil et militaire qui avait tenu tête à Hitler, qui avait refusé de plier sous les bombardements, avait été défait dans les grandes largeurs par des travaillistes qui, à l’époque, étaient 147 fois plus à gauche que ceux d’aujourd’hui, avec la mise en oeuvre de la nationalisation de grands moyens de production et d’échanges, l’instauration d’un système d’enseignement totalement gratuit, d’un système de santé également gratuit, pour ne parler que de ces avancées considérables.
Churchill l’avait d’autant plus mauvaise que lui, le héros flamboyant, avait été défait par un homme discret et apparemment sans grande envergure : Clement Attlee, son vice-premier ministre. Moins brillant que d’autres personnalités travaillistes, il dirigea néanmoins son gouvernement avec beaucoup de fermeté. Mais pour l’aristocrate Churchill (descendant du duc de Malborough, celui qui « s’en va-t-en guerre »), le petit bourgeois Attlee, pur produit de la méritocratie anglaise, était un médiocre sans contours. Il avait donc inventé, pour sa gouverne, la blague désopilante suivante :
« Une voiture vide s’arrête devant 10 Downing Street. Attlee en descend. »
Chaque fois que je vois ou j’entends Jean-Marc Ayrault, je pense à cette saillie.
Théophraste R.,
Downstreetologue de renommée mondiale.